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mercredi 19 février 2025

Rions en lisant les publications scientifiques

 Je sais bien qu'il faut être charitable mais quand même : lisant des publications scientifiques, je trouve bien trop souvent des phrases dont je ne peux m'empêcher de me moquer. 

Et je retrouve un document ancien qui faisait déjà de même. Comme il est en anglais, je le traduit pour mes amis francophones :

 on sait depuis longtemps  =  je ne me suis pas ennuyé à aller chercher les références originales

Il est de grande importance théorique et pratique = cela m'intéresse

Alors qu'il n'a pas été possible de trouver une réponse à ces questions = les expériences ont échoués mais je me suis dit qu'on pourrait quand même publier

Extrêmement pur = de composition inconnue sauf en ce qui concerne les déclarations exagérée du fournisseur

Nous avons effectué une pléthore d'analyses =  nous avons fait quelques mesures

3 des échantillons ont été retenus pour une étude détaillée =  les autres échantillons donnaient des résultats incohérents et nous les avons donc ignorés
 

tachée accidentellement lors de la fixation = on la laissée tomber par terre 

manipulée avec le plus grand soin pendant les expériences les expériences = on ne l'a pas fait tomber par terre 

des résultats caractéristiques sont montrés = voici les meilleurs résultats que nous avons obtenus, les meilleures valeurs
 

les meilleurs résultats sont ceux de Jones = c'est un de mes étudiants 

on pense que = points je pense 

il est généralement admis que = il y a quelques collègues qui pensent comme moi 

 on pourrait argumenter que = j'ai une si bonne réponse à cet objection que je vais la proposer 

correct pour ce qui est de l'ordre de grandeur : faux 

il est clair que beaucoup de travail sera nécessaire avant d'obtenir une compréhension complète = je ne comprends rien 

on espère que ce travail encouragera d'autres études du même type = cet article n'est pas très bon tout comme ceux de mes collègues qui étudient ce sujet sans intérêt 

 j'adresse des remerciements à x pour l'assistance pour les expériences et à y pour les discussions profitables = x a fait tout le travail et y m'a expliqué ce que ça signifiait

lundi 17 février 2025

L'invention des sciences de la nature

Dans un billet précédent, je relisais Francis Bacon pour savoir si oui ou non il avait été à l'origine de la méthode scientifique que nous avons aujourd'hui et ma conclusion était que plutôt non mais quand même oui.

 Je m'explique : nos idées actuelles ont été longuement forgées et il a fallu nombre de personnes pour y parvenir. 

Pour la méthode scientifique, la physique et la chimie, la biologie ont marché à des pas différents. Il est clair que c'est la mécanique et l'astronomie qui ont commencé à l'époque de l'Antiquité grecque, mais c'est donc vers la Renaissance que les sciences modernes sont lentement apparues, et notamment quand l'algèbre a été façonné. 

Ce n'est pas d'ailleurs Descartes tout seul qui est arrivé à cela car il y a eu également des personnages importants comme Viete, mais progressivement, les capacités de calcul se sont augmentées et l'utilisation de ces dernières, alliée à une grande rigueur dans l'étude des phénomènes, rigueur qui se débarrassait autant que possible des préjugés philosophiques, est arrivé à une mathématisation de la physique et à sa constitution en sciences de la nature, tenant sur les deux pieds que sont l'expérience et le calcul.

Pour la chimie, c'est ensuite à l'époque de Lavoisier que les choses se sont faites mais on n'était pas encore à nos idées complètement modernes puisque Chevreul, une génération après Lavoisier, parvenait encore à faire œuvre originale avec sa méthode à posteriori expérimentale. 

Aujourd'hui les choses sont bien plus claires et on voit bien  la méthode scientifique repose sur le travail de nombreuses personnes tout également importante. Il y a une espèce d'idées  enfantine à vouloir attribuer à une seule personne des avancées qui sont en réalité dues à plusieurs.

dimanche 16 février 2025

Vous avez dit "scientifique bougon" ? Non.

Je retrouve un article écrit par un collègue décédé et que je ne citerai donc pas puisque je veux le critiquer. Il s'agit d'un texte d'histoire des sciences qui commence en disant que les scientifiques seraient bougons, parce qu'ils seraient perdus dans leurs pensées. 

D'emblée, la généralité me gêne et notamment parce que je connais nombre de collègues qui ne sont pas bougons mais au contraire très enthousiastes, très joviaux, joeux, positifs... 

Bien sûr, nous connaissons des collègues prétentieux, ou autoritaires, mais ceux-là ne sont pas bougons : ils sont prétentieux ou autoritaires.
Nous connaissons des collègues perdus dans leurs pensées, absobés par des phénomènes qui les passionnent, mais ceux-là ne sont pas non plus bougons : ils sont simplement absents, étourdis...
Nous avons aussi des collègues qui se sont réfugiés dans les sciences pour échapper à des relations sociales qui leur pèsent, et cela sont moins bougons que timides ou peureux, par exemple (j'insiste sur le "par exemple").

Bref nous avons des collègues de tas de sortes, et la phrase introductive de mon collègue me paraît bien fautive... d'autant plus qu'il l'appliquait un personnage de l'histoire des sciences qu'il n'a pas connu.

Il y a d'ailleurs un phénomène à prendre en compte, pour interpréter le comportement de certains scientifiques : quand on s'entraîne à réfuter des théories, à ne pas croire ce qui a été dit par le passé, fut-il récent, à ne pas accepter même ses propres idées théoriques en les sachant fausses par principe, alors on a vite un comportement socialement étrange, car si l'on se critique soi-même, comment pas ne pas critiquer les autres ?
Pour autant, cela ne signife pas être bougon :  cela peut apparaître mordant, impoli, que sais-je mais pas bougon.
 

mercredi 12 février 2025

Science, technologie, ingénierie, technique : de quoi s'agit-il ?

Il y a toujours eu une confusion entre science et technologie, au point que Louis Pasteur le déplorait déjà, avec des phrases d'une énergie terrible. 

Pourtant, c'est tout simple, en principe : D'une part, les sciences de la nature cherchent  à "lever un coin du grand voile", à découvrir les phénomènes inconnus et les mécanismes des phénomènes, à l'aide une méthode aussi certaine que possible, et qui passe par : (1) l'identification d'un phénomène ; (2) la caractérisation quantitative de ce phénomène (on en mesure des caractéristiques judicieusement choisies) (3) le regroupement des résultats de mesure en "lois" synthétiques, c'est-à-dire essentiellement en équations ; (4) la recherche -par induction, c'est là un point central- de concepts, notions, théories, mécanismes quantitativement compatibles avec les équations dégagées ; (5) la recherche de conséquences des théories ainsi "induites" ; (6) les tests expérimentaux de ces conséquences, en vue de réfutations qui permettent de boucler, afin d'améliorer des théories toujours insuffisantes. 

D'autre part, la ou les technologies (à discuter), elles, visent l'amélioration des techniques, et elles ont un but pratique, puisque "technique" signifie "faire".   Pour autant, la science n'est pas au-dessus de la technologie, et la technologie n'est pas au-dessus de la science : ce sont deux activités séparées ! Et Pasteur lui-même observait que sa volonté de contribuer au bien-être de l'humanité l'avait détourné de ses travaux scientifiques (par exemple, l'exploration de la chiralité) vers la technologie, mais il l'avait mûrement décidé. 

Des collègues évoquent, à côté de ces termes de science et de technologie, celui d'ingéniérie, mais il n'est pas bien clair, et, en tout cas, il tombe clairement du côté de la technologie, puisque le Journal officiel en dit : "Ensemble des fonctions allant de la conception et des études à la responsabilité de la construction et au contrôle des équipements d'une installation technique ou industrielle (en anglais : engineering)" (Arrêté du 12 janv. 1973 ds Lang. fr., Paris, J.O., 1980, p. 21). Bien sûr, certains peuvent utiliser les termes avec diverses acceptions idiosyncratiques... mais ils risquent de n'être compris que par eux-mêmes.   Ajoutons enfin  : - que le mot « science », utilisé dans une expression telle que « science du coordonnier » n'a rien à voir avec les sciences de la nature, puisque, ici, le mot « science » signifie seulement savoir ; or comment refuser à un corps professionnel d'avoir un savoir ? Ce serait idiot… tout comme il serait idiot de confondre ce savoir empirique avec les sciences de la nature - que  les mathématiques ne sont pas des sciences de la nature, mais des "mathématiques", et elles ne se confondent pas avec le calcul, qui est, comme on l'a vu, le quotidien des sciences de la nature - qu'il ne peut en aucun cas exister des "sciences appliquées", puisque des science ne sont précisément pas appliquées ; une expression comme "sciences appliquées" est un oxymore fautif, tout comme carré rond. 

Tout cela étant dit, puisque la confusion règne (c'est un fait) beaucoup en "sciences et technologies des aliments", et que les étudiants notamment sont perdus, je me suis amusé à recopier la table des matières d'une revue de la discipline pour essayer d'y voir plus clair. A noter que le mot "chimie" figure dans son titre, et que ce mot, déjà, prête à confusion, comme je l'ai expliqué dans d'autres billets, puisque l'on a tendance à confondre dans ce mot... de la science, de la technologie, et même de la technique. Pourtant, un examen attentif de l'histoire de la chimie montre que la chimie est une science de la nature, et que les travaux techniques (industries) ou technologiques ne sont pas de la chimie proprement dite, mais de la technologie ou de la technique, des applications de la chimie qui ne devraient pas être nommées "chimie". On est proche de la confusion qui règne en médecine, si bien dénoncée par Claude Bernard, qui observe justement que la médecine est une technique, que la recherche clinique est une technologie, et que la science de la médecine est la physiologie ! 

