Affichage des articles dont le libellé est viande. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est viande. Afficher tous les articles

vendredi 25 janvier 2019

Les deux dimensions de la cuisson de la viande


Il y a des cas simples où une cause provoque un effet et un seul : si j'appuie sur une sonnette, ça sonne ; ou si je fouette un blanc en neige, il mousse.
Mais il y a des cas plus compliqués où il y a plusieurs effets simultanés, et c'est le cas pour la cuisson de la viande.

Commençons par indiquer que la viande (pensons à un biceps, ou un quadriceps), c'est donc un morceau de chair, fait essentiellement de tissu musculaire. Cette matière est elle-même faite de "fibres musculaires", sorte de tubes très fins, alignés parallèlement, et groupés en "faisceaux" par du "tissu collagénique", lequel tissu fait d'ailleurs aussi la "peau" des fibres. A l'intérieur des fibres, de l'eau et des protéines, principalement.



Pour comprendre ce qui se passe quand on cuit, il faut avoir, de surcroît, l'information selon laquelle il existe des protéines qui coagulent à la chaleur (pensons au blanc d'oeuf), et d'autres qui ne coagulent pas.
Or l'intérieur des fibres musculaires comprend de l'eau et des protéines qui coagulent, comme le blanc d'oeuf, alors que le tissu collagénique est fait de protéines (le "collagène") qui ne coagulent pas ; en revanche, le tissu collagénique chauffé se défait, libérant dans un liquide environnant du collagène dégradé, que l'on nomme la gélatine. Ajoutons enfin qu'avant de se défaire, le tissu collagénique se contracte, ce qui explique que la viande chauffée perde du jus : du liquide de l'intérieur est expulsé lors de cette contraction.

Avec cela, nous voyons que quand on chauffe à haute température, il y a plusieurs effets :
- à court terme, la viande se contracte et perd du jus... tandis que l'intérieur des fibres coagule, donc durcit. La viande devient dure, donc perd sa tendreté ; simultanément elle perd de la jutosité
- à plus long terme, la chaleur dissocie le tissu collagénique, donc permet une dissociation des faisceaux, ce qui laisse croire que la viande est "attendrie". En réalité, elle l'est pour la pièce entière, mais pas pour chaque fibre indépendamment.

vendredi 18 janvier 2019

Je vous présente l'actine et la myosine

Cela fait longtemps que j'aurais dû évoquer ces protéines que sont l'actine et la myosine ; d'ailleurs, je devrais dire "les actines et les  myosines", ce qui serait plus juste.


Examinons tout cela dans une perspective historique. 

Il y a environ trois siècles, les chimistes ont identifié l'albumine, principe coagulant du blanc d'oeuf, ou albumen. Cette "matière", cette "substance",  avait des particularités, par rapport aux composés végétaux, à savoir que, comme elle contenait de l'azote (on l'ignorait à l'époque), sa putréfaction engendrait de l'ammoniac, composé basique qui fait virer la couleur d'indicateurs colorés, à savoir, à l'époque, les sirops de violette (on broie des fleurs dans l'eau et l'on filtre).
Puis, progressivement, les chimistes comprirent que les viandes, aussi, avaient cette même propriété, et l'on se mit à parler d'albumine pour l'oeuf, la viande, les poissons.
Soudain, vers 1800, les chimistes découvrirent, dans des plantes des composés qui avaient les mêmes propriétés : des "albumines végétales" ! Ce fut un bouleversement, car la division établie par la religion entre le règne animal et le règne végétal tombait !
Mais, bientôt, les progrès de l'analyse chimique révélèrent l'existence d'entités plus précises que l'albumine, et plus diverses aussi, et l'on identifia les "protéines", mais aussi les acides aminés.
Aujourd'hui, on nomme "albumines" une catégorie très particulière de protéines : de petites protéines solubles dans l'eau et capables de coaguler à la chaleur, notamment.
Et c'est ainsi que, dans le blanc d'oeuf, il y a une vingtaine de sortes de protéines différentes, dont seulement certaines sont des albumines. Pour les viandes ou poissons, il y a aussi des albumines, telle l'albumine sérique, dans le sang.


Aujourd'hui, parlons de protéines

Il y a donc des protéines très différentes, et, notamment, certaines coagulent et d'autres non. Ainsi les viandes sont des assemblages de "fibres musculaires" (des sortes de tuyaux très fins), en faisceaux regroupés eux-mêmes en super-faisceaux. Les fibres musculaires sont comme de tuyaux,  comme dit précédemment, qui contiennent une matière qui a des ressemblances avec le blanc d'oeuf. La "peau" de ces fibres, c'est du "tissu collagénique", une matière faite d'une protéine qui est nommée collagène. Et cette protéine ne coagule pas, mais elle peut former des gels : ce sont les gels de gélatine, qui se forment d'ailleurs spontanément quand on laisse refroidir le bouillon formé par la cuisson d'une viande dans une petite quantité d'eau (ou de vin).
L'intérieur des fibres musculaires, ce sont de l'eau et deux sortes de protéines, qui sont nommées actines et myosines. Ces protéines permettent aux fibres de se raccourcir quand elles reçoivent un ordre du cerveau (un signal électrique transmis par les "nerfs"), et c'est cela qui conduit à la contraction entière du muscle. Et ces protéines, contrairement au collagène, peuvent coaguler : la preuve, c'est que quand on broie une viande, puis que l'on chauffe, on obtient... des terrines, où les protéines que sont actines ou myosines ont coagulé.


dimanche 30 décembre 2018

Questions de cuisson à basse température

Une question ? Une réponse détaillée. Aujourd'hui, c'est à propos de cuisson à basse température, mais je m'y attendais, car Noël a été pour certains amateurs l'occasion de recevoir ces thermocirculateurs dont j'avais proposé l'usage dès 1980 !
Voici en tout cas la question :

Je fais souvent des cuissons longues de viande à basse température, le jus que je récupère est très goûteux et j'ai plusieurs fois essayé de le faire réduire pour obtenir un jus très corsé, mais dès qu’il bout, il se dissocie et perd toute son homogénéité. Y a-t-il une solution pour le faire réduire en le gardant stable ?

Dans les discussions, soit avec des amis, soit avec moi-même, j'ai fini par savoir me méfier de l'idéalisme, cette tendance platonicienne à croire à une unité  du concept. Et, en matière de cuisson longues à basse températures, tout se rencontre : le porc (attention aux parasites, qui imposent un 82,5 °C), l'agneau (pas certain d'aimer le gigot à 70 °C, car il est parfois un peu cartonneux), le boeuf (collagénique, il libère... de la gélatine), le veau (pas besoin de chauffer trop), le poulet (à 60 °C, il reste d'un rose qui le rend immangeable pour beaucoup), etc.
Donc les cuissons longues, mais lesquelles ?

