dimanche 31 mars 2013

N'oublions pas le service à la française

Jadis les Français mangeaient... à la française : les diverses préparations étaient disposées sur la table, à des endroits particuliers, et ils étaient renouvelés d'une certaine façon, un peu comme un buffet que l'on regarnirait, mais avec la différence que l'on mangeait ce que l'on avait près de soi.
Ce fut un séisme quand le service à la russe s'imposa : c'est celui que nous connaissons aujourd'hui, où les mets sont apportés, puis servis aux convives. Certes, on mange chaud... mais mange-t-on socialement ?

Manger socialement ? C'est cela qui est bon. C'est pour cette raison que les fondues au fromage ou bourguignonnes ont tant de succès. C'est pour cette raison que le couscous mangé à l'ancienne, avec un plat devant tous, que l'on prend à la main, a son succès. Rien de pire, en quelque sorte, que les mets mangés seuls.

Du coup, ne pourrions nous pas organiser nos repas pour retrouver l'intelligence du service à la française, en plus de l'intérêt du service à la russe ?
C'est un peu ce qui se fait dans le pot-au-feu à l'alsacienne, où des condiments sont répartis sur toute la table, échangés à la demande entre les convives. Tous mangent la même viande, partagée entre tous ; tous boivent le même bouillon corsé, brûlant ; et tous s'échangent les condiments, se parlant, échangeant.

Et c'est ainsi que le pot-au-feu devient un mets merveilleux !

samedi 30 mars 2013

Science fautivement dite participative

Après la science qui aurait été citoyenne, voici que me vient sous les yeux de la science qui serait participative. Etrange emploi de la langue française, qui, hélas, risque de conduire à des fautes de pensée.
La science est la science. Pour des raisons préalablement exposées, elle ne peut pas être citoyenne. Je n'y reviens pas, sauf à signaler que quelques personnes prises en flagrant délit de faute de pensée se sont "débattues", tels les poissons dans un filet, en disant que tout cela n'était que mots, et que les idées comptaient davantage. D'accord... mais quelles idées ?

Pour la science dite participative, là encore, il y a une faute de français. L'idée que l'on aurait voulu nommer (pauvre pensée que celle qui ne sait pas l'usage des mots) ? Une façon de faire la science, où des amateurs puissent venir participer au travail institutionnel. Par exemple, des astronomes amateurs participant au recensement des amas ouverts ; ou encore des botanistes amateurs signalant les aires de répartition des espèces.

Evidemment, ce type de collaboration est très bien ! Oui, il y a la participation de tous (disons moins pompeusement : de plusieurs). Oui, il faut encourager des telles initiatives, mais je propose de ne pas spécifier la science qui est ainsi faite : c'est de la science, un point c'est tout !

Et c'est ainsi que la science est belle : quand tout le monde est convié au grand banquet de la production de la connaissance !

(j'y pense : il faudra que j'évoque la question de l'enseignement ... dit "des sciences" : à ce stade, je ne critique pas la terminologie).

Vive la connaissance (bien) produite et (bien) partagée !

jeudi 28 mars 2013

Gavage ? Non, bonheur !

Ce matin, je lisais les déclarations d'un président d'université qui parlait de "gavage" pour les classes préparatoires aux grandes écoles.

C'est un terme très mauvais : sans verser dans l'ancien combattant, je me souviens avec bonheur de ce moment où je pouvais me consacrer entièrement aux mathématiques, physique et chimie !
Que de merveilleux théorèmes j'ai découvert, appris  !  Que de beaux phénomènes j'ai découvert !
D'ailleurs, il faut ajouter que les enseignants étaient merveilleux... et d'ailleurs certains sont restés des amis, parce qu'ils avaient un enthousiasme partagé.

Les classes préparatoires, du gavage ? Non, du bonheur... pour ceux qui aiment (ceux qui n'aiment pas, évidemment, seront malheureux... mais n'est ce pas le cas pour tout, dans la vie ?)

mardi 26 mars 2013

Science et cuisine à l'école

Ce matin, une correspondante qui voudrait mettre de la gastronomie moléculaire à l'école.
A laquelle il est répondu :

Sans attendre, laissez moi vous parler des "Ateliers expérimentaux du goût" (ils sont sur les sites académiques, mais aussi sur mon site, adresse ci dessous), pour le Premier Degré (introduits à l'échelon national par le ministre en 2001) et les "Ateliers science & cuisine", qui sont pour le second degré, en thème d'approfondissement, et en relation avec les programmes.
Il y a d'autres projets, comme "Dictons et plats patrimoniaux", que vous trouverez aussi.
L'idée était moins de focaliser spécifiquement sur la gastronomie moléculaire ou la cuisine moléculaire que de partir de cuisine, et de faire monter la nourriture à la tête, en renvoyant vers de la culture, au sens large.
N'hésitez pas à m'interroger.

vendredi 22 mars 2013

Je prends!

Hier, alors que je discutais avec Bernard Chevassus-au-Louis, je lui vantais les beautés du paradigme des "hussards blancs de la Raison".
En échange, il m'a passé son "Touche pas à ma science"

Remarquable Colloque

Hier, à l'Académie d'agriculture de France, remarquable colloque sur le thème "Réconcilier le public avec son alimentation".

Des intervenants de qualité, qui ne se sont pas contentés de livrer des messages convenus, mais, au contraire, ont vraiment discuté la question !


Leurs résumés sont sur le site académique, où se trouvera bientôt le podcast des interventions.

Voici :

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« RETABLIR LA CONFIANCE DU CITOYEN
DANS SON ALIMENTATION »

Résumé des interventions du colloque du 21 mars (14h00 – 17h30)



  • Introduction de la journée par Hervé THIS, Secrétaire de la section « Filières alimentaires » de l’Académie d’Agriculture de France

Les faits :
  • Il y a des fraudes, mais cela ne signifie pas que tout le monde fraude.
  • Il y a des risques, mais (1) il y a des risques à tout et (2) il faut se demander quantitativement quels risques (relatifs).
  • Une partie du public est craintif, parce qu'il ne comprend pas la science et la technologie.
  • Une partie de la presse vend de la peur (n'est-ce pas cela, le plus grand scandale alimentaire du xxi e siècle?)
Des propositions :
Si la solution était simple, on l'aurait mise en œuvre.
Quand on signale une fraude :
– il faut indiquer combien de pour cent du groupe est représenté
– il faut profiter de chaque affaire pour vérifier que nos systèmes sont bons ; en réalité, peu après chaque « convulsion », il est indispensable de faire un bilan assorti d'une prise éventuelle de décisions (sans tomber dans le resserrement des libertés, hygiénisme..)

Quand on signale des risques :
– il faut l'assortir de valeurs quantitatives
– il faut les distinguer des dangers
– il faut publiquement dire comment on les minimise.
Pour donner au citoyen les moyens de craindre ou de ne pas craindre les diverses composantes de son alimentation, il faut une information qui ne soit pas partisane. Celle de l'industrie n'étant pas crédible, il faut que l'Etat prenne ses responsabilités, et diffuse de l'information de l'Ecole à l'âge adulte, en passant par les canaux « efficaces ».
Ici, proposition de formations des enseignants du Premier et du Second Degré. L'INRA pourrait aller intervenir dans les Rectorats, pour des formations académiques.
Enfin, il faudra sans doute aussi réfléchir aux relations entre science, technologie et technique, fin de bien cibler les « émerveillements proposés ».
Au fond, la presse se répartit en deux groupes : ceux qui vendent de la peur, et les autres. On doit considérer que les sociétés ont la presse qu'ils méritent. Il sera bien difficile de changer les méthodes des marchands de peur, mais on peut réfléchir avec les autres pour trouver des solutions actives.
Quoi qu'il en soit, on ne pourra pas éviter d'être TRES présent dans le grand concert médiatique, et de proposer des sujets.


Première Table ronde - Quelle confiance le consommateur accorde-t-il aujourd’hui à la qualité (sanitaire, nutritionnelle, environnementale…) de son alimentation ? Perception et réalités.

Modérateur – Bertrand HERVIEU, Vice-président du Conseil Général de l’Alimentation, de l’Agriculture et des Espaces Ruraux

Questions Comment expliquer vous la méfiance actuelle des consommateurs dans leur alimentation ? Quelles sont, à votre avis, les principales craintes ? A quoi sont elles dues ? Quelles sont les principales craintes des consommateurs aujourd’hui au regard de leur alimentation ? Pourquoi n’ont-ils pas confiance dans ce qu’ils mangent ? Les informations dont les consommateurs disposent (étiquetage, ou autre) sont-elles suffisantes et adaptées ?

