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dimanche 28 mai 2023

Moins de graisse ;-)

 Dans un train, un magazine traînait. Voici le titre de sa 4e de couverture : 

chips-avec-moins-de-graisse

 

Une chips avec 40 % de graisse en moins ? En moins que dans quel produit ? Et puis, si la frite n'est pas frite, pourquoi y aurait-il même un soupçon de matière grasse, alors qu'il n'y en a pas dans la pomme de terre. 

 

Bref, tout cela est bien la preuve qu'une certaine industrie alimentaire prend les citoyens pour des imbéciles. Je souhaite que le prochain chantier politique, en matière alimentaire, porte sur la loyautés des conditionnements.

samedi 27 mai 2023

Et si l'industrie alimentaire innovait comme le prêt à porter ?

 Et si l'industrie alimentaire innovait comme le prêt à  porter ? On a beau regarder  : les aliments produits par l'industrie alimentaire semblent très classiques, et très comparables, selon les marques. Les salons professionnels, d'ailleurs, montrent bien que les innovations dans le domaine alimentaire portent surtout sur le conditionnement, plus que sur les aliments eux-mêmes. Ce sont les éternels cassoulets, choucroute, pizzas, salades de carottes ou de pomme de terre... Je n'ai pas besoin de vous inviter à faire la visite dans un supermarché pour vous convaincre que bien peu de changements ont eu lieu. 

 

Bref, je maintiens que  l'industrie alimentaire innove peu en ce qui concerne le contenu affiché des mets (et si ces mets étaient changés, en dépit ce qui est « affiché », alors ce serait déloyal!). D'ailleurs, l'industrie alimentaire voudrait-elle évoluer qu'elle le pourrait difficilement : nous sommes "biologiquement" collés à l'alimentation que nous avons eu enfant, et les changements de culture alimentaire sont difficiles. 

L'histoire d'Augustin Parmentier le démontre à l'envi : il fallut à la fois une famine et une intelligente stratégie pour déterminer les Français à consommer des pommes de terre. 

Arrêtons-nous à la stratégie : il donna au roi à consommer des pommes de terre, tout comme, plus tard, Auguste Escoffier assura le succès de sa pêche Melba en la nommant d'après une actrice célèbre. 

Dans les deux cas, c'est l'argument d'autorité... qui est largement utilisé par l'industrie de l'habillement, qui parvient, elle, à imposer des styles très variés et parfois quasi imbéciles : cela va de la casquette à l'envers jusqu'au pantalon troué par avance ! Comment l'industrie du vêtement s'y prend-elle ? D'abord, il y a un "artiste", qui dessine des vêtements qui sont réservés à une élite (sur mesure), et souvent portés dans des circonstances (défilés de mode, festivals de cinéma, galas...) qui s'apparentent à la consommation de pomme de terre par le roi ; puis l'argument d'autorité joue, et le public adopte les nouvelles modes, ce qui permet le développement de production en série. 

Observons qu'il s'agit là d'un mécanisme qui correspond pleinement à du "design", lequel est né avec la Révolution industrielle, et la collaboration des artistes à des industries produisant en série. 

 

Pourquoi l'industrie alimentaire ne pourrait-elle fonctionner de même ? 

L'introduction de véritables innovations aurait l'intérêt de la libérer du carcan de la concurrence, qui, depuis quelques années, conduit à une réduction désastreuse des marges bénéficiaires. Se pose alors la question de la collaboration de l'industrie avec les "artistes". 

Là, il faut reconnaître à la pratique culinaire trois composantes : technique, artistique, de lien social. Si l'industrie alimentaire est techniquement compétente, elle est souvent très faible artistiquement, et gagnerait donc à s'adjoindre le concours des meilleurs artistes. Comment y parviendra-t-elle, économiquement ? La pratique des droits d'auteur semble pouvoir être mise en oeuvre, pour le bénéfice commun des artistes et des sociétés qui les emploieront : cette pratique conduit à éviter de gros investissements, et incite les deux parties à oeuvrer de conserve pour assurer le succès de leurs produits.

mardi 26 avril 2022

À propos de denrées alimentaires, et pas seulement d'ailleurs, il faut de la loyauté, de la loyauté et encore de la loyauté


 
Je reçois, il y a quelques jours, un email de correspondants qui me demandent de les aider à fabriquer des vins artificiels. Ils ajoutent qu'ils savent qu'en France, cela est interdit, mais qu'ils comptent sur des réglementations plus souples dans d'autres pays pour vendre leurs produits.

Ils m'interrogent sur la manière technique de parvenir à de telles reproductions.

Je leur explique d'abord qu'une analyse des composés odorants ne suffira pas, comme ils le croient, et je leur propose de prendre les choses dans l'ordre,  à commencer par le premier ordre, puis le deuxième ordre,  et ainsi de suite... comme expliqué dans mon livre Mon histoire de cuisine.