Ne sachant pas ce que mon interlocuteur a dans l'idée, je propose de considérer les viandes qui ont quelques chances de laisser passer dans le jus des composés qui peuvent composer la sauce.
Commençons par le boeuf, et notamment le boeuf collagénique, puisque c'est surtout pour de telles viandes que j'avais initialement préconisé la cuisson à basse température. Ces viandes (comme les autres, d'ailleurs) sont faites de faisceaux de fibres musculaires. Chaque fibre est entourée d'une matière nommée tissu collagénique, et les fibres sont regroupées entre elles par du tissu collagénique. Pourquoi ce nom de tissu collagénique ? Parce que c'est un fait que cette matière, comme du tissu, est faite de petites fibrilles, en l'occurrence des molécules en triple hélice, qui ont pour nom "collagène". Quand on chauffe, ce tissu se dissocie, et laisse passer dans le liquide environnant de la gélatine, qui n'est autre que du tissu collagénique dégradé. Et c'est cette gélatine qui fait prendre la sauce en gelée quand elle refroidit.
Mais là, je ne vois pas le phénomène signalé par notre ami.

Ce phénomène, je ne l'ai rencontré qu'une fois, pour du veau que j'avais détaillé en dés. Je l'avais cuit à 60 °C pendant deux jours, et il est vrai que le jus  a grumelé quand j'ai fait bouillir pour réduire la sauce.
Qu'à cela ne tienne : dans mon livre "Cours de gastronomie moléculaire N°1 : Science, technologie, technique, quelles relations ?", j'ai présenté l'idée "d'un petit mal un grand bien", qui m'a fait transformé une sauce grumelée en une sauce claire... servie dans un verre à Cognac.



Mais il y a mille autres façons, à commencer par une clarification, ou un simple coup de mixer. En effet, cette sauce qui grumelle doit sans doute son comportement à des protéines qui ont été libéré, et qui ont ensuite coagulé à la chaleur. Comme pour une crème anglaise qui grumelle parce que les protéines de l'oeuf, au lieu de faire des grumeaux microscopiques, font des grumeaux macroscopiques. Nos grand-mères secouaient les crèmes ainsi grumelées dans une bouteille  ; certains pâtissiers les passent au chinois ; mais le mixer réhomogénéise très bien !

mardi 25 décembre 2018

Que faire des recettes que l'on trouve en ligne ?

 Je ne sais plus sur quel site j'ai trouvé cela, mais je crois me souvenir qu'il s'agissait de la partie cuisine d'une grande revue féminine. Et je ne me souviens plus de quelle recette il s'agissait, mais peu importe : la question est, surtout, que l'image suivante démontre que ce site est pourri.



Mettre de la viande dans une casserole avec de l'eau froide et porter à ébullition n'est pas une pratique anormale, certes.
Et pocher la viande se fait sans problème, bien que l'on puisse s'interroger sur le terme "pocher", qui semble mal utilisé : pocher, selon les bons dictionnaires, c'est plutôt cuire à température proche de l'ébullition, et non partir à l'eau froide. Mais c'est là un détail par rapport à la suite, qui évoque des "impuretés" et de l'amidon.
Des impuretés ? La viande la plus saine n'est pas "impure", et, pourtant, elle libère une écume que l'on retire, quand on veut un consommé clair. Il est vrai que l'on nomme "écume" une mousse engendrée par des "impuretés", mais je crois savoir que ces prétendues impuretés sont en réalité des protéines coagulées, peut-être avec des composés du sang  : rien d'impur, dans tout cela, sinon l'apparence de la chose.
Mais le pire, c'est l'amidon. Car il n'y a pas d'amidon dans la viande ! L'amidon, c'est une matière faite de "granules", composés de "polysaccharides" de deux types, amylose ou amylopectine. C'est une matière de réserve des végétaux : la sève brute qui est montée dans les feuilles s'y enrichit de glucose, de fructose et de saccharose, qui sont redescendus dans les racines, où ces molécules s'assemblent notamment en amidon.

Dans les organismes animaux, rien de semblable : les animaux ne sont pas des végétaux ! Ce qui me conduit à m'interroger : en supposant que la recette considérée soit "correcte" d'un point de vue pratique, ou d'un point de vue artistique, on serait en droit de ne pas croire à ses commentaires ignares. Mais la recette tout entière n'est-elle pas entachée de cette ignorance prétentieuse qui consiste à expliquer ce que l'on ne sait pas ?

 Je vous laisse y penser.

lundi 26 mars 2018

Mousses...

Ce matin, un groupe d'étudiants m'interroge, à propos d'un travail qu'ils font dans le cadre des TIPE (Travaux d’Initiatives Pratique Encadrés), à propos de mousses en cuisine.
Leur travail est louable : ils se préoccupent d'alimentation des personnes âgées, et veulent faire -je schématise- une mousse à paratir de viande et de d'une mousse de blanc en neige.
Amusant que cela m'arrive précisément alors que je viens de finir un texte (pour la revue Charcuterie et gastronomie) où je discute précisément le fait que les quenelles peuvent être des systèmes foisonnés comme les soufflés, comme je l'ai compris après notre avant dernier séminaire.

Bref, nos jeunes amis me disent  :

 
Après avoir réalisé de nombreux tests afin de trouver la composition idéale de la mousse, nous avons pu déterminer qu'il fallait 6 blancs d’œufs (pour un œuf d'un poids moyen de 60 grammes) et 30 g de blancs de poulets cuits préalablement afin d’avoir une mousse consistante.
Cependant, cette composition est très riche en œuf, et la tenue de notre mousse n'est pas idéale. C'est pourquoi nous voudrions vous poser les questions suivantes :
-  Quels nutriments artificiels seraient-ils judicieux d'ajouter à la composition de notre mousse afin de diminuer la teneur importante en blanc d’œuf ?
-  Est-il possible de diminuer la teneur en blanc d’œuf sans altérer l'aspect et le maintien de la mousse ?

-  Existe-il des agents stabilisants ou des techniques permettant de garder une tenue suffisante de la mousse afin de la conserver ?






Quarante litre de blancs en neige à partir d'un oeuf

Dès le début de leur message, je butte sur le mot "idéale", parce que c'est un adjectif, et que l'objectif qui permettrait de mesurer cette idéalité n'est pas donné.
Bref, nos amis ont produit une préparation de 30 grammes de poulet broyé (je suppose) et de six blancs d'oeufs, sans doute battus en neige. J'imagine donc  une mousse très volumineuse (environ deux litres de mousse), dont nos amis me disent qu'elle est riche en oeuf... ce qui est une évidence, puisque l'oeuf, c'est de l'oeuf.
Mais pourquoi ne parlent-ils pas plutôt de protéines et d'eau ? La viande, c'est environ 25 pour cent de protéines et 75 pour cent d'eau, tandis que le blanc, c'est 10 pour cent de protéines et 90 pour cent d'eau.
D'autre part, veulent-il  réduire la proportion de protéines d'oeuf ? C'est alors facile, quand on prépare un "geoffroy", c'est-à-dire un oeuf très foisonné... et je rappelle que nous avons obtenu plus de 40 litres de mousse à partir d'un seul blanc d'oeuf, soit environ 3 grammes de protéines.
Comment ? En réfléchissant que de l'oeuf en neige, c'est une solution aqueuse de protéines que l'on a foisonné. Combien de mousse peut-on obtenir avec un blanc ? Puisque le blanc d'oeuf est fait de protéines et d'eau, et que, classiquement, l'ajout d'air ne procure qu'un petit tiers de litre de mousse, c'est que manquent soit l'eau, soit les protéines, soit l'air.
Or l'air ne manque pas... et l'expérience qui consiste à ajouter de l'eau montre que c'est l'eau qui manque... ce qui a constitué la base d'un "atelier" des "Ateliers expérimentaux du goût", à l'attention de l'Education nationale (école, collèges, lycées, lycées professionnels, centres de formation des apprentis) :
http://www2.agroparistech.fr/Les-Ateliers-experimentaux-du-gout.html
Bref, il est facile de réduire la quantité de protéines dans une mousse !

