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lundi 13 octobre 2025

Derrière cette image... il y a une cause importante de la déstabilisation des émulsions.

 



Une émulsion, c'est la dispersion d'un liquide dans un autre avec lequel il n'est pas miscible.

Par exemple, on obient une émulsion quand on disperse de l'huile dans de l'eau. Il faut de l'énergie pour diviser en gouttelettes le liquide qui est dispersé, et plus on donne d'énergie, plus les gouttes dispersées sont petites.

Mais on se trouve bien d'utiliser des composés tensioactifs, qui permettent d'abaisser l'attention de surface, c'est-à-dire de réduire l'énergie à donner pour obtenir des émulsions avec des tailles particulières de gouttes dispersées ; et ces composés stabilisent en outre (relativement) les émulsions, en tapissant la surface des gouttelettes et en prévenant (relativement) la coalescence des gouttelettes.

Dans la sauce mayonnaise, la phase continue est une solution aqueuse venue du jaune d'œuf et du vinaigre ; c'et dans cette "eau" que l'on disperse de l'huile sous la forme de gouttelettes trop petites pour qu'on puisse les voir à l'oeil nu : ces gouttelettes, en fin de travail à la fourchette, ont un diamètre compris entre un millième de millimètre et un dixième de millimètre ; au mixeur, les gouttelettes peuvent être plus petites.
En fin de confection de la sauce, la proportion d'huile peut atteindre 95 %.

Mais nous arrivons maintenant aux phénomènes qui conduisent à la déstabilisation des émulsions, puisque tel est le sujet de l'image ci-dessus.

Il y en a de plusieurs sortes,  tel le crémage, c'est-à-dire le fait que les gouttelettes d'huile ont tendance à monter, étant moins denses que l'eau, tandis que l'eau a tendance à drainer.

D'autres mécanismes sont à l'action et notamment celui qui est figuré par cette image et qui a pour nom déplétion-floculation.

Cette fois il s'agit de considérer qu'il peut y avoir également, dans la solution aqueuse, des composés dont les molécules sont par exemple comme de longues chaînes. Et ces polymères peuvent être assez gros (par rapport à la taille des gouttelettes) pour ne pas pouvoir trouver place entre des gouttes voisines.

Par exemple, dans les aliments, il y a des protéines, qui, selon les conditions d'acidité,  peuvent être plus moins plus ou moins dépliées, et avoir une longueur de plusieurs dizaines à centaines de liaisons covalentes (ces liaisons que l'on trouve par exemple entre  des atomes de carbone dans une molécule organique).

Imaginons donc que l'espace entre trois gouttelettes soit trop petit pour qu'un polymère vienne s'y placer.
Alors la concentration en polymère à cet endroit serait nulle :  rien de difficile jusque-là.
Mais à l'extérieur, dans le liquide, la concentration en polymère n'est pas nulle, de sorte que le phénomène d'osmose conduit non pas le polymère à entrer dans l'espace où il ne peut pas entrer, mais à l'eau quitter cet espace pour aller en quelque sorte diluer le polymère à l'extérieur.

Or quand l'eau quitte cet espace, les trois gouttelettes se rapprochent et finissent par coalescer.

Nous sommes bien d'accord que cette description est approximative, mais je renvoie au Handbook of molecular gastronomy pour ceux qui voudraient en savoir plus. En tout cas voilà l'idée derrière l'image qui représentait ici.

dimanche 12 octobre 2025

Derrière cette image, il y a un type de calcul que j'aime beaucoup : le calcul différentiel et intégral.

 



L'idée est en réalité toute simple, pour ce cas précis : il s'agit de calculer l'airz sous la courbe en noir.

A cette fin, on approche cette courbe par une série de rectangles pour lesquels il est facile de calculer l'aire (le produit de la base par la hauteur), et ensuite de faire la somme de toutes les aires de ces rectangles.

Bien sûr, il y a de petites différences entre les rectangles et la courbe, un crénelage, mais en s'y prenant bien on arrive à montrer qu'elles peuvent ne pas être gênantes.

L'idée principale est de considérer la somme des aires pour des rectangles de plus en plus étroits, de sorte que la différence à la courbe devienne de plus en plus petite par rapport à l'aire des rectangles, nulle à la limite.

Cela, c'est pour le calcul intégral, mais ce qui est encore plus beau, c'est que cela correspond à une idée analogue que l'on met en œuvre pour le calcul de la tangente à une courbe en un point.

Pour ce cas, que je ne représente pas,  on commence par considérer deux points de part et d'autre du point où l'on veut calculer la tangente et l'on tire une droite entre ces deux points. Elle n'est pas exactement la tangente, mais elle n'en est pas loin.
Puis on rapproche les points de celui qui nous intéresse et progressivement, la droite ainsi tracée converge vers la tangente.

Bien sûr le diable est partout et il y a lieu d'être mathématiquement très propre mais l'idée est là,  et elle est sublime. Elle fut découverte par Isaac Newton et pas de Wilhelm von Leibnitz, sous les formes différentes.

N'hésitez pas : recommandez la lecture du livre Calcul différentiel et intégral de Nikolas Piskounov (on le trouve en pdf en ligne).

samedi 11 octobre 2025

Derrière l'image : des molécules dans l'air.


 

Nous sommes bien d'accord que, pour  donner une idée de molécules dans l'air, il faudrait présenter un volume dans lequel se trouveraient des molécules.

Mais on peut aussi imaginer de prendre une photo dans le plan de deux molécules voisines et voici ce que l'on observerait.

Comme toujours avec les images, il y a  lieu d'être prudent, d'interpréter, car les molécules de l'air sont de différents types :  diazote, dioxygène, dioxyde de carbone...

Mais nous voulons donner ici une idée générale, un ordre de grandeur et l'on  considérera donc que l'air est fait de molécule de diazote.

Évidemment, les molécules diazote ne sont pas de petites haltères, mais au premier ordre encore, il y a peut-être lieu de se limiter à la représentation donnée ici, voire réduire les molécules à un point seulement puisque l'on verra le résultat plus tard.

La question est  :  quelle distance sépare deux molécules de diazote dans l'air ?

On considère évidemment de l'air à la température ambiante, dans des conditions normales de pression. Bref on ne tourne pas autour du pot  : on regarde l'air devant soi et l'on se demande quelle est la distance entre deux molécules d'air quitte à raffiner ensuite.

À ce stade, il doit y avoir une démarche mise en œuvre car on imagine bien que puisque les molécules d'air bougent tous sens dans le vide -j'insiste : dans le vide-, alors il y en a qui sont proches et d'autres qui sont plus éloignées.

Certes, mais pour faire un calcul d'ordre de grandeur, nous irons d'abord considérer une moyenne. Mieux encore, nous nous résoudrons pour le calcul à placer les molécules au centre d'un réseau cubique, dont nous cherchons la longueur de la maille. Avec cette démarche, il devient très facile de calculer la distance entre deux molécules d'air et plusieurs solutions sont possibles selon les lois physiques dont on se souvient.

Par exemple, si l'on a en tête la loi des gaz parfaits, alors on pourra écrire que le produit de la pression par le volume est égal au nombre de moles par une constante R et par la température absolue. Il est facile, en fixant un volume, par exemple d'un mètre cube, de calculer le nombre de moles, donc le nombre de molécules.
D'autres, qui se souviendront qu'une mole d'un composé fait un volume de gaz de 22,4 litres auront un autre point de départ pour leur calcul, mais en réalité ce sera le même.