Au premier ordre, le vin c'est de l'eau.

Au deuxième ordre, c'est de l'eau et de l'éthanol.

Au troisième ordre... c'est là que  tout se complique, parce qu'il y a des directions différentes  : l'odeur est importante, mais la saveur aussi, sans compter les autres modalités sensorielles.

On peut vouloir mettre des phénols, notamment des tanins, mais on peut aussi vouloir mettre des composés odorants, par exemple, et le jeu de la reproduction est infini.

Sans compter qu'il faut de belles compétences en formulation odorante pour arriver à synthétiser un cocktail de composé odorants qui ressemblera à quelque chose, quand on part d'un fouillis de pic de chromatographie.

Et j'ai terminé ma discussion de la question en évoquant la constitution colloïdales des vins, à savoir que les vins ont, en suspension, des particules minuscules, invisibles, qui contribuent au goût. Cela est essentiel, et  il faut se demander comment  le reproduire.

Pour terminer ma réponse à mes interlocuteurs,  je discute le fait que le produit ainsi réalisé ne pourra sans doute pas faire référence au vin, car le mot vin est réservé par la loi aux produits  obtenus par fermentation du jus de raisin.

Et c'est bien  : la question de la loyauté, dans le commerce des denrées alimentaires, est essentielle.

Ce qui m'étonne, c'est que mon analyse n'a été suivie d'aucun merci, comme si la réponse que je leur donnais, qui manifestement n'allait pas dans le sens qu'ils voulaient, les avais heurté. Mais je n'y suis pour rien : ce n'est pas moi qui cherche à faire quelque chose d'éventuellement déloyal.

En tout cas, des individus qui sollicitent votre expertise et qui n'ont pas un merci sont des goujats.

mardi 22 mars 2022

Loyauté

 
Quand on veut aider les amis à bien comprendre, il s'agit d'être clair et d'utiliser des mots loyaux, sans ambiguïté.

Dans un tweet récent, j'avais signalé que la terminologie "levure chimique" me semblait déloyale ou fautive, et je proposais de l'interdire, mais mon message a suscité une discussion avec des correspondants qui disaient en substance que, au fond ce n'était pas si grave.

Je n'ai pas dit que c'était très grave, mais j'ai observé que
1. cela n'aidait pas mieux comprendre
2. quand il y a des possibilités de confusion, nos amis confondent et rencontrent des difficultés
3. les commerçants sans scrupule utilisent les confusions pour leurs agissements répréhensibles.

D'aillerus,  je vois dans le milieu culinaire des confusions d'un genre tout à fait analogue à propos de gélatine et d'agents gélifiants.
La gélatine, c'est un agent gélifiant parmi d'autres, d'origine animale exclusivement. Il y a d'autres agents gélifiants extraits des plantes ou des algue,s mais ce ne sont pas des gélatine  : ce sont des agents gélifiants.

J'insiste :  chaque fois qu'il y a une confusion, il y a des malhonnêtes qui s'en empare pour tromper ceux à qui ils vendent leurs produits, et voilà pourquoi je crois tout à fait importante la loi de 1905 qui revendique que les produits soient loyaux   : si c'est du bœuf, ce n'est pas du cheval.

Les confusions précédentes, entre levures, levure de boulanger et poudre levante,  ou entre gélatine et agents gélifiants sont en réalité tout à fait analogues à la confusion entre boeuf et cheval  :  il s'agit de viande dans les deux cas, mais le prix n'est pas le même !

Bref,  on n'aura  jamais raison de supporter des confusions quand on est capable de pas les faire, et nous avons un devoir, si nous comprenons bien, d'éclairer nos amis.

vendredi 8 novembre 2019

Surimis et diracs fibrés

Comme dit dans d'autres billets, il y a lieu d'être particulièrement prudent à propos de dénomination de produits alimentaires, car leur commercialisation ne doit jamais conduire à de la déloyauté.

Ici, la question est de nommer des produits qui auraient la texture de surimis sans en être. 