  • Charles PERNIN, Chargé de mission alimentation à CLCV

Il y a une vraie crise de confiance des consommateurs envers l’industrie agroalimentaire. Ce phénomène n’est pas nouveau : de nombreux baromètres d’opinion montrent depuis des années que l’image de ce secteur dans l’opinion est très dégradée.
Il faut rappeler que cette situation n’est pas spécifique à l’agroalimentaire. Nous sommes dans une ère du soupçon : la crise de confiance concerne le politique, le domaine de la santé et de l’expertise en général, du sport (dopage) et des médias.
Pour en revenir à l’alimentation, les consommateurs ont l’impression de ne plus vraiment savoir ce qu’ils mangent et doutent de la qualité des produits issus de l’industrie. N’oublions pas que, pour les consommateurs, la qualité de l’alimentation n’est pas qu’une question sanitaire. L’utilisation d’additifs, l’artificialisation des recettes, le recours à des ingrédients qui s’apparentent à des « erzatz » (analogues de fromages, arômes artificiels), tout cela ne peut que nuire à l’image des produits.
Ces pratiques sont d’ailleurs en totale contradiction avec le marketing qui ne cesse de faire référence à une prétendue naturalité, au terroir ou à l’authenticité des recettes. Ces contradictions manifestes, ainsi que la réticence de l’industrie agroalimentaire à communiquer sur ses pratiques et ses métiers, ne font qu’accroître la méfiance. Cette situation est d’autant plus difficile à gérer qu’aujourd’hui tout finit par se savoir (du fait des nouvelles technologies de l’information et des réseaux sociaux notamment).
Après un scandale comme celui de la viande de cheval, le secteur peut estimer qu’il s’agit d’une crise de plus et continuer comme avant. Cela revient à considérer que de toute façon les consommateurs finiront par acheter ce qu’on leur propose. Mais peut-on construire un modèle économique créateur de valeur sur la base de la méfiance et du doute ? N’y-a-t-il pas un lien entre l’image négative de l’industrie et la baisse continue de la part consacrée à l’alimentation dans le budget des ménages ?


  • Louis ORENGA, Directeur d’APRIFEL et ancien Directeur du Centre d’information des viandes.

Il est paradoxal de constater qu’en ce début de 21ème siècle les interrogations des consommateurs sont de plus en plus grandes alors que l'information est soi-disant de plus en plus accessible. On peut se demander pourquoi plus tout le monde répète qu'il faut s'adapter à la demande des consommateurs ou des citoyens, plus ces derniers ont souvent la perception du contraire.
La mondialisation des échanges, l’élaboration de plus en plus importante des produits, la multiplicité des circuits de distribution ont conduit à l’éloignement de la connaissance naturelle que l'on pouvait avoir des produits par le passé, ce qui a généré des interrogations et des inquiétudes renforcées par la mondialisation de l'information. Parallèlement à ce phénomène, la communication du 20ème siècle a cristallisé les positions, particulièrement à la fin du siècle, en opposant frontalement la publicité émanant des entreprises et des secteurs économiques à l'information qui ne pouvait, par définition, émaner que de la presse ou d'émetteurs en capacité de revendiquer de n'avoir aucun lien avec le domaine économique.
Facteur aggravant en ce début de 21ème siècle, quelle que soit la volonté de donner une information factuelle, la communication est ipso facto qualifiée de publicité si elle est positive et ne dénonce donc pas un risque. On pourrait caricaturer en disant que la mention « train en retard » sur le tableau d'affichage d'une gare est une info, mais celui qui est « à l’heure » relève de la publicité. Encore plus grave est le fait que les mécanismes de communication de notre société moderne ne peuvent que valoriser l'information qui se base sur le désaccord, l'opposition, le conflit. Cela ne serait pas si grave si cela n'était qu’un problème de sémantique. Hélas, la conséquence est que cela met en péril la concertation. En effet, si l'information ne peut pas exister pour démontrer que ceux qui se sont parlés sont arrivés à faire avancer les choses, les personnes et les organisations en présence ne peuvent exister et se valoriser que dans le dissensus. On ne peut donc, par définition, que se retrouver avec un consommateur qui perd le peu de repère qu’il essaye d'acquérir par l'expérience.
La solution ne pourra donc exister que si le duo, rôle de la publicité d'une part émanant du secteur économique et l'information émanant du secteur non économique, évolue.
Cette opposition dans les mécanismes de communication ne peut que conduire à aggraver les conflits dans un monde justement de communication.
La concertation, si souvent demandée par tous, risque aujourd'hui d’exister encore moins qu'il y a vingt ans. En effet, avec l'accroissement de l'information si l'on apprend que deux entités, de domaines de référence différents, se sont vues ou ont juste envisagé de discuter ensemble, alors les mises en cause se déchaînent sur les uns et les autres. Ainsi, tant que ces mécanismes de communication hérités de la fin de notre siècle dernier n'auront pas évolué, les changements étant de plus en plus rapides et générant des peurs réelles ou supposées, issues de vraies problèmes ou de problèmes virtuels, les incompréhensions voire le divorce entre les différents acteurs ne feront que se renforcer, accroissant les interrogations des consommateurs.
La communication doit donc sortir de cette dualité entre publicité et information qui, en fait, organise les oppositions et fait perdre à la communication l’essence même de ce pourquoi elle doit aussi être faite, à savoir permettre à deux entités de se parler et de se comprendre pour construire un projet commun.
Une troisième voie, qui ne relèverait ni de la publicité ni de l'information telle qu'on la connaît aujourd'hui, devrait pouvoir s'installer. Cette communication de type informative devrait permettre justement de mettre en avant les consensus, les accords et avoir auprès de l’opinion une visibilité au moins égale à celle qui est aussi nécessaire lorsque l'on doit dénoncer un risque, un dysfonctionnement ou un désaccord. Sans une réflexion dans ce domaine, qui conduira à s'interroger sur les émetteurs de cette nouvelle communication sur les canaux de diffusion de cette information et sur la transparence de cette dernière, les crises et les incompréhensions ne feront que se développer car, pour terminer sur une notion économique, parler des risques pour certains en matière de communication est toujours plus rentable, plus valorisant pour celui qui alerte et même moins risqué juridiquement que de construire le dialogue et justement prendre le risque de dire que l’on a la volonté de dialoguer et de faire avancer un problème, mais ça c'est de la pub !

  • Bernard CHEVASSUS-AU-LOUIS, Président de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation (OQALI)

Trois points importants
  • la défiance vis à vis des experts a conduit à un irréversible retour de l'évaluation profane des risques. Cette évaluation n'est pas quantitative (les citoyens ne disposent pas des informations statistiques) mais qualitative. Il est donc important d'analyser ce que sont les qualités d'un "bon risque" (qui peut être quantitativement fort) et celles d'un "mauvais risque" (qui peut, à l'inverse, être considéré comme faible par les experts).
  • Par rapport à ce retour de l'expertise profane, l'alimentation moderne et les nouveaux risques (listerias, résidus phytosanitaires, OGM, etc.) se caractérise par des risques "imperceptibles", qui défient donc ces capacités d'expertise individuelle et conduisent à une "socialisation" de l'inquiétude.
  • il faut se garder de penser toutes les situations en termes de risques et s'acharner à garantir le risque zéro (ou à clamer qu'il n'existe pas). Les citoyens ne demandent pas le risque zéro mais le "mépris zéro" (voir le cas récent de la viande de cheval), ce qui ouvre peut être de nouvelles pistes pour restaurer la confiance.