Bref, selon ce que nous avons retenu de nos études élémentaires à l'université, nous aurons des possibilités qui nous conduiront ensuite à diviser le volume du gaz par le nombre de molécules (qui sera égal au nombre de moles multiplié par le nombre d'Avogadro).
Puis, ayant le volume associé à une molécule, on cherchera le côté du cube correspondant.

Et c'est ainsi qu'on s'aperçoit que la distance entre deux molécules dans l'air et d'environ 200 fois le diamètre d'une molécule de diazote  : l'air est donc c'est essentiellement de vide, d'où la représentation pas si fausse de la figure initiale.

vendredi 10 octobre 2025

La flèche des énergies de liaison.


 

Voilà une image que je ne cesse de transmettre aux étudiants à tous les niveaux parce qu'elle donne une idée des ordres de grandeur en chimie, pour les forces des liaisons chimiques.

La chimie considère des molécules, c'est-à-dire des atomes liés par des liaisons chimiques. Et ces liaisons chimiques sont de différents types, selon les atomes qui sont liés.

Lors des réactions, il s'agit de rompre des liaisons et d'en former de nouvelles, de sorte que l'on comprend que le bilan sera favorable les produits de réactions sont plus stables que les réactifs : cette flèche est importante.

Autrement dit, en chimie (comme ailleurs), il est bon d'avoir en tête des ordres de grandeur, avant d'entrer dans les détails. Le gros avant le détail.

Une référence en chimie, et notamment en chimie organique c'est la liaison entre deux atomes de carbone, ce que l'on a nomme une liaison covalente.

Je ne sais pas pourquoi mais je me trouve bien de savoir que la distance d'une telle liaison est d'environ 1,5 angströms, c'est-à-dire 0,15 nanomètres, je ne sais pas pourquoi mais je retiens aussi que ton énergie est de 350 kilojoules par mole. Mais peut-être est-il inutile dans un premier temps de se souvenir de tout cela, et il suffit peut-être de  conserver à l'idée que nous avons la référence de 100 % pour l'énergie de cette liaison.

On peut ranger d'autres énergies de liaison par rapport à celle-ci. Par exemple, il y a des liaisons de van des Waals, des liaisons faibles, qui sont entre 1 et 5 % de la liaison covalente. Je n'entre pas dans les détails de ces liaisons parce que ce serait inutile et je veux simplement dire que, ensuite, la liaison un peu plus forte que l'on peut placer sur cette flèche est la liaison hydrogène, telle celle qui s'exprime entre deux molécules d'eau : environ 10 % de la liaison covalente.

Sur cette flèche, on peut vouloir placer l'énergie de la liaison disulfure, ce que l'on nomme aussi pont disulfure : c'est elle qui fait coaguler les protéines dans le blanc d'oeuf. En réalité, c'est une sorte particulière de liaison covalente, mais environ  75 % de la liaison entre deux atomes de carbone.

Et puis il y a les liaisons électrostatiques, entre des atomes ou des groupes d'atomes électriquement chargés et là, liaison peuvent être très intenses, par exemple atteindre 250 % de la liaison covalente.

Évidemment, cette flèche mérite d'être assortie d'un tableau qui donne des références à des articles précis, mais en tout cas voilà un panorama utile, un ordre de grandeur à transmettre à tous et à nous-même.

jeudi 9 octobre 2025

Derrière l'image : le calcul nous sauve toujours





Cette image est emblématique d'un problème que j'ai rencontré avec des personnes présentes dans des laboratoire de chimie, engagées dans des analyses. La morale de l'analyse que nous allons faire est la suivante : il s'agit de savoir si l'on veut obtenir de bons résultats ou des résultats médiocres, de savoir si l'on veut faire bien en apprenant, ou faire mal parce que l'on est doublement insuffisant.

Dans nombre d'analyses en effet, on obtient un "signal" et idéalement, un composé particulier donne un signal particulier, une courbe en cloche bien séparée des autres.

Mais le plus souvent, si l'on fait des analyses, et non pas des exercices d'entraînement comme dans des séances de travaux pratiques universitaires, on a une situation plus compliquée, plusieurs composés étant à l'origine de signaux qui sont entremêlés, et le travail d'interprétation des spectre consiste précisément à identifier chacun des signaux et, surtout, en calculer l'aire puisque c'est elle -et non pas la hauteur- qui est proportionnelle à la quantité de composés présents, la quantité que l'on cherche.

Or des composés chimiquement semblables engendrent des signaux qui sont proches au point de fusionner partiellement comme sur l'image que l'on voit ici.

Et c'est là que l'on rencontre la première alternative : faut-il passer de très longues heures, voire jours ou mois, pour changer les conditions expérimentales et finalement obtenir des spectres où les signaux sont séparés, ou bien faut-il calculer un peu ?

Je suis bien désolé d'observer que, en recherche scientifique, les capacités de calcul ne sont pas toujours très grandes... et c'est la première solution qui est choisie.

On croit que j'exagère, mais non : j'ai même vu nommer maître de conférences, dans une grande école, une personne qui a passé deux mois à séparer expérimentalement des signaux que, par le calcul, je sépare en un quart d'heure.

Evidemment, la mauvaise foi humaine veut cacher des insuffisances personnelles et c'est ainsi qu'un jour, j'ai eu l'occasion d'assister à une discussion ahurissante entre un doctorant et un étudiant en stage "encadré" par le premier, à propos de ce même cas  : le docteur "enseignait" d'un air docte et pénétré, à l'étudiant la méthode du tangente skimming, l'écrémage tangentiel, qui consiste à tirer une droite sous le plus petit des deux signaux (à la règle et au crayon !) et à considérer que la valeur de ce signal est égale à ce qui dépasse au-dessus de la droite.

C'est une méthode très insuffisante et j'ai montré que, dans certains cas, 75 % du signal était ainsi perdu.
On peut pas imaginer faire de la bonne analyse en utilisant cette méthode.

Passant dans un couloir au moment où le docteur endoctrinait l'étudiant, avec son  explication fautive, j'ai interrompu la discussion pour faire l'observation que je viens de faire,  et la réponse du doctorant a été "nous c'est comme ça qu'on fait".

Comme il n'était pas éthique d'intervenir dans une équipe qui n'était pas la mienne, j'ai laissé les deux jeunes collègues discuter entre eux, mais je me suis promis de bien expliquer publiquement la question.

J'ai publié dans un article scientifique aux Cahiers technique de l'Inrae la méthode détaillée de calcul -un calcul très simple- qui permet de connaître l'aire respective de chacun des deux signaux dont on voit la somme ici.

J'insiste, c'est un calcul très simple que j'aurais pu faire même sans ordinateur sans doute vers l'âge de 13 ou 14 ans. C'est un calcul fondé sur des notions élémentaires du calcul intégral, mais je vois trop de personnes, jusqu'à des collègues, pour lesquelles cela n'est pas maîtrisé.

Je ne me fais pas toujours des amis dans le milieu scientifique quand j'observe que la science, c'est le calcul, et que, sans calcul, on ne fait ni bonne science ni même bon travail technique.

Je fais d'ailleurs une différence, afin d'encourager mes amis, entre mathématiques et calcul : le calcul, c'est l'emploi de mathématiques qui ont été produites il y a des siècles par les mathématiciens ; ce n'est pas difficile, et j'en fournis pour exemple le merveilleux livre de Nicolas Piskounov intitulé "Calcul différentiel et intégral" : à mettre entre toutes les mains, en conseillant de lire ligne à ligne et de faire les exercices les uns après les autres.