Mais avant d'en décider, il faut que je présente les deux protagonistes de l'alternative terminologique dont il est question maintenant.
D'une part, les surimis sont des produits traditionnels dans certaines parties de l'Asie, qui sont fait à partir de poisson broyé, d'amidon (pensons à de la sauce blanche) et de matière grasse, la pâte ainsi constituée est striée par passage sous un peigne, et les feuillets striés sont cuits, puis roulés sur eux-mêmes en bâtonnets, colorés avec du paprika et reçoivent une dispersion d'un aromatisant qui rappelle le goût du crabe, par exemple.
Qu'en dit la réglementation ? Les surimis font l'objet d'une norme d’application volontaire, numérotée NF V45-068, qui encadre les conditions d’usage du mot « surimi » et la composition de ces petits bâtonnets et de leurs dérivés. Ce document a été élaboré par des représentants des industriels, des distributeurs, des autorités réglementaires (dont la DGCCRF et le Service commun des laboratoires, SCL), des centres techniques, des laboratoires d’analyses et des organismes de certifications. Ils font partie de la commission de normalisation AFNOR / V45C « Produits transformés issus de la pêche et de l’aquaculture ».
La norme volontaire indique que le produit surimi doit contenir au minimum 30 % de chair de poisson ou de céphalopode. Elle autorise aussi l’ajout d’ingrédients pour aromatiser ou valoriser le surimi. Si l’ingrédient d’origine aquatique (poissons, crustacés, mollusques, algues, etc.) représente plus de 5 % – en poids – du produit fini, la norme autorise le fabricant à le mentionner sur l’emballage, avec une phrase-type telle que « surimi à xxx », ou « surimi de chair de poisson à xxx ». Pour les autres ingrédients, qu’ils soient d’origine terrestre (chorizo, lard fumé, etc.), végétale (fruits, légumes, épices, aromates, etc.) ou comportant de l’alcool (mirin, vin, etc.), la norme volontaire ne fixe pas de pourcentage minimal ou maximal. Concernant les aromatisants, additifs et colorants, la norme rappelle la nécessité de respecter les réglementations concernées, mais proscrit les additifs à usage de blanchiment. Elle autorise l’usage de liants (lait, dérivés de lait, farines), d’huiles et graisses végétales (hormis certaines, comme l’huile de palme), d’huiles d’animaux aquatiques, des fibres végétales, de l’eau, du sucre et du sel.

D'autre part, il y a très longtemps, j'ai nommé diracs ces préparations qui reproduisent des tissus musculaires (viandes, poissons), pour ce qui concerne la composition chimique, à savoir environ 70 % d'eau, 20 % de protéines et 10 % de matière grasse. Et c'est ainsi que l'on obtient une sorte de steak quand on mélange 7 cuillerées d'eau, 2 cuillerées de protéines coagulables (par opposition à la gélatine qui coagule pas  à la chaleur) et une cuillerée d'huile. Un tel dirac est très élémentaire, mais on peut en produire de nombreuses versions  : on peut émulsionner plus d'huile pour obtenir un dirac émulsionné, on peut foisonner afin d'obtenir un dirac mousseux, foisonné. On peut aussi l'étaler en couches très minces superposées pour faire des dirac feuilletés... et l'on peut enfin le strier, un fois en couche mince,  pour obtenir un diras  fibré.
Et puis, on peut aussi mélanger lla pâte faite de protéines, d'eau et de lipides, avec une sauce blanche, et l'on  retrouve alors une composition analogue à celle du surimi, avec la même consistance. Pour le goût et la couleur, on met ce que l'on veut et l'on obtient tout aussi bien des diracs striés bleus, ou rouges,  ou jaunes,  ou verts, avec des  goûts de poire, de rhum, de poisson, le citron...

D'où la question : un dirac fibré serait-il un surimi ? Vu la norme volontaire actuelle, ce serait abusif, car le surimi est aujourd'hui connu pour être un produit délimité tel que je l'ai expliqué plus haut, même si la norme volontaire peut évoluer.

Bref, finalement, je crois qu'un dirac fibré doit être nommé dirac  fibré.

Un dirac strié replié sur lui-même, réalisé à l'Institut technique d'hôtellerie du Québec en 2012.

mercredi 6 novembre 2019

Il faut de l'honnêteté, en matière de commerce de denrées alimentaires ! (et pas seulement, bien sûr)