Mais lançons nous... même si, on va le voir, l'exercice finit par être lancinant. 

Bioactive compounds of beetroot and utilization in food processing industry: A critical review : ici, au moins, on commence facilement, car il est question d'utiliser des composés des betteraves dans l'industrie. C'est clairement de la technologie. Certes, il aura fallu identifier les composés "bioactifs" avant de les étudier, mais l'intention est claire. Intention ! Le mot est essentiel, parce que l'on peut fort bien imaginer que des ingénieurs ou des technologues, voire des techniciens, s'intéressant à leur travail, fassent une découverte, mais il faudra l'intention, pour aller plus loin, et c'est à ce titre que l'on a parfois dit que Rumford avait découvert la convection. Je reviens une seconde sur mon "Certes, il aura fallu identifier les composés bioactifs" : on voit qu'un travail technologique peut conduire à explorer le monde, à "lever un [petit, ici] coin du grand voile", ce qui correspond à une activité scientifique. Et  s'impose une observation : de même que l'on ne fait pas de chimie quand on respire, on ne fait pas de science quand on effectue certaines des tâches qui relève de sa méthode ; de même, une partie du public confond science et rigueur, mais il ne suffit pas d'être rigoureux pour faire une recherche scientifique. L'intention est essentielle, et les technologues qui auront ici identifié des composés bioactifs dans les betteraves, s'ils ont contribué à l'augmentation des connaissances, n'auront pas notablement contribué à la science. D'ailleurs, des composés "bioactifs" : on pressent qu'il s'agit seulement d'observer si des composés ont une action sur le corps humain... ce qui est une application. J'ajoute aussi que je crois les étapes 4, 5 et 6  essentielles dans la recherche scientifique. Trop souvent, le travail n'est que technique, quand il s'arrête à la caractérisation quantitative des phénomènes. 

Exploring the impacts of postharvest processing on the aroma formation of coffee beans – A review :  ce deuxième travail semble annoncer clairement la couleur : il s'agit d'explorer un champ technique, à savoir ce qui se passe quand on a recueilli les fruits du caféier. Toutefois le titre n'est plus suffisant, ici, parce que l'on pourrait imaginer que les « chercheurs » ont tenté d'élucider des mécanismes à des fins de savoir, ou bien à des fins d'amélioration des procédés. On retrouve ici la question de l'intention, de l'ambition particulière de ce « chercheur » qui, selon les cas, est un chercheur scientifique ou un chercheur technologique. En tout cas, ici, il faut y aller plus avant pour se déterminer... en se doutant que si l'on parle d'arôme, c'est bien que l'on pense à un effet sur l'humain... et donc à de la technologie, en vue de modifier le café pour qu'il soit mieux apprécié : si ce n'est pas de la technologie, cela ! 

Phenolic compounds and antioxidant activities of tea-type infusions processed from sea buckthorn (Hippophaë rhamnoides) leaves </i>: ici, le mot "proccessed" fait penser à de la technologie, mais nous arrivons à un cas plus subtil, même si l'argousier est utilisé de façon technique. Ce qui est en cause, plus précisément, c'est cette exploration des activités antioxydantes des composés phénoliques de la plante. Vise-t-elle une simple caractérisation, pour une utilisation (technologique), ou la recherche de mécanismes ? Il faut lire en détail l'article... et l'on opte alors pour la seconde option. Mais là encore, une observation, à propos de ce "processed" : le fait que des composés phénoliques soient différents avant ou après transformation de feuilles d'argousier est un phénomène dont l'exploration pourrait révéler des mécanismes inédits du monde... à condition d'être dans l'état d'esprit de les chercher. C'est  sans doute dans cette idée que l'un de mes amis qui est un très bon scientifique évoque, parmi les stratégies scientifiques, le "abstraire et généraliser". 

Chloroplast-rich material from the physical fractionation of pea vine (Pisum sativum) postharvest field residue (Haulm) : là, c'est facile, puisque c'est une valorisation de résidus de transformation. Technologie. Bien sûr, avec beaucoup de mauvaise foi, on pourrait dire que l'on s'intéresse aux mécanismes particuliers qui permettent à des résidus du pois de contenir beaucoup de matériaux chloroplastiques, mais... la lecture de l'article montre que tel n'est pas le cas, puisque, au contraire, il s'agissait d'analyser technologiquement les nutriments des fractions isolées, par une technique un peu améliorée. 

Characteristics of flavonol glycosides in bean (Phaseolus vulgaris L.) seed coats : ici, il s'agit donc de caractériser une classe particulière de composés dans les haricots, et l'on peut imaginer que l'objectif est de lever un coin du grand voile. D'ailleurs, la "science des aliments" n'est en réalité une science de la nature, et non une activité technologique, que dans la mesure où elle a cet objectif. On observera que nous avions eu le besoin d'introduire la gastronomie moléculaire comme une discipline scientifique, parce que avions vu que les "sciences et technologies des aliments", dans les années 1980, se résumaient presque à de la science des ingrédients, et à des études des procédés ; or il nous apparaissait clairement que nous pourrions identifier des phénomènes et mécanismes nouveaux si nous explorions des phénomènes peu considérés, avec l'objectif clair d'identifier des mécanismes et phénomènes nouveaux. Bref, ici, il pourrait s'agir de science des aliments, et bien de science... sauf que la consultation de l'article révèle un "Results suggest seed coats of Windbreaker and Eclipse may have potential as functional food ingredients, though benefits may not be simply due to flavonols"... qui montre que le travail était technologique. 

Wine production using free and immobilized kefir culture on natural supports</i> : hopla, facile, non ? Mais c'est aussi l'occasion de voir que, jusque ici, nous n'avons pas eu un seul cas de science ! 

Variations in chlorophyll and carotenoid contents and expression of genes involved in pigment metabolism response to oleocellosis in citrus fruits: ouf, voilà enfin de la science ! Ici, de la science qui caractérise non pas les aliments, mais bien plutôt les ingrédients alimentaires, car c'est là une subtilité que je gardais en réserve, et qui agravait l'état des années 1980  : non seulement la science des aliments n'était le plus souvent que de la science des ingrédients, mais pire, ce n'était pas de la science des aliments, puisque c'était de la science des ingrédients ! Or je maintiens que les ingrédients ne sont pas des aliments, puisque manque l'étape de "cuisine". Un exemple : un sanglier vivant n'est pas un aliment ; pour faire un aliment à partir de ce sanglier, il aura fallu tuer l'animal, le dépecer, le préparer, le "cuisiner"... Ce qui n'est pas une mince affaire, et ce qui change du tout au tout la chair de l'animal. 

Use of a smartphone for visual detection of melamine in milk based on Au@Carbon quantum dots nanocomposites : et là, c'est facile, puisque c'est de la caractérisation technique. N'épiloguons pas. 

Physicochemical properties and phenolic content of honey from different floral origins and from rural versus urban landscapes : à la lecture du seul titre, les deux possibilités scientifique et technologique se présentent, à savoir que l'on pourrait explorer les compositions et des caractéristiques des miels de différentes origines, en vue de comprendre comment ils sont formés, par exemple, ou bien l'on pourrait chercher  à attribuer des propriétés à partir de l'environnement de production, mais je propose surtout de conserver cet exemple observer que certains travaux publiés s'arrêtent à la caractérisation : si l'on est charitable, on peut admettre qu'il s'agisse de science, avec une ou deux étapes préliminaires... mais la caractérisation n'a de sens que si l'on identifie des mécanismes ! 

Effect of interesterified blend-based fast-frozen special fat on the physical properties and microstructure of frozen dough  : bon, de la technologie. Là encore, on pourrait faire de la science si l'on était vraiment scientifique... mais Effect of phosphates on gelling characteristics and water mobility of myofibrillar protein from grass carp (Ctenopharyngodon idellus) : on se trouve dans l'avant dernier cas, et l'on pose la question de l'objectif, avant de trancher. L'article, lui, nous dit qu'il s'agit de technologie : dommage pour la science, tant mieux pour la technologie. 

Hydrolysis and oxidation of lipids in mussel Mytilus edulis during cold storage : je pressens un travail technologique. Car même si l'on caractérise l'évolution des lipides lors du stockage au froid, l'étude s'arrête là. 

Particulate organohalogens in edible brown seaweeds : de la science des ingrédients ou de la toxicologie ? Cette fois, il faut aller voir l'article, dont le résumé est le suivant : 

Brown algae, rich in antioxidants and other bioactive compounds, are important dietary seaweeds in many cultures. Like other marine macroalgae, brown seaweeds are known to accumulate the halogens iodine and bromine. Comparatively little is known about the chemistry of chlorine in seaweeds. We used synchrotron-based X-ray absorption spectroscopy to measure total non-volatile organochlorine and -bromine in five edible brown seaweeds: Laminaria digitata, Fucus vesiculosus, Pelvetia canaliculata, Saccharina latissima, and Undaria pinnatifida. Organochlorine concentrations range from 120 to 630 mg·kg-1 dry weight and organobromine from 150 to 360 mg·kg-1, comprising mainly aromatic organohalogens in both cases. Aliphatic organochlorine exceeds aliphatic organobromine but is positively correlated with it among the seaweeds. Higher organochlorine levels appear in samples with more lipid moieties, suggesting lipid chlorination as a possible formation pathway. Particulate organohalogens are not correlated with antioxidant activity or polyphenolic content in seaweed extracts. Such compounds likely contribute to organohalogen body burden in humans and other organisms. On voit que le résumé commence par vendre la salade, en termes d'application technique. Cela dit, le métabolisme du chlore ou du brome est une question passionnante. On n'oublie pas que l'iode fut découvert à partir des algues par Bernard Courtois. 