Bref, si nous avons le choix entre le calcul et l'expérimentation, pour arriver au même résultat, n'hésitons pas !

mercredi 8 octobre 2025

Dernière cette image, il y a... quoi ? Des questions de physico-chimie !

 



Sur cette image, on voit du bleu et des formes de fil. De quoi s'agit-il ? Pour qui s'intéresse à la matière molle, on reconnaît immédiatement des polymères linéaires dans de l'eau, ou plus généralement, dans une solution aqueuse, avec un interface semble celui qui limite l'eau et l'air.

Cela fait penser, par exemple, à des molécules de protéines dénaturées dans du blanc d'œuf, par exemple comme quand on bat un blanc d'oeuf en neige. En effet, le blanc d'oeuf est fait de 90 pour cent d'eau et de 10 pour cent de protéines. IL y a environ 300 sortes de protéines (connues), et toutes les protéines ont des molécules comme des fils plus ou moins repliés, fait d'enchaînements de petits segments qui sont nommés résidus d'acides aminés.

Sur la figure qui est donnée ici, on ne voit pas cette constitution des protéines en résidus d'acides aminés ; il y a seulement la forme générale des molécules de protéines.

Dans le blanc d'oeuf, nombre des protéines sont globulaires, ce qui signifie que leurs molécules forment comme des pelotes. Mais il est exact que le cisaillement exercé par le fouet qui bat les blancs en neige dénature ces pelotes, les déroule, au moins partiellement. 




Or il se trouve que si les molécules de protéines sont naturellement en pelotes, c'est qu'une partie des molécules établit peu de liaisons avec l'eau, se plaçant au coeur des pelotes,  tandis que d'autres parties peuvent se lier à des molécules d'eau, et peuvent s'y placer, formant l'extérieur des pelotes natives.

 La description que je donne ici est simplifiée mais c'est l'idée générale :  il est vrai que pour des protéines déroulées, les parties les moins solubles dans l'eau iront se placer plutôt dans l'air, le reste se plaçant dans l'eau,  et c'est cela qui conduit à l'image que nous considérons ci-dessus.
 Ainsi, une bulle d'air dans un blanc en neige est tapissée de molécules plus ou moins déroulées de protéines, qui forment comme une coque protectrice, laquelle évite que des bulles d'air voisines ne fusionnent et que la mousse ne soit trop rapidement déstabilisée.

Mais là, il y a un grand écart entre le macroscopique et le moléculaire et il vaut mieux faire ce trajet pas à pas, par ce que je nomme la méthode descendante d'analyse des systèmes physico-chimiques.
Partons donc du macroscopique, la mousse vue de loin : c'est un solide blanc, très délicat certes mais qui subsiste un certain temps, disons plusieurs dizaines de minutes.
Si l'on s'approche, si l'on utilise une loupe ou un microscope optique, alors on voit maintenant que cet objet blanc est constitué de bulles d'air tassées les unes contre les autres, des bulles plus ou moins grosses.
Quelle taille ? Si on ne les voit pas à l'oeil nu quand on les regarde à 20 centimètres de distance,  c'est que leur taille est inférieure à 0,2 mm environ 20 cm. Dans un blanc en neige en début de battage, on voit les bulles, mais en fin de battage et surtout si l'on a fouetté avec du sucre, alors on ne les voit plus ce qui donne une idée de leur taille maximum.
C'est seulement ensuite, quand on passe au grossissement supérieur, à l'échelle des assemblages supramoléculaires, que les physiciens nomment échelle mésoscopique, que l'on peut avoir une image comme celle que nous avons montré ci-dessus.
Si nécessaire on peut grossir encore et avoir l'information atomique que nous cherchions. Les sauts d'échelle n'ont pas été réguliers mais qu'importe : ce qui compte, c'est de bien avoir à chaque étape une idée des ordres de grandeur des tailles

L'image ci-dessus montre qu'elle n'est pas compréhensible sans une foule d'informations supplémentaires. Elle n'est pas fausse, mais ne dit rien des ordres de grandeur de taille, par exemple. Elle ne dit pas non plus que tout cela est en mouvement :   l'eau, par exemple quand elle est liquide à la température ambiante, est constituée de molécules dont la vitesse moyenne est de 400 mètres par seconde ! Les molécules de protéines, dans l'eau, heurtées en tous sens, ne cessent de se déformer et l'image qui est donnée ici ne doit être considéré que comme un instantané.
En outre, l'image est idéalisée et la surface de l'eau n'est certainement pas un trait bien droit, car il y a des molécules d'eau qui quittent l'eau liquide, d'autres qui reviennent, les pelotes bougent, etc.

Une image, c'est une description, une description théorique, une théorie et c'est donc plutôt une perche tendue à la pensée pour discuter de ce que l'on voit et non pas pour l'accepter et c'est ainsi que les images, considéré avec circonspection nous mène vers une meilleure connaissance



https://icmpg.hub.inrae.fr/international-activities-of-the-international-centre-of-molecular-gastronomy/international-journal-of-molecular-and-physical-gastronomy/3-educational-practices/3.2.-developments-practices-and-policy/3.2.2.-courses/descending-approach

mardi 7 octobre 2025

Derrière l'image d'une courbe en cloche.





Comment construire une courbe en cloche ?
 

L'utilisation des logiciels de calcul formel fait des mathématiques un jeu parce que l'on peut essayer très rapidement des idées que l'on voit immédiatement mises en œuvre. Personnellement, j'utilise le logiciel Maple... au point que c'est devenu mon principal outil : pour calculer, pour écrire, pour penser, pour dessiner, pour faire de la chimie...

Par exemple, si l'on demande au logiciel de tracer la courbe associée à l'équation y = x,  on voit une droite partant de l'origine.
C'est quelque chose qui augmente mais qui ne redescend pas, comme on le voudrait pour une courbe en cloche.
Si l'on teste maintenant l'équation y = 1/x, avec le sentiment que quand x deviendra très grand 1/x deviendra très petit, alors tout va bien du côté des x positifs, mais il y a un problème pour les x négatifs, qui tendront vers moins l'infini en approchant de 0.

On pourrait alors s'amuser à prendre la valeur absolue de 1/x,  auquel cas on aurait deux morceaux: un à gauche qui monte vers l'infini à un droite qui monte vers l'infini.

On a le sentiment d'y être presque. Cela dit, les valeurs absolues sont facilement remplacé par des carrés et on peut donc rester 1 sur x au carré, mais là encore, pour x = 0, la fonction diverge.
Comment faire ? Il s'agit que le dénominateur ne soit jamais nul. Alors pourquoi pas 1/(1+x^2)...  et cette fois on y est :  on a une courbe en cloche [ici, l'accent circonflexe indique une puissance].