  • Gérard PASCAL, Membre de la section VIII de l'Académie d'agriculture de France

Il ne m’appartient pas de m’exprimer sur la perception des consommateurs, d’autres intervenants sont bien plus qualifiés que moi pour le faire. Je souhaite simplement apporter l’éclairage d’un chercheur, nutritionniste et toxicologue, qui a aussi exercé des activités d’expertise pendant 35 ans. C’est donc un témoignage qui va à l’évidence manquer d’objectivité.
Mon premier constat est celui d’un grand succès : dans un premier temps, les nutritionnistes ont parfaitement réussi, à juste titre, à persuader le citoyen de l’importance de son alimentation en matière de préservation d’un bon état de santé et de prévention de l’apparition des pathologies majeures qui nous menacent.
Le second est celui d’une incapacité totale à persuader ce citoyen de la multiplicité des solutions possibles pour atteindre cet objectif de prévention. Le consommateur a été livré à la cacophonie des discours d’une multitude d’acteurs prétendant tous détenir la vérité et recommandant souvent, soit une alimentation sur ordonnance soit des remèdes de gourous. Son anxiété n’a fait que croître face à la multitude des choix qui lui sont proposés. L’éducation à l’alimentation a été délaissée au profit d’une soit disant éducation nutritionnelle déconnectée de la réalité de la production des matières premières agricoles et de leur transformation culinaire ou industrielle. Le développement de nos sociétés urbaines n’y est pas non plus étranger. Nous sommes ainsi passé d’une connotation positive à une méfiance généralisée.
Au cours des 30 dernières années, la méfiance à l’égard des scientifiques, de la science et de la technologie n’a fait que croître. Les scientifiques, les universitaires les plus sérieux et honnêtes sont de plus en plus considérés comme inféodés aux industriels et accusés d’être incapables d’impartialité, ôtant toute valeur à leurs avis. Par contre, les « lanceurs d’alerte », les opérations médiatiques scientifiquement les plus lamentables trouvent un écho de plus en plus large et bienveillant dans les médias et …dans les milieux des décideurs, en particulier politiques (et je ne fais pas de politique politicienne !).
Beaucoup de ces décideurs n’informent pas complètement les citoyens sur les raisons de leurs choix en matière de sécurité sanitaire et se refusent à faire clairement la part entre les avis scientifiques émanant de collectifs mis en place par leurs soins et les multiples raisons sociales, économiques, écologiques, éthiques … qui peuvent justifier leurs décisions de gestion des risques qui s’écartent sensiblement de ces avis. Je ne peux que souligner la position française qui consiste à mélanger les genres : c’est le directeur de l’AFSSA puis de l’ANSES qui signe les avis qui ne sont pas toujours l’exact transcription des avis d’experts ; le HCB est organisé en deux comités, l’un scientifique, l’autre économique et social et l’on ne sait pas qui a exprimé tel ou tel point de vue quand le sujet est brulant. De plus les comités scientifiques des deux instances font double emploi dans le domaine de l’évaluation des risques sanitaires des OGM. N’est-ce pas de nature à troubler le citoyen ? Et puis qu’il est agréable de vouloir donner des leçons au monde entier en adoptant des positions «originales» souvent indéfendables !
Note pays s’est doté, il y aura bientôt 30 ans, d’une structure unique dans le monde à l’époque, le CNA, qui permet à tous les acteurs de la chaîne alimentaire de dialoguer et de rechercher le consensus dans tous les domaines. Plus de 70 avis ont fait l’objet de ce consensus, or qui en a connaissance dans la population ? Un exemple particulièrement éclairant est celui de l’excellent avis à mon sens, émis en décembre 2011 sur les PAT et dont je n’ai pas entendu parler récemment à l’occasion de la décision prise par Bruxelles au sujet de leur utilisation en alimentation des poissons. Pourquoi vouloir à tout prix activer des débats soit disant démocratiques à grand renfort de médias, alors que la démocratie s’exerce dans ce parlement de l’alimentation. Redonnons lui la place qu’il mérite et qui s’impose en cette période de gros temps; sa représentativité, en fait une instance difficilement manipulable par quelque acteur que ce soit.

Même question à tous : quelle est, à votre avis, la principale mesure à mettre en œuvre aujourd’hui pour rétablir la confiance du consommateur dans son alimentation ?


15h45 - Deuxième Table ronde – Quelles sont les actions mises en œuvre par les pouvoirs publics et les acteurs privés pour garantir la sécurité sanitaire des produits alimentaires livrés aux consommateurs, que peut-on mettre en place ?

Modérateur – Bernard CHEVASSUS-AU-LOUIS, Président de l’Observatoire de la Qualité de l’Alimentation

Quelles sont les actions mises en œuvre par les acteurs pour garantir la sécurité sanitaire des produits alimentaires livrés aux consommateurs ? Quelle est la principale mesure à mettre en œuvre aujourd’hui pour rétablir la confiance du consommateur dans son alimentation ?
  • Sandrine BIZE, chef du Département Hygiène, Sécurité, Qualité et Environnement à la CGAD
La Confédération générale de l’alimentation en détail (CGAD) est l’organisation interprofessionnelle représentative des métiers de l'artisanat et du commerce alimentaire de proximité et de l'hôtellerie-restauration.
La CGAD représente plus de 300 000 entreprises, générant un chiffre d'affaires de plus de 95 milliards d'euros chaque année et employant plus de 1,1 million d'actifs dans 18 métiers (Boucher - Charcutier, Boucher chevalin, Boulanger, Charcutier - Traiteur, Chocolatier - Confiseur, Crémier – Fromager, Détaillants en Fruits et Légumes, Epicier, Glacier, Hôtelier – Cafetier – Restaurateur, Pâtissier, Pizzaiolo, Poissonnier, Tripier).
Ce sont des entreprises de proximité implantées aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural qui entretiennent avec leur clientèle un lien social et qui dialoguent avec eux (information en direct…).

Les Métiers de l’Alimentation se sont investis depuis plusieurs années déjà sur le terrain de la maitrise de la qualité sanitaire. En effet, dès la sortie de la directive 93/43 qui a marqué un tournant en matière de règlementation « hygiène » en fixant avant tout des obligations de résultats aux professionnels, la CGAD et ses organisations professionnelles ont décidé de rédiger des guides de bonnes pratiques d’hygiène basés sur une démarche HACCP collective. Ces guides validés par les autorités compétentes sont là pour aider les entreprises à satisfaire leurs obligations réglementaires en matière d’hygiène.
Pour suivre l’évolution des pratiques professionnelles et prendre en compte l’arrivée du Paquet hygiène, non seulement d’autres guides sont en cours de rédaction mais les guides anciennement validés subissent une réactualisation pour intégrer, par exemple, les notions de plan de maitrise sanitaire, de traçabilité, de gestion des non conformités ou pour intégrer des outils d’auto-contrôle (contrôle à réception, contrôle des températures, analyses microbiologiques…). Ces guides expertisés par l’Anses s’accompagnent de formations des chefs d’entreprise et de leurs salariés.

Par ailleurs, la création de l’Observatoire de l’alimentation, dans lequel la CGAD est impliquée en particulier sur le volet sanitaire, doit conduire à une communication par les pouvoirs publics vers les consommateurs sur la qualité sanitaire « réelle » de l’alimentation en France qui reste satisfaisante et a progressé au fil du temps malgré l’impression contraire qu’en ont les consommateurs. Il faut une communication publique rassurante qui montre les efforts réalisés par la filière

  • Catherine CHAPALAIN Directrice générale de l’ANIA
Nous vivons dans un monde de paradoxes :
  • Notre monde est plus sur, et pourtant, il y a une augmentation des peurs, notamment alimentaires, avec une amplification des risques liés à l’alimentation, par rapport à la réalité et une surmédiatisation.
  • Alors qu’il y a quarante ans l’alimentation moderne était valorisée, elle est aujourd’hui synonyme de danger.
  • Alors que les produits alimentaires n’ont jamais été aussi surs, il y a une perte de confiance du consommateur.
  • Alors qu’à l’étranger, notre modèle alimentaire et les produits alimentaires ont une très belle image, en France, ils sont trop souvent critiqués.
  • Dernier paradoxe, celui qui oppose le français consommateur – à la recherche du prix toujours plus bas - au français producteur, qui veut maintenir son emploi et voir sa rémunération augmenter : la qualité a un coût…..
Quel est l’enjeu pour l’ANIA, dans ce contexte compliqué ? Restaurer la confiance du consommateur. Il s’agit clairement d’un enjeu de compétitivité pour les entreprises de l’alimentaire.
Quelles sont les actions que nous mettons en place ?
  • L’alimentation-santé est la première priorité de l’ANIA. Nous travaillons autant sur les aspects de qualité et de sécurité que sur le volet nutritionnel.
  • Dans le domaine de la nutrition, nous avons recensé plus de 300 démarches de progrès, réalisées par les entreprises et les professions, en matière d’optimisation nutritionnelle, d’éducation et d’information du consommateur, de communication responsable et de programmes de recherche. Nous soutenons dans ce cadre le Fonds français pour l’alimentation et la santé.
  • En matière de sécurité sanitaire, nous avons en Europe la réglementation la plus sévère au monde, qui nous impose de mettre sur le marché des denrées saines et sûres, avec des obligations en matière de résultat et de traçabilité…. Et nous accompagnons les entreprises avec des outils d’application pratiques.
  • Pour restaurer la confiance du consommateur, nous avons également adopté une doctrine professionnelle qui encourage la communication positive sur les produits et encadre strictement la communication péjorative. Le « sans » ne doit pas être un argument de vente.
  • Enfin, nous allons lancer une campagne de valorisation autour de 2 idées fortes, la qualité et la sécurité des aliments et la « trame alimentaire », avec un parti-pris de transparence.
Notre objectif est bien de recréer de la valeur autour de l’alimentation, de « ré enchanter l’alimentation ».
  • Marc AUCLAIR, Directeur marketing d’United Biscuits France
(Texte à venir)
  • Jérôme BEDIER, Secrétaire général du groupe Carrefour
  • Gérard LALOI, Président de la Commission « Alimentation » de la Société des agriculteurs de France (SAF)
Baisser les coûts à tous prix… et en payer le prix !