Mais il y a d'autres solutions à... foison ;-)

Cette question des oeufs n'est pas le fin mot de l'histoire, car nos amis pourraient faire foisonner le poulet sans ajouter des oeufs, mais ils pourraient également produire une de mes inventions que j'avis nommé "würtz" : l'idée est de dissoudre un peu de gélatine dans un liquide, puis de fouetter pour faire foisonner. Ensuite, on statilise la mousse en la mettant au froid. Evidemment, le liquide mérite d'avoir du goût, comme je le dis ici, notamment :
http://hervethis.blogspot.fr/2017/12/les-wurtz.html
Ou encore ici :
http://www.pierre-gagnaire.com/pierre_gagnaire/travaux_detail/48

Bref, plein de solution pour des mousses de protéines.
Mais, au fait, savez-vous qu'il y d'autres agents foisonnants que les protéines ? C'est une autre histoire, qui sera contée une autre fois.






mercredi 21 mars 2018

Demain, les diracs... à toutes les sauces

Décidément, il y a lieu d'aider mes amis qui se lancent dans la cuisine note à note, et qui s'interrogent : comment remplacer la viande et le poisson ? La réponse est : avec des "diracs".

Pour commencer simplement, expliquons qu'une viande ou un poisson, c'est un matériau fait de 25 pour cent de protéines et de 75 pour cent d'eau.
Autrement dit, on obtient une matière de la même fermeté qu'une viande en mêlant une cuillerée de protéines et trois cuillerées d'eau, puis en cuisant. D'autre part, on obtient une matière de la même fermeté qu'un blanc d'oeuf cuit sur le plat en cuisant un mélange fait de 10 pour cent de protéines et de 90 pour cent d'eau : une cuillerée de protéines pour neuf cuillerées d'eau.
Et on obtient quelque chose d'encore plus dur que la viande si l'on augmente la teneur en protéines.
On n'obtient ni de la viande, ni du blanc d'oeuf, mais une matière que j'ai proposé de nommer un "dirac".

Et il y a donc des diracs durs, des diracs mous... mais bien d'autres diracs. Certains peuvent être "mousseux", foisonnés... et ce sont donc des "berthollets". Certains peuvent être striés, et ce sont des surimis; Mais on peut imaginer bien d'autres possibilités : des systèmes feuilletés, des systèmes émulsionnés.


Pour un dirac foisonné ? On part d'eau et de protéines, on fouette, on ajoute les couleurs, odeurs, saveurs, puis on cuit (par exemple, à la poêle, ou bien dans un four à micro-ondes, mais on pourrait égale ment verser des cuillerées dans de la friture, par exemple. Et je nomme cela un "berthollet".

Pour un dirac émulsionné ? Puisque les protéines stabilisent merveilleusement des émulsions, on comprend que l'on puisse ajouter de la matière grasse au mélange eau+protéines. Combien ? Jusqu'à environ 19 fois plus que d'eau. Et l'on a évidemment quelque chose d'alors très gras... et de très moelleux.
D'ailleurs, j'y pense : pourquoi ne pas faire comme avec le chocolat, à savoir classer par proportion de matière grasse ? 

Pour un dirac haché : c'est comme pour un steak haché, à savoir que l'on prépare un dirac, puis que l'on hache, dans le même hachoir que d'habitude. 

Pour un surimi de dirac : on part d'un mélange de protéines et d'eau, on ajoute un empois d'amidon, puis on coule sur une plaque plate, et l'on strie (à l'aide d'une fourchette ou d'un peigne) avant de cuire (vapeur, micro-ondes, etc.)

mardi 20 mars 2018

Des "viandes foisonnées"... ou plutôt non, plutôt des "diracs foisonnés" : les berthollets

En cuisine note à note, les diracs sont importants : ils  sont des matières obtenues par cuisson de solutions aqueuses de protéines : ce sont des "viandes artificielles". Il y en a de durs, de mous, de striés, de lisses...

Mais on peut aussi ne faire cuire qu'après fait foisonner, tout comme on obtient une omelette soufflée après avoir cuit de l'oeuf longuement battu, ce qui, soit dit en passant, a contribué à la réputation mondiale des omelettes de la "mère Poulard", au Mont Saint-Michel.

Mais, quand on n'utilise pas de l'oeuf, mais des protéines, on n'a pas le droit d'utiliser le mot "omelette", tout comme il aurait été déloyal d'utiliser le mot "viande", ce qui a conduit à introduire le nom de "dirac".

Pour des systèmes de protéines foisonnées coagulées ? Je propose le nom de "berthollet". Pourquoi ? Parce que ce chimiste, qui connut Lavoisier et poursuivit sa carrière après la Révolution française, n'avait que des rues à son nom. Il lui fallait un plat !

lundi 12 février 2018

Avant de se lancer dans un gros travail, il vaut mieux une stratégie !

Aujourd'hui, je réponds à des élèves qui m'écrivent :

Bonjour Monsieur THIS,
Je suis élève en 1 ère S, et cette année, avec deux de mes camarades, nous traitons le sujet des TPE. Notre sujet comporte trois grandes parties dont la transformation des molécules au sein de la viande lors de sa cuisson. Notre but est de montrer que le gout est perçu grâce aux molécules, et que donc après cuisson, les molécules ont changé et donc le goût ne sera plus le même. Nous avons étudié la réaction de Maillard, je voulais donc vous demander s'il vous serait possible de nous transmettre les équations chimiques qui s'y passent ainsi que dans la dénaturation des protéines si cela affecte le goût. Puis pour finir est ce que l'oxydation des lipides joue un rôle dans le bon goût de la viande car j'ai seulement vu que cette oxydation était dangereuse et apportait une odeur désagréable.

On le voit, le message est confiant, et je m'en veux de lire les mots précis, et de commenter. Pardon à mes jeunes amis si c'est parfois rude, mais ils n'oublieront pas que j'ai une mission d'instruction, et que les observations que je fais visent surtout à les aider pour l'avenir (moi, je ne donne pas de bons ou de mauvais points ; j'observe seulement).

