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lundi 17 février 2025

L'invention des sciences de la nature

Dans un billet précédent, je relisais Francis Bacon pour savoir si oui ou non il avait été à l'origine de la méthode scientifique que nous avons aujourd'hui et ma conclusion était que plutôt non mais quand même oui.

 Je m'explique : nos idées actuelles ont été longuement forgées et il a fallu nombre de personnes pour y parvenir. 

Pour la méthode scientifique, la physique et la chimie, la biologie ont marché à des pas différents. Il est clair que c'est la mécanique et l'astronomie qui ont commencé à l'époque de l'Antiquité grecque, mais c'est donc vers la Renaissance que les sciences modernes sont lentement apparues, et notamment quand l'algèbre a été façonné. 

Ce n'est pas d'ailleurs Descartes tout seul qui est arrivé à cela car il y a eu également des personnages importants comme Viete, mais progressivement, les capacités de calcul se sont augmentées et l'utilisation de ces dernières, alliée à une grande rigueur dans l'étude des phénomènes, rigueur qui se débarrassait autant que possible des préjugés philosophiques, est arrivé à une mathématisation de la physique et à sa constitution en sciences de la nature, tenant sur les deux pieds que sont l'expérience et le calcul.

Pour la chimie, c'est ensuite à l'époque de Lavoisier que les choses se sont faites mais on n'était pas encore à nos idées complètement modernes puisque Chevreul, une génération après Lavoisier, parvenait encore à faire œuvre originale avec sa méthode à posteriori expérimentale. 

Aujourd'hui les choses sont bien plus claires et on voit bien  la méthode scientifique repose sur le travail de nombreuses personnes tout également importante. Il y a une espèce d'idées  enfantine à vouloir attribuer à une seule personne des avancées qui sont en réalité dues à plusieurs.

dimanche 2 février 2025

Bacon a-t-il inventé la science moderne ?

Certains auteurs disent que Francis Bacon aurait été le créateur de la science moderne avec son Novum Organum  : j'ai voulu en avoir le cœur net en relisant ce texte que j'avais découvert il y a très longtemps et que j'avais un peu oublié. 

On y trouve  une très longue diatribe contre la philosophie excessivement théorique et inventive qui fut notamment celle d'Aristote,  et, inversement,  une apologie d'une étude des faits de la nature sans divagations philosophiques, une apologie d'une "philosophie naturelle" dont la méthode serait très différente. Et notre auteur de classer les faits d'observations. 

Mais en sortant du livre, si l'on voit bien une volonté de mettre à plat la philosophie naturelle, les sciences de la nature, on ne voit certainement pas des idées aussi précises que celles sur données par Galilée, notamment à propos de l'étude quantitative des phénomènes

Certes Bacon dit bien que tout doit être mesuré, pesé, nombré... Mais il ne fait lui-même que classer des observations par type d'observations, ceux qui est bien loin de ce que fera Galilée, qui mettra en pratique cette méthode expérimentale qui met en œuvre le calcul sur les nombres que sont les résultats de mesure. 

D'ailleurs,  plusieurs des idées de Bacon, notamment à propos des causes, sont déjà données par Blaise Pascal, et l'on n'oubliera pas qu'il y a eu auparavant René Descartes qui a introduit les outils mathématiques pour manier tout cela. 

Bref, il est exagéré de dire que Bacon aurait inventé la science moderne, et il vaudrait mieux avoir la justesse de dire que, après certains Grecs de l'Antiquité qui explorèrent correctement des phénomènes naturels, il y eut Descartes,  Pascal, Bacon, et Galilée enfin pour arriver à cette méthode scientifique que nous utilisons aujourd'hui. 

Au sortir de cette lecture, je continue à penser que les deux phrases de Galilée disant que l'expérience doit avoir raison contre toute autorité, d'une part et, d'autre part que le monde est écrit en langage mathématique, sont des piliers sur lesquels repose la méthode scientifique d'aujourd'hui. 

Il faut ajouter que Bacon a dit des choses très intéressantes à propos de la chimie, sans employer le mot évidemment , puisque cette science qu'est la chimie n'avait pas encore été dégagé de l'alchimie. 

En effet, la transition s'est faite un peu plus tard, aux environs de la parution des premiers tomes de l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert, quand on a arrêté de considérer que, si une expérience rate, c'est que l'expérimentateur est "insuffisant" ; on a fini par comprendre que, comme le disait Galilée, l'expérience a toujours raison. 