A ce stade, nous pourrions nous arrêter, mais on comprend que l'on pourrait aussi avoir une courbe en cloche en remplaçant x^2 par x^4, ou par x^6, par exemple.
Mais ce sont là des puissances, qui font croître la courbe de plus en plus vite... Or la fonction exponentielle croit plus vite que toutes les puissances. Que penser de 1/(1+exp(x^2))  ? Une courbe en cloche ! Ou plus simplement de 1 sur exponentielle de x^2 puisque en 0 l'exponentielle prends la valeur 1 et non 0 ? C'est là l'équation d'une gaussienne, nom donné en l'honneur du merveilleux mathématicien Carl Friedrich Gauss.
La première courbe que nous avons réussi à faire, celle en 1/(1 + x^2= et nommé lorentzienne, et ses "jupes" sont beaucoup plus larges que celles de la gaussienne, si l'on peut dire

Quel bonheur que ces logiciels de calcul formel : en a un clic, on trace la courbe d'une fonction.

lundi 6 octobre 2025

Derrière l'image d'une émulsion




Oui, il s'agit bien, ici, de l'image d'une émulsion au microscope optique. Plus précisément, il s'agit d'une sauce mayonnaise en début de constitution. On est parti d'un jaune d'œuf et de vinaigre, pas de moutarde sans quoi on ferait plutôt une rémoulade et non pas une mayonnaise, on a ajouté du sel et du poivre, puis de l'huile en fouettant.  Le fouet a divisé les gouttelettes répétitivement, et c'est ainsi que l'on voit sur cette image, majoritairement, des goutteletes d'huile dispersées dans une phase aqueuse. Cette phase aqueuse, c'est de l'eau où sont dissoute des molécules de composés variées, l'eau provenant du jaune d'œuf puisque 50 % du jaune d'œuf, c'est de l'eau, et du vinaigre puisque environ 90 % du vinaigre c'est de l'eau

Ce système physique est nommé émulsion parce qu'il s'agit d'une dispersion de gouttelettes d'un liquide dans un autre liquide avec lequel le premier n'est pas miscible, avec lequel il ne se mélange pas.
Et c'est exact que l'huile ne se mélange pas à l'eau, ni aux solutions aqueuses telles que serait de l'eau salée ou du vinaigre.

Regardant mieux l'image, on voit donc de grosses formes rondes et un peu transparentes : ce sont des gouttelettes d'huile, qui sont de tailles très variées, les plus grosses mesurant environ un dixième de millimètre et les plus petites pouvant être environ 1000 fois plus petite.
Mais il y a aussi trois formes rondes noires et, là, ce sont des bulles d'air. Non pas des bulles d'air qui étaient présentes dans la mayonnaise, mais des bulles qui ont été introduites quand on a étalé l'émulsion sur la plaque de microscope.

Je ne dis pas qu'il y a pas d'air dans une mayonnaise, mais je dis qu'il y en a très peu et c'est à ce titre que même si, stricto sensu l'image représente une émulsion un peu foisonnée, il n'y a pas lieu d'être trop pointilleux et il faut reconnaître qu'au premier ordre, nous voyons bien une phase continue et une phase dispersée, faite de gouttelettes d'huile. C'est donc bien une émulsion.

Plus généralement, il y a lieu de conserver cette idée générale que c'est une erreur d'entrer les détails avant d'avoir fait l'essentiel.
Si l'on regarde une feuille de papier rectangulaire, elle est... rectangulaire. Pourtant, si on regarde les bords de la feuille à la loupe, on voit bien qu'il y a des très petites irrégularités. Mais en vrai ce serait une erreur de ne pas considérer que, au premier ordre, la feuille est rectangulaire.

Cette méthode de bien voir le gros avant le détail, et, en tout cas, de séparer les ordres de grandeur, de regarder par ordres de grandeurs successifs, doit être enseignée aux étudiants parce qu'ils sont souvent perdus dans les différents ordres de grandeur, et c'est à ce titre que j'avais introduit la méthode descendante d'analyse des systèmes physico-chimiques que j'ai publiée dans l'International Journal of Molecular and Physical Gastronomy : https://icmpg.hub.inrae.fr/international-activities-of-the-international-centre-of-molecular-gastronomy/international-journal-of-molecular-and-physical-gastronomy/3-educational-practices/3.2.-developments-practices-and-policy/3.2.2.-courses/descending-approach

Je la recommande à tous les étudiants qui me font l'honneur de faire confiance.

dimanche 5 octobre 2025

Derrière l'image : l'aromaticité du benzène


 

L'image qui est donnée ici est celle de la molécule de benzène : c'est une molécule très importante dans l'histoire de la chimie parce qu'elle a échappé à la théorie... et son analyse a fait progresser la chimie.

Le benzène est une matière qui a été découverte par le merveilleux physico-chimiste anglais Michael Faraday, alors qu'il étudiait lee résidu huileux qui résultait de la production du gaz d'éclairage. Et le nom a été donné plus tard, dérivé de "gomme benzoïne", une résine odorante connent depuis longtemps en Asie et utilisée en parfumerie.

Plus tard, on s'est aperçu que cette molécule avait (disons-le avec les mots modernes) six atomes de carbone et six atomes d'hydrogène, puis on a observé que les atomes de carbone étaient liés en un cycle.
Mais quand la tétravalence du carbone est apparue (le fait que chaque atome de carbone ait quatre liaisons avec des atomes voisins), alors il est apparu que la représentation moléculaire du benzène posait un problème, parce qu'on ne savait pas où placer trois doubles liaisons entre les atomes de carbone.

C'est finalement Auguste Kekule qui a proposé une solution : on a réussi à penser qu'il n'y avait pas les doubles liaisons connues alors,  mais ce que l'on nommerait aujourd'hui une délocalisation de six électrons sur l'ensemble des atomes de carbone.

Autrement dit, la représentation qui est donnée ici est parfaitement fautive, et elle méprise l'immense progrès qui a été fait à l'époque de Kekule.
Ce qui est pire, c'est qu'elle induit les étudiants en erreur  : je me souviens d'une doctorante qui croyait que l'on pouvait effectuer des réactions d'addition sur le benzène ou des molécules de la même famille, alors que précisément, le phénomène d'aromaticité montre que ce n'est pas possible, ou pas comme elle l'imaginait.
Il est convenu d'utiliser un cercle, dans de la molécule pour bien signaler la délocalisation des électrons. 


Je propose de toujours utiliser plutôt la représentation correcte même la représentation avec des doubles liaisons est acceptée, interprétée correctement par ceux qui savent déjà.

Mais notre but n'est-il pas d'aider les étudiants à apprendre ?


samedi 4 octobre 2025

À partir d'une image

 

 



Quand on voit une telle image, on ne peut manquer de penser à ce que l'on nomme l'opération de régression linéaire et, aussi, à la possibilité d'une triche !

Souvent, lors des analyses, on obtient une série de valeurs que l'on peut ranger sur un diagramme à deux dimensions,  avec la valeur de commande en abscisse et le signal enregistré en ordonnée. Par exemple, imaginons que l'on mesure l'intensité d'un courant électrique créé par une différence de potentiel électrique, ou l'absorption lumineuse quand on éclaire une solution d'un composé dont on étudie la concentration.

Les couples de valeurs sont ce que l'on nomme des points expérimentaux.
L'opération d'ajustement, qui apparaît en troisième lieu, dans la démarche scientifique, consiste à chercher des relations entre ces points.
Par exemple, souvent, on cherche à savoir s'ils sont alignés, auquel cas il y aurait une relation de proportionnalité entre les valeurs des abscisses et les valeurs des ordonnées.