Ainsi l'accroche : c'est amusant, mais il y a seulement dix ans, elle aurait été de la dernière vulgarité, en France. On devait dire "Monsieur", et jamais "Monsieur This". Mais les temps changent.

Puis on n'aurait jamais commencé une lettre par "Je". Là, ça reste vrai, et nos jeunes amis sont en quelque sorte catalogués dès les premiers mots.

Un détail de ponctuation : il ne fallait pas de virgule après "1ere S", mais il en fallait entre "et " et "cette année". Bon, un détail... mais tout ce qui mérite d'être fait mérite d'être bien fait, non ?

Arrive le "nous traitons le sujet des TPE" : amusante formulation pour dire que nos amis ont un "travail personnel encadré à faire". Le sujet des TPE, c'est quoi ? C'est ce que chaque groupe décide, mais qu'a décidé ce groupe ? On ne le sait pas : on découvre seulement qu'il y a trois parties. 

Ah, nos amis veulent montrer que le goût est perçu grâce aux molécules. Bon, pourquoi pas... car effectivement, dans la vision, ce sont des photons, et pas des molécules, qui sont à l'origine de la sensation... mais, au fait, la perception visuelle n'est-elle pas une modalité du goût ? Le goût est la sensation synthétique que nous avons, et il inclut la saveur. D'où un premier doute : et si nos jeunes avaient en réalité la saveur, comme sujet ? Là, ils auraient tort de penser qu'elle est due aux molécules, car les ions sont des ions, parfois réduits à un atome électriquement chargé.
Je leur donne donc, en lien téléchargeable, mon texte sur les mots du goût :
https://sites.google.com/site/travauxdehervethis/Home/applications/des-applications-de-deux-types/applications-pedagogiques-educatives-intellectuelles/pour-les-collegiens-et-les-lyceens

Après une cuisson, il peut y avoir des modifications moléculaires... ou pas. Car tout dépend de la cuisson ! Et puis, il y a des modifications moléculaires induites par les cuissons qui s'accompagnent de changements de saveur, et d'autres qui ne s'accompagnent pas de telles modifications. Considérons, par exemple, le chauffage d'amidon dans de l'eau : les grains d'amidon s'empèsent... mais les espèces chimiques sont les mêmes, avant et après la "cuisson".
Certes, parfois, il y a effectivement des réactions, comme dans les oxydations, les déshydratations de hexoses, les hydrolyses, les dégradations de Strecker, les réactions de Fischer, les réactions de Maillard... mais pas toujours. Et puis, il y a aussi des différences de "biodisponibilité" qui changent la saveur : imaginons des ions sodium ou chlorure (du sel de table) libres, ou bien pris dans un gel ; nous ne les percevrons pas de la même façon, et la saveur (ainsi que le goût, donc), aura changée. De même, l'amylose peut se mettre en hélice autour de composés odorants, ce qui change la composante olfactive du goût.

Nos amis me disent qu'ils ont étudié la réaction de Maillard, mais j'espère qu'ils ont utilisé les bonnes sources ? A tout hasard, je leur donne mon article, où je relate le travail précis d'enquête historique qui permet d'éviter de dire n'importe quoi, à propos des réactions de Maillard : il est téléchargeable sur la même page https://sites.google.com/site/travauxdehervethis/Home/applications/des-applications-de-deux-types/applications-pedagogiques-educatives-intellectuelles/pour-les-collegiens-et-les-lyceens.

Mais je lis "je voulais donc vous demander s'il vous serait possible de nous transmettre les équations chimiques qui s'y passent" : quelles réactions ont-elles lieu lors des réactions de Maillard ? La question est bien trop générale, car il y a des traités entiers sur les réactions de Maillard, et je ne compte pas le nombre d'articles scientifiques que j'ai à ce sujet... alors que je n'ai même pas fait de recherche bibliographique spécifique.

Puis "ainsi que dans la dénaturation des protéines si cela affecte le goût"  : oui, comme dit précédemment, la coagulation (plutôt que la dénaturation) des protéines change le goût, puisqu'elle change la biodisponibilité des espèces molécules ou ioniques présentes ou formées lors des traitements thermiques. Encore un énorme chapitre ! Décidément, avant de se lancer dans tout cela, il vaut mieux focaliser l'étude... et c'est d'ailleurs bien ce qui est préconisé par le Journal Officiel, et que je rappelle dans mes conseils aux élèves faisant des TPE ou des TIPE (voir https://sites.google.com/site/travauxdehervethis/Home/applications/des-applications-de-deux-types/applications-pedagogiques-educatives-intellectuelles/pour-les-collegiens-et-les-lyceens).

Mais ce n'est pas tout, car nos amis écrivent encore "Puis pour finir est ce que l'oxydation des lipides joue un rôle dans le bon goût de la viande car j'ai seulement vu que cette oxydation était dangereuse et apportait une odeur désagréable". Là, il y a des traités entiers, à nouveau ! Et puis, l'oxydation des lipides, c'est bien trop vaste, puisque l'on nomme lipide tout composé des aliments qui n'est pas soluble dans l'eau : c'est une catégorie où l'on trouve tout aussi bien les cires, le cholestérol, les triglycérides, les phospholipides... Alors, l'oxydation : laquelle ? Oui, le "rancissement", que l'on devrait nommer "autoxydation" peut créer des espèces variées, parfois néfastes, mais la question de la santé est une autre question. Quant à l'odeur, c'est effectivement une composante du goût, quand elle est rétronasale... mais "désagréable" est un adjectif qui relate une appréciation personnelle, donc qui n'a rien à voir dans un tel travail : le mauvais des uns est le bon des autres.

Bref, tout ce questionnement me laisse un peu perplexe... et je crois nos amis mal partis, parce qu'ils n'ont pas fait ce que le Journal Officiel leur demandait : il faut qu'ils commencent par le lire... et, surtout, je vois bien l'intérêt de l'exercice, qui propose à la fois de la stratégie et du travail de détail.

Pardon, enfin, si j'ai offensé mes amis en leur "reprochant" de ne pas savoir : en réalité, ce reproche n'est pas la stigmatisation d'une faute, mais seulement le signalement d'erreurs qu'ils pourront apprendre à corriger. Après tout, quelqu'un qui sait, c'est quelqu'un qui a appris, n'est-ce pas ?

jeudi 1 février 2018

Les confits

Ce matin, une question, à propos de confits : 


Bonjour Monsieur This.
Il y a plusieurs années, je réalisais des confits de toutes sortes dans ma cuisine. Je testais alors des épaules d'agneau confites à l'huile d'olive, des échines de porc au saindoux, les cuisses de canard à la graisse de canard...
Seulement à l'époque, j'avais trouvé la température idéale pour confire mes viandes: Je les mettais au sel la nuit, les rinçais le lendemain, les faisais sauter et le soir je les plongeais dans la graisse (huile, saindoux...) "aux environs" de 70°C (c'est à ce moment que ma mémoire flanche), sur une plaque au minimum (+ thermo-sonde),  de sorte que j'aille me coucher et que ma viande confisait jusqu'au lendemain matin sans pour autant durcir.
Ma question: y a-t-il une température idéale pour créer le phénomène d'osmose entre les muscles d'une viande et la matière grasse afin de confire ?