Comparative studies on the yield and characteristics of myofibrillar proteins from catfish heads and frames extracted by two methods for making surimi-like protein gel products : bon, l'intention technologique est claire. 

Point-of-use detection of ascorbic acid using a spectrometric smartphone-based system: idem. 

Development and validation of a method for simultaneous determination of trace levels of five macrocyclic lactones in cheese by HPLC-fluorescence after solid–liquid extraction with low temperature partitioning: de l'analyse, donc de la technologie.

Rapid quantification of the adulteration of fresh coconut water by dilution and sugars using Raman spectroscopy and chemometrics: de la caractérisation, en vue de dépister des fraudes, c'est donc de la technologie. 

Effect of pH and holding time on the characteristics of protein isolates from Chenopodium seeds and study of their amino acid profile and scoring : en réalité, il faut lire l'article pour voir que l'on est dans une caractérisation technologique. 

Antioxidant activity of a winterized, acetonic rye bran extract containing alkylresorcinols in oil-in-water emulsions</i> : là encore, on trouve le cas évoqué. Mais là, je commence à me lasser, et sans doute vous aussi. 

Chemical profiles and antioxidant properties of roasted rice hull extracts in bulk oil and oil-in-water emulsion </i>: il s'agit donc de caractérisation, et c'est l'occasion de signaler à nos jeunes amis qu'une caractérisation n'est qu'une caractérisation. Le contenu conceptuel est faible si l'on ne va pas jusqu'aux mécanismes. Mais, au fait, trouver le mécanisme d'un phénomène, c'est bien... mais est-ce une grande découverte ? 

Distribution and effects of natural selenium in soybean proteins and its protective role in soybean β-conglycinin (7S globulins) under AAPH-induced oxidative stress: on sent la technologie à plein nez... 

Mais je propose que nous arrêtions ici, parce que c'est vraiment trop long, en observant seulement que les travaux scientifiques sont vraiment rares ! N'est-ce pas désolant ? N'est-ce pas un scandale que la revue en question évoque les sciences aliments.

Mais je dis assez souvent que se lamenter est inutile, et je vois surtout, là, la possibilité de développer véritablement des sciences des aliments, et pas seulement des ingrédients alimentaires ! Cela, ce me semble être précisément la gastronomie moléculaire !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 

 

Annexe: le reste des titres, pour que vous puissiez vous exercer : 

 # Peels of tucumã (Astrocaryum vulgare) and peach palm (Bactris gasipaes) are by-products classified as very high carotenoid sources

 # Diffuse light affects the contents of vitamin C, phenolic compounds and free amino acids in lettuce plants 

# Solid-state fermentation of black rice bran with Aspergillus awamori and Aspergillus oryzae: Effects on phenolic acid composition and antioxidant activity of bran extracts 

# Modifying Robusta coffee aroma by green bean chemical pre-treatment 

# Microwave and ultrasound pre-treatments to enhance anthocyanins extraction from different wine lees 

# Effect of sex on the nutritional value of house cricket, Acheta domestica L. 

# Effect of anthocyanins on lipid oxidation and microbial spoilage in value-added emulsions with bilberry seed oil, anthocyanins and cold set whey protein hydrogels 

# Comparison of real-time PCR methods for quantification of European hake (Merluccius merluccius) in processed food samples 

# A unified approach for high-throughput quantitative analysis of the residues of multi-class veterinary drugs and pesticides in bovine milk using LC-MS/MS and GC–MS/MS 

# Novel insight into the role of withering process in characteristic flavor formation of teas using transcriptome analysis and metabolite profiling 

# High-sensitivity determination of cadmium and lead in rice using laser-induced breakdown spectroscopy 

# Characterization and storage stability of chlorophylls microencapsulated in different combination of gum Arabic and maltodextrin 

# Determination of serotonin in nuts and nut containing products by liquid chromatography tandem mass spectrometry 

# Development of a DNA metabarcoding method for the identification of fifteen mammalian and six poultry species in food 

# Comparisons of nutritional constituents in soybeans during solid state fermentation times and screening for their glucosidase enzymes and antioxidant properties 

# Characterization of three different types of extracellular vesicles and their impact on bacterial growth 

# Taste-guided isolation of sweet-tasting compounds from grape seeds, structural elucidation and identification in wines 

# A value-added approach to improve the nutritional quality of soybean meal byproduct: Enhancing its antioxidant activity through fermentation by Bacillus amyloliquefaciens SWJS22 

# UV and storage stability of retinol contained in oil-in-water nanoemulsions 

# Screening of antimicrobials in animal-derived foods with desorption corona beam ionization (DCBI) mass spectrometry 

# Effect of hulling methods and roasting treatment on phenolic compounds and physicochemical properties of cultivars ‘Ohadi’ and ‘Uzun’ pistachios (Pistacia vera L.) # Traditional rose liqueur – A pink delight rich in phenolics 

# In vivo anti-hyperuricemic and xanthine oxidase inhibitory properties of tuna protein hydrolysates and its isolated fractions 

# Sensory descriptive and comprehensive GC–MS as suitable tools to characterize the effects of alternative winemaking procedures on wine aroma. Part I: BRS Carmem and BRS Violeta 

# Kinetics of lipid oxidation in omega fatty acids rich blends of sunflower and sesame oils using Rancimat 

# Encapsulation of grape seed phenolic-rich extract within W/O/W emulsions stabilized with complexed biopolymers: Evaluation of their stability and release 

# Evaluation of near-infrared (NIR) and Fourier transform mid-infrared (ATR-FT/MIR) spectroscopy techniques combined with chemometrics for the determination of crude protein and intestinal protein digestibility of wheat 

# Impact of consumer behavior on furan and furan-derivative exposure during coffee consumption. A comparison between brewing methods and drinking preferences 

# Effects of heat-moisture treatment after citric acid esterification on structural properties and digestibility of wheat starch, A- and B-type starch granules 

# Glycine betaine reduces chilling injury in peach fruit by enhancing phenolic and sugar metabolisms 

# Effects of skim milk pre-acidification and retentate pH-restoration on spray-drying performance, physico-chemical and functional properties of milk protein concentrates 

# Simultaneous determination and risk assessment of fipronil and its metabolites in sugarcane, using GC-ECD and confirmation by GC-MS/MS # Extraction of lycopene using a lecithin-based olive oil microemulsion 

# Discrimination of geographical origins of Chinese acacia honey using complex 13C/12C, oligosaccharides and polyphenols # β-Agarase immobilized on tannic acid-modified Fe3O4 nanoparticles for efficient preparation of bioactive neoagaro-oligosaccharide 

# Influence of fried food and oil type on the distribution of polar compounds in discarded oil during restaurant deep frying 

# Structural elucidation of fucoidan from Cladosiphon okamuranus (Okinawa mozuku) 

# Determination of lipophilic marine toxins in fresh and processed shellfish using modified QuEChERS and ultra-high-performance liquid chromatography–tandem mass spectrometry 

# Discrimination of Brazilian lager beer by 1H NMR spectroscopy combined with chemometrics 

# Synergistic effect of mixture of two proline-rich-protein salivary families (aPRP and bPRP) on the interaction with wine flavanols 

# Impact of a post-fermentative maceration with overripe seeds on the color stability of red wines # Inhibitory effects of dietary soy isoflavone and gut microbiota on contact hypersensitivity in mice 

# Metabolite characterization of powdered fruits and leaves from Adansonia digitata L. (baobab): A multi-methodological approach # Isolation of antioxidative compounds from Micromelum minutum guided by preparative thin layer chromatography-2,2-diphenyl-1-picrylhydrazyl (PTLC-DPPH) bioautography method 

# Effect of guar gum on the physicochemical properties and in vitro digestibility of lotus seed starch # Preparation of an intelligent pH film based on biodegradable polymers and roselle anthocyanins for monitoring pork freshness 

# Extraction, structural characterization and stability of polyhydroxylated naphthoquinones from shell and spine of New Zealand sea urchin (Evechinus chloroticus) 

# A review of microencapsulation methods for food antioxidants: Principles, advantages, drawbacks and applications 

# Transcriptome and proteome analyses of the molecular mechanisms associated with coix seed nutritional quality in the process of breeding 

# The synthesis and characterization of a xanthan gum-acrylamide-trimethylolpropane triglycidyl ether hydrogel 

 

Vous avez vu beaucoup de science, vous ?

samedi 8 février 2025

La science chercherait la vérité ? Certainement pas

On entend parfois parler de vérité, à propos de science. On dit (parfois) que la science est la recherche de la vérité, ou que la science est le domaine de la vérité... Mais tout cela est-il bien légitime ? 

La science considère des « faits », et, si je ne méconnais pas les innombrables débats à propos de ce mot (tout comme d'ailleurs à propos de vérité), il faut éviter de se contorsionner intellectuellement. 

C'est un fait qu'un morceau de sodium qui tombe sur de l'eau fait au minimum une grande lueur, ou au maximum une explosion ; en tout cas, il se passe quelque chose. Cela a été, cela est, et cela sera si l'on refait l'expérience dans les conditions où nous l'entendons tous : à savoir à la température ambiante, avec des masses macroscopiques que l'on n'aurait aucune peine à préciser.
De même, c'est un fait que la pomme tombe de l'arbre, dans les conditions (que l'on pourrait préciser) habituelles. 

Les faits ne sont ni vrais ni faux : ce sont des faits. Il n'y a pas de valeur de vérité pour les faits : un « fait faux » n'est pas un fait, tout comme un « carré rond » n'existe pas. 