Vivons-nous une nouvelle crise alimentaire sanitaire ? Après les risques pour la santé du prion avec la vache folle, de la dioxine, de la listéria, de la mélamine… connaissons-nous aujourd’hui avec le scandale de la tromperie sur la viande de bœuf un empoisonnement à large échelle potentiellement grave ? Non ! Nous parlons là d’une « simple affaire » de substitution de viande, frauduleuse certes, mais sans conséquence aucune pour la santé… Une innocuité d’ailleurs reconnue par les pouvoirs publics eux-mêmes avec leur autorisation donnée de distribuer les produits incriminés aux organisations caritatives !

→ Et pourtant, notre chaine alimentaire se trouve confrontée à la pire crise jamais endurée par tous les acteurs concernés : la perte de confiance, alors même que les progrès réalisés lors de ces dernières décennies n'ont jamais garanti une telle sécurité en matière d'alimentation (contrôles sanitaires exigeants de fiabilité, traçabilité d'une performance exceptionnelle…). En fait plus, peut-être que la fraude, que le bon sens du consommateur peut comprendre sans l’admettre, c'est l’extraordinaire complexité du circuit agri-agroalimentaire, qui avec de mauvais relents de mondialisation et de finances malsaines, sème un trouble profond chez les citoyens. Le doute naît de la mise en lumière de ce dédale tortueux générateur de toutes les incompréhensions d’abord, de toutes les suspicions ensuite !

→ Voilà le vrai risque, ce climat purulent, qui exige notre examen de conscience et requiert notre réflexion. N’avons-nous pas finalement oublié les principes ? A l’origine, le fameux « triangle d’or », qualité organoleptique, équilibre nutritionnel, garantie sanitaire, se travaillait pour démontrer la validité d’un prix, d’un coût, d’un investissement, matériel pour nos industries, immatérielle pour nos marques. Progressivement, le « socle » s’est retourné : le prix, d’argument à justifier est devenu le cadre de référence incontournable dans lequel doivent s’insérer les critères de qualité. Le fameux principe « d’analyse de la valeur » des années 80 : « à coût égal, comment augmenter la qualité », s’est insidieusement mué en : « à qualité égale comment baisser les coûts »; avec les risques et les tentations qu’une telle démarche peut susciter.

Retrouver la confiance du consommateur exige à tous les stades de la chaîne alimentaire, et en commun : de l’humilité (acceptons le diagnostic), de la détermination (faisons bouger ensemble les lignes du paradigme qualité/prix), de la patience et enfin et surtout la réaffirmation d’une attitude profonde pour remettre le produit au centre de notre vocation : le plaisir de nourrir !

→ Le Haut Comité à la Réputation Alimentaire, recommandé par notre think tank SAF-agriculteurs de France pour rassembler tous les acteurs au service de ce projet, trouve plus que jamais sa nécessaire raison d'être.

→ Dans la même lignée, le futur Colloque « Pourquoi une éthique alimentaire ? » organisé par la SAF et Valeurs Vertes le 18 avril 2013 au Parlement Européen de Strasbourg réunira personnalités politiques et acteurs de la chaîne.

  • Jacques ROUX, Président du Syndicat National de la Restauration Collective (SNRC).
La restauration collective fait face à un double défi quotidien : conserver la confiance de ses clients (donneurs d’ordre) et des convives, à qui nous servons 8 millions de repas par jour.
Elle se différentie des autres formes de restauration par des obligations réglementaires strictes qui sont autant de points de vigilance et de sensibilité utiles :
• L’obligation de fournir des repas équilibrés : le respect du « contrat » est au cœur de la confiance. A l’école, l’hôpital, dans les maisons de retraite ou l’entreprise, ce repas représente souvent le seul repas équilibré de la journée.
• La garantie d’un prix dit « social » : le challenge de la restauration collective c’est de conserver un niveau de vigilance très élevé sur la qualité et la traçabilité tout en pratiquant des prix très modérés pour permettre au plus grand nombre de bénéficier de ses prestations.
• Les exigences fortes en matière de sécurité́ alimentaire et sanitaire : du fait de la fréquence et de la récurrence de la consommation, de la taille de certains services mais aussi parce que de nombreux secteurs de la restauration collective concernent des convives en situation de fragilité.
Face à cela, l’attente des consommateurs est une information loyale, fiable et vérifiable :
• Notre première priorité est de garantir la santé publique, la sécurité de la consommation, avec une politique de transparence sur les contrôles, internes et externes.
• De plus en plus, les consommateurs s’interrogent sur la loyauté des produits que nous leur servons. D’où deux propositions très concrètes :
1- opérer nous-mêmes des contrôles par sondage sur les produits qui nous sont livrés,
2- exiger auprès des distributeurs et des producteurs la garantie que les produits livrés sont bien ceux commandés – et que cette garantie emporte leur responsabilité.






samedi 16 mars 2013

Une merveilleuse question, à propos de cuisine note à note

Cet après midi, je reçois une de ces questions que je "chouchoute", parce qu'elles me permettent de m'expliquer clairement, de poser les "questions qui fâchent", sans rien cacher ; une de ces questions qui posent donc les bonnes questions, et qui appellent des réponses circonstanciées.

Voici le message :
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Bonjour,
Je regarde pour la seconde fois la chaîne Encyclo qui vous consacre une émission.
Ce que je vois et écoute est très intéressant mais franchement, vous voyez une mère de famille faire de la "cuisine" avec des outils de labo ou en regardant que ses oeufs cuisent à 66° ou 64° ?????
Que mangez vous lors de votre pause de 12 à 13h30 ??????
Je constate que tout ce que vous faites et quelques cuisiniers avec vous est certes amusant,  mais que celà prend 15, 60 minutes ou plus et se retrouve de toute manière mangé en 2 minutes à la table.
Donc par exemple où est l'intérêt de "fabriquer" un café gouteux et blanc après passage en alambic par rapport à une tasse traditionnelle de bon café ??????
Je n'arrive pas à comprendre l'utilité (hors celle du scientifique) de tout cela ....... pouvez vous m'aider ?????
Cordialement

 Immédiatement, j'ai donc répondu : 
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Bonjour et merci de votre message. Il est EXTREMEMENT intéressant, et je vais prendre le temps d'y répondre de façon détaillée, sur mon blog (sans vous citer, bien sûr).
Pour faire bref, vous faites la remarque qui était faite en 1947 aux pionniers de la musique électroacoustique.
Mais, je le répète, je vais vous répondre de façon détaillée, pour essayer de vous convaincre qu'il ne s'agit pas d'amusement ! D'ailleurs, l'Académie d'agriculture de France n'aurait pas consacré une séance publique à la cuisine note à note si ces personnes avaient jugé qu'il s'agissait d'une bagatelle. Peut-être le film est-il en cause, plutôt que l'idée de la cuisine note à note (je n'ai pas vu le film).


Encore merci pour votre message, et à bientôt, pour ma réponse. Bonne soirée
Mais je voulais surtout me donner du temps pour une belle réponse. Et voici le mieux que je puisse faire (je reprends chaque phrase, et je commente) : 

Je regarde pour la seconde fois la chaîne Encyclo qui vous consacre une émission.
 
Oui,  la chaîne Encyclo vient de diffuser un film réalisé en décembre 2012. La réalisatrice et son cameraman sont venus au laboratoire, ont suivi plusieurs activités... en choisissant celles qui convenaient à l' "histoire" qu'ils voulaient raconter. Je n'ai pas vu le film (du travail !), et je ne sais pas ce qu'ils ont dit. Je réponds donc dans cet état d'esprit. 

