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mardi 10 décembre 2024

A propos de feuilletages, et notamment du tourage

Je ne suis pas certain d'avoir bien expliqué les résultats du séminaire consacré à l'influence de la régularité du tourage sur le gonflement des pâtes feuilletées. 

Mais déjà, je m'aperçois qu'il faut dire les choses différemment pour me faire mieux comprendre : il s'agissait donc de faire une pâte feuilletée, et de chercher à l'obtenir très gonflée. 

Une pâte feuilletée, c'est un empilement de feuillets de pâtes séparés par des feuillets de beurre.
Et quand on cuit, l'eau de la pâte et du beurre s'évapore, ce qui repousse les feuillets les uns des autres. 

Le "tourage", c'est le fait d'étaler la pâte et de la replier sur elle-même, comme on va le comprendre en examinant la recette. 

1. On part de farine et d'eau, et l'on fait une boule de pâte, un pâton, que l'on aplatit en un gros disque. 

2. Puis on prend du beurre en quantité approximativement égale à celle de la farine, et on le malaxe pour en faire un disque également épais, mais un peu plus petit que le disque de pâtes. 

3. On pose le disque de beurre sur le disque de pâtes, et on replie la pâte sur le beurre pour l'envelopper. A ce stade, nous avons un disque composé, avec, au centre, un disque de beurre. 

4. Le tourage, c'est le fait de prendre un rouleau, d'allonger ce disque de beurre enveloppé dans la pâte trois fois plus long que large, puis de replier en trois. 

5. Cela, c'est un "tour simple", et, pour faire une pâte feuilletée on fait 6 tours de cette sorte, éventuellement deux par deux. 

On comprend que le premier tour, partant d'une couche de beurre, conduise à trois couches de beurre et donc quatre couches de farine... puisque les couches de pâtes mises les unes sur les autres se recollent. Au deuxième tour on aura donc 9 couches de beurre, puis 27 au troisième tour, puis 81, puis 243, puis 729. Après si tours, nous avons donc 729 couches de beurre et 730 couches de pâtes soit 1459 couches au total. Et 1459 couches dans l'épaisseur de la pâte, c'est-à-dire environ 1 cm : cela signifie que les couches de beurre ou de pâtes sont au maximum d'un millième de centimètre d'épaisseur, soit encore un centième de millimètre. C'est très peu. 

Et l'on comprend aussi que si l'on s'y prend mal, deux couches de pâtes peuvent se souder à travers une couche de beurre qui fuirait. A de tels endroits, la pâte ne pourrait plus gonfler, puisque les couches de pâtes sont soudées. 

Et voilà l'hypothèse que nous voulions tester : est-ce que si l'on fait des tourages très réguliers, on évite de telles soudure et l'on obtient des pâtes feuilletées plus gonflées ? 

Le séminaire a consisté à faire une pâte, une seule pour commencer qui a été tourée 4 fois. Puis nous avons divisé le pâton en deux. Une moitié a été très régulièrement tourée, tandis que l'autre a été médiocrement tourée. Les deux pâtons ont été ensuite cuits dans le même four, à la même température et pendant le même temps, et nous avons observé le résultat : la pâte régulièrement tourée était beaucoup plus gonflée que l'autre. Mieux encore, elle était homogène à l'intérieur, ce qui signifie que les feuillets étaient régulièrement espacés, tandis que, pour la pâte mal tourée, il y avait une espèce de grosse poche vide au centre. 

Même si ce résultat doit être répété, notre hypothèse semble donc corroborée expérimentalement, et je crois qu'il n'est pas mauvais de dire à tous ceux qui font des pâtes feuilletées de tourer aussi proprement que possible. 

J'ajoute que, lors du séminaire, nous avions un couteau médiocre pour couper les bords, alors que cette découpe est absolument essentielle. Si l'on ne coupe pas les bords, les couches se repliées au bord ne peuvent pas s'écarter à cet endroit, formant une sorte de gros portefeuille un peu ouvert. 

Pour avoir un bon gonflement, il faut couper les bords le plus proprement possible et sans souder les couches lors de pâtes lors de la coupure. 

Et c'est ainsi que l'on obtient des pâtes feuilletées bien gonflées !


jeudi 5 décembre 2024

A propos de farines

 Il y a des types de farine différents, mais les plus courantes sont celles de type 45 et de type 55, et nombre d'auteurs de livres de cuisine recommandent très expressément d'utiliser parfois les unes et parfois les autres selon les préparations. 