Pour les commençants, cette opération se fait avec ce que l'on nomme la régression linéaire, et plus précisément la recherche d'une droite par la méthode des moindres carrés, introduite par le merveilleux mathématicien Carl Friedrich Gauss : on cherche une droite qui, ne pouvant passer exactement par tous les points expérimentaux (sauf miracle), passe le mieux possible, ce qui se calcule en minimisant la distance des points à la droite.
La qualité de cet ajustement s'exprime notamment par un paramètres que l'on note R2 (je renvoie vers les cours complets),  et qui s'approche de 1, pour les ajustements qui seraient parfaits (ce qui est impossible). J'ajoute qu'il n'y a pas lieu d'être braqué sur cette méthode, et notamment le R2, et qu'il existe une "hyperbole de confiance" qui mérite d'être mieux connue qu'elle ne l'est.

Mais revenons à notre R2 : comme il s'agit d'expérience, il ne peut y avoir de proportionnalité exacte et R2 sera toujours inférieur à 1.
Certes, dans les bons cas, il pourrait être de 0,99 ou 0,9999 mais pas  1 exactement !
De sorte que si l'on voit un R2 = 1, cela peut signifier soit que la valeur de R2 a été arrondie, ce qui n'est pas à faire puisqu'on laisserait penser à un alignement parfait, soit  que l'on a changé les valeurs des points pour qu'il s'alignent exactement... ce qui n'est pas admissible.
Les points expérimentaux sont des points expérimentaux jamais parfaitement alignés, et la droite que l'on trace est une droite parfaitement rectiligne, mais elle ne peut pas passer exactement par les points expérimentaux.

Il y a un monde entre les points expérimentaux, qui relèvent de l'expérience, et  la droite, qui de relève de la modélisation. Il ne faut pas tout confondre

vendredi 3 octobre 2025

Des ganaches sans additifs ?

La correspondant m'interroge : comment faire des ganaches sans additif ? Et la question appelle tout d'abord des questions préalables : qu'est-ce qu'une ganache ? qu'est-ce qu'un additif et pourquoi vouloir le supprimer s'il est utile ? 


1. La crème ganache

Pour bien savoir ce dont on parle, il faut 

- consulter les billets terminologiques : https://nouvellesgastronomiques.com/tags/terminologie/, et plus spécifiquement, pour les ganaches : https://nouvellesgastronomiques.com/mais-au-fait-dou-vient-la-ganache/ 

- consulter des recettes par de bons auteurs, tels Emile  Darenne et Emile  Duval, 1909 : 

"Crème Ganache. — Mettre trois tablettes (125 gr.) de chocolat à fondre à l’étuve ou au four, les placer dans une terrine et y ajouter 30 gr. de beurre fin, puis un huitième de litre de crème fleurette ; laisser un peu refroidir avant l’emploi (à défaut de crème, employer du lait bouilli)."

Cela étant, on fera mieux si l'on se souvient de la mayonnaise, où l'on ajoute de  l'huile à une préparation qui contient de l'eau (l'inverse "rate"). Ici, on ajoute du chocolat fondu dans de la crème tiédie, pour avoir une émulsion. Et pour que tout se passe bien, il faut que la crème ajoutée soit plus chaude que le chocolat fondu. A noter que certains professionnels font bouillir de la crème, ajoutent le chocolat fondu au milieu et tournent avec la maryse à la limite des deux masses. Cela revient à l'émulsion que je décrivais... si les températures sont bien contrôlées.

 

2. Les additifs

Là, c'est un terrain que je sais miné, parce que les opposants à l'industrie alimentaire (pourquoi ne pas se limiter à ne pas acheter les produits de cette industrie si on veut les éviter ?) dénoncent sans relâche les additifs. 

Cela dit, il y a de tout, dans cette liste de produits largement testés du point de vue toxicologique : des conservateurs, des émulsifiants, des gélifiants... Et il y a sans doute lieu de conserver le meilleur, pour nos usages culinaires.
Par exemple, la "pectine" reçoit le numéro E440, la "lécithine" prend le numéro de code E322.

 

3. Utiliser ou non des additifs ? 

Mais, au fait, pourquoi en utiliser dans des ganaches ? Observons qu'il y en a le plus souvent dans le chocolat, parce que cela apporte du fondant, du croquant, par exemple (Valrhona dixit). En tout cas, cela permet de réduire l'énergie considérable qu'il faut dépenser pour le conchage, l'opération de division et de dispersion des grains de sucre en poudre dans la masse de chocolat fondu.

Mais je pressens que la question qui m'était posée visait plutôt la conservation, parce que l'on se souvient que la ganache, avec de la matière grasse dispersée dans l'eau, a tout ce qu'il faut -hélas- pour favoriser des proliférations microbiennes : de l'eau, des nutriments. Pour peu que la température soit suffisamment douce, les micro-organismes prolifèrent, et cela est d'autant plus gênant que la ganache n'est guère acide, et n'a pas, contrairement à des yaourts, ces "protection" (relative) de l'acidité.

Au fond, d'un strict point de vue technique, la question que je me poserais plutôt est : puisque les industriels utilisent des additifs dans leurs produits, pourquoi n'en utiliserions-nous pas en cuisine ?

Il y a lieu de savoir ce que l'on fait. Par exemple, savoir qu'il y a lécithine et lécithine : certaines viennent du soja, d'autres du colza, etc. Or le soja contient des phytohormones qui peuvent être déconseillées. Autrement dit, si l'on utilise une lécithine de soja et qu'on est prédisposé au cancer du sein, il faut être attentif non pas à la lécithine de soja en tant que lécithine, mais aux "impuretés" qui accompagneraient la lécithine.
D'ailleurs, de ce point de vue, le fait que la lécithine soit "bio" ou non ne fait aucune différence.
 
 

jeudi 2 octobre 2025

Comment obtenir des gâteaux moelleux, tendres ?

Comment obtenir des gâteaux moelleux, tendres ?

Un gâteau, qu'il s'agisse de génoise, de cookie, de quatre quarts, etc., c'est une structure solide (disons "prise" pour utiliser un langage culinaire) qui contient généralement des gouttelettes de matière grasse (par exemple de beurre de cacao mais aussi de beurre simplement), des bulles d'air si l'on a foisonné une préparation (par exemple en battant des blancs en neige) et une structure de type mie de pain, obtenu par empesage de l'amidon présent dans la farine. 

Pour avoir un gâteau bien tendre, il faut donc penser à y mettre une forte proportion de mousse, de matière grasse émulsionnée, d'eau.

Bien sûr, la cuisson peut augmenter l'alvéolage (voir le billet d'hier), car elle peut contribuer à des bulles de vapeur d'eau, et, aussi, l'utilisation d'une poudre levante peut ajouter des bulles de dioxyde de carbone. D'ailleurs, il est bon de savoir que, même avec des levures qui, en fermentant, on produit un foisonnement dans la masse, la cuisson augmente le taux de foisonnement en faisant dilater les bulles présentes et en activant les levures, avant que la chaleur ne finisse par les tuer. 

 Finalement, il y a mille façons d'augmenter la tendreté, le moelleux. Et j'en reviens à une vieille idée  (juste) : ce n'est pas en variant au hasard les ingrédients de recettes que l'on peut empiriquement les améliorer ; c'est en les comprenant. 

Dans mon livre Révélations gastronomiques, par exemple, j'avais fait un chapitre mon montrer comment faire des mousses au citron, pour démontrer que les recettes étaient inutiles, pour leur composante technique.
Reste alors le plus beau : les perfectionner artistiquement, puisque l'on se souvient que ma plus belle découverte, c'est d'avoir été capable de dire finalement que "la cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique". 