L'histoire de la tour de Babel est connue  : des hommes présomptueux avaient pour projet de construire une tour si grande qu'elle attendrait le ciel,  et Dieu lui-même. Celui-ci suscita les langues qui séparaient les communautés et stoppa le projet.
Les mots sont donc essentiels,  et il est vrai que, en matière alimentaire, la question des mots est primordiale, ce qui est bien reconnu par la loi sur le commerce des denrées alimentaires de 1905 : les produits doivent être sains, marchands, mais aussi loyaux :  du "cheval" n'est pas du "bœuf",  et vice et versa.
Les métiers du goût doivent  être particulièrement vigilants sur cette question parce qu'il en va de leur image auprès du public. À une époque où des élus menacent de taxer  les produits de charcuterie pour des raisons idiotes (éliminer les nitrites... qui pourtant sont utilisés pour combattre le botulisme), certains industriels finauds prévoient de contourner des réglementations ou de faire des publicités nauséeuses, par exemple en cuisant les jambons dans les bouillon de légumes qui apportent des nitrites qui ne seront donc pas déclarés sur l'étiquetage des produits,  alors nous devons examiner soigneusement les dénominations des produits et militer vigoureusement pour l'application la réglementation voir sur sa définition même. Aujourd'hui, je prends l'exemple de la béarnaise, cette sauce qui, certes, a varié au cours du temps, mais qui quand même, s'est fixée à une réduction d'échalotes dans du vinaigre, de l’œuf,  du beurre et de l'estragon, plus évidemment quelques constituants secondaires comme le sel et le poivre.
La question de la loyauté n'est pas facile, parce que  la simple pratique culinaire, mais aussi et la recherche d'innovations, conduisent souvent à être tenté de garder les anciennes dénominations pour des préparations nouvelles. Par exemple, nous faisons aujourd'hui des crèmes anglaises avec seulement 8 jaunes d’œufs par litre de lait, alors qu'il y en avait 16 il y a un siècle : la préparation moderne n'a rien à voir. Ou encore, je me souviens avoir inventé il y a plusieurs décennies ce que j'avais nommé des mayonnaise sans œuf, et je n'avais pas compris,  alors,  que cela était non seulement impossible mais déloyal. Non pas qu'il soit impossible de préparer des émulsion sans œuf,  et ce fut mon invention des "ollis", mais surtout que ces préparations ne sont pas des mayonnaises. Une mayonnaise sans œuf, c'est comme un carré rond... puisque la réglementation reconnaît fort heureusement qu'il faut au minimum 8 pour cent de jaune d'œuf dans une mayonnaise. Sans quoi, c'est un autre produit.
Tout comme le vin, qui est le produit de la fermentation du jus de raisin. On peut parfaitement faire des préparations synthétiques qui confondent parfaitement avec du vin, mais elles devront porter un autre nom que celui de vin.
Revenons à l'exemple de la béarnaise. Certes, Marie-Antoine Carême on donne une recette différente de celle d'aujourd'hui, et même aujourd'hui on obtient des résultats bien différents selon que l'on commence par produire un sabayon ou pas. On rappelle qu'il y a en cuisine des subtilités merveilleuse et que, par exemple, le beurre noisette versé dans du vinaigre fait un résultat bien différent de celui que l'on obtient en mettant du vinaigre dans le beurre noisette. D'ailleurs il faut ici discuter le mot différent  : il peut y avoir des différences de consistances, mais les différences de goûts sont essentielles,  et c'est cela qui pose problème pour les brevets : deux sauces qui ne diffèrent que par une pincée  de piment de Cayenne sont en réalité différentes.
Mais quand même, comment ne pas se mettre en colère quand on voit des industriels prétendre nommer béarnaise des sauces faites à partir de matière grasse végétale, et non de beurre ? D'aromatisant estragon et pas d'estragon ? Je ne dis pas que ces sauces ne sont pas bonnes, mais je dis qu'elles sont déloyales, malhonnêtes ! Je l'avais signifié par courrier au fabricant, et ma colère s'est accrue quand j'ai reçu une lettre de réponse me disant que la pratique était parfaitement autorisée dans le cadre du Codex alimentarius.
C'est  la preuve que nous n'avons pas assez milité pour des dénominations justes. Et c'est la démonstration aussi du fait que ce fabricant est un salaud, qui prend une lourde part de la responsabilité d'une sorte de nivellement par le bas de la cuisine,  de sorte qu'il ne faudra pas s'étonner si plus tard, le public en vient à le critiquer pour ses pratiques.
D'ailleurs, dans toute cette affaire, je vois que les scientifiques sont en quelque sorte utilisés par le monde professionnel artisanat, car ce sont eux qui montent au créneau, alors que c'est la profession tout entière qui devrait réagir.
Et voilà pourquoi je ne cesse de réclamer la création d'académies pour chaque profession du goût : son rôle doit d'abord être de codification.
Mais revenons à notre béarnaise : on peut parfaitement faire une sauce analogue à la béarnaise, sans œuf ou sans beurre, mais ce n'est pas une béarnaise

samedi 1 juin 2019

A propos de lait, de beurre, de crème

Je reçois ce message : 

Bonsoir Monsieur This,
À quel moment peut-on utiliser le mot « lait » ou « crème » sans faire d’erreur ? Je m’y perds un peu.
J’ai lu, il y a quelque temps, un article très intéressant que vous aviez écrit à ce sujet justement.
C’était à propos du « lait » et des diverses appellations des « lait de soja », « lait d’amande » « lait de chèvre » etc.
Je vous remercie à l’avance de bien vouloir éclairer ma lanterne avec la précision que vous mettez toujours dans vos réponses.
 


Et voici ma réponse : 

 Merci du message.
Le lait de vache, c'est donc le lait de vache. Et le lait de chêvre, le lait de chêvre. La crème, c'est ce produit que l'on récupère à la surface du lait qui a reposé.
Jusque là, tout va bien.