Et les théories ? Là, c'est encore plus simple, parce que les théories scientifiques sont toutes insuffisantes, donc fausses. De sorte que, bien entendu, elles ne sont alors pas « vraies ». 

Et, en conséquence, la science ne cherche certainement pas la vérité, mais elle cherche les mécanismes des phénomènes, sous la forme de théories (idées, concepts, relations quantitatives entre des concepts) qui sont insuffisantes et dont on cherche lentement à augmenter les capacités prédictives. Souvent, on avance par petits pas, et, parfois, il y a un saut conceptuel, un changement complet de cadre descriptif, comme quand on est passé de la physique classique à la physique quantique. Mais pas de vérité, dans tout cela !

mercredi 5 février 2025

Stratégie scientifique

Cela fait des décennies que je ne cesse de poser cette question  : comment faire des découvertes ? 

La question est évidemment essentielle, en science, et, pragmatique, j'ai fait une collection d'idées stratégiques, pour avancer dans la réponse. 

Voici ce que j'ai à ce jour : 

(1) Transforming adjectives and adverbs into quantitative parameters (introduction of new concepts); 

(2) Looking for the mechanisms of phenomena; 

(3) Focusing on oddities, contradictions, discrepancies and ''symptoms''; 

(4) Designing ''microscopes''; 

(5) Making science from a technical question; 

(6) Refuting a theory; 

(7) Solving a problem; 

(8) Assuming that any fact, result, observation, phenomenon should be considered as a particular example of general categories that we have to invent; 

(9) Looking behind the â ordinary: this means not accepting what was accepted;

 (10) Making the contrary of what was always proposed; 

(11) Looking deeply enough to what an experiment can reveal, and work deep enough to see the impact. 

(12) It is good to see the tree but one should also see the forest. 

 

 Which ones are missing ? 

 

On voit que c'est en anglais... mais la communication scientifique se fait dans cette langue. Je ne détaille pas... mais cela est fait dans un article que l'on trouve en ligne : http://www.chemistryireland.org/docs/news/Irish-Chemical-News-2017-Issue-5.pdf &nbsp; N'hésitez pas à me communiquer des idées supplémentaires !

dimanche 2 février 2025

Bacon a-t-il inventé la science moderne ?

Certains auteurs disent que Francis Bacon aurait été le créateur de la science moderne avec son Novum Organum  : j'ai voulu en avoir le cœur net en relisant ce texte que j'avais découvert il y a très longtemps et que j'avais un peu oublié. 

On y trouve  une très longue diatribe contre la philosophie excessivement théorique et inventive qui fut notamment celle d'Aristote,  et, inversement,  une apologie d'une étude des faits de la nature sans divagations philosophiques, une apologie d'une "philosophie naturelle" dont la méthode serait très différente. Et notre auteur de classer les faits d'observations. 

Mais en sortant du livre, si l'on voit bien une volonté de mettre à plat la philosophie naturelle, les sciences de la nature, on ne voit certainement pas des idées aussi précises que celles sur données par Galilée, notamment à propos de l'étude quantitative des phénomènes

Certes Bacon dit bien que tout doit être mesuré, pesé, nombré... Mais il ne fait lui-même que classer des observations par type d'observations, ceux qui est bien loin de ce que fera Galilée, qui mettra en pratique cette méthode expérimentale qui met en œuvre le calcul sur les nombres que sont les résultats de mesure. 

D'ailleurs,  plusieurs des idées de Bacon, notamment à propos des causes, sont déjà données par Blaise Pascal, et l'on n'oubliera pas qu'il y a eu auparavant René Descartes qui a introduit les outils mathématiques pour manier tout cela. 

Bref, il est exagéré de dire que Bacon aurait inventé la science moderne, et il vaudrait mieux avoir la justesse de dire que, après certains Grecs de l'Antiquité qui explorèrent correctement des phénomènes naturels, il y eut Descartes,  Pascal, Bacon, et Galilée enfin pour arriver à cette méthode scientifique que nous utilisons aujourd'hui. 

Au sortir de cette lecture, je continue à penser que les deux phrases de Galilée disant que l'expérience doit avoir raison contre toute autorité, d'une part et, d'autre part que le monde est écrit en langage mathématique, sont des piliers sur lesquels repose la méthode scientifique d'aujourd'hui. 

Il faut ajouter que Bacon a dit des choses très intéressantes à propos de la chimie, sans employer le mot évidemment , puisque cette science qu'est la chimie n'avait pas encore été dégagé de l'alchimie. 

En effet, la transition s'est faite un peu plus tard, aux environs de la parution des premiers tomes de l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert, quand on a arrêté de considérer que, si une expérience rate, c'est que l'expérimentateur est "insuffisant" ; on a fini par comprendre que, comme le disait Galilée, l'expérience a toujours raison. 

Il y a eu ainsi une transition de l'alchimie vers la chymie,  puis vers la chimie  quand Lavoisier introduisit très explicitement des méthodes quantitatives, dans une méthodologie qui restait très expérimentale. Au fond, Lavoisier a fait pour la chimie ce que Galilée a fait pour la physique. Et en ce sens, ces deux hommes sont plus grands que les autres de leur temps car l'observation ne suffit pas, le jugement n'est pas un outil suffisant pour relier les faits et c'est par les nombres que s'imposent les sciences de la nature.

dimanche 8 décembre 2024

La science ? Théorie et expérience : cela s'apprend.

Ce matin, alors que je recevais au laboratoire un étudiant venu faire des expérimentations, j'ai mieux compris l'étendue des explications à donner. 

En l'occurrence, j'avais imaginé produire des mousses en soufflant de l'air par la partie inférieure d'un liquide susceptible de mousser. Quand j'avais initialement expliqué à l'étudiant, j'avais compris qu'il voyait mal comment nous pourrions faire, et c'est à ce moment-là que j'ai compris que mon idée "évidente" était celle d'une colonne de chromatographie où l'on soufflerait de l'air par la base n'avait rien d'évident. 

Rien d'évident...  parce que mon jeune ami ne savait pas ce que c'est une colonne de chromatographie. Une colonne de chromatographie ? C'est une colonne en verre qui comporte à sa base un "fritté". Un fritté ? Il s'agit de particules de silice agglomérées pour faire comme un filtre solide. 

La colonne de chromatographie était le premier objet inconnu de mon ami et le fritté était le second. 

Comment souffler de l'air dans cette colonne ? Il me semblait évident que l'on utiliserait de l'air comprimé, mais j'ai bientôt compris que mon ami ne savait pas qu'il y avait des systèmes d'air comprimé mutualisés dans les laboratoires. Je lui ai donc montré cela (c'est un robinet qui arrive sur les paillasses), en ajoutant "évidemment" qu'il fallait régler le débit. 

Comment régler le débit ? Pas en ouvrant plus ou moins la vanne, mais en faisant passer cet air du circuit mutualisé vers un débitmètre, tel que nous en avons dans les placards. Je lui en ai trouvé un deux : il s'agit simplement de faire passer l'air dans un système qui fait monter plus ou moins une bille dans une échelle graduée, laquelle doit être calibrée. 

Comment brancher ces divers éléments ? Il me semblait "évident" que nous utiliserions des tuyaux en caoutchouc, mais comment notre jeune ami aurait-il su que nous avions de tels tuyaux de différents diamètres dans nos réserves ? 

Je lui ai donc trouvé ce qu'il fallait et j'ai fait les branchements. Restait à raccorder le tuyau de caoutchouc à la sortie mutualisée d'air comprimé. Pour cela il fallait un système vissable sur la sortie d'air. Mais ce système fuyait, et la solution était d'enrouler sur le raccord vissable un "ruban de Téflon". Un ruban de téflon ? Là encore, notre ami ignorait l'existence d'un tel objet, et nous lui avons montré ce dont il s'agissait. 

Finalement, le montage étant fait, j'ai expliqué qu'il fallait laver la colonne de chromatographie qui, sortant des réserves de verrerie, n'était pas d'une propreté parfaite, ce qui risque de fausser les mesures, les mousses étant particulièrement sensibles à la présence de certains composés qui souillent les équipements. 

Comment laver ? Là c'était plus facile, parce que j'avais un document tout fait ayant précisément ce titre. Mais en réalité, une bonne réflexion aurait suffi : un matériel est souillé parce que des composés sont à sa surface. Pour enlever les composés soluble dans l'eau, on utilisera de l'eau, mais pour enlever les composants l'eau ? On prendra "évidemment" un solvant organique. 

Bref,  on lavera d'abord  à grande eau froide, puis à l'eau chaude, pour éliminer  les composés solubles. "Évidemment" on terminera avec de l'eau distillée. Et on passera ensuite à l'acétone qui dissoudra les composés insolubles et on le fera trois fois parce que si l'on enlève 90 pour cent des souillures au premier lavage, il en restera 10 pour cent ;  mais le deuxième lavage enlèvera 90 pour cent de ces 10 pour cent, de sorte qu'il ne restera qu'un pour cent et l'on comprend pourquoi la troisième opération s'impose. 

Ayant lavé à l'acétone, on repassera à l'eau pour ne pas laisser de trace sur le verre et là encore, on aura intérêt à faire grande eau froide, eau chaude, eau froide et eau distillée. 

Le lavage de l'intérieur du fritté pose une question particulière parce qu'il ne s'agit pas de faire simplement un nettoyage de surface, mais un nettoyage profond. Et c'est là qu'on sera amené à pousser les liquides nettoyants à travers le fruité... à l'aide d'air comprimé, que l'on utilisera pour pousser les liquides lavant. 

Et c'est ainsi que, disposant d'une colonne bien propre, nous pourrons pousser de l'air avec un débit connu, faible ou fort. 