Ce que je vois et écoute est très intéressant mais franchement, vous voyez une mère de famille faire de la "cuisine" avec des outils de labo ou en regardant que ses oeufs cuisent à 66° ou 64° ?????

Si c'est très intéressant, tant mieux : il faut le signaler à la chaîne. 
Maintenant, vois-je une mère de famille (pourquoi pas un père de famille, d'ailleurs ? Chez moi, c'est moi qui fait la cuisine à tous les repas, pour la famille) faire de la cuisine avec des outils de labo ? 
La réponse est un grand "OUI", parce que c'était cela, l'idée de la cuisine moléculaire : cuisiner avec des outils de notre siècle, au lieu d'utiliser des outils techniquement périmés. Le fouet pour faire une mayonnaise ? La sonde à ultrasons fait l'émulsion en quelques secondes. Le fouet pour monter des blancs en neige ? Pourquoi ne pas utiliser un système foisonnant, plus efficace, plus rapide ? Rester fixé sur les outils anciens, c'est comme vouloir rouler en char à boeufs. Pourquoi la cuisine serait-elle la seule activité humaine qui ne puisse progresser techniquement ? Mon interlocuteur, d'ailleurs, utilise internet, donc un ordinateur : pas un crayon et une lettre, pas un morceau de minerai pour écrire sur la paroi d'une grotte ! 

D'autre part, la cuisson des oeufs à 66 ou 64 °C : ce qui est merveilleux, dans cette façon de faire, c'est que, précisément, on n'a pas à attendre la cuisson, parce qu'on peut la faire à l'avance, et réchauffer ensuite, si l'on veut. 
Par exemple, il m'arrive souvent de programmer (oui, un outil moderne) mon système de chauffage pour que des oeufs soient cuits à 67 °C quand je rentre le soir, tard. Les  oeufs sont cuits... et ils sont quand même bien supérieurs aux oeufs minablement cuits par les techniques classiques. Tiens, sans mentir, voici l'oeuf que j'ai eu dans mon assiette, dans l'hôtel le plus huppé d'une grande capitale européenne : blanc caoutchouteux, jaune sableux, décentré, cerné de vert, odeur soufrée...
 Que mangez vous lors de votre pause de 12 à 13h30 ??????

Là, c'est hélas une remarque ad hominem : et ma réponse est hélas que, bien souvent, j'ai tant de travail que je ne mange rien  !  Ou bien, n'importe quoi. Agent de l'Etat, et passionné par la science, je fais plutôt 105 heures par semaine que 35, et je fais passer mon confort bien après ma mission. D'accord, ma réponse est ad hominem, mais comment l'éviter ? 
Et puis, quand je mange, je vais au plus rapide... en regrettant que ce ne soit pas (encore) de la cuisine note à note. Mais cessons là la discussion sur ce point : les argments ad hominem sont fautifs. 

 Je constate que tout ce que vous faites et quelques cuisiniers avec vous est certes amusant,  mais que celà prend 15, 60 minutes ou plus et se retrouve de toute manière mangé en 2 minutes à la table. 

 Ici, il faut vite dire qu'il ne s'agit pas de s'amuser. Pensez vous que je veuille m'amuser, quand je vais jusqu'à prendre sur mon temps de science pour écrire un livre sur la cuisine note à note ? Quand j'organise des séances de travail (gratuites) pour former les cuisiniers professionnels ? Le mot "amusant" est étrange, d'ailleurs, mais passons. 
Autre aspect de la phrase : faut-il passer 15 à 60 minutes pour préparer quelque chose qui est mangé en 2 minutes ? Là, c'est plus grave : il faut savoir que les professionnels passent parfois une journée pour faire une oeuvre d'art culinaire. Mais, en musique : Gérard Causset, auteur de superbes suites de Bach transposées du violoncelle à l'alto, ne s'entraîne-t-il pas des années pour un concert d'une petite heure ? Je ne crois pas que l'argument soit bon, pour les artistes. 
Pour les mères et pères de famille ? Permettez moi de vous dire que la cuisine note à note peut être bien plus rapide que la cuisine classique, et, surtout, on peut imaginer (et comptez sur moi pour que les imaginations deviennent réalité) des tas de façons de faire très rapidement ! 
Sans que ce soit de la cuisine note à note, laissez moi vous dire que cette cuisine est faite pour le public, et pas pour les "riches", tout comme l'était la cuisine moléculaire. Cuire au lave vaisselle : ce n'est pas une manière de bobo, mais, au contraire, une façon d'économiser l'énergie. 
A moi, d'ailleurs, d'être ad hominem : comment pensez vous que vos enfants se nourriront quand il y aura 10 milliards d'humain sur terre, avec une crise de l'énergie (qui commence) et une crise de l'eau ? Croyez vous vraiment qu'ils mangeront comme nous aujourd'hui ? Décidément, je ne peux mieux répondre qu'en vous renvoyant aux podcasts de l'Académie d'agriculture de France, qui a organisé une séance publique le 19 décembre 2012 (http://www.academie-agriculture.fr/detail-seance_312.html)

 Donc par exemple où est l'intérêt de "fabriquer" un café gouteux et blanc après passage en alambic par rapport à une tasse traditionnelle de bon café ??????

 Où est l'intérêt de fabriquer un café goûteux ? Il y a plusieurs question, dans la question. D'abord, la cuisine note à note ne vise pas à "reproduire" du café. C'est comme si on utilisait un synthétiseur pour faire du violon : il vaut mieux l'utiliser pour faire des sons nouveaux, non? 
D'autre part, et si le café était meilleur ? 
Enfin, pourquoi ne pas embellir notre vie, en ayant le café traditionnel, d'une part, et d'autres breuvages ? 
Pour cette question, on avait la même chose aux débuts de la musique de synthèse, à laquelle on demandait : pourquoi se fatiguer à créer des sons alors que le violon les fait ? La réponse a été donnée : la musique électroacoustique est partout ! Et puis, surtout, pensez à un film comme Farinelli : faut-il vraiment castrer de petits garçons pour avoir des voix d'ange, ou vaut-il mieux utiliser un synthétiseur pour avoir des musiques enchanteresses ? Je choisis mon camp !

Je n'arrive pas à comprendre l'utilité (hors celle du scientifique) de tout cela ....... pouvez vous m'aider ?????

Utilité scientifique : pardonnez moi de vous dire que la cuisine note à note n'a pas d'utilité scientifique. La science cherche à faire des découvertes, pas des applications, lesquelles sont réservées à la technologie. 
Et là, vous posez une grave question, qui est partout, en ces temps de plomb où l'argent tient lieu de valeur morale. Dans un billet précédent, je discute la question de l'importance de la science, et de ses relations avec la technologie. La cuisine note à note est une technique, et je ne la propose que parce que je cherche des moyens pour que nos enfants (moi, je serai mort en 2050) puissent survivre, avec les trois crises que j'ai évoquées. Il ne faut négliger aucune piste, et l'imprévoyance peut être grave. 
Ce ne sont donc pas des jeux, que je propose, mais des réflexions extrêmement sérieuses. Pour en savoir plus, je vous invite à considérer les divers blogs, forums (gratuits), et mon livre "La cuisine note à note en 12 questions souriantes". 

L'utilité de la science :  je sens qu'il faut que j'insiste un peu. La science produit de la connaissance, ce qui n'est pas rien ! C'est la connaissance, qui nous fait humains ! Et c'est la connaissance, que la technologie et la technique utilisent pour changer le monde. Sans la théorie de la relativité générale, pas de GPS, pas de satellites, pas de télévisions, pas de... Sans les pionniers de la physico-chimie, pas de médicaments, pas de cosmétiques, pas de vernis, peintures... Mais c'est là une vieille discussion, arrêtons nous, en signalant simplement que ce serait une grave erreur que la science soit sacrifiée sur l'autel de l'utilité. L'art est-il utile ? Et la culture tout entière ? Il y aurait long à dire... et je sens qu'il faudra un jour que j'en fasse plus long. 

Cordialement

Merci, encore, pour cette question. Très sincèrement, merci de me donner l'occasion de dire ce que j'ai dit ailleurs. Je sens que je me répète un peu, mais si c'est "utile" (voir le billet précédent) ?

Etre utile aux hommes

De Diderot à Voltaire :

"Il faut travailler, il faut être utile, on doit compte de ses talents".

Faut-il ajouter quoi que ce soit ?

A propos des relations entre science et technologie

Je m'aperçois que tout le monde n'a pas (encore ? ;-) ) lu mon livre "Science, technologie, technique : quelles relations ?", de sorte que ma passion absolue pour une science qui ne se confondrait pas avec la technologie (ce qui exclut évidemment toute possibilité de cette chimère qui est nommée fautivement "technoscience") risque de faire penser que je suis pour une science inutile.