 


mercredi 1 octobre 2025

Comment faire pour avoir des gâteaux gonflés, ou au contraire éviter un gonflement qui risque de les fissurer (quatre quarts) ?

Je suis plus bec salé que bec sucré, mais pour les gâteaux, la question qui m'est posée par un interlocuteur dans le titre de ce billet  appelle la réponse suivante  : il s'agit de considérer l'évaporation de l'eau. 

Avec une information supplémentaire : un gramme d'eau liquide qui s'évapore à 100 °C fait un volume de valeur de un litre et demie !

 

Cela étant dit, revenons à la question, et expliquons plus en détail

 

Dans nombre de préparations culinaires ou pâtissières, il y a des gonflements  : par exemple pour les soufflés, pour le pain, pour la brioche, pour les choux et gougères, etc. 

Pour ces cas, on veut un gonflement aussi fort que possible. Or  j'ai découvert dans les années 1990 que le gonflement des soufflés (mais c'est vrai pour l'ensemble des préparations considérées)  n'est pas dû à la dilatation thermique des bulles d'air apportées par le blanc d'oeuf battu en neige mais bien plutôt par l'évaporation de l'eau : pour 100 g de préparation pour un soufflé, il y a 10 g d'eau évaporé lors de la cuisson,  ce qui correspond à 15 litres de vapeur : on voit la puissance du mécanisme d'évaporation (contrairement à la dilatation des bulles d'air qui, elle, ne ferait qu'un petit gonflement d'un tiers). 

Bref si des préparations culinaires gonflent, c'est que de l'eau s'évapore et, mieux encore, qu'elle s'évapore par le fond. C'est ce que je considère dans mon livre Révélations gastronomiques à propos des gougères : si on chauffe par dessous, les bulles de vapeur formées dans la partie inférieure ne peuvent s'échapper, et elles poussent vers le haut les  couches supérieures, provoquant le gonflement. 

 Inversement,  si l'on chauffait par-dessus, alors l'eau du dessus s'évaporerait, formerait une croûte qui, comme pour celles des frites, laisserait passer des bulles de vapeur. 

 

 

Nous avons donc là de quoi nous guider : pour avoir des gougères bien gonflées, des soufflés bien gonflés, des  cookies bien gonflés, il faut les chauffer par le fond, par exemple en posant la plaque de cuisson sur une autre plaque déjà chauffée ou sur la sole du four.
Inversement, pour avoir des cookies aussi plats que possible, il faut éviter l'évaporation et chauffer par dessus. 

 Ajoutons qu'il y a d'autres méthodes pour augmenter le gonflement : la poudre levante, par exemple,  qu'il ne faut pas confondre avec de la levure, a l'intérêt de former des bulles quand les  gâteaux qui la contiennent sont chauffés ; c'est ainsi que l'on fait gonfler des 4/4 par exemple.


mardi 30 septembre 2025

Blanc, blanc, blanc

 Un chef m'interroge sur la question du blanc en cuisine : comment l'obtenir ?

J'ai réfléchi à votre blanc, et la réponse est que, si l'on veut en obtenir :
- soit on place des particules blanches (dioxyde de titane, aujourd'hui à éviter)
- soit on fait une mousse ou bien une émulsion à très petites bulles/gouttelettes : pensez à du blanc en neige que l'on "serre" avec du sucre, ou à un "geoffroy" que l'on passe au mixer (pour le geoffroy, ce sera dans mon prochain livre : une "mayonnaise au blanc d'oeuf", si l'on peut dire)
- sans compter les agents blanchissants, qui absorbent les uv et réémettent de la lumière visible, faisant "plus blanc que blanc"... mais là, je ne peux pas en dire plus.  

A noter que le blanc s'obtient par réflexion : il faut que la lumière soit bien blanche pour que la réflexion le soit aussi.

vendredi 26 septembre 2025

Le séminaire de septembre 2025 : haricots verts et beurre maître d'hôtel

Nous venons de tenir le séminaire de gastronomie moléculaire de la rentrée, à propos de l'équeutage des haricots verts, d'une part et de la fabrication du beurre maître d'hôtel d'autre part. 

Je suis désolé de dire que dans les deux cas, les indications des professionnels ont été réfutées. 

 

1. Pour les haricots verts, une certaine culture française supprime les deux bouts : vers le pédoncule, ce bout dur qu'il est  naturel d'enlever, et d'autre part le bout pointu à l'opposé. 

Au Canada, les professionnels m'avaient dit qu'ils laissaient ce bout effilé, pour une raison que je n'ai pas retenu, mais en tout cas, cela faisait longtemps que je voulais comparer des haricots dont soit les deux bouts auraient été enlevés, soit le seul bout près du pédoncule l'aurait été. 

Nous avons donc fait l'expérience de préparer deux casseroles avec la même quantité d'eau : nous avons mis dans une casserole les haricots avec deux bouts enlevés et dans l'autre casserole les haricots avec un seul bout enlevé.
Nous les avons cuits exactement pendant 15 minutes,  de sorte qu'ils étaient cuit mais encore un tout petit peu croquants, sans saler l'eau pour ne pas avoir un paramètre supplémentaire et nous avons d'abord comparé les liquides. Ils étaient de la même couleur, et ils étaient également du même goût. 

Puis nous avons comparé les haricots :  visuellement ils étaient identiques. Ensuite, nous avons goûté les deux sortes de haricots par un test triangulaire où l'on donne trois échantillons, avec  deux échantillons identiques et le troisième différent ; on demande aux dégustateurs quels sont les numéros des échantillons identiques. 

Il n'y a pas eu de différence perceptible,  et l'un des participants, un professionnel,  a conclu que à l'avenir, il ne supprimerait plus qu'un bout. 

Ce même professionnel avait dit que dans sa famille, parce qu'il pouvait se procurer des haricots très frais, il n'était pas nécessaire d'enlever le bout pointu, mais, pour nos expériences, les haricots n'étaient pas parfaitement frais et il n'y a pas eu non plus de différence. Notamment nous n'avons pas perçu de goût désagréable pour cette partie effilée. 

On notera que, pendant l'expérience, il était apparu qu'il y aurait une possibilité de différence de goût parce que, quand nous avons cuit les haricots, j'en ai vu un qui était mal placé :  il avait encore son extrémité effilée dans une casserole où tous les autres haricots avaient les deux extrémités éliminées ; j'ai enlevé ce bout effilé et j'ai vu alors qu'il y avait un trou par lequel l'eau pouvait entrer. Autrement dit, dans les haricots aux deux extrémités supprimées, l'eau aurait pu entrer plus que dans les haricots avec une seule extrémité supprimée. 

Mais rien ne sert d'avoir des théories quand elles ne s'appliquent pas :  puisqu'il n'y a pas de différence de goût entre les deux lots de haricots, il est inutile d'aller chercher  à  expliquer ces différences qui n'existent pas. 

 

2. Maintenant pour le beurre de maître d'hôtel, il s'agit de beurre qui est malaxé avec du persil haché, du sel, du poivre et un peu de jus de citron. 

Des professionnels ont dit que le maniement excessif du beurre avec les autres ingrédient pourrait "user" le beurre maître d'hôtel... mais là encore, aucune différence sensorielle n'est apparue. 