Surtout, j'y reviens, je vois qu'il n'y avait rien d'évident dans tout cela, et qu'il a fallu en quelque sorte bricoler : nos étudiants sont mieux formés à la théorie qu'au bricolage, et quand ils savent bricoler, ils n'imaginent pas toujours que la recherche scientifique puisse se fonder sur de telles bricolages. 

Bien sûr, on bricole mais avec rigueur :  par exemple, pour notre système, s'imposait absolument de le calibrer, de le tester, de voir la répétabilité du foisonnement, etc. 

La recherche scientifique est donc un jeu constant entre l'expérimentation et la théorie, je l'ai déjà dit souvent, c'est précisément cette vie simultanée dans deux mondes parallèles qui me fascine

jeudi 5 décembre 2024

La "rédaction scientifique"

La rédaction scientifique ? On voit si souvent l'adjectif "scientifique" malmené que cela vaut la peine de s'interroger. 

D'autant que l'on sait que les adjectifs sont souvent à l'origine de confusion : pour parler du cortège du président, par exemple, il faut parler... du "cortège du président", ce qui n'est pas la même chose que le "cortège présidentiel", car un cortège n'est "présidentiel" que s'il est lui-même un président. 

Autre faute courante : "sciences appliquées". Bien des grands anciens, à commencer par Louis Pasteur, ont bien expliqué que cela n'existe pas, ne peut pas exister. Il y a des applications des sciences, mais pas de sciences appliquées, parce que, si c'est une application de la science, alors c'est... une application de la science, mais pas de la science. 

Alors, rédaction... scientifique : de quoi s'agit-il ? 

Si une rédaction traite de travaux scientifiques, si elle relate des travaux scientifiques, ce n'est pas une "rédaction scientifique". Et  une rédaction n'est scientifique que si elle est un travail scientifique.

D'ailleurs, certaines équipes de recherche scientifique font appel à des rédacteurs pour rédiger leurs articles scientifiques : la rédaction par ces personnes, par ces rédacteurs, n'est pas un travail scientifique. C'est de la rédaction. 

Nous en revenons à cette discussion d'il y a quelques jours où j'évoquais l'intérêt de faire des projets d'une façon véritablement scientifique, de ne pas perdre son temps à faire des projets bâclés, mais, au contraire, à profiter de l'occasion pour faire de la science. 

De même, la rédaction d'un article scientifique doit être une rédaction scientifique, c'est-à-dire la possibilité passionnante de poursuivre le travail expérimental par un travail théorique. 

C'est au moment de la rédaction notamment (mais pas seulement bien sûr) que l'on doit insister sur la partie conceptuelle, abstraite du travail. C'est à ce moment que les données peuvent prendre une importance qui dépasse la simple mesure, le simple travail technique de caractérisation quantitative. 

La rédaction scientifique ne consiste donc pas à aligner des mots plus ou moins bien, mais bien à faire un travail scientifique... ce qui me conduit à rappeler les étapes de la méthode scientifique :
- identification d'un phénomène,
- caractérisation quantitative du phénomène,
- regroupement des résultats de mesure en équations,
- regroupement des équations et introduction de concept pour former des théories,
- recherche de conséquences testables des théories
- test expérimentaux de ces conséquences. 

Au fond, tout cela peut se faire en quelque sorte lors d'une véritable rédaction scientifique. Par exemple, l'identification du phénomène, qui bien sûr aura été faite avant le travail expérimental, pourra être reprise en introduction de l'article que l'on prépare : il y a lieu de bien définir le phénomène, et la rédaction permet, quand nous exposons cela à nos lecteur, de vérifier une fois de plus que nous avons bien cerné la chose. 

Puis, la caractérisation quantitative sera évidemment déjà faite, mais la rédaction sera la possibilité de prendre du recul sur cette caractérisation et de l'évaluer en quelque sorte. Pour les parties de "Matériels et méthodes", notamment, a rédaction scientifique n'est pas l'énoncé d'une liste sans intérêt mais au contraire une présentation raisonnée, que nous pouvons à nouveau discuter intelligemment. 

Puis, pour le regroupement des données en équations, c'est aussi, sans doute, un travail qu'on aura fait avant la rédaction scientifique, mais cette dernière  sera une occasion de le reprendre, de l'évaluer. 

Puis, le regroupement des équations et d'introduction de nouveaux concepts feront  le véritable grand moment scientifique, essentiel, puisque  les données expérimentales servent précisément à cela. 

Les conséquences testables de la théorie ? Soit elles auront été testées dans le travail expérimental, soit la rédaction scientifique sera l'occasion de les énoncer, de les rechercher, et de conduire à une conclusion plus enthousiasmante qu'un simple rappel des résultats présentés dans la partie "Résultats" de l'article.  

Bef, la rédaction scientifique est un moment passionnant de l'activité scientifique parce que c'est un moment de science, de cette sens qui nous passionne tant.

mercredi 4 décembre 2024

À la réflexion, je suis étonné que tant de discours théorique soit donné avec tant d'aplomb... mais si peu de bases solides.

À la réflexion, je suis étonné que tant de discours théorique soit donné avec tant d'aplomb... mais si peu de bases solides. 

Je considère par exemple l'amollissement des légumes lors d'une cuisson. La théorie stipule que les échauffement (la "cuisson") dégradent les molécules de pectine, qui seraient comme des cordages entre les fibrilles de cellulose. 

Pourquoi pas, mais cherchons qui a établi cela ? On découvre alors qu'il existe des travaux sur la réaction de "bêta élimination" des pectines, mais cela a été fait en milieu basique et, et non pas en milieu acide, ce qui est le cas général des aliments. 

Cela étant, les pectines sont des polysaccharides avec une liaison O-glycosidique, dont on sait qu'elle peut se faire en milieu acide. Bref, il y a des hydrolyses par des mécanismes différents, et, à ma connaissance, on n'a pas regardé ce qui se passait vraiment, mécanistiquement, dans les carottes que l'on cuit. 

Sans compter que je réclame des études quantitatives, et non pas seulement de vagues descriptions : de combien les pectines sont-elles hydrolysées, en pratique culinaire ? Ces polymères que sont les pectines  sont composés de centaines ou des milliers de résidus, et il faut savoir après combien de temps on obtient des monomères.  

Bref, ce tableau que l'on avait brossé rapidement et négligemment est bien plus passionnant qu'il n'y paraissait, et il faut être honnête, et reconnaître que  l'état de que nos connaissances est bien plus embryonnaire que les publications ne le laissaient penser.
 

Il y a lieu de consacrer de nombreux travaux à cette question. Et il faut ajouter que ce n'est pas un cas isolé et que par exemple, je répète depuis des années voire des décennies qu'il est paradoxal que nous ayons des milliers d'articles consacrés au thé, à ses différents goûts selon les variétés, l'environnement, etc., mais je ne connais aucun article  consacré au mécanisme par lesquels les composés qui forment le goût du thé sont libérés dans l'eau à partir des feuilles. 

Je cite deux cas, mais il y en a  une infinité : toutes nos connaissances sont dans cet état très rudimentaire et c'est pour cette raison que la gastronomie moléculaire et physique s'impose absolument, urgemment : à un moment où l'on ne cesse de nous parler d'innovation, il y a vraiment lieu de comprendre ce que l'on fait pour faire différemment, et mieux. 

Je prends sur mon temps de recherche scientifique pour publier des cours. Ai-je raison ?

L'été dernier, j'avais publié un cours sur la synthèse de recherches bibliographiques. C'est initialement une réponse à des questions d'étudiants de master, une question d' "enseignement", mais la rédaction de  ce cours m'a conduit à faire progresser ma pratique initiale. Le document est maintenant complet, rigoureux, évalué par les pairs et public : il peut être communiqué à tous les étudiants qui ont à faire un tel travail. Ai-je eu raison d'y passer tant de temps ? 

À minima, j'ai beaucoup progressé personnellement lors de la rédaction de ce document, notamment parce qu'il m'a conduit à mieux explorer les intérêts et les inconvénients de l'intelligence artificielle appliquée à la recherche bibliographique, et aussi à la recherche scientifique. 

Actuellement, c'est un autre cours que je prépare, à propos de la méthode d'analyse descendante des phénomènes :  j'explique en substance que l'on a toujours intérêt à ne pas sauter d'étape lors de l'interprétation des phénomènes et à passer successivement, étape après étape, de l'analyse macroscopique des phénomènes à l'analyse microscopique, puis à l'analyse supra moléculaire et, enfin, à l'analyse moléculaire, chimique. 

Lors de la préparation de ce cours, j'ai été conduit à observer à calculer une proportion de modification moléculaire pour les différentes préparations culinaires. Mais ce type de calcul peut être fait pour tout procédé technique, en réalité. 

Dans mon texte, je fais une apologie de la chimie, que je vois comme l'étape ultime de l'analyse, et non seulement je me vois conforté dans mes idées et mes motifs personnel à propos de la chimie (qui me passionne !), mais je vois mieux le raisonnement qui conduit à ces idées et motifs, au lieu d'être mu seulement par un vague sentiment. 

Surtout, devant expliquer tout cela à mes jeunes amis (les "étudiants"), je suis conduit à prendre des exemples et, pour ces derniers, je suis non seulement amené à bien dérouler la théorie, sans faille, mais aussi à justifier ce que j'avance  par des recherches bibliographiques serrées. 

J'apprends beaucoup lors de la préparation de ce texte et je suis bien sûr qu'il rendra grand service aux étudiants qui en disposeront, mais il me faut revenir à la question initiale : ai-je raison de prendre sur mon temps pour faire ce document ? 