Il y a eu ainsi une transition de l'alchimie vers la chymie,  puis vers la chimie  quand Lavoisier introduisit très explicitement des méthodes quantitatives, dans une méthodologie qui restait très expérimentale. Au fond, Lavoisier a fait pour la chimie ce que Galilée a fait pour la physique. Et en ce sens, ces deux hommes sont plus grands que les autres de leur temps car l'observation ne suffit pas, le jugement n'est pas un outil suffisant pour relier les faits et c'est par les nombres que s'imposent les sciences de la nature.

samedi 28 août 2021

Pourquoi il n'y a pas de force centrifuge


La question me revient hier  : pourquoi ne faut-il pas parler de force centrifuge, mais d'une force centripète pour un mouvement de rotation, tel celui que nous faisons quand nous sommes à l'intérieure d'une voiture, ou sur un manège ?

Je ne veux pas manquer de signaler  ici le livre absolument extraordinaire, bien qu'un peu ancien, de Marie-Antoinette Tonnelat sur l'histoire du principe de relativité.



Je vois en particulier deux images essentielles qu'il me faudra discuter. L'une représente le mouvement d'une pierre lâchée du haut du mat d'un navire alors que ce dernier avance à vitesse constante devant un quai, et l'autre est une gravure qui montre ce que l'on pensait être la forme des trajectoires des boulets de canon, avant Galilée : d'abord une ligne droite inclinée, puis une chute verticale... ce qui est bien loin de notre représentation moderne, juste, qui est celle d'une parabole.

Certes, le livre de Marie-Antoinette Tonnelat est épais, et pas facile parce que sans beaucoup de concessions,  mais il est clair.  Et, je me limite à la question de la force centripète, qui est une victoire de la pensée de la Renaissance. 

 

Mais il faut commencer par parler d'inertie


Considérons un bloc de glace sur la plate-forme arrière d'un camion qui roule à vitesse constante. Une notion essentielle, pour les études de mouvement, est l'inertie : un objet matériel ne change pas d'état de mouvement (de vitesse) tant qu'on ne lui applique pas de force. Et si on lui applique une force, on change son mouvement, ce qui correspond à lui communiquer une accélération

Bref un bloc de glace sur la plate-forme la camion qui roule à vitesse constante va  en ligne droite, à vitesse constante, toujours dans la même direction, tout comme le camion (pour arriver dans cet état, il aura fallu maintenir le bloc de glace, lors de l'accélération initiale du camion).
 
A partir de la vitesse constante, supposons maintenant que le conducteur du camion freine, c'est-à-dire qu'il réduise la vitesse du camion. Alors le bloc de glace va foncer vers la cabine du conducteur, parce que sa vitesse n'a pas de raison de changer (s'il n'y pas de forces de frottement avec la plate-force). Sa vitesse reste constante, alors que celle du camion diminue.

Inversement, si le camion avait accéléré, le bloc de glace serait tombé par l'arrière, parce que la vitesse du camion aurait été supérieure à la vitesse du bloc de glace.



Voilà pour l'inertie : d'une part, un objet de matériel ne change pas de mouvement tant qu'on ne le fait pas changer de mouvement, ce qui a lieu par l'application de forces ; d'autre part, le changement de la vitesse est ce que l'on nomme l'accélération. Il y donc une merveilleuse logique à  ce premier le principe de la dynamique, qui stipule que la somme des forces appliquées à un corps est proportionnelle à l'accélération, le facteur de proportion étant la masse inertielle.

 

Mais on se souvient que l'on voulait discuter la question des mouvements de rotation.  

Considérons donc maintenant que le camion tourne. Le blog de glace  continue d'avancer avec la même vitesse, dans la même direction.

Mais le camion tourne parce que le conducteur, par le volant qui agit sur les roues, éprovoqué un changement de sa vitesse.

Autrement dit, le bloc de glace sors du camion par le côté opposé à celui vers lequel le camion tourne.

Pour conserver le bloc de glace dans le camion, dans le mouvement circulaire voulu par le conducteur, il faut qu'il y ait une paroi sur le côté, qui exerce une force en direction du centre de rotation :  c'est-à-dire donc bien une force centripète, vers l'intérieur.

D'ailleurs, quand on est en voiture, et que l'on tourne, on sent bien que la portière nous pousse versle centre de rotation.
Et, inversement nous-même poussons la portière vers l'extérieur... ce qui est un  combat perdu, parce que généralement la voiture est plus lourde que nous.

De même, dans un manège, on n'est pas éjecté vers l'extérieur du manège en raison d'une force centrifuge, mais, au contraire, si l'on reste en rotation avec le manège, c'est que des forces centripètes sont appliquées.
On n'est éjecté qu'en raison de notre inertie, parce que la force centripète a été insuffisante.

 

Me reste à décrire l'idée de l'expérience du navire et de Galilée.

La pierre lâchée du navire qui passe devant le quai tombe verticalement pour un marin sur le navire : la pierre a initialement la même vitesse que le bateau et que le marin, de sorte que, si elle n'est pas ralentie par des frottements avec l'air, elle continue, lors de sa chute, son mouvement de translation horizontal à la même vitesse. Et comme le marin a cette même vitesse, il ne voit que la chute verticale.