Ce qui se complique, c'est quand il est question d'argent, de commerce. Et là, il y a des services de l'Etat pour protéger les citoyens (vous voyez que je préfère ce terme à "consommateurs"), en mettant des limites qui permettront de combattre les malhonnêtes (mais vous verrez ci dessous que ces réglementations n'ont pas que du bon).
Oui, il faut des dénominations claires, parce que la loi veut justement que les produits soient sains, loyaux, marchands. Et notamment loyaux : du lait, ce n'est pas du lait écrémé, par exemple. Mais imaginons que nous centrifugions du lait avec une machine très efficace : il ne resterait rien du gras initial, et ce lait parfaitement écrémé serait un produit différent de celui que l'on a traditionnellement nommé lait écrémé. Et puis, la crème : est-ce une crème toute fraîchement prélevée sur du lait qui a reposé, ou bien une crème maturée, fermentée ?
Bref, on comprend le besoin d'une réglementation, laquelle passe par des définitions. En l'occurrence, tous les textes réglementaires se trouvent en ligne, sur le site du ministère de l'économie et des finances, à savoir : https://www.economie.gouv.fr/daj/specification-technique-ndeg-b3-07-09-applicable-aux-laits-et-aux-produits-laitiers-date

Et vous y trouverez des choses comme :

La  dénomination  «  lait  »  est  réservée  exclusivement  au  produit  de  la  sécrétion  mammaire  normale,  obtenu par une ou plusieurs traites, sans aucune addition ni soustraction. Toutefois, la dénomination « lait » peut être utilisée : a) pour le lait ayant subi un traitement n'entraînant aucune modification de sa composition ou pour le lait dont on a standardisé la teneur en matière grasse ; b) conjointement avec un ou plusieurs termes pour désigner le type, la classe qualitative, l'origine et/ou l'utilisation  envisagée  du  lait,  ou  pour  décrire  le  traitement  physique  auquel  il  a  été  soumis  ou  les  modifications  qu'il  a  subies  dans  sa  composition,  à  condition  que  ces  modifications  soient  limitées  à  l'addition et/ou à la soustraction de ses constituants naturels. On entend par « produits laitiers » les produits dérivés exclusivement du lait, étant entendu que des substances nécessaires pour leur fabrication peuvent être ajoutées, pourvu que ces substances ne soient pas utilisées en vue de remplacer, en tout ou partie, l'un quelconque des constituants du lait. Sont  réservées  uniquement  aux  produits  laitiers  les  dénominations  suivantes  :  lactosérum,  crème,  beurre,  babeurre,  butteroil,  caséines,  matière  grasse  laitière  anhydre  (MGLA),  fromage,  yaourt  (ou  yoghourt), kéfir, kumis, viili/fil, smetana et fil.

Je ne mets pas tous le document, car vous pourrez le télécharger facilement.
Tout cela étant dit, nous nous souvenons que nous sommes en Europe, d'abord, et que j'aurais dû vous indiquer :
https://ec.europa.eu/agriculture/publi/fact/milk/2007_en.pdf


Mais revenons à des choses simples  : ayant déjà donné la définition du lait, je livre ici celle de la crème  (en vous invitant quand même à regarder tout le document :

La  dénomination  crème  est  réservée  au  lait  contenant  au  moins  30  g  de  matière  grasse  provenant  exclusivement  du  lait  pour  100  g  de  poids  total.  La  dénomination  crème  légère  est  réservée  au  lait  contenant  entre  12g  inclus  et  30g  non  inclus  de  matière  grasse  provenant  exclusivement  du  lait  pour  100 g de poids total.


Et je termine en citant un cas terrible : celui d'un artisan crémier de Bretagne qui faisait un beurre salé excellent, en barattant lui-même. Il fut épinglé parce que son beurre contenait trop d'eau. Et en effet, la réglementation impose un maximum d'eau.