AU CONTRAIRE !

Il y a de nombreuses années, déjà, j'avais fait une conférence intitulée "Vive la technologie", à l'Ecole de chimie de Paris (Chimie Paristech)... parce que je crois vraiment que la technologie étant le travail de l'ingénieur, il est essentiel, socialement, que nous valorisions la technologie.

C'est d'ailleurs ce qu'avait fort bien fait le grand vulgarisateur Louis Figuier, qui évoquait les merveilles de l'industrie ! Et nous lui devons des générations d'ingénieurs. D'ailleurs, mon ami Pierre Gilles de Gennes était bien d'accord avec cette idée, lui qui visait la formation d'excellents ingénieurs de recherche.

A propos : "ingénieur de recherche" ? Ce n'est pas parce qu'il y a le mot "recherche" qu'il faut entendre "recherche scientifique" ! Au contraire : il est question de recherche technologique, et, pour la faire bien, il faut des gens de talent.

Bref, je crois (et je viens de le proposer au Centre de recherche Total du Qatar, devant le directeur de la Fondation science et technologie du Quatar) que l'on doit séparer la science, qui doit être à la charge de l'Etat, et la technologie, qui doit être à la charge de l'industrie.
Pour autant, les deux communautés doivent se parler, et je crois plus fécond d'organiser ce dialogue que de favoriser la recherche technologique par l'Etat ou la recherche scientifique par l'industrie.
Sans être nécessairement trop raide, bien sûr.

Passons sur la toute dernière phrase, qui n'est qu'une façon d'essayer d'être moins bête que je ne suis, et revenons à la question : comment valoriser les travaux des scientifiques de l'Etat, sachant que ceux-ci ne doivent pas a priori (sous peine de tordre le bras à un principe sain) se lancer dans la technologie ?
Dans le livre susnommé, je propose que les scientifiques se réunissent périodiquement avec les industriels pour discuter ensemble les possibles applications des travaux scientifiques effectués.
Chaque nouvelle connaissance peut, ainsi, faire l'objet d'une discussion, laquelle doit conduire à autant d'idées que possible, et c'est ensuite  à l'industrie qu'il revient de faire les tests de l'idée.
Il est encore plus efficace que les résultats des tests soient alors "partagés" : soit les tests ont été positifs, et il revient à l'industriel de décider ce qu'il fait de l'idée technologique testée ; soit les tests ont été négatifs, et cela peut indiquer que la théorie scientifique sous jacente est fautive (elle l'est certainement, car toute théorie scientifique est insuffisante, mais on veut dire ici que l'on a une indication -utile- de l'insuffisance !).

Et c'est ainsi, si les communautés se parlent, que l'argent du contribuable pourra être efficacement utilisée !

Qu'en pensez-vous ?

Un merveilleux cadeau

On vient de m'offrir un livre écrit par quelqu'un que je n'aime pas... mais c'est un des plus beaux cadeaux que l'on m'ait fait !

Oui, car, croyant à la déloyauté a priori de l'auteur, je ne vais pas pouvoir croire un seul mot du livre... et, surtout, je viens de comprendre que ce devrait être ainsi que l'on lit : sans croire ce qui est écrit !
Ce qui est dit dans les media, ce qui est écrit dans les livres ne doit pas être cru, sous peine d'une grande naïveté, bien sûr, et c'est surtout à propos des sujets qui nous tiennent le plus à coeur que le risque est grand, de "gober" des erreurs.

Désormais, grâce à ce livre, je vais mettre en oeuvre l'idée que j'énonçais naguère ainsi "Tenir le probable pour faux jusqu'à preuve du contraire", et que j'énonce plus positivement ainsi "Dois-je croire au probable ?".


Une idée amusante

Dommage que je n'ai pas demandé l'autorisation : je citerai volontiers l'auteur de ces lignes :

"PS : il serait amusant en guise de prosélytisme de la cuisine note à note de procéder comme dans Amélie Poulain et faire photographier le titre de votre livre dans différents endroits connus……. Mais vous n’êtes pas le mieux placé pour le proposer, j’imagine !"



vendredi 15 mars 2013

Pourquoi la science et la technologie font-elles peur ?

J'avais promis de réfléchir à la question : pourquoi la science et la technologie font-elles peur ?
D'abord, il est toujours judicieux, quand on considère du vivant, de ne pas oublier que celui que nous considérons aujourd'hui est le produit de l'évolution biologique. Or pour être présent aujourd'hui, la vie à dû surmonter mille épreuves : proies, prédateurs, famines dues aux grands froids, aux grandes sécheresses, inondations, gel, canicules... Tout s'y est mis pour éliminer la vie, et seuls les plus "adaptés" ont réussi à survivre.
Il faut en conclure que nous avons dans notre passé de l'espèce, voire du genre, des milliers de mécanismes qui assurent notre survie.
Et si la prudence en était un ? Si nous étions a priori méfiant, de tout changement... en même temps que très opportuniste, et prêts à sauter sur l'occasion? Pour faire ces choix, nous avons besoin d'un jugement, et ce jugement ne peut guère tenir compte des résultats des sciences ou des techniques. C'est quelque chose d'instinctif. Mieux, même, plus la nouveauté est obscure, et moins nous sommes sans doute capable de l'apprécier.
Or la science et la technologie modernes sont "alambiqués", composés, peu intuitifs. Il est donc "prudent", à l'aune de l'évolution biologique, de les refuser.

Autre piste importante : le fait que l'enseignement ait longtemps sélectionné les élèves, à l'école, sur les capacités d'abstraction, de calcul, de science, de technologie. Autrement dit, la science et la technologie sont des règles avec lesquelles les enseignants de l'Ecole, du Collège et du Lycée  ont tapé sur les doigts... du plus grand nombre (sélectionner, c'est ne garder que quelques uns).
Comment voulons-nous, ensuite, que la masse du public aime les sciences et la technologie ? Bien impossible ! Et nous aurons beau faire, il faudra vaincre une sorte de "réflexe conditionné", ce qui ne se fait pas en un jour.

A cela, il faut ajouter que nos capacités explicatives sont assez médiocres : allez donc expliquer, sans calcul, les arcanes de la mécanique quantique, de la décohérence, de l'intrication, ou même, plus modestement, la seconde loi de Fick, ou même le fait que le dénominateur de l'écart-type d'un échantillon doive s'écrire n-1... Allez donc expliquer "avec les mains" l'effet gyroscopique, ou pourquoi les vagues arrivent parallèlement au rivage...
Certes, on parvient à donner des idées de, ou le goût de, avec des exemples tel que la conjecture de Syracuse, dont nous avions fait un dessin animé sur Arte, mais les difféomorphismes du cercle ? les tores à trois dimensions ? la démonstration par Andrew Wiles du théorème de Fermat-Wiles ?

Autrement dit, si nous ne savons pas expliquer, comment attendre que nos amis puissent comprendre ? Et donc qu'ils puissent accepter. Sommes-nous assez fiables pour qu'ils aient confiance ?

Cela étant posé, il y a sans doute d'autres causes que je n'ai pas le temps de considérer et d'évoquer. Mieux vaut proposer avec optimisme et dynamisme des pistes pour améliorer les choses.
D'abord, "Si Peau d'Âne m'était conté, j'y prendrais un plaisir extrême", disait La Fontaine. Apprenons à raconter des histoires, et racontons-les. Activement. Pas besoin de "science citoyenne", surtout quand elle est trouble, mais mobilisons-nous pour :
1. être des citoyens exemplaires
2. donner des explications, afin de ne pas former une caste supérieure, méprisante du peuple
3. refusons d'être des gourous, et ne parlons que dans le domaine d'expertise qui est le nôtre
4. apprenons à nous enthousiasme pour la science, la technologie, la Connaissance, la Culture !

Et c'est ainsi que la physico-chimie est belle ;-)

jeudi 14 mars 2013

La science peut-elle être citoyenne ?

Non, la science ne peut pas être citoyenne, sauf pour les personnes qui ne savent pas parler français, ou pour celles qui ne savent pas ce qu'est la science.

Quand on parle d'une fleur bleue, c'est la fleur qui est bleue. De ce fait, on ne peut pas parler de "cortège présidentiel", sauf si le cortège est le président lui-même. Sinon, c'est la faute célèbre du partitif.
Bref, le cortège du président n'est pas le cortège présidentiel.