A minima, je vois que je suis conduit à "serrer les boulons" à propos de mes propres connaissances, à chercher des publications récentes sur les thèmes que j'aborde et à améliorer les théories dont je dispose, et que j'expose. 

Je vois aussi que je suis amené à apprendre moi-même,  notamment à propos de certaines réactions que j'utilise dans les exemples que je donne.
Je vois que je renforce mes réflexes scientifiques à la fois dans les interrogations que je fais, les questions que je me pose, mais aussi à propos de l'état des connaissances générales de la communauté scientifique dans les sujets que j'ai choisis comme exemple. Je vois mieux des insuffisances de ces dernières et cela me conduit à penser que, les questions étant bien posées, les travaux scientifiques peuvent ensuite se faire mieux. 

Bref, je vois beaucoup d'intérêt à la rédaction de ses cours, mais, si je n'ai pas de mauvaise foi, il faut que je m'interroge sur cette question de "lever un grand voile", le véritable travail scientifique : la rédaction de ses cours contribue-t-elle vraiment à cela ?

 

vendredi 8 novembre 2024

Qu'est-ce que la science (de la nature) ? Il n'y a qu'une seule méthode

Ces temps-ci, je vois nombre d'amis qui confondent rigueur et science.  La rigueur, c'est la rigueur, et Flaubert était rigoureux, ou Mozart, par exemple... mais ils n'étaient pas scientifiques pour autant. De la rigueur, on peut en mettre dans toute activité humaine, et c'est d'ailleurs le propre des gens que j'aime que de ne pas être des tas de viandes avachis, mais au contraire des êtres dressés autour d'une "colonne vertébrale" (quelle est la vôtre ?). Pour la science, j'ai discuté dans mon livre Cours de gastronomie moléculaire N°1 : Science, technologie, technique (culinaires), quelles relations ?, la question du mot "science", que les sciences de la nature ont eu tendance à "confisquer"... mais il y a des sciences de l'humain et de la société, qui ne se confondent pas avec elles. 

Et l'on a le droit de parler de la "science du cuisinier", ce qui ne signifie pas que les cuisiniers soient des scientifiques... au sens des sciences de la nature. Focalisons nous donc à partir de cette phrase sur les sciences de la nature. Quel est leur objet, leur unique objet  ? <h3><b>Chercher les mécanismes des phénomènes, par l'emploi de la "méthode scientifique". </b></h3> Et qu'est-ce que cette méthode ? Elle tient en six points : <b>1. identifier un phénomène</b> 2.<b> le quantifier</b> (tout doit être "nombré", disait déjà Francis Bacon) 3. <b>réunir les données de mesure en équations</b> nommées "lois" 4. <b>produire des "théories" </b>en regroupant les lois et en introduisant des "mécanismes", assotis de nouvelles notions, concepts... ; à noter que, évidemment, tout doit être quantitativement compatible avec ce qui a été mesuré en 2 5. <b>recherche de conséquences logiques, testables,  des théories</b> 6. <b>tests expérimentaux de ces prévisions théoriques</b> 7. <b>et ainsi de suite </b>à l'infini en bouclant, car une théorie n'est qu'un modèle réduit de la réalité, pas précis à l'infini (un exemple : Georg Ohm, à partir de ses mesures imprécises, a identifié la loi d'Ohm, mais quand, un siècle après, on y a regardé de plus près, on a vu que la relation entre la différence de potentiel et l'intensité électrique était plutôt sous la forme de marches d'escalier... et c'est l'effet Hall quantique). Tout cela étant clair, on pourrait me demander : comment êtes-vous sûr que cette méthode est la méthode scientifique ? Ma réponse est que je soumets cette vision à tous les scientifiques du monde entier, dans les pays du monde, à raison d'environ 200 conférences par an, et jamais je n'ai eu de réfutation. Cela est publié... mais, surtout, c'est tiré de l'analyse des travaux des Lavoisier, Faraday, Pasteur, Einstein, etc. Bref, ce n'est pas une invention personnelle. 

D'autre part, on observera que la science (de la nature) ne se confond pas avec la technologie ou ingénierie, ni avec la technique. La technologie a une visée applicative que la science n'a pas. Je rappelle que la science cherche seulement les mécanismes des phénomènes ; elle ne cherche ni à produire des médicaments, ni à faire des ordinateurs, etc. La technique, elle, est la production. Elle est améliorée par la technologie, qui prend les résultats de la science pour les transférer. C'est notamment pour cette raison qu'il faut absolument combattre des terminologies comme "technoscience", qui sont aussi absurde que "carré rond". Et pour terminer, j'ajoute que chaque champ - science, technologie, technique- est merveilleux... quand il est bien fait. Il n'y a pas de hiérarchie, la science qui serait mieux, ou la technique, ou la technologie : on ne compare pas des pommes avec des bananes. Et il faut les trois pour que nous parvenions, dans la plus grande clarté intellectuelle, à faire demain un monde meilleur qu'aujourd'hui. Vive la Connaissance produite, partagée, utilisée pour le bien de l'humanité !

mardi 5 novembre 2024

La bonne foi est fructueuse : analysons nos erreurs

Alors que je sors d'une séance expérimentale avec un étudiant intelligent et intéressé, je le vois faire des erreurs qui sapent son travail, annihilent ses efforts.
Plus exactement, l'envie de faire bien l'a conduit à se lancer trop vite dans la partie expérimentale, et c'est ainsi que des phénomènes non anticipés se sont ajoutés à ceux qu'il voulait analyser.  

L'analyse de son échec ne vise pas à lui mettre la tête dans la boue, mais à lui permettre d'éviter ce type d'erreurs pour le futur.

Car on ne considère pas assez qu'une expérimentation est moins un travail technique local d'une sorte d'ascèse, de recherche d'amélioration personnelle, et c'est d'ailleurs ainsi que l'expérimentation prend tout son intérêt.

À la réflexion, je m'aperçois que nous avons déjà rencontré souvent des erreurs du type de celle d'hier, et cela a  a constitué la base de ce que nous avons donné des "DSR", des documents structurants de recherche qui visent précisément à éviter les erreurs, à nous prémunir contre les complexités inattendues, à nous permettre de mieux anticiper.

La première leçon, la leçon la plus immédiate de l'analyse de l'erreur d'hier, c'est que nous devons avoir un programme expérimental clair avant de nous lancer. Ce programme doit être fondé sur une analyse, de même que dans un calcul, s'impose un libellé clair et explicite des objectifs, puis un schéma sur lequel apparaissent les grandeurs d'intérêt.  L'expérimentation doit commencer par l'établissement d'un modèle théorique qui sera exploré expérimentalement.
Au fond, que l'on calcule que l'on expérimente, il y a des quantités à considérer, et rien ne vaut un schéma faire apparaître, les identifier

J'y reviens : on aurait beau jeu de critiquer l'étudiant pour une sorte de légèreté, car je suis presque sûr que, sans la méthode que je propose, la plupart des étudiants seraient tombés dans le piège.
J'ai bien raison de dire que le diable est caché derrière tout geste expérimental, tout calcul




samedi 19 octobre 2024

La... recherche ?

 Alors que des amis industriels sont venus parler à nos étudiants, j'ai à nouveau rencontré la confusion entre recherche, recherche et développement, développement, recherche appliquée... 

Commençons par le mot développement, qui est un anglicisme qui signifie mise au point. Quand quand on cherche à faire un million de pizza par jour avec, sur chacune, quelques feuilles de basilic, il y a certainement lieu de faire une recherche pour savoir comment déposer les feuilles et car on ne les mettra pas à la main.
Il y a d'abord la recherche d'un procédé, qui est une recherche technologique, et ensuite une mise au point du procédé qui se fait sur la ligne de production. Dans les deux cas, il s'agit de rechercher mais pas avec la même profondeur et, au fond, on pourrait dire qu'il y a une recherche technologique globale pour la mise au point,  et une recherche technologique locale pour la mise au point. 

Mais la recherche technologique se distingue de la recherche scientifique, qui est  l'exploration des mécanismes. 

Et nous arrivons ici à cette question de la recherche scientifique  : elle n'est ni pure ni académique, mais simplement scientifique. 

Pour cette dernière, on cherche à faire des découvertes, à lever un coin du grand voile, comme le disait Albert Einstein et non pas à trouver des applications, des produits, des améliorations des technique. 

Il y a donc d'un côté la recherche scientifique, puis la recherche technologique dans la mesure où elle améliore les techniques, et cette recherche technologique peut être plus ou moins profonde. 

mercredi 11 septembre 2024

Science pure versus technologie

Il y a périodiquement des personnes qui viennent dire que la séparation entre la science pure et la "science appliquée" est périmée, que ce sont des idées d'un autre temps... mais rien qu'une telle déclaration montre à la fois une volonté idéologique et une mauvaise perception de la science, sans compter un usage médiocre de la langue, ce qui a des conséquences sur la pensée. 

 

J'invite donc ces personnes à lire ou à relire la biographie de Max Planck intitulée "Planck, une conscience déchirée",  par John Heilbron (Editions Belin) : elle y verront des discussions entre Planck et Starck,  alors que l'industrie allemande, très lié à certains milieux technologiques, poussait pour que l'Académie des sciences accueille en son sein une division de "sciences appliquées". Ce sont là les mots de Heilbron,  mais je ne suis pas sûr que Planck aurait adhéré à cette description, et notamment  parce que il n'existe pas plus de "science pure" que de "sciences appliquées" :  la science, c'est la science, à savoir une activité de recherche des mécanismes des phénomènes, et les applications de la science sont... des applications de la science. L'expression "science appliquée" est fautive, parce que si une science était appliquée, ce serait de la technologie, et non plus de la science.