Mais pour un observateur immobile, sur le quai, la pierre décrit une parabole, composée d'un mouvement de chute et d'un mouvement de translation.

Et nous pouvons maintenant revenir à la question balistique : ce fut d'un  progrès extraordinaire que de comprendre que le mouvement d'un corps ne s'accompagnait pas d'une espèce de perte d'énergie de mouvement, que le mouvement ne s' "épuise" pas progressivement  comme on le croyait quand on représentait les boulets comme partant en ligne droite avant de tomber verticalement. 



Oui, au contraire, il y l'inertie, l'accélération, et éventuellement l'accélération de la pesenteur. En discutant avec les jeunes amis qui m'interrogent, je vois mieux la beauté extraordinaire de tout cela,  et une fois de plus je leur suis reconnaissant de me donner cette occasion qui permet de partager mon enthousiasme avec d'autres.


mercredi 29 juillet 2020

De la rationalité partout !

1. Récemment, je me suis étonné qu'une jeune amie de notre groupe de recherche ignore comment nous sentons. Oui, pourquoi percevons-nous les odeurs ?

2. Je m'étonnais de cette ignorance, tout comme je me suis étonné, il y a plusieurs décennies, quand, âgé de vingt ans, j'avais rencontré une personne de mon âge qui ignorait que la Terre est une boule dans le vide de l'espace.

3. Là, je viens de comprendre que mes étonnements sont peut être hors de mise : pourquoi ne pas admettre que l'on puisse s'intéresser à tout autre chose que les mécanismes du monde, à ses caractéristiques ? Pourquoi ne pas considérer que d'autres puissent se focaliser sur les relations interpersonnelles, par exemple, ou bien l'histoire, l'économie, que sais-je ?

4. L'école, puis le collège et le lycée donnent des informations dans les limites des référentiels (les "programmes"), et si des notions d'astrophysique élémentaire sont présentes, les mécanismes de l'olfaction ne sont pas abordés : notre jeune amie a une excuse.

5. Doit-on toutefois l'accuser de manque de curiosité ? Après tout, l'éventail des connaissances possibles est infini, et ce serait un mauvais procès, même si le monde où nous vivons mérite quelque considération, avant les êtres qui l'habitent.

6. Mais bon, qu'importe, car le présent billet a un autre but : bien reconnaître qu'il y a lieu de donner simplement des explications des phénomènes les plus courants. D'ailleurs, à l'origine de cette série de billets, il y a eu ceux qui étaient consacrés au brunissement des feuilles des arbres en automne, par exemple. Oui, la chimie, cette science mal connue, mérite d'être "communiquée", par ce qu'elle nous dit des changements de notre environnement.  En cuisine, mais pas seulement !

7. Et il y a lieu de donner des explications simples, pas les calculs qui fondent ces explications, mais qui rebutent la majorité d'entre nous. Certes, il y a alors un peu de paternalisme, comme dans les "on démontre que" des cours de mathématiques, quand un professeur veut aller rapidement au résultat, pour des "conducteurs de voiture"  plutôt que pour des "mécaniciens".

8. D'ailleurs, il y a lieu de penser à des explications expérimentales, jamais contestables, car on se souvient avec le physicien italien Galilée (1564-1642), un des pères de la science moderne, que ""Un bon moyen pour atteindre la vérité, c'est de préférer l'expérience à n'importe quel raisonnement, puisque nous sommes sûrs que lorsqu'un raisonnement est en désaccord avec l'expérience il contient une erreur, au moins sous une forme dissimulée. Il n'est pas possible, en effet, qu'une expérience sensible soit contraire à la vérité. Et c'est vraiment là un précepte qu'Aristote plaçait très haut et dont la force et la valeur dépassent de beaucoup celles qu'il faut accorder à l'autorité de n'importe quel homme au monde."





mercredi 10 avril 2013

L'invention des sciences de la nature

Les sciences de la nature ont-elles un père ? On avant Galilée, mais on cite insuffisamment Francis Bacon, qui écrit :

"Nous ne saurions trop recommander de ne rien avancer en matière d'histoire naturelle, qu'il s'agisse des corps ou des vertus, qui ne soit (autant que faire se peut) nombré, pesé, mesuré, déterminé ; car ce sont les oeuvres que nous avons en vue, et non les spéculations. Or la physique et la mathématique bien intégrées l'une à l'autre engendrent la pratique".

Nombrer, peser, mesurer, déterminer : voilà la marque (pas suffisant, mais un bon début) d'une science de la nature, singulière parmi les savoirs ! Et la réfutabilité est un deuxième pied, essentiel pour qui ne veut pas confire en suffisance.

Vive le doute positif et le nombre, qui borde le chemin !