Science citoyenne ? De même, il faudrait admettre que la science est un citoyen... ce qui n'est vraiment pas possible !

Supposons que l'on admette la faute, avec une indulgence excessive ; peut-on envisager une science citoyenne, qui serait une science en vue du citoyen ? Là, il y a hélas soit un pléonasme, soit un oxymoron.
Pléonasme : si l'activité scientifique est payée par l'Etat, alors les résultats doivent être mis à la disposition de tous les contribuables. C'est une évidence, donc un pléonasme
Oxymoron, en revanche : si l'on veut dire que le citoyen doit pouvoir guider la science, alors c'est bien impossible, comme quand on parlait de "science prolétarienne", par exemple. La science ne se commande pas, et les découvertes sont hélas imprévisibles. La démocratie ne peut rien au royaume de l'activité scientifique, et tant pis pour nos "décideurs", souvent prétentieux, qui voudraient guider les découvertes. Ne prenons pas nos désirs pour des réalités.
Ou alors, il y a confusion entre science et technologie... mais on ne peut pas imaginer que nos élites fassent une confusion si élémentaire, quand même. 

Bref, la science ne sera jamais citoyenne !




Dernière minute :
Ayant posté ce billet hier, je reçois presque aussitôt des messages : 
1. Cher collègue,
Merci pour l'information et félicitations pour votre réaction énergique. La science est de plus en plus souvent instrumentalisée à des fins politiques et c'est très dangereux : les OGM et le climat en sont des exemples navrants.
Cordialement.
xxxx, Professeur émérite de chimie-physique, Université de Bruxelles.

2. Merci pour ce mail édifiant!

3. Cependant, l'accès à l'information scientifique  dans un pays comme la France étant largement  disponible, ce rejet des sciences a une autre  cause que la simple méconnaissance. Il n'y a en  effet rien de plus simple si l'on veut apprendre que de se rendre dans une bibliothèque ou lire des sites sérieux sur Internet.

Je vois donc deux raisons à cette méconnaissance des faits:
- paresse intellectuelle : il suffit de voir le  succès des documentaires de propagande type M R. Et encore, ce genre de  documentaire militant ne touche qu'une toute  petite partie de la population, la majorité
préférant les bêtises de la télé (arme de distraction massive)
- collusions entre les scientifiques/politiques  et les industriels (sang contaminé, amiante, médicaments, etc.)

4.
Merci pour cette information. Je partage tout à fait votre point de vue. La Science traite du réel et n'a que faire des idéologies. Dans notre monde de la France  d'aujourd'hui, il y a trop d'affabulations développées à partir de résultats scientifiques qui trompent les citoyens. Sans une forte culture scientifique, il est difficile de faire la part des choses; et le bon sens n'est pas bien répandu. Je pense qu'il y aurait un remède à cela, c'est de préciser ce que l'on sait et ce que l'on ne sait pas.  Les médias ne savent pas dire "ce que l'on ne sait pas" ; le citoyen ordinaire a l'impression que l'on sait tout,  et mélange l'affabulation et le réel. Au point de penser que la Science doit devenir citoyenne!

Pour moi qui suis électricien, ce que l'on ne sait pas c'est le lien entre le champ électromagnétique et la matière (le boson de Higgs?) et de ce fait on véhicule des tas d'images fausses: par exemple, assimiler le flux d'électrons à un flux d'eau (les électrons ont un parcours moyen limité), confondre l'effet des ondes à une discontinuité de la propagation avec un phénomène mécanique, etc. 

Il faut donc que les scientifiques communiquent pour dire ce qu'ils ont trouvé en en précisant la limite. Je pense que si le message scientifique contenait la limite de la connaissance acquise, le bon sens reviendrait et la question de la Science citoyenne serait sans objet.

A propos du nouveau pape François

Les Jésuites ont cette phrase merveilleuse :

Il faut se comporter en Chrétien, et non en tant que Chrétien.



mercredi 13 mars 2013

Un stage pour déterminer sa carrière ?

Ce matin, une "nouvelle amie" du laboratoire m'avoue qu'elle utilisera son stage pour déterminer sa carrière. Erreur !

Imaginons qu'elle soit dans un environnement amical et que, en conséquence, elle fasse des travaux qui lui plaisent. Elle risque de penser que la recherche scientifique est ce qu'elle veut faire. Mais ne pourrait-elle pas, aussi, tomber avec des gens désagréables, avec la même activité scientifique, qui lui feraient conclure que la recherche scientifique est une activité désagréable ?

Alors, comment se déterminer ?

Ah, la recherche !

Ce matin, une nouvelle "amie" au laboratoire (un stage), qui me signale qu'elle veut faire de la recherche.
Ces temps ci, le mot revient, encore et encore... mais de quoi s'agit-il vraiment ? J'ai fait un livre entier sur la question (Science, technologie, technique : quelles relations).
La recherche scientifique ? C'est de la recherche scientifique, ou de la science, qui se fait dans les laboratoires de l'Etat.
La recherche technologique ? C'est ce qui se fait, dans l'industrie, et l'on cherche à obtenir un résultat pratique : guérir du SIDA, la mise au point d'un test de dépistage du cancer de l'estomac par une simple inhalation, le remplacement du crâne humain chez un patient vivant, un réfrigérateur quantique...
La recherche technique ? C'est de la technologie (voir cas précédent).
La recherche artistique ? C'est de l'art, pas dans un laboratoire scientifique.
La recherche historique? géographique?

Bref, le mot "recherche" est à toutes les sauces, mais, quand je l'entends, je sais qu'il faut poser la question "de quoi parlons-nous vraiment ? " (et savons nous bien de quoi nous parlons?)

Vive la connaissance !

mardi 12 mars 2013

Un combat à mener

Militons ! Hier, j'ai appris que l'Education nationale représentait la molécule de benzène avec trois doubles liaisons, au lieu de la représentation plus cohérente d'une délocalisation des électrons pi.
Est-ce grave, au fond ? Oui, parce que je vois, ensuite, des étudiants avancés qui croient qu'il y a des doubles liaisons dans la molécules de benzène, et qui, en conséquences, iront chercher à faire des additions, et s'étonneront de la réactivité particulière de ce composé.
D'ailleurs, tant qu'on y est, on serait avisé de combattre le mot "résonance", pour conserver celui de mésomérie. En effet, s'il y avait une résonance, il y aurait une fréquence de résonance !
Non, il n'y a pas "oscillation" entre les formes limites !

Donc représentons le benzène avec un petit cercle au milieu, et parlons de mésomérie.

Rien que du bonheur

Il y a quelques années, l'Education nationale avait pris une décision déplorable : il avait été décidé que la double flêche, qui représente les équilibres chimiques, serait représentée par un signe égal.
C'était une mauvaise décision... parce que Gherd Van't Hoff avait reçu le prix Noble de chimie, en 1901, pour avoir précisément remplacé le signe égale par une double flèche.
La question est de savoir de quoi on parle : représente-t-on un mécanismes, des objets, ou bien fait-on une équation ?
La seconde possibilité n'est pas admissible, car quand on écrit "Fe2+" à gauche du signe =, on doit supposer que c'est la quantité d'ions ferreux. Or ce n'est pas ce qui est entendu par cette représentation là.
Bref, sous l'influence de physiciens insuffisamment compétents en matière de transformations moléculaires, on avait fait quelque de mauvais.

La bonne nouvelle, c'est que l'Education nationale (qui était quand même bien isolée, dans le monde!) est revenue en arrière !


Il faut savourer cette victoire. Vive la physico-chimie !

dimanche 10 mars 2013

généralisons

John Tyndall,  succéda à Faraday à la Royal Institution (Faraday as a discoverer, Ed Apollo) : "When an experimental result was obtained by Faraday, it was instantly enlarged by his imagination. I am acquainted with no mind whose power and suddenness of expansion at the touchh of new physical truth could be ranked with his. Sometimes I have compared the action of his experiments on his mind to that of highly combustible matter thrown into a furnace; every fresh entry of fact was accompanied by the immediate development of light and heat. The light, which was intellectual, enabled him to see far beyond the boundaries of the fact itself, and the heat which was emotional, urged him to the conquest of this newly revealed domain. But though the force of his imagination was enormous, he bridled it like a mighty rider, and never permitted his intellectual to be overthrown. In virtue of the expansive power which his vivid imagination conferred upon him, he rose from the smallest beginnings to the greatest ends. "

[Quand Faraday obtenait un résultat expérimental, il le généralisait aussitôt en faisant usage de son imagination. Je ne connais aucun esprit dont la puissance et la capacité de généralisation soudaine ait atteint celui de Faraday. Parfois j'ai comparé l'action d'une expérience sur son esprit à l'inflammation soudaine d'un combustible jeté dans un fourneau ; chaque nouvelle brassée de faits était immédiatement accompagnée d'un rapide dégagement de lumière et de chaleur. La lumière, qui était de nature intellectuelle, lui permettait de voir plus loin que les limites du fait lui-même, et la chaleur, qui était de l'ordre de l'émotion, le poussait à conquérir aussitôt ce nouveau domaine qui lui était révélé. Mais, alors que la force de son imagination était considérable, il a bridait comme un cavalier puissant, et ne permettait jamais à son jugement d'être renversé. Grâce à la puissance généralisatrice que lui donnait son imagination vigoureuse, il s'élevait des plus petits faits aux plus grandes perspectives]

jeudi 7 mars 2013

Je me fais mes remarques à moi même

La cuisine note à note dérange, et nous entendons les premiers grognements.