  
Ma première réponse est que le mot "osmose" est souvent mal utilisé, et, en l'occurrence, il ne s'agit pas d'osmose. Et puisque je contredis mon correspondant-ami, je lui donne en prime une façon de faire les fruits au sirop.





Commençons par expliquer ce qu'est l'osmose, en mettant une mirabelle dans un sirop très léger... par rapport à la mirabelle. Oui, la mirabelle, c'est beaucoup d'eau et du sucre. Si on fait un sirop avec une proportion plus faible de sucre que dans la mirabelle, alors j'ai fait observer il y a longtemps que la mirabelle tombe au fond du sirop...  parce qu'elle est moins dense (on peut presque négliger l'influence du noyau dans l'affaire, en tout cas en première approximation.
Inversement, la mirabelle dans un sirop très chargé en sucre se met à flotter... de sorte que l'on trouve le bon degré de sirop en partant d'un sirop trop concentré, et en ajoutant de l'eau : quand la mirabelle commence  à descendre, le sirop est à la bonne concentration.

Mais cela nous a éloigné de l'osmose, et nous allons y revenir. Ce qui se passe, quand on laisse une mirabelle pendant longtemps dans un sirop trop léger, c'est que le fruit gonfle et éclate. Inversement, dans un sirop trop concentré, le fruit se ratatine.
Pourquoi ? Parce qu'il y a de l'osmose, ce qui signifie que la peau des fruits laisse passer l'eau, et pas le sucre.
Prenons le cas d'un sirop concentré : de l'eau du sirop passe dans le fruit, et de l'eau du fruit passe dans le sirop, mais comme le sirop est très concentré, l'eau est plus "tenue" par le sirop que par le fruit... qui finit par perdre son eau, se ratatine. Phénomène inverse pour le sirop trop léger.

Mais revenons au confits

Là, il n'y a pas d'osmose, mais le phénomène est le suivant. La viande est faite de "fibres musculaires" (pensez à des tuyaux plein d'eau et de protéines, un peu comme du blanc d'oeuf), et ces fibres sont groupées en faisceaux par ce que l'on nomme du "tissu collagénique", une sorte de colle. Tiens un peu comme un pinceau de peintre que l'on aurait trempé dans de la gelée fondue qui aurait refroidi et emprisonné les poils.
Quand on cuit la viande pendant longtemps -ce qui est le cas des confits-, alors le tissu collagénique se dégrade... un peu comme quand on chauffe une gelée.
Et les fibres sont alors libérées, ce qui attendrit bien sûr la viande.
Mais alors intervient non pas l'osmose, mais la capillarité : le liquide (en l'occurrence le gras liquide) peut entrer entre les poils du pinceaux, ici entre les fibres musculaires.
Je ne perds pas de temps à expliquer les raisons de ce phénomène passionnant, et je me limite à observer que la cuisson est alors comme une cuisson à basse température, mais dans de la graisse liquide au lieu d'être dans un liquide aqueux. Les températures à utiliser sont donc celles de la cuisson à basse température, et, personnellement, je fais des cuissons de plusieurs jours, mais sans jamais descendre sous 60 degrés, car il y a alors plus de risques microbiologiques... qui sont réels quand les thermosondes ne sont pas contrôlées régulièrement.

Le passage au sel ? Pourquoi pas, surtout quand on conserve la viande dans la graisse.
Le marquage ? Pourquoi pas, puisqu'il donne du goût... mais on peut aussi observer que le réchauffage du confit dans une poêle s'accompagne de ce même brunissement.
De bonnes idées : mettre des herbes aromatiques dans la matière grasse, utiliser une matière grasse de belle qualité gustative... puisqu'elle va se retrouver dans les confits : thym, romarin...

mardi 2 janvier 2018

Il est un peu tard pour les réveillons, mais pour attendrir une volaille ferme...

Ce matin, un ami m'interroge :

Il y a longtemps que me trotte une idée de cuisson en tête : pour rendre la chair d'un poulet fermier plus juteuse et tendre, serait-il opportun de le plonger d'abord dans un bouillon (version pot au feu) pendant, disons 30 mn, puis de le placer au four très chaud à rôtir?





La réponse se fonde sur les trois données essentielles suivantes :

1. les viandes sont faites de fibres qui sont tenues entre elle par le tissu collagénique, responsable de la dureté ;

2. la jutosité est liée au fait que l'intérieur des fibres est fait de protéines et d'eau, un peu comme du blanc d'oeuf

3. le chauffage a deux actions contradictoires : il durcit l'intérieur des fibres, comme quand on fait un pot-au-feu ; et il dissout très lentement le tissu collagénique.


Autrement dit, si une volaille est un peu dure, c'est qu'il faut surtout dissoudre le collagène, d'où la solution de la cuire dans un bouillon, à basse température. La cuisson doit être longue, car le collagène se dissout lentement, et la température doit être aussi basse que possible, afin que l'intérieur des fibres ne durcisse pas.

En pratique ? Je préconise une cuisson à basse température, dans un bon bouillon, pendant plusieurs heures. Disons pour être précis une journée à 70 degrés.
Puis, une fois que la poule est attendrie et cuite, oui, un coup de décapeur thermique en surface pourra faire le croustillant plus le goût en quelques minutes (mais attention de ne pas cuire : cette second opération doit seulement atteindre la surface).

jeudi 21 décembre 2017

A propos de pot au feu

On trouve dans Ginette Mathiot (Je sais cuisiner , Nouvelle édition revue et augmentée, Albin Michel 1990 , p. 724 n°2082) cette indication à laquelle je ne crois guère :


« Pour attendrir le pot-au-feu. Si la viande de bœuf apparaît dure malgré deux heures trente de cuisson, introduire dans le bouillon deux cuillères d'eau de vie (à 40°). La viande deviendra tendre. »

Le test n'est pas difficile à faire, mais nous ne pourrons pas le faire lors des séminaires de gastronomie moléculaire, car ces derniers ne durent que deux heures.

Qui s'y met ?






Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)






mardi 19 décembre 2017

Cuisson de viandes

Dans un séminaire de gastronomie moléculaire, nous avions comparé des matériaux pour cuire des kougelhopfs, et observé de remarquables différences.

Là, se pose la question à propos de la cuisson des viandes  au four : est-elle différence quand les viandes sont placées dans une cocotte en fonte fermée, dans un tajine, dans un romertopf ? Dans le premier cas, de la fonte ; dans le deuxième de la terre vernissée ; dans le troisième de la terre poreuse.


Mon analyse est pourtant que la température de la viande est le paramètre essentiel, et que ce n'est pas le matériaux qui importe. C'est donc d'abord une cuisson à basse température qu'il faudra faire.

Qui le fait ?











Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

Peut-on manger des viandes cuites au barbecue ? Oui !