Cette question de regrouper des activités technologiques avec des activités scientifiques est récurrente. Elle s'est donc posée dans les années 1920 en Allemagne, mais elle s'est également posée en France, vers la Seconde Guerre mondiale, puis à nouveau il y a quelques petites décennies à l'Académie des sciences en France : Guy Ourisson, qui était alors président de l'Académie, fut un artisan de la création de l'Académie des technologies à partir de ce qui se nommait naguère le CADAS,  le comité des applications de l'Académie des sciences. 

 

J'insiste un peu parce que j'ai encore rencontré des amis qui auraient voulu que j'admette que la science moderne avait bien changé qu'elle était nécessairement liée à l'industrie ou à l'armée ;  que les idéaux de Planck  ou d'autres, à propos de la science, étaient devenus périmés, etc. 

En réalité, je m'étonne que de telles personnes se croient, dans la discussion, à la hauteur de Planck ou même d'Albert Einstein, dont le texte de discours pour l'anniversaire des 70 ans de Planck montrait combien il adhérait à ces idées que d'aucuns prétendent périmés. 

 Oui, il y a la science, qui est merveilleuse, et les applications des sciences qui sont merveilleuses quand elles sont faites pour le bien de l'humanité. 

Et rien n'y fera  : une recherche d'application est une recherche d'application et une recherche de mécanismes est une recherche de mécanismes. Certes, certains individus balancer entre les deux  ; ils peuvent à un moment chercher des applications, et chercher des mécanismes à un autres, mais  pour autant, ces deux activités ne se confondent pas. Il y a la science, d'une part, et les applications des sciences d'autre part.

vendredi 6 septembre 2024

Cherchons toujours les mécanismes !

Lors de la dernière année universitaire, j'ai eu l'occasion d'observer que nos élèves ingénieurs n'avaient pas suffisamment le réflexe d'aller chercher les mécanismes des phénomènes qu'ils considéraient.
De sorte que, cette année, au moins pour ce qui me concerne, je serai très insistant à ce propos car je crois que c'est là la clé du bon exercice du métier d'ingénieur. 

Je ne méconnais pas que ce métier a une composante strictement technologique au sens de l'amélioration des techniques, de la résolution de problèmes techniques, de la mise au point des produits, et une composante d'encadrement d'équipe, de gestion de projet. Ici, c'est bien la question technologique qui m'intéresse et l'expérience montre amplement que des maniments superficiels des questions ne mènent à rien, font perdre du temps... 

La clé du succès, c'est la compréhension des phénomènes et la mise en œuvre de solutions guidées par cette compréhension.
Il faut chercher le mécanisme en terme de chimie, de physique, de biologie et c'est ensuite, quand on a une description des phénomènes, une analyse des questions en ces termes scientifiques, que l'on peut résoudre les problèmes de façon efficace. 

Je prends la précaution d'ajouter que je ne cherche pas à transformer nos ingénieurs en scientifiques, en personnes qui cherchent les mécanismes des phénomènes. Non, il s'agit plutôt que nos élèves ingénieurs aillent chercher la connaissance des mécanismes produites par les scientifiques et mettent en œuvre cette connaissance pour les questions qu'ils traitent. 

D'ailleurs, celles et ceux qui ont concocté les programmes de préparation aux écoles d'ingénieurs ont bien compris tout cela puisqu'ils ont mis au programme des matières fondamentales telles que mathématiques, chimie, physique, biologie.
Nos élèves ingénieurs bénéficient de ce socle très ferme , et nous avons la mission de les faire avancer plus loin. Ils auraient tort s'ils pensaient pouvoir ne plus traiter ces questions, et d'ailleurs, beaucoup aiment ces matières. Poursuivons donc sur la lancée, incitons-les à ne pas oublier les connaissances qu'ils ont acquises et, au contraire invitons les à développer leur connaissance dans tous ces champs car c'est ainsi qu'ils feront d'excellents ingénieurs. 

Cela a été bien compris notamment par l'Ecole de physique et de chimie de Paris, où  l'enseignement « scientifique » est très poussé, sans négliger  pour autant les questions pratiques : il y a des séances expérimentales tous les après-midi pendant 4 ans. 

 

Aidons nos amis à devenir d'excellents ingénieurs ! 

samedi 31 août 2024

A propos de sociologie des sciences (heureusement, un cas particulier ne fait pas une discipline)

Est-il utile de passer quelques mois dans un laboratoire pour comprendre ce que sont les sciences quantitatives ? Oui et non. 

Oui, car on voit ce qu'est vraiment la science (à condition que ce ne soit pas de la technologie).
Non si l'on se contente de regarder, sans plonger dans le calcul. 

Pour bien cadrer la discussion, je rappelle que les sciences de la nature  fonctionnent par : 

- identification d'un phénomène 

- caractérisation quantitative du phénomène 

- réunion des données de mesures en "lois" synthétiques, c'est-à-dire en équations 

- recherche de mécanismes quantitativement compatibles avec les lois (parfois, les mécanismes ne sont autre que des noms collés sur des groupes de comportements) 

- recherche de conséquences de la théorie constituée par l'ensemble des mécanismes retenus 

- test expérimental de la conséquence théorique, en vue de la réfutation de la théorie, afin de l'améliorer. 

A part le tout début du travail, le reste fait usage du calcul, et rien de la science de la nature ne se comprend sans comprendre le calcul. Dit autrement, comprendre les sciences de la nature, c'est comprendre la description précédente, ce qui est vite fait, mais, surtout, comprendre les relations entre les mesures et les mécanismes, par les équations qui sont au coeur de l'activité. 

Alors oui, on peut venir passer quelques mois dans un laboratoire, pour en comprendre le fonctionnement, mais si l'on ne plonge pas dans les calculs, si ces calculs ne sont pas au centre de l'investigation, alors il y a le risque que l'on ne voie pas vraiment la science, mais seulement son aspect technique, moins d'une moitié d'elle. Cela n'a aucune importance si l'on veut simplement satisfaire une curiosité, mais cela le devient si l'on fait de cette connaissance la base d'un travail ultérieur. 

Or trop de commentateurs des sciences de la nature sont restés aux mots (de plus de trois syllabes, bien entendu : cela fait plus sérieux, plus "intellectuel"), sans plonger dans les équations. 

Bien sûr, les sociologues peuvent s'intéresser au groupe social constitué par les scientifiques et les relations qu'ils entretiennent avec le reste du monde, mais cela ne dit rien du contenu des sciences quantitatives : la validité de leurs travaux est limitée aux comportements humains... qui ne sont que peu différents des comportements dans d'autres groupes humains : avant d'avoir une activité scientifique, les scientifiques sont humains. 

Oui, il y a l'humain, et le professionnel. Pour l'humain, c'est dit, mais pour comprendre le fonctionnement du professionnel, il y a des règles particulières, qui s'enracinent plus profondément dans les sciences, ou, dit plus clairement, qui ne se comprennent que si l'on comprend mieux les sciences, c'est-à-dire dans les équations. 

Considérons par exemple la chimiométrie, qui est une discipline qui fait usage de mathématiques à propos de données d'analyse chimique. Il y a des débats pour savoir si seules les méthodes statistiques sont au coeur de la discipline, ou bien si d'autres types de mathématiques peuvent être utilisées. Il y a des débats pour savoir si la chimiométrie est une science ou une technologie, ou encore une technique. Il y a des débats pour savoir si les espoirs qu'on y met correspondent aux mots posés dans des appels d'offres, par exemple.
Discuter de tout cela ? Comprendre les relations entre scientifiques quand elles sont centrées sur ces débats ? Il faut manifestement savoir de quoi l'on parle, plonger dans le détail des calculs, en comprendre la mécanique, la nature. 

Je sais bien qu'un cas isolé ne fait pas une règle générale, mais j'ai du mal à m'empêcher de penser que le monde de la sociologie des sciences (faut-il un monde entier pour cela ?) devrait faire du ménage dans ses rangs. Et, comme les autres disciplines scientifiques, raidir un peu les règles de publication. 

J'ai, en effet, reçu dans mon groupe de recherche une sociologue des sciences d'une des principales université du monde, dirigée par un ponte de la sociologie des sciences (on verra pourquoi je ne nomme personne précisément!). La personne était venue pendant six mois au laboratoire, et, mieux même, dans mon propre bureau. Je la tenais au courant de tout, je partageais avec elle les feuilles de calcul (qu'elle ne comprenait pas), les ébauches d'article, je l'emmenais avec moi quand je faisais des conférences, je répondais à ses questions en voiture, dans le métro… Évidemment quand on passe beaucoup de temps en compagnie de quelqu'un, iil est bien difficile de rester  longtemps sans « sourire », sans faire de l'ironie, de l'antiphrase… surtout moi ! Et j'ai eu finalement la stupéfaction de voir imprimé dans sa thèse des blagues que je lui avait dites... et qu'elle avait prises au sérieux. Mais ces blagues n'étaient pas assorties de point d'ironie, et elles n'étaient pas prises comme telles : notre amie avait mis au pied de la lettre des idées évidemment insoutenables. Pis encore, je crois qu'elle n'avait rien compris à la science quantitative, parce qu'elle voyait cette dernière comme une sorte de récit, assorti de signes incompréhensibles pour elle, alors que les sciences de la nature sont précisément cela, le maniement d'équations qui tiennent si bien au phénomène. Notre "collègue" aurait passé dix fois plus de temps avec nous que ses a priori n'auraient pas été changés. 