On trouvera les détails dans



mercredi 24 septembre 2025

A propos de rapporteurs et d'évaluation des manuscrits pour des revues scientifiques

A propos de la publication de Zimmer K. 2025. Lipstick on a pig, Nature, 654, 809-812, un auteur d'un manuscrit se plaint à moi des rapporteurs qui auraient fait des observations déplacées à propos de son texte. Et voici ma réponse :
 
Cher Ami
Je ne suis pas certain d'être d'accord avec toi. Les rapporteurs de ton texte ont été respectueux, et, sans connaître le sujet, je ne pense pas qu'ils demandent des choses impossibles ni déplacées. Au contraire -et toujours sans être spécialistes de ces matières- je crois que cela améliorerait ton manuscrit de faire les quelques modifications demandées.
D'autre part, je crois savoir que les rapporteurs ne sont pas des xxx(une discipline particulière)xxx, comme tu le suppose.

Tu proposes une grille d'évaluation ? Je sais d'expérience que ce n'est pas la bonne solution. Mais si tu as une grille à proposer, pourquoi pas ; tout ce qui peut nous faire progresser est bon à prendre. 

Enfin, tu parles d'échec parce que tu as été critique, mais je crois qu'il n'y a pas lieu d'utiliser un tel mot : je peux t'assurer que, sur des manuscrits que j'ai moi-même proposés récemment, j'ai eu bien plus d'observations que tu n'en as eues, avec deux ou trois tours d'échanges. Par exemple, si mon "cours sur les synthèses bibliographiques" a été si gros, une fois publié, c'est parce que des rapporteurs ont insisté pour que j'ajoute des tas de choses, sur l'IA, par exemple. Mais, finalement, le cours est plus complet.
Autre exemple, pour mon article sur la rigueur terminologique, j'ai eu un rapporteur très pointilleux, et j'ai fait BEAUCOUP de changements, non pas parce que j'étais d'accord avec lui, mais parce que je me suis appliqué l'idée que je donnais aux auteurs  quand j'étais éditeur scientifique, dans une vie antérieure : un bon auteur est quelqu'un qui saisit la moindre observation non pas pour suivre nécessairement ce que le lecteur lui dit mais pour changer son texte et faire grandir ce dernier (évidemment il y a des cas où nos taches aveugles sont des taches aveugles, qui appellent des modifications telles que les lecteurs les proposent).

Dépasse donc tes réticences en modifiant ton manuscrit... pour en faire un article que j'ai hâte de lire en détail.

mardi 23 septembre 2025

Les séminaires de gastronomie moléculaire reprennent

Arrêtés en juillet et en août, les séminaires de gastronomie reprennent,  le mercredi et toujours de 16 à 18h au lycée Guillaume Tirel qui nous accueille très amicalement. 

Ces séminaires sont souvent adaptés aux participants présents, à savoir que quand des cuisiniers sont là,  les travaux portent surtout sur des tests expérimentaux d'idées culinaires propagées par le milieu professionnel.  Mais quand des scientifiques sont présents, alors on entre plus dans les détails physico-chimiques des transformations culinaires. Et quand les auditeurs sont plus généraliste, on s'adapte aussi. 

En tout cas, il y a toujours des tests des précisions culinaires et  une discussion des méthodes et des résultats obtenus. 

Après les séminaires, il y a toujours  la rédaction d'un compte-rendu détaillé, qui  inclut des photos des expériences pour toutes celles et tous ceux qui n'ont pas pu assister à la rencontre. 

Depuis plusieurs années, dans ces séminaires nous testons des précisions culinaires c'est-à-dire des idées glanées au fil des discussions et  des pages à propos des techniques, sans nous empêcher éventuellement pas de déborder sur des sujets qui nous intéresserait particulièrement. 

Il faut mettre ses travaux vis-à-vis de la démarche scientifique, qui passe par l'observation d'un phénomène, sa caractérisation quantitative, la réunion des données en équations, la réunion d'équations et de concepts en théorie et les tests expérimentaux des prévisions théoriques obtenues. 

Ici, dans les séminaires, le plus souvent, on s'arrête à la toute première étape, parce que ce serait inutile de vouloir chercher des explications à des phénomènes qui n'existent pas. 

Or les expériences ont souvent montré que le milieu culinaire a plus dit qu'il n'avait observé. 

Par exemple, quand un chef triplement étoilé nous dit que le dégorgement des tranches d'aubergines permet qu'elles se tiennent mieux ensuite à la cuisson et que nous observons l'inverse, il n'est pas nécessaire d'aller essayer d'interpréter les dires initiaux du chef. 

Il faudrait que je refasse les comptes, mais il y a un an et demi, sur 25 ans de séminaires mensuels, 87 % des idées testées avaient été montrées fausses. 

Surtout, le travail de ces séminaires à deux intérêts. Tester des précisions culinaires certes mais surtout montrer une méthodologie que d'autres pourront reprendre. 

Pour le premier ; nous avons eu une discussion récente, pendant le séminaire, avec des professionnels, que j'interrogeais pour savoir pourquoi le milieu professionnel ne faisait pas ces tests et la réponse a été que sans support théorique, nos amis ont du mal à imaginer quelles expérimentations ils pourraient faire. 

C'est donc quelque chose donc il faudra tenir compte pour le futur. 

Pour le second point, il faut signaler qu'il y a eu d'autres séminaires dans le monde et qu'il pourrait y en avoir d'autres dans le futur : dans d'autres villes, dans d'autres pays. 

Au fond c'est bien là l'étymologie du mot séminaire, semen,  la graine.

lundi 22 septembre 2025

Assez avec les publications scientifiques mal conçues, mal pensées, mal faites, mal évaluées, mal publiées

Faisant ce matin ma veille bibliographique, je trouve un article qui évoque le possible remplacement des conservateurs par des huiles essentielles. 

Cet article est doublement scandaleux. 

Il l'est, d'une part, parce que déjà il y a 30 ans il y a eu le même contenu publié... et qui n'est pas cité. 

D'autre part, il est scandaleux par sa naïveté : les huiles essentielles sont des composés tout aussi efficaces et tout aussi toxiques que les composés de synthèse, et  il n'y a pas de vertus particulières parce qu'un composé vient ou non d'une plante. Il faut rappeler que la ciguë est un poison végétal terrible, tout comme la baie de l'if, et ce ne sont pas là des exceptions que je cite :   la plupart des plantes sont toxiques... et les composés toxiques qu'elles renferment sont terribles quand elles sont concentrées. 

Il faut se demander comment de tels articles peuvent être publiés ? Je crois qu'il y a lieu de dénoncer le travail minable des grands éditeurs commerciaux, le travail complètement insuffisant de leurs équipes éditoriales, qui ne sont en réalité que des secrétariats, le travail bâclé de trop nombreux rapporteurs incompétents, pas formés, laxistes, et, évidemment, le travail insuffisant des auteurs qui soumettent de tels articles. 

J'ajoute que l'article que j'ai trouvé n'est pas éthique puisque ses citations ne renvoient pas vers les premiers auteurs qui ont découvert les faits, d'une part,  et que,  d'autre part, les auteurs ont glissé des résultats des résultats personnels dans une synthèse bibliographique,  ce qui est strictement interdit : si un article est une revue, il est évalué comme une revue mais si c'est une note de recherche, il était évalué comme une note de recherche. La confusion des genres ne vaut rien, s'apparente à une malhonnêteté. 