Ce matin, un correspondant (amical) me demande des précisions sur la cancérogénicité des viandes cuites au barbecue, afin de ne plus en manger :

"Vous dites que manger des aliments cuits au barbecue est cancérigène, pouvez-vous me préciser exactement ce qui l'est, est-ce le charbon ou autre chose ? J'aimerais en savoir plus avant d’arrêter définitivement ces moments plaisirs de l'été."

 Je lui réponds  :

Je ne dis pas qu'il ne faut pas manger de viande cuite au barbecue, pour cette première et importante raison que je dis que chacun doit faire ce qu'il veut.

Dans mon laboratoire, les "on doit" ou les "il faut" sont interdits, et nous invitons chacun à prendre des décisions responsables, après recherche.
Pour ce qui concerne le barbecue, je dis plus exactement (et j'ai des tas de références scientifiques à vous donner) que la viande mise au-dessus du feu ou de la braise se charge de benzopyrènes cancérogènes. Que le feu soit vif, avec des flammes,  ou qu'il n'y ait que des braises, que l'on ait utilisé du bois ou du charbon de bois, peu importe.

En revanche, je propose de savoir que si l'on surélève la grille, la quantité de benzopyrènes diminue, mais, surtout, que si l'on met la viande à côté du feu, et non pas dessus, alors la quantité de benzopyrène devient indétectable (pour ne pas dire nulle) : en effet, les viandes cuisent tout  aussi bien, parce que les infrarouges se propagent dans toutes les direction ; mieux encore, on peut mettre derrière la viande un réflecteur, nommé "coquille", qui accélère la cuisson. Et dans cette configuration, évidemment, pas de benzopyrène !

Finalement, s'il est vrai que les benzopyrènes cancérogènes sont effectivement abondants dans les viandes au barbecue classique, je ne crois pas qu'il faille arrêter de cuire ainsi, quand cela n'a lieu que quelques fois. Car le risque n'est grand que pas la répétition des expositions.

D'autre part, je prends souvent l'exemple de la viande au barbecue non pas pour empêcher mes amis de manger des préparations, mais surtout pour inviter à être de bonne foi, et à ne pas se préoccuper de dangers moins avérés, de risques plus faibles (les additifs, les pesticides, les perturbateurs endocriniens, le gluten, que sais-je ?) quand on fait soi-même bien pire. Il y a d'autres exemples de ce type : fumer, boire, ne pas enlever la peau des pommes de terre, etc.

 Je revendique surtout de la cohérence !














Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

lundi 18 décembre 2017

Deux échelles pour des reproductions de viande


Dans mon livre La cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique, j'avais avancé l'idée, l'hypothèse, que le cerveau humain a évolué de sorte qu'il reconnait des « formes ».

Par « formes », j'entendais des formes aristotéliciennes, c'est-à-dire  des structures, des organisations. Par exemple, la seule mélodie d'Au clair de la lune, sans les paroles, permet de reconnaître la chanson ; par exemple, les étoiles de la Grande Ourse nous font penser à une casserole,  et ainsi de suite.

En cuisine, ces formes sont les saveurs (la saveur du chocolat, du roquefort...), les odeurs (celle de l'asperge, du haricot vert...), les couleurs... mais pourquoi pas les consistances ? Et c'est ainsi que je me suis interrogé sur l'organisation des fibres de la viande.

Dans du tissu musculaire, les fibres ont toutes environ le même diamètre, mais elles sont groupées en faisceaux, lesquels sont groupés en superfaisceaux, et ainsi de suite. Nous sommes sans doute capables de "reconnaître" cette consistance particulière. De ce fait, pourquoi ne pourrions-nous pas reproduire cette consistance ?

Si le projet est simple, est-il compliqué ? Ou, plus exactement dit, pourrait-on faire une "copie" qui soit simplifié, tout comme une photographie de la Joconde n'est qu'une reproduction (sans le vernis, l'épaisseur, etc.)  ?
Le fait que la viande soit composée de fibres de divers diamètres pourrait conduire à sélectionner seulement quelques uns de ces diamètres.
Par exemple, pourquoi ne pas se limiter à une construction "bimodale", avec de petites fibres  et de grosses fibres ?
L'opération est simple : on part d'objets d'un diamètre de spaghetti, et l'on divise en objets environ dix fois plus petits, de sorte que la bouche les distingue. Si l'on mêle les deux types de fibres, sentira-t-on cette bimodalité ? Même si l'on ne reproduit pas la consistance de la viande (et je crois qu'on ne la reproduira pas ainsi), nous devrions sentir les deux consistances, car des fibres de diamètre dix fois plus petit que celui d'un spaghetti restent perceptibles (la limitre est de 15 micromètres, soit plus de fois moins que les 5 millimètres d'un spaghetti  cuit).
De ce fait, le mangeur concluera de sa dégustation qu'il y a  une caractéristique qui a été prévue  par le cuisinier, et je crois qu'il en déduira positivement qu'on "l'aime", puisque l'on s'est préoccupé de lui, qu'on a fait pour lui une construction.


Le goût ? C'est une autre affaire, et je propose que nous laissions libre cours à notre fantaisie, en salé ou en sucré, parce que c'est là une autre affaire. Ce qui restera, c'est que le convive aura compris qu'on s'est préoccupé de lui, qu'on l'aime.















Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

dimanche 17 décembre 2017

Cautériser la viande ? Un fantasme



De nombreux livres de cuisine indiquent que l'on doit saisir les viandes sautées afin de cautériser la chair, d'empêcher le jus de sortir. Que penser de cette prescription ?

Faisons l'expérience de poser un steak dans une poêle très chaude, et observons : nous entendons du bruit, nous voyons des bulles à la base du steak, et nous voyons aussi une fumée s'élever. 
Si nous mettons un verre froid dans la fumée, nous le voyons se couvrir de buée, ce qui montre que de l'eau s'évapore de la viande... ce qui est bien naturel, puisque l'on chauffe de la viande, laquelle est faite de 60 pour cent de protéines et de 40 pour cent d'eau. 
 
Disposant de cette première observation, nous pouvons maintenant comparer deux poêles où cuisent deux moitiés d'un même steak, l'une chauffée doucement et l'autre chauffée très fort. 
Dans les deux cas,  il y a de la fumée. Autrement dit, que l'on chauffe doucement ou énergiquement, de l'eau s'évapore ; autrement dit, si par hasard il y avait cautérisation, cette dernière ne préviendrait pas efficacement la sortie du jus ! D'ailleurs, prenons un steak sauté vivement et posons-le dans une assiette : rapidement, la viande surmonte une flaque de jus, preuve que la cautérisation ne prévient pas la sortie du jus. 
 
Pourquoi cette prescription, alors ? Parce que si l'on cuit lentement une viande, un thermocouple que l'on placera sous la viande, au contact de la poêle, montrera une température constante de 100° : c'est l'indication que le débit de sortie du jus de viande est supérieur à la vitesse l'évaporation du jus. En revanche, si nous sautons très vivement la viande, nous pouvons observer que la température sous le steak argumente considérablement, atteignant 180, 200, 250°, signe qu'il n'y a plus d'eau liquide et que, contrairement au cas précédent, on n'est pas en train de faire bouillir la viande. 
De ce fait, les réactions chimiques responsables de la formation de composés sapides, odorants, colorés ont lieu, et la surface de la viande prend un goût bien particulier.