Pour comprendre la science, il faut donc faire l'effort de comprendre les équations qui sont véritablement la science, qui la structure, qui la déterminent… Oui, des explications patiemment données permettent de comprendre, à n'importe qui, mais seulement si ce n'importe qui a envie de comprendre le formalisme, s'y plonge. 

Pour les autres, la science est un récit, un conte qui, évidemment, n'a pas plus de validité que n'importe quelle histoire de fée ou de revenant. Ce cas n'est pas isolé, et l'on voit trop d'articles ou de livres de sociologie ou de philosophie des sciences qui passent à côté de ce que sont vraiment les sciences quantitatives, ou qui présentent des "élaborations" où les scientifiques n'y retrouvent pas leur activité. 

Comment améliorer les choses ? En introduisant du calcul dans le cursus des sciences de l'humain et de la société, en n'acceptant pas que la rigueur soit moindre que dans d'autres disciplines. Mais faut-il être plus exigeant dans ce champ que dans d'autres ? La question est épineuse, et compliquée par le fait que le discours de certaines sciences de l'homme et de la société est un discours en langage naturel, qui, de ce fait, peut être entendu par l'homme et la femme de la rue.
 

mardi 20 août 2024

Qu'est-ce que la science ?


L'enseignement doit s'inspirer de la mythologie alsacienne, qui reconnaît que les héros conduits par Odin doivent sans cesse lutter contre les géants, sous peine d'une dévastation du monde nommée Ragnarok : chaque groupe d'âge est ignorant de ce que les précédents ont appris, de sorte que nous devons les aider à obtenir cette connaissance. D'où l'idée commune, en pédagogie, selon laquelle la répétition est la base de l'enseignement ? Pour le mot "science", nous sommes bien d'accord que le mot désignait naguère simplement un savoir (on parlait de la science du cordonnier), et, aujourd'hui, dans l’enseignement supérieur, on confond par ce mot les sciences de la nature, et les sciences de l'humain et de la société. Ici, ce sont les sciences de la nature que j'évoque. Elles sont dites parfois "expérimentales", mais c'est trop réducteur, parce qu'il peut y avoir des théoriciens. Parlons de sciences de la nature. Que sont ces sciences ? Des activités de culture, et, plus précisément, de recherche de connaissances. Mais, plus précisément, je propose de caractériser les activités humaines par - un objectif - le ou les chemins (methodon, en grec : méthode) qui y mènent (le choix du chemin, c'est la stratégie). En l'occurrence, l'objectif des sciences de la nature, c'est la recherche des mécanismes des phénomènes. Et le chemin me semble être le suivant : - identification d'un phénomène (parmi l'immensité de tous les phénomènes qui se présentent à nous à chaque instant) - caractérisation quantitative du phénomène (si possible sur des variables pertinentes) - recherche de "lois" synthétiques, qui regroupent les données numériques obtenues lors des caractérisations - recherche de mécanismes par "induction", à partir des lois synthétiques précédentes ; cela constitue une "théorie" (on lira avec intérêt les textes de Henri Poincaré à ce sujet) - recherche de conséquences de la théorie obtenue, en vue de faire un test expérimental de ces conséquences (c'est en vertu de tels tests que les théories scientifiques sont dites "réfutables", et que les théories non réfutables ne méritent sans doute pas d'être nommées "scientifiques") - tests expérimentaux des conséquences- et ainsi de suite, en repartant sur les caractérisations quantitatives. C'est clair et simple, non ? Alors pourquoi cela ne m'a-t-il pas été enseigné, quand j'étais étudiant en sciences ? Et pourquoi continue-t-on de parler de "carrières scientifiques" pour désigner les métiers de l'ingénieur, qui n'ont de rapport ni avec l'objectif précédent, ni avec la méthode décrite ? Il faut changer rapidement !

mardi 18 juin 2024

Les Ateliers expérimentaux du goût

 Hier, lors de la réunion des professeurs de physique et de chimie de l'Académie de Bordeaux, j'ai été remis en position de présenter les Ateliers expérimentaux du goût ainsi que les Ateliers science et cuisine, que j'avais introduits dans l'Education nationale au début des années 2000. 

Force est d'observer, avec le recul, que la méthode pédagogique introduite alors n'a pas démérité et qu'elle n'est pas périmée : au bénéfice des élèves, les collègues peuvent parfaitement mettre en œuvre des ateliers de ces deux types. 

Que faut-il faire pour relancer la machine ? Sans doute en refaire des présentations à l'attention des professeurs qui, pour certains, ont oublié l'existence des ateliers, et qui, pour d'autres,  ne la connaissent pas. 

Il n'y a nulle part de mauvaise volonté, bien au contraire, et il y a surtout l'observation que, lors des préparations culinaires, il y a mille phénomènes extraordinaires qui méritent d'être considérés, analysés, étudiés, en laboratoire ou en classe. 

Souvent, un microscope fait l'affaire, mais évidemment, si l'on calcule un peu, on fait bien mieux. En tout cas, il y a cette observation que ces activités scientifiques ne coûtent quasiment rien, surtout quand on les fait à l'occasion de la préparation d'aliments que l'on va consommer. 

Mousses, émulsions, gels, suspension... Tout y passe, et ces colloïdes sont à l'interface de la physique, de la chimie, mais aussi de la biologie puisque la cuisine, c'est usage de tissus végétaux ou animaux. 

Merci aux collègues de l'académie de Bordeaux de m'avoir accueilli si chaleureusement et surtout, de m'avoir permis de présenter à des collègues des activités qui mériteraient de figurer au cœur de leurs études avec les élèves.

mardi 11 juin 2024

De bons professeurs pour les débutants ?



Je connais au moins deux très bons musiciens qui ont écrit qu'il faut surtout d'excellents professeurs pour les débutants. Dit ainsi, cela paraît logique, car ce sont les bons professeurs qui donneront des conseils avisés que les élèves pourront suivre...

Mais... Est-ce une idée juste ? On se souvient que j'ai souvent discuté la question des professeurs : je maintiens qu'il faut du travail, plus que des professeurs. A quo les professeurs servent-ils ? Peuvent-ils vraiment nous aider ? Ou bien devons-nous toujours faire des erreurs et les surmonter pour grandir ?

Plus généralement, quel est le rôle d'un professeur ? La question n'a pas été posée par les deux musiciens qui ont usé de leur autorité pour nous dire ce "Il faut", que je récuse. Il ne faut rien, sauf ce que je décide.

D'ailleurs, pour ce qui concerne la musique, je connais au moins un grand flûtiste qui  a appris par lui-même, sans professeur. En alsacien, on dit "D'Uewung macht d'Maischter", l'exercice fait le maître. Et en français : quelqu'un qui sait, c'est quelqu'un qui a appris.
Alors ?

Surtout, la notion de "bon professeur", au singulier, doit interroger : le bon professeur pour une personne ne particulier est-il bon professeur pour une autre personne ? Je ne le crois pas, d'expérience.

Et, pour terminer, le voeu de nos deux musiciens initiaux est peut-être "pieux"... car quel Rostropovitch, quel Tortelier, quel Maurice André acceptera-t-il de détourner son temps pour aller "border des enfants dans leur lit", les tenir par la main, longuement, patiemment ? Et mieux, seraient-ils de "bons professeurs" ?

Bref, je suis loin d'être convaincu à la déclaration de nos deux musiciens et je propose plutôt que nous rassemblions des conseils utiles, que nous mettrions à la portée de tous, sur un internet dont nous disposons maintenant.
Certes, certains ont besoin d'enthousiasme, et c'est aussi cela que donnent des professeurs. Le goût d'étudier, et un chemin proposé pour les travaux, les études que seul l'étudiant peut faire.

Pour les sciences, qui m'intéressent plus que la musique, il y a eu ce cas merveilleux de Richard Feynman, physicien lauréat du prix Nobel, qui a pris sur son temps pour aller faire une série de conférences dans les universités américaines, ce qui a donné lieu un très beau livre de physique. Il reconnaissait, a posteriori, que ces conférences étaient peut-être inutiles : elles passaient au-dessus de la tête des moins bons des étudiants, et elles étaient inutiles pour les meilleurs, qui étudiaient par eux-mêmes.

Mais, j'y reviens : à l'heure d'Internet, il est peut-être plus intéressant de disposer de films de très grands professeurs dont nous ferons notre miel.
D'ailleurs, Michel Debost, flûtiste, a  l'honnêteté de dire que quelle que soit la façon de faire, si elle nous convient, alors c'est la bonne. En musique, on se souviendra également du pianiste Glenn Gould,  qui jouait  ou mépris de toutes les règles, sur une sorte de petit tabouret qui faisait hurler tous les pédagogues. Il est souvent répété pour la flûte que l'embouchure devait être parfaitement centrée, mais on a vu nombre de grands flûtistes mettre l'embouchure en biais, sur le côté, parce que la forme de leurs lèvres se prêtait mieux à cette position. De même pour le violoncelle,  il faudrait une tenue particulière... qui n'est certainement pas celle d'un d'un artiste tel que Yoyo Ma, qui joue couché en arrière.

Reste-t-il des conseils certains ? Récemment, j'ai vu en ligne les carnets de Richard Feynman, et j'ai vu qu'il écrivait en majuscules... ce qui ralentit. Et, d'autre part, j'ai vue les cahiers de Pierre-Gilles de Gennes, parfaitement calligraphiés : encore une façon de se ralentir, de se laisser penser avant d'écrire ce qui est peut-être faux. On se dit que, ainsi, on évite des confusions de signes, on se laisse le temps de penser... Il faudrait maintenant croiser cela avec les cahiers d'autres grandes scientifiques du passé avant d'en tirer des conclusions... que nous pourrions alors "enseigner".