Par exemple, je trouve :
CONDITIONS GENERALES RELATIVES AU CONTRAT DE STOCKAGE
Ne  peut  faire  l’objet  d’un  contrat  de  stockage  privé  que  le  beurre,  salé  ou  non,  produit à partir de crème pasteurisée ou de lait, fabriqué à partir du 1er février 2011 dans une usine agréée de l’Union Européenne et entré en entrepôt frigorifique préalablement au dépôt d’une demande de contrat de stockage privé. 
Le dépôt des demandes de contrat est autorisé à compter du 1er mars 2011.  Le contrat de stockage est conclu entre FranceAgriMer et une personne physique ou  morale  après  réception  à  FranceAgriMer  de  la  demande  de  contrat  figurant  en  ANNEXE  I  (voir  point  8  du  présent  cahier  des  charges). 
La  période  de  stockage  contractuel prend effet le lendemain de la réception de la demande de contrat. Pour    chaque    opérateur,    la    première    demande    de    contrat    déposée    à    FranceAgriMer   au   titre   de   la   présente   campagne   de   stockage   privé   devra   être   accompagnée d’un exemplaire du présent cahier des charges dûment paraphé et signé. Le délai de conclusion du contrat est de 30 jours après réception de la demande de contrat pour le beurre français et de 60 jours pour le beurre produit dans un autre Etat membre, sous réserve de la confirmation de l’éligibilité du beurre. Si l’éligibilité du beurre n’est pas confirmée, le contrat est considéré comme nul et non avenu. La  conclusion  d’un  contrat  de  stockage  privé  pour  du  beurre  fabriqué  dans  un  autre  Etat  membre  est  en  plus  subordonnée  à  la  réception  par  FranceAgriMer  d’un  certificat  établi  par  un  organisme  compétent  de  l’Etat  membre  de  production  dans  les  50  jours suivant l’entrée en stock (cf point 1.7). Un contrat ne peut contenir qu’un lot.  Le contrat : ♦  fixe le numéro de contrat, le début de la période de stockage contractuel ainsi que la période possible de sortie de stockage contractuel ; ♦   reprend  la  nature  du  produit  à  stocker  (beurre  ou  beurre  salé),  la  quantité  contractuelle  ainsi  que  les  frais  de  stockage  susceptibles  d’être  versés  au  contractant (frais fixes et journaliers).
1 - DEFINITION DU BEURRE
1.1 ¾Origine et nature du lait mis en œuvre - composition du beurre
Le  beurre  doit  être  produit,  dans  une  usine  agréée  de  la  Communauté,  soit  à  partir  de  lait  de  vache  produit  dans  la  Communauté,  soit  à  partir  de  crème  pasteurisée  obtenue  directement  et  exclusivement  à  partir  de  lait  de  vache  produit dans la Communauté. FranceAgriMer – stockage– cahier des charges stockage privé beurre  - campagne 2011 12
Le  beurre  recombiné  est  éligible  à  l’aide  sous  réserve  que  le  beurre  concentré  fractionné ayant servi à sa fabrication ait été obtenu à partir de crème reprenant la  définition  précitée  y  compris  après  une  éventuelle  phase  sous  forme  de  beurre. Le beurre doit avoir la composition suivante :
1.1.1 ¾ une teneur minimale en poids de matière grasse butyrique de 82%, ¾ une teneur maximale en poids de 16 % d'eau, ¾ une teneur maximale en matière sèche non grasse de 2 %, ou
1.1.2 ¾ une teneur minimale en poids de matière grasse butyrique de 80%, ¾ une teneur maximale en poids de 16 % d'eau, ¾ une teneur maximale en sel de 2 %, ¾ une teneur maximale en matière sèche non grasse à l'exclusion du sel, de 2 %.

Et mon crémier n'était pas dans les clous... alors que son beurre était bon. Je lui ai bien volontiers  pardonné et j'ai continué d'acheter mon beurre chez lui !




J'espère avoir répondu à la question ? 



 

samedi 30 mars 2019

Le beurre de cacaco, c'est du beurre de cacao, et le chocolat, c'est du chocolat : pas de traficotages !

Nous sommes bien d'acord : même si les mots "sain", "marchand" et "loyal", qui sont à la base de la loi sur le commerce des denrées alimentaires, sont à discuter, il ne faut pas tourner autout du pot : est loyal, honnête, ce qui est loyal, honnête. Et l'honnêteté départage les gens honnêtes des gens malhonnêtes, qui sont en réalité des salauds.



Tout cela  en préambule d'une discussion à propos du chocolat. Le chocolat, c'est une préparation que l'on obtient à partir du cacao, lequel contient à la fois ce qui se nomme beurre de cacao et une partie végétale qui résulte de la torréfaction des graines de cacao. À cette préparation, on a appris à ajouter du sucre pour faire des tablettes de chocolat, qui sont donc faites de moitié beurre de cacao et de moitié de sucre, environ.
Il y a quelques années, sous le prétexte de régulariser les cours du cacao, des industriels peu scrupuleux ont conduit la réglementation a changer, et il a été admis que l'on pourrait ajouter au beurre de cacao trois pour cent de matière grasse quine soit pas du beurre de cacao. Par matière grasse végétale, il faut t'entendre de la matière grasse végétale qui n'était pas présente dans le cacao le nom de beurre de cacao pour ce mélange.