Comment rendre cela quantitatif ? 

Bien sur, il y a eu la mesure de la température sous la viande, mais pourrions-nous faire un modèle ? Nous pourrions vouloir calculer l'épaisseur de la croûte. A cette fin, il faudrait déterminer la puissance transmise à la viande, ce qui pourrait se faire en remplaçant la viande par une petite coupelle pleine d'eau. En mesurant la température de l'eau, on pourrait suivre l'échauffement, et déterminer la puissance de chauffage. Puis, de ce fait, on pourrait calculer l'épaisseur de la croûte formée. 

Et c'est alors le début d'une longue histoire, celle d'une exploration scientifique de la cuisson des viandes.Vive la gastronomie moléculaire ! 


La tendreté des viandes et la capillarité


Histoire de capillarité

Le gastronome Jean Antelme Brillat-Savarin évoque avec éloquence (on se souvient qu'il était juriste)  les grenadins de veau, ces pièces de veau si tendres qu'on peut les manger à la cuillère. 

A la cuillère ? La viande serait-elle suffisamment tendre, naturellement, pour que l'on puisse ainsi la diviser ? Il est vrai que certaines viandes extraordinairement persillées se défont facilement, au point que certains cuisiniers les reconnaissent en les pressant entre deux doigts : ces derniers s'enfoncent comme dans du beurre. Ou bien est-ce le résultat d'une cuisson particulière ? 
 
Quand une viande est très tendre, la cuisson doit absolument éviter de la durcir, de la maltraiter. Comment faire ? Pour un tel cas, on se souvient que la viande est faite de fibres musculaires, sortes de sacs allongés, collés les uns aux autres. La cuisson coagule intérieur des fibres, tel du blanc d'oeuf qui cuirait, de sorte que l'on comprend, en conséquence, qu'il faut cuire très peu, à une température assez basse pour assurer la coagulation sans évaporer l'eau qui fait la jutosité ni former trop de réseau protéique, qui, tel un œuf dur caoutchouteux, « solidifierait » trop l'eau. Deux cas se présentent : soit on met la viande dans un liquide parfumé, et l'on chauffe pendant très peu de temps à très petits frémissements, soit on chauffe sur une poêle très chaude, et l'on colore rapidement de chaque côté. 
 
Pour les viandes dures, l'analyse est différente. Ces viandes sont celles dont le tissu collagénique est plus abondant, plus résistant. Dans un tel cas, la viande est dure initialement, et la question est de l'attendrir. La clé de la solution est la suivante : à partir de 55°C le tissu collagénique se dissout dans le liquide qui environne la viande. C'est là que la cuisson à basse température s'impose : on met la viande dans un liquide, et l'on chauffe à une température comprise entre 60 et 70° pendant très longtemps, afin d'assurer la dissolution du tissu collagénique. L'intérieur des fibres coagule délicatement, ce qui durcit la viande, mais le tissu collagénique se dissout, ce qui permet aux fibres de se séparer mollement. 
 
Une conséquence en est que si le liquide de cuisson a bon goût, il peut entrer dans la viande par capillarité, ce phénomène physique qui fait monter l'encre entre les poils des pinceaux.

Pourquoi cette montée capillaire ? Parce que les molécules d'eau sont composées d'atomes d'hydrogène et d'oxygène, et que, dans les molécules d'eau, les atomes d'oxygène attirent plus les électrons que les atomes d'hydrogène, ce qui crée l'apparition de charges électriques sur les deux types d'atomes. 
D'autre part, le collagène qui gaine les fibres, et qui est présent à l'extérieur de ces dernières, a également des atomes d'hydrogène et d'oxygène, chargés électriquement, de sorte que, puisque des charges électriques de signes opposés s'attirent, tels des aimant, les molécules d'eau collent au tissu collagénique, et, de proche en proche, remontent vers l'intérieur de la viande. De la sorte, à l'issue d'une longue cuisson, la viande se gorge de liquide de cuisson, tandis qu'elle s'attendrit.


A cette description, on aura compris qu'il existe une véritable possibilité de donner du goût à une viande : il faut cuire dans un liquide qui a du goût. C'est pourquoi les professionnels ne cuisent jamais dans l'eau, mais dans du vin, un fond corsé, etc. On observera d'ailleurs que ce liquide , qui ne doit pas être trop salé, peut-être réduit en fin cuisson : quand la viande est tendre, on récupère le liquide, et on le fait bouillir sans couvercle, afin que l'eau s'évapore. Certes, on perd nombre de composés odorants (il faudra considérer dans un autre billet comment on pourrait éviter ce gâchis) mais on concentre en espèces solubles et non volatiles : acides aminés, sels minéraux, sucres… De sorte que l'on obtient finalement un liquide qui a beaucoup de goût, avec lequel on nappera la viande.
Finalement les grenadins de Brillat-Savarin ne sont pas un doux rêve, mais une réalité accessible à qui connaît les bases de la gastronomie moléculaire. 





Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine) 

samedi 16 décembre 2017

Ce matin, un groupe d'élèves me contact pour avoir des informations sur la cuisine note à note.

Je me réjouis, tout d'abord, car ces élèves sont de ceux qui ont compris que la cuisine moléculaire est dépassée, et que c'est la cuisine note à note qui sera présente demain.
Mais il faut que je leur réponde, et voici leur message : 

Nous souhaiterions réaliser une viande "note à note". Nous avions trouvé une recette qui s'en approchait légèrement : le Dirac qui se trouve sur youtube, mais nous n'avons pas de renseignements sur la quantité et les ingrédients utilisés. 


La première des questions est : qu'est-ce que la "viande" ? Il peut y avoir une définition du dictionnaire, une définition réglementaire... Par exemple, pour le TLFi, la première définition est " Aliment dont se nourrit l'homme; nourriture quelconque", mais c'est une définition dépassée, et l'on conservera donc plutôt :
"Chair comestible d'un animal".

Or la cuisine note à note est une cuisine de synthèse, qui n'utilise pas les ingrédients classiques que sont les viandes, poissons, légumes, fruits... mais des composés.
Une "viande note à note", c'est donc impossible ! Aucune construction note à note ne sera jamais une viande, et aucune viande ne peut faire de cuisine note à note !

Les diracs, dans cette affaire ? C'est parce que je copiais la composition moléculaire des viandes, avec environ 75 pour cent d'eau et 25 pour cent de protéines que j'ai cherché un nom qui ne soit pas "viande" : on se rappelle que le commerce des denrées alimentaires doit être loyal ; ce qui est de la viande est de la viande, et ce qui n'en est pas n'en est pas.
Bref pour mes reproductions de viande (reproduction de viande du seul point de vue de la composition), j'ai introduit le nom de "dirac". D'ailleurs, je discute tout cela dans un article dont je vous conseille la lecture : https://www.academie-agriculture.fr/publications/notes-academiques/n3af-2016-6-note-de-recherche-what-can-artificial-meat-be-note-note

Faire un dirac ? Rien de plus simple : dans un récipient, mettre une cuillerée à soupe de protéines, trois cuillerées d'eau, une rasade d'huile, des colorants, des composés sapides et odorants, éventuellement des vitamines, des oligo-éléments... Et cuire comme un steak, à la poêle.