Je prédis que ce modèle des publications scientifiques ne fera pas long feu et en tout cas je ferai tout pour le combattre (la preuve).

vendredi 19 septembre 2025

Levures et poudres levantes

 Alors que l'on m'avait interrogé à propos de levures, de levain, de poudres levantes,   j'avais demandé à mes interlocuteurs de se procurer de la levure fraîche de boulanger, de la levure lyophilisée, et une poudre levante.

Mes interlocuteurs sont venus avec un cube de levure fraîche, un solide mou et blanc crème, et avec des sachets de "levure desséchée" et de "levure lyophilisée". Dans les deux cas, il s'agissait d'une poudre plus ou moins grossière, de petites billes de 1 à 2 mm de diamètre, de couleur blonde ou brune. Enfin, il y avait des sachets de "poudre à lever", de "poudre levante", ou  bien de "levure chimique", et dans ces trois cas, c'était une poudre blanche.

Ces divers produits sont bien différents. Pour les cubes de levure fraîche, tout d'abord, il s'agit d'agglomérats de micro-organismes, des organismes vivants réduits à une seule cellule : des "levures". Mis dans l'eau, les fragments du cube se sont désagrégés et les cellules se sont dispersées dans l'eau, produisant ensuite, lentement, des bulles d'un gaz qui est le dioxyde de carbone.
Cette matière nommée "levure de boulangerie" est composée de cellules de levure ; c'est elle que les boulangers utilisent pour faire leurs pains. En effet, mises dans une pâte faite de farine et d'eau, à douce température, les cellules de levures grossissent, puis  se divisent, et chacune des cellules filles grossit encore, se divise,  et ainsi de suite,  si bien qu'à partir de très peu de cellules,  on peut en obtenir beaucoup, tandis que l'on obtient aussi beaucoup de gaz qui fait gonfler le pain, tout en donnant beaucoup de goût.

Pour les levures qui étaient marquées lyophilisées ou desséchées, c'est au fond la même chose sauf que cette matière est privée de son eau et que la réactivation est un peu plus longue :  il faut la réhydratation.
Le résultat final s'apparente à celui que l'on obtient à partir des levures fraîches.

Pour les derniers produits, en poudre, il ne s'agit pas de "levure", et je propose de combattre la dénomination fautive et trompeuse de levure chimique. Ce sont des mélanges de poudre minérale qui se mettent à réagir en présence d'eau et à former du dioxyde de carbone : quand on met ses poudres dans l'eau, il y a une vive effervescence immédiate, une production de gaz abondante mais rapide. Les poudres levantes sont utilisées pour faire gonfler des gâteaux, et il n'y a pas besoin de fermentation... mais il y a aussi des différence en termes de tailles de bulles, d'alvéolage de la pâte, mais, surtout, en termes de goût !
 
 J'insiste un peu pour dénoncer absolument l'expression de "levure chimique" parce qu'en réalité il ne s'agit pas de levures ; c'est seulement une poudre et cette poudre est levante. La dénomination poudre levante est juste  ; la dénomination levure chimique est imbécile et trompeuse et elle devrait être interdite depuis longtemps.

Finalement, quel produit utiliser et dans quelles circonstances ? J'ai dit que la fermentation par des levures est bien différente de l'effervescence par des poudres levantes, et j'ai dit que les levures sont des organismes vivants qui fabriquent de nombreux composés :  il suffit de mettre son nez au dessus de trois verres emplis d'eau et de levure ou de levure lyophilisée pour les deux premiers, de poudre levante pour le troisième, pour  s'apercevoir de la différence.

Mais il faut que j'insiste un peu parce qu'il y a levure et levure, tout comme il y a des champignons de Paris et champignons des bois. Les levures sauvages qui forment les levains donnent aux pains des goûts très différents des levures domestiques, même si les sociétés qui fabriquent ces dernières savent aujourd'hui en produire de très nombreuses, très différentes.
Il y a beaucoup de  diversité dans les levures domestiques, et, d'ailleurs, les levures d'une marque ne sont pas les levures d'une autre marque, alors que pour les poudres levantes, c'est plus homogène car on a pas un choix infini pour fabriquer des mélanges de poudres minérales non toxiques et qui produisent une effervescence dans les aliments.

Pour en revenir aux questions d'usage, on utilisera des poudres levantes si on veut un gonflement rapide, sans ajout de goût, mais on utilisera des levures si on veut un gonflement plus lent, avec des bulles d'ailleurs plus petites, et surtout une multiplication à l'infini :  alors que la poudre levante libère du gaz une fois pour toutes, les levures qui fermentent se multiplient, de sorte que si l'on consomme la moitié de la préparation, pour faire du pain, il reste l'autre moitié, qui peut se multiplier, pour faire encore du pain, et ainsi de suite à l'infini.

jeudi 18 septembre 2025

Quand les idoles s'effritent

Je suis toujours désolé quand mes idoles s'effritent ce matin. Or, ce matin, il y a eu ce phénomène alors que je relisais le troisième tome du livre intitulé L'Art de la cuisine française au 19e siècle par Marie-Antoine Carême. 

J'explorais le chapitre des sources et notamment des petites sauces froides, celui où l'on trouve la sauce "magnonnaise" avec une abondance de précisions culinaires. C'est dans ce texte en particulier qu'il y a cette phrase : "c'est du frottement répété de la cuiller en bois contre le bord de la terrine que dépendent de la blancheur et la fermeté de la sauce". Carême écrivait magonnaise et non pas mayonnaise et l'on sait que la sauce venait d'apparaître dans la cuisine française, comme une classique rémoulade... mais sans moutarde. Il l'a trouvée si bien qu'il l'utilisait très largement dans ses banquets. 

En relisant le texte de Carême, j'ai trouvé d'abord la sauce magnonnaise, mais ensuite une mayonnaise d'une autre façon , pour laquelle on part de velouté, c'est-à-dire une sauce elle-même faite d'un roux et d'un mouillement, où il ajoute de l'huile d'Aix, du vinaigre et du jus de citron tout en battant. On a certainement une émulsion, de cette façon, mais d'un type bien différent de la mayonnaise originelle faite de jaune d'œuf, de vinaigre et d'huile. 

Certes, il ne s'empêchait pas d'ajouter de la sauce au suprême (ou du velouté ou de l'allemande) à de la magnonnaise, ou à de la hollandaise, par exemple, pour leur donner plus de succulence, mais il  détourne en quelque sorte l'appellation de mayonnaise, tout comme il le fait un peu plus loin à propos de ravigote et de rémoulade.  

Je m'aperçois donc à ce propos que, malgré une grande autorité, une certaine prétention, Carême n'est pas la référence terminologique que j'aurais voulue et que lui-même n'a pas suffisamment exploré les textes du passé, même s'il cite Menon comme étant une référence fiable (ce qu'elle n'est pas entièrement). 

En réalité, il n'a pas fait tout ce travail nécessaire de recherche historique et de comparaison des textes pour identifier des termes communs, pour obtenir des références culturelles solides. 

Finalement Carême n'est donc pas plus fiable que le Guide culinaire qui viendra après lui, et que trop de personnes acceptent comme parole d'Evangile, et il faut donc ne pas s'arrêter à ce qu'il a écrit. 

D'ailleurs, alors que je lis que je relis simultanément l'Eloge de la cuisine française d'Édouard Nignon, je vois également des usages terminologiques très contestables. Je vois même qui renomme à sa façon des préparations classiques. De quel droit ?