Je récuse absolument le nom de chocolat pour un tel produit ! Le prétexte du changement était que l'on voulait régulariser les cours du cacao, afin d'enrichir les cultivateurs. Mon oeil ! C'était surtout une manoeuvre malhonnête pour se faciliter la vie. Et puis, n'aurait-on pas pu utiliser un autre terme que chocolat pour désigner de tels produits ? Certains ont argumenté en disant que certains fabricants avaient déjà cette pratique... mais alors il fallait sévir contre ces fabricants malhonnêtes, qui avaient usurpé le nom du chocolat. Bref, au lieu de niveler par le bas, on aurait mieux fait de niveler par le haut.
> Je pense que le combat n'est pas perdu et que nous devons absolument militer, aujourd'hui encore, pour que le chocolat soit seulement confectionné à partir de cacao. Il en va de la pluie élémentaire honnêteté.

lundi 11 décembre 2017

De la génoise sans oeufs ? Ce n'est pas de la génoise, puisque cette dernière est faite avec des oeufs

Aujourd'hui, je reçois une question :

Je vous contact dans le cadre d'une création de pâtisserie végétalienne. Nous nous  étions entretenus par téléphone et vous m'aviez donnez de précieux conseil pour la confection de macaron sans œufs. Serait-il possible de m' éclairer cette fois sur le moyen de remplacer les œufs dans une génoise ?




Et voici mon analyse :

 De la pâtisserie végétalienne ? J'ignore ce dont il s'agit, en réalité, parce que les particularités alimentaires sont par million.

Nous nous étions entretenus au téléphone à propos de macarons sans oeufs ? Je n'aurais pas dû : agent de l'Etat, je dois mon activité à l'ensemble des contribuables, et non à pas un en particulier.
En conséquence, j'ai fait une erreur, en prenant sur mon temps pour répondre à une seule personne, et j'aurais dû faire ce que je fais ici : donner le résultat à tous.

Des macarons sans oeufs : en réalité, ce n'est pas possible. C'est comme un carré rond. Si la recette des macarons comporte des oeufs, tout produit qui ne contient pas d'oeuf n'est pas un macaron. Dire "macaron sans oeuf", c'est comme dire "coq au vin sans coq".
Donc il faut un autre nom. Et comme j'ai proposé une recette à mon interlocuteur, surtout si la recette a bien fonctionné (il s'agissait de remplacer les protéines de l'oeuf par d'autres protéines foisonnantes ou coagulantes, telles les protéines de poisson, de viande, de végétaux (les pois contiennent beaucoup de protéines), je dois donner un nom au produit. Mieux encore, je propose un nom d'un chimiste qui a étudié les protéines, soit "berzélius", du nom du chimiste suédois qui a nommé les protéines.

La génoise sans oeuf ? Ce n'est pas une génoise, et, là encore, puisque les oeufs apportent la coagulation à la cuisson d'une mousse semi-liquide, la solution est identique à celle des macarons.






Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

samedi 4 février 2017

Le jambon de Bayonne et autres produits alimentaires

Oublions les groupes de pression, et revenons à des idées simples et justes, qui ne sont pas embobinées par un certain commerce. Il est choquant (et malhonnête) de nommer "champagne" un vin qui serait produit ailleurs qu'en Champagne, tout comme il est choquant de nommer camembert un fromage qui ne serait pas fait en Normandie.

Il en va de même, en charcuterie. Par exemple, pour un jambon de Bayonne, il doit s'agit de jambon (commençons par dire le plus important), provenant de porcs élevés dans la région de Bayonne, et travaillés selon les règles en vigueur, de celles qui distinguent un jambon cru d'un jambon cuit, par exemple. Il n'y a pas assez de porc pour que des industriels puissent vendre du "jambon de Bayonne" ? Tant pis, ils vendront autre chose.

Le fromage "fermier" ? Il doit être produit dans une ferme.  Le fromage au lait cru ? C'est du lait cru, lequel n'est pas chauffé. Oui, on a introduit de merveilleuses techniques de filtration qui conservent un superbe goût de lait cru... mais qui  éliminent la flore sauvage. Le lait ? Il n'est pas cru, mais microfiltré. Et le fromage ? Ce n'est pas un fromage au lait cru, et il lui faut donc un autre nom... C'est tout simple quand on est honnête  : "fromage produit à partir de lait microfiltré".


Toute autre solution est déloyale !

mercredi 5 août 2015

Le naturel ?

Une certaine industrie alimentaire vend de façon contestable des produits "naturels", et une certaine réglementation démagogique accepte cette entorse à la pensée.