On obtient comme un steak, mais ce n'est pas de la viande : c'est un dirac... et quand c'est bien fait, c'est TRES BON !










Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

jeudi 14 décembre 2017

Une astuce : des feuilles de figuier pour attendrir les viandes ?



Ma passion publique pour les extraordinaires phénomènes qui se produisent lors des transformations culinaires me  conduit  à recevoir de nombreux messages par courriel, et, souvent, on me pose des questions sur la cuisine. Parfois,  mais parfois seulement,  j'affiche ces  questions sur le blog « gastronomie moléculaire » et je donne la réponse. Toutefois, pour une réponse que j'ai, il y a des millions de questions ouvertes. 

Voilà notamment pourquoi nous n'avons aucune difficulté à nous réunir chaque mois depuis maintenant plus de plus de 17 ans,  à l'Ecole supérieure de cuisine française, à Paris, pour nos séminaires de gastronomie moléculaire.
Dans chaque séminaire, nous considérons une question, une seulement, nous l'analysons, et nous faisons des expériences pour l'explorer.  Les comptes rendus de ces séminaires sont donnés sur mon site http://sites.google.com/site/travauxdehervethis/, notamment, et leur teneur est également donnée dans la revue La Cuisine collective.

Toutefois, nous sommes amenés à sélectionner très durement les questions que nous explorons au cours des séminaires, car certaines questions sont très « locales ». Pas inintéressantes, mais locales. Par là, je veux dire que leur  étude risque  de ne pas apporter grand-chose à notre connaissance, ou, du moins, de ne pas faire effondrer un très grand pan de la montagne de notre ignorance.

Par exemple, on me dit que la présence de feuilles de figuier dans une daube permet d'attendrir la viande. Est-ce vrai ?

Je n'en sais rien, et j'en doute.
Oui,  le suc du figuier  contient des enzymes protéolytiques, des protéases, qui attaquent les protéines de la viande, et attendrissent cette dernière. C'est d'ailleurs pour cette même raison que certaines populations enveloppent les viandes dans des feuilles de papaye, ces dernières libérant une enzyme protéolytique, une protéase, la papaïne.
Toutefois,  les enzymes sont elles-mêmes des protéines, c'est-à-dire comme des fils repliés sur eux-mêmes. Or l'activité  protéolytique des protéases, comme l'activité enzymatique des autres enzymes,  dépend de ce repliement. Ce repliement  très spécifique est perdu lors du chauffage,  et c'est la raison pour laquelle je doute  que des protéases puissent conserver leur action protéolytique lors d'une cuisson.
Bien sûr le mot « chauffage » n'a guère de sens, car sortir un poulet du congélateur, c'est déjà le chauffer. Il est donc essentiel de spécifier une température de chauffage. Dans une daube, si l'on atteint le frémissement, la température est d'au moins 80 degrés, une température à laquelle la majorité des  enzymes sont dénaturées, perdant leur activité. Et   voilà pourquoi je veux une action protéolytique des feuilles de figuier.

Bien sûr,  il pourrait y avoir des actions d'autres sortes, en raison d'un contenu en composés phénoliques, par exemple. On peut tout imaginer,  mais si l'on peut tout imaginer, pourquoi imaginer plutôt une action qu'une absence d'action  ? Il y a une infinité d'actions possibles et une infinité d'actions impossibles.

Faut-il perdre du temps à aller explorer d'abord le très improbable ? C'est là une question de stratégie, et aussi de circonstances, et  c'est seulement  au cas où la précision culinaire qui m'est indiquée  aurait une importance particulière que je crois  devoir me résoudre à y passer du temps.
Pour les feuilles de figuier et les daubes,  la précision n'a été donné qu'une fois, et je ne l'ai pas trouvé en dans les sources écrites. L'imagination humaine étant infinie, je crains  devoir ne pas m'intéresser expérimentalement à cette question.
Et vous ?









Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

lundi 11 décembre 2017

La sublimation, dans le congélateur : ne gardons pas les mets trop longtemps


Partageons les questions qui m'arrivent par courriel.

L'une d'elle concernait la glace qui apparaît quand on stocke longtemps un produit dans un congélateur. Comment se forme-t-elle ? A partir du liquide qui « suinterait » des produits congelés (viande, poisson... ) ?

Non ! Le phénomène est merveilleux... et différent : il a pour nom « sublimation ». Evidemment, je ne vais pas faire ici un cours de physique, mais en profiter pour partager un émerveillement.


Reprenons avec un phénomène analogue, mais plus rapide et plus « visible » : on met quelques cristaux d'iode, comme du gros sel, mais violet, dans un petit bocal transparent, muni d'un couvercle, et l'on chauffe très doucement. Aucun liquide n’apparaît, tant que la température reste inférieure à 113,7°C, mais il y a, à la place, des fumées violettes, et l'on voit apparaître sur le couvercle de petits cristaux violets. L'iode (on devrait dire « le di-iode », puisque la molécule est formée de deux atomes d'iode) passe directement de l'états solide à l'état de vapeur, puis se recondense sur le couvercle.

Le même effet s'observe dans les congélateurs, mais bien plus lentement (parce que la température est bien plus basse, notamment). La température étant inférieure à la température de solidification (« congélation ») de l'eau, celle qui est  présente dans les aliments est sous la forme solide, mais en équilibre avec une certaine « pression de vapeur », et l'eau sous la forme de vapeur se recondense ailleurs, sous la forme de glace. On n'est pas dans les conditions où un liquide peut exister, et il n'existe pas.

Et voilà pourquoi la congélation, merveilleux système de conservation, n'est pas une panacée. D'ailleurs, quand on nous promet des panacées, doutons... et émerveillons-nous des phénomènes chimiques et physiques.






Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

lundi 18 septembre 2017

L'invention du jour

Ce matin, une idée nouvelle, alors que je discutais pour des étudiants de mastère mon invention ancienne des "oeufs d'anti-cent ans", qui sont les "opposés chimiques" des oeufs de cent ans asiatiques.
Dans les oeufs d'anti-cent ans, on fait coaguler par un acide, au lieu de le faire par une base.

Mais on se souvient que les viandes et les poissons sont des solutions de protéines. On connaît les ceviche, le poisson à la tahitienne, où un acide fait coaguler ces chairs. Mais une base ? Pourquoi ne pas faire coaguler de la chair (lamelles) en la trempant dans une solution d'hydroxyde de sodium, ou dans de la lessive de cendres (puisque l'on a alors de la potasse) ?
D'accord, on aura un goût savonneux, mais on pourra ultérieurement le combattre à l'aide de jus de citron.