Pourtant, il serait juste de reconnaître que je suis le premier à poser les questions :
- quid de l'aspect nutritionnel ?
- quid des risques (différents des dangers) ?
- cette cuisine profitera-t-elle au "grand capital" ?
- nuira-t-elle aux petits producteurs ?
- la cuisine note à note fera-t-elle disparaître nos cassoulets, choucroutes, aïollis.... ?
- la science est-elle à l'opposé de la cuisine?
- y aura-t-il de la chimie dans l'assiette ?
- l'avant-gardisme artistique des chefs adeptes de la cuisine moléculaire permet-il à l’industrie agroalimentaire et chimique d’introduire des techniques innovantes ?
- la cuisine note à note fait-elle disparaître les produits agricoles et de l'élevage ?
- la cuisine note à note est-elle une "vraie nourriture" ?
- cela a-t-il un intérêt de faire de la cuisine note à note ?
- ai-je une "bande" d'amis diaboliques qui voudraient nuire à la santé publique ?
- ai-je des intérêts cachés ?
- l'argent que des industriels donne au laboratoire sert-il à développer leur activité au détriment des artisans ?


Les réponses étant un peu dispersées, donnons-les ici, en partant de la fin :

Des industriels donnent de l'argent au laboratoire pour des études scientifiques, et notamment des doctorants. Par exemple, une thèse a voulu examiner les changements de couleurs des haricots verts au cours de la cuisson ; une autre s'est intéressée aux mécanismes des échanges entre une solution (bouillon, sauce) et des tissus végétaux (carottes, oignons) où ces tissus étaient traités thermiquement. Un travail récent cherchait à savoir si les glycoalcaloïdes des pommes de terre (dans la partie corticale) migraient au cours d'une cuisson. Je ne crois pas que nous puissions avoir honte de telles études, ni nous les reprocher. En l'occurrence, nous cherchons des mécanismes, et nous ne nous substituons pas aux industriels, pour les parties applicatives.

Ai je des intérêts cachés ? Non, aucune société, pas d'action dans des sociétés qui bénéficieraient de mes travaux. Et pas de proche qui récupérerait des sous de telles sociétés.

Une bande d'amis diaboliques ? Pas à ma connaissance : je cherche à fréquenter des gens honnêtes financièrement et intellectuellement. Evidemment, ces amis sont souvent des personnes qui préconisent que la Connaissance peut améliorer le monde où nous vivons (je fréquente peu d'obscurantistes).

La cuisine note à note présente-t-elle un intérêt artistique ? Oui, on pourrait continuer à jouer du Bach et du Mozart, à faire du Rodin, ou à cuisinier comme Carême... mais l'histoire de la cuisine nous montre que les grands Anciens ont été des novateurs ! La cuisine note à note permet de faire des oeuvres impossibles autrement.

La cuisine note à note est-elle une vraie nourriture ? Pour moi, une nourriture, un aliment, c'est quelque chose qui nourrit. Les études scientifiques ont largement montré que la cuisine classique n'était pas exempte de dangers et de risques (benzopyrènes dans les flammes, dans les barbecues). Je sais l'attachement à la cuisine classique... mais ne pourrions nous pas avoir la même chose (au pire) débarrassée des risques ?
Pour en revenir aux possibilités, la cuisine note à note produit (vise à produire) des aliments, des mets, donc de la nourriture. Je vois d'ailleurs mal ce que pourrait être une vraie nourriture et une fausse nourriture.

Quid de l'aspect nutritionnel ? Je suis le premier à dire que nous ne savons sans doute pas comment construire des plats note à note pour une cuisine quotidienne, tous les jours de toutes les années. Et j'encourage mes amis nutritionnistes à nous répondre.

Quid des risques (différents des dangers) ?  Un couteau est dangereux, mais il n'y a pas de risque s'il est replié, dans un tiroir fermé à clé. Nous devons donc apprendre à nous servir des ustensiles, des produits. Note à note ou pas !

Cette cuisine profitera-t-elle au "grand capital" ? La cuisine note à note a été introduite pour favoriser l'enrichissement des agriculteurs. Par des fractionnements à la ferme, on vise à leur donner de la valeur ajoutée. Au lieu de vendre des carottes, ils vendraient des fractions de carottes. N'est-ce pas déjà le cas pour le raisin (ils font du vin) ou le lait (ils font du fromage) ?

Nuira-t-elle aux petits producteurs ? Au contraire, il y a la possibilité de produire des fractions de façon individuelle ! Nous l'avons montré lors du Cours 2012 de gastronomie moléculaire.

Na cuisine note à note fera-t-elle disparaître nos cassoulets, choucroutes, aïollis.... ?  Non : le jazz, le rock, n'ont pas fait disparaître Mozard et Bach ; ils se sont ajoutés, et nous avons aujourd'hui plus de choix, de liberté!

La science est-elle à l'opposé de la cuisine ? Disons que cela n'a rien à voir. La science cherche à comprendre les mécanismes des phénomènes, et la cuisine veut faire à manger (produire de la ... vraie ;-) nourriture).

Y aura-t-il de la chimie dans l'assiette ? Ici, mea culpa ! Dans le temps, j'ai dit que la cuisine, c'était de la chimie ; puis j'ai dit publiquement que je m'étais trompé en le disant, parce que j'avais cru que l'on pourrait dire que le mot "chimie" désignait la science des réarrangements d'atomes. Dans un récent billet, j'ai fait amende honorable, et je crois que la chimie, c'est l'activité de production de composés nouveaux. Donc la cuisine c'est de la chimie !

L'avant-gardisme artistique des chefs adeptes de la cuisine moléculaire permet-il à l’industrie agroalimentaire et chimique d’introduire des techniques innovantes ? D'abord, la cuisine moléculaire est une vieille histoire. Ensuite, oui, ces chefs ont utilisés des gélifiants comme la méthylcellulose ou comme les carraghénanes, mais quelle différence avec la gélatine ou avec la pectine ? Des industriels produisent tous ces produits, et bien peu d'entre nous font encore leurs baravois à partir de pied de veau. Bien peu d'entre nous évitent de consommer du sucre de table, lequel ne se trouve pas, tout blanc, dans la nature ! La cellulose, elle, est dans les plantes. La pectine aussi, la gélatine dans les tissus animaux.

La cuisine note à note fait-elle disparaître les produits agricoles et de l'élevage ? Allons : j'ai proposé que l'on fractionne les produits animaux et végétaux, comme on extrait le sucre des betteraves. Ce n'est pas demain que l'on pourra se passer de cultiver des végétaux pour en récupérer les meilleures parties ! De la terre, du vent, du soleil, de la pluie... et les végétaux nous produisent des composés très élaborés ! Economiquement !


Au fait, pourquoi répondre aux craintes ? Parce que je crois qu'elles sont légitimes. Il est question de prudence.

Vive la connaissance, qui nous prémunit contre les risques, à défaut de pouvoir abattre les dangers, qui sont partout dans notre monde !


mardi 5 mars 2013

Supplément d'âme

Supplément d'âme ? Le mot est beau... mais faut-il céder au charme d'une expression qui engage plus qu'on ne l'a décidé ?
Parler d'âme, c'est en supposer l'existence. L'âme, c'est quand même quelque chose de très connoté religieusement.
Je ne dis pas ici si je suis croyant ou non : je dis simplement que celui qui maîtrise la langue qu'il emploie sait que l'expression "supplément d'âme" se dit croyant.

Evidemment cet exemple n'est que représentatif de toute une catégorie de paroles, d'actes.