jeudi 8 mai 2025

Le récit de la science ?

 
Une jeune fille m'interrogeait hier à propos de phénomènes qui pourrait être discutés, en vue d'en  faire des chapitres de livres  : lesquels prendre, en cuisine ? 

Cela part évidemment d'une idée tout à fait exceptionnelle : il faut d'abord saluer cette envie de s'intéresser à la physique et à la chimie, et notamment quand elle part de la cuisine. 

Mais il y a surtout lieu d'expliquer combien la sélection est facile, car la science sécrète son objet en quelque sorte :  partant des phénomènes, elle en fait l'exploration. 

Ainsi il y a donc lieu, pour n'importe quel phénomène, de se lancer dans un mouvement infini qui consiste à bien identifier le phénomène, à le délimiter, puis à le quantifier, à chercher des regroupements des données en équations, puis à  chercher des regroupements d'équations avec de nouveaux concepts qu'il faut alors imaginer et qui doivent être quantitativement compatibles avec les données ; il faut ensuite  chercher des conséquences logiques des théories ainsi constituées et tester expérimentalement  es conséquences. 

Tout cela mérite d'être accompagné de longues discussions, de longues explications, et il faut souligner que le  mouvement  est infini puisque toute théorie est insuffisante : il  faut moins  les présenter que les réfuter, en chercher des réfutations. 

Ce mouvement infini, c'est le mouvement de la recherche scientifique, qui se fait pour n'importe quel phénomène, et en regardant dans ma cuisine, je vois mille choses qui sont tendues à mon intérêt. 

Par exemple, alors que je fais mariner les anchois dans du sel, je vois l'eau qui sort des tissus musculaire des poissons... mais comment ?
Dans le bocal, je vois une matière grasse à la surface mais d'où vient-elle et comment est-elle apparue ?
Je vois que les chairs brunissent, mais pourquoi ?
À côté du bocal d'anchois, il y a ce saumon que j'ai fumé pendant le weekend : quelles molécules de la fumée ont-elles parfumé mon saumon et où se sont-elles placées ?
Pas loin, il y a des quenelles, toujours de poisson que j'ai également réalisées pendant le weekend à partir de chair de poisson broyée avec des œufs et de la crème. Et comment le broyage a-t-il modifié la chair ? Quelle est la taille des segments de fibres musculaires finalement obtenus ? Quelle est la répartition des tailles ? Pourquoi celle-là ? Existe-t-il un rapport entre l'énergie que j'ai dépensée pour broyer et cette distribution ? Puis, lors de l'ajout de blanc d'œuf et de crème, le broyeur a-t-il introduit des bulles d'air ? Et de quelle taille ? Cette taille dépend-elle de la viscosité de la chair hachée ou plutôt du mixeur ? Et la graisse : les gouttelettes de matière grasse présentes dans la crème ont-elles été divisées lors du broyage ? 

À ce stade je peux m'arrêter : je crois avoir bien montré combien phénomène pouvait donner lieu à une longue discussion. Evidemment cette discussion n'a pas été faite ici, mais il suffit de considérer tout article scientifique pour s'apercevoir que la question initiale de mon interlocutrice avait une réponse facile.
 

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