Contestable ? Entorse ? Oui, car est "naturel", en français, ce qui n'a pas fait l'objet d'une transformation par l'être humain. Nos aliments ne sont pas naturels, car ils ont été cuisinés. Et très peu de nos ingrédients alimentaires sont naturels, car même le sel, tiré de la mer ou des mines, a été extrait, purifié, raffiné. On ignore souvent que le sel est amendé avec de l'iode, par exemple, ou que nos fruits et légumes, qui semblent pousser tout seuls, ont en réalité été sélectionnés depuis des générations. Les arbres ont été greffés, la sélection a opéré, et nos pommes modernes n'ont plus rien des pommes sauvages, ni les carottes des carottes sauvages.
Bref, nous ne mangeons pas de produits naturels, et c'est une étrange idée que de le croire. Mais c'est un fait que même des individus qui savent lire, écrire et compter, parlent de produits naturels.
Récemment, lors de l'enregistrement d'une émission de télévision, il m'est venu qu'il est facile de montrer à nos interlocuteurs leurs contradictions. Cela s'est passé alors que je discutais avec une journaliste qui avait prononcé le mot "naturel". Naturel ? Je lui demandai d'abord si le sucre était naturel, et elle tomba dans le piège, puisqu'elle répondit que oui. Les protéines du lait ? Oui, l'acide tartrique, lequel est au fond des bouteilles de vin blanc ? Oui. L'huile ? Oui... Alors le "faux fromage" qu'elle voulait "dénoncer" était naturel, puisqu'il était fait de ces matières (j'abrège la liste et la démonstration).
Par la même technique, à peu près tous nos aliments sont naturels, sauf quand certains ingrédients ont été synthétisés, telle la vanilline des "vanilles artificielles".

Mais nous sommes bien d'accord : ce n'est pas charitable d'agir comme je le fais ! Et il n'est pas juste de dire que nos aliments sont naturels : en réalité, ils sont tous parfaitement artificiels, parce qu'ils ont été préparés. Et des cuisiniers qui parleraient d'une cuisine naturelle seraient dans l'erreur, même si le Michelin leur a donné  des étoiles !

samedi 16 mars 2013

Un merveilleux cadeau

On vient de m'offrir un livre écrit par quelqu'un que je n'aime pas... mais c'est un des plus beaux cadeaux que l'on m'ait fait !

Oui, car, croyant à la déloyauté a priori de l'auteur, je ne vais pas pouvoir croire un seul mot du livre... et, surtout, je viens de comprendre que ce devrait être ainsi que l'on lit : sans croire ce qui est écrit !
Ce qui est dit dans les media, ce qui est écrit dans les livres ne doit pas être cru, sous peine d'une grande naïveté, bien sûr, et c'est surtout à propos des sujets qui nous tiennent le plus à coeur que le risque est grand, de "gober" des erreurs.

Désormais, grâce à ce livre, je vais mettre en oeuvre l'idée que j'énonçais naguère ainsi "Tenir le probable pour faux jusqu'à preuve du contraire", et que j'énonce plus positivement ainsi "Dois-je croire au probable ?".


samedi 18 août 2012

Des questions de loyauté

Il y a quelques années, les règlements européens ont autorisé une petite quantité de matières grasses ajoutées au beurre de cacao afin :
- d'harmoniser les réglementations nationales au sein de la Communauté européenne
- de lisser les cours du cacao.

Dont acte... mais il y a d'abord une question de loyauté. Pour des Français, du chocolat à l'huile de palme n'est pas du chocolat. Si cela l'est pour d'autres pays, il faut en conséquence :
- soit donner des noms différents aux divers produits
- soit profiter des harmonisations pour remonter le niveau de qualité et d'exigence, pas le descendre !

Je propose que l'on ouvre à nouveau le dossier et que l'on règle cette question terrible !

Tant qu'on y sera, on pourra aussi faire cesser le scandale du Codex alimentarius, qui admet qu'on puisse faire de la sauce béarnaise sans jaunes d'oeufs ni échalotes ni beurre ! Qui m'épaule dans ce combat ?

vendredi 3 février 2012

Militons!

Les "arômes alimentaires" : l'expression est dans la réglementation, mais si cette dernière est bien (ce qu'il faudra examiner), il n'en reste pas moins qu'il est insupportable que le monde industrie utilise l'expression.
Un arôme, il faut le rappeler, c'est l'odeur d'une plante aromatique. Ce n'est donc pas un produit préparé par l'industrie pour donner du goût à un aliment.

1. Je n'ai rien contre l'industrie, qui fait vivre la population
2. Mais il y a confusion, entre l'arôme, au sens réel, rappelé plus haut, et ce que l'industrie utilise pour donner du goût.

Autrement dit, le mot "arôme" tel qu'utilisé par l'industrie ne répond pas aux critères de la loi de 1905 sur le commerce : les produits doivent être sains, loyaux, marchands. En l'occurrence, l'expression incriminée ici est déloyale.

Il faut donc sans attendre la changer... en observant que la même confusion n'a pas lieu en langue anglaise, où l'on utilise "flavouring" pour dénommer les préparations qui donnent du goût.

Ne soyons pas en retard d'un éclaircissement, dans un pays qui a vu le développement des Lumières !