Toutefois, le type n'est pas une notion très utile parce qu'il s'agit en réalité du taux de cendres et non pas nécessairement de la quantité de protéines susceptible de faire ce réseau viscoélastique que l'on nomme le gluten. 

Mais ce qui est dit est-il juste ? J'aime beaucoup les tests expérimentaux bien faits. Or aujourd'hui, dans notre séminaire de gastronomie moléculaire, nous avons fait des pâtes à foncer avec les mêmes quantités d'ingrédients à savoir 200 g de farine pour 100 g de beurre et 70 g d'eau, soit avec une farine de type 45,  soit avec une farine de type 55 :  les préparations étaient faites de la même manière, et les échantillons étaient cuit tous ensemble, dans le même four avec une répartition des échantillons qui permettait de juger d'irrégularités éventuelles de cuisson, au centre du four ou sur les bords. 

Puis nous avons fait des tests triangulaires pour savoir si des personnes pouvaient ou non distinguer des différences de consistance des différentes pâtes. 

Le résultat est clair : nous n'avons pas perçu de différence entre des pâtes à foncer faites à partir de farine de type 45 et des pâtes à foncer identiques mais à partir de farine de type 55. 

Nous avons profité de l'occasion pour tester deux manières de préparer les pâtes  : soit par un sablage préalable de la farine avec le beurre puis l'ajout d'eau, soit par le travail de la farine avec de l'eau et ensuite l'ajout de beurre. 

Visuellement, les pâtes avant cuisson était différentes et les secondes étaient notamment plus collantes que les premières... mais après cuisson, les tests sensoriels n'ont montré aucune différence et l'apparence d'ailleurs elle-même n'était pas différente non plus. 

Bref il y a lieu de réviser nos certitudes à propos des pâtes à foncer  : quand je vous disais que rien ne vaut l'expérience  !

mercredi 13 septembre 2023

Eviter les "retrecissements" ?

"Comment éviter "les rétrécissements" des pâtes ?", me demande-t-on ?

En réalité, il s'agit moins de rétrécissement que de rétraction, un terme que l'on ne confondra pas avec "rétractation".  La rétractation, c'est ce que fit Galilée sous la menace de l'Inquisition, quand, ayant osé penser que la Terre tourne autour du Soleil et non l'inverse, il fut conduit à abjurer cette cité qui était contraire à l'écriture.

La rétraction, en revanche, le fait de se rétracter, de voir des dimensions se réduire.

Mais rien ne vaut une expérience : commençons par faire une pâte à foncer, avec farine, beurre, un peu d'eau, et abaissons là au rouleau ; immédiatement, avec un emporte-pièce carré, coupons la pâte... en laissant  l'emporte-pièce en place. Après une dizaine de minutes, on verra que la pâte s'est rétractée, à savoir qu'il y a une distance entre la pâte et les bords de l'emporte-pièce.

Cette expérience est est le résultat d'un séminaire de gastronomie moléculaire qui a montré que des repos d'une nuit n'ont aucun intérêt. Non seulement, nous n'avons pas vu d'effet avec un long repos, mais, surtout, nous avons compris que c'est l'abaissement final qui étire le gluten, de sorte que la rétraction intervient ensuite, dans les 20 minutes qui suivent l'abaissement.

Les explications sur la rétractions ? Voir mon livre Les secrets de la casserole. 



Les détails sur les expérimentations du séminaire : voir le compte rendu correspondant.

dimanche 20 août 2023

Cuit et recuit

 
Ce matin, une correspondante m'écrit : 

 

La question que je me pose et que je vous soumets est celle-ci : comment se fait-il que certains plats cuisinés à ce jour sont meilleurs le lendemain ? Et j'ai noté cela surtout pour les légumineuses, et les mélanges céréales/légumes. Peut-être en existe-t-il d'autres, mais les constatations sur ces plats sont évidentes.

 

Et voici ma réponse : 

 

Chère Madame Merci pour votre message, et pour votre lecture qui m'honore. La première question est le « meilleur », car le bon, c'est le beau à manger. Or l'histoire de l'art a amplement montré que le beau des uns n'est pas celui des autres. La musique, la peinture, la littérature ont réfuté l'idée d'un beau universel. Il en va de même pour la cuisine, sans doute. D'ailleurs, j'ai même rencontré des individus qui aimaient les œufs durs trop cuits, avec odeur de soufre, cerne vert et blanc caoutchouteux, alors que cela me semble une abomination. 

Bref, ne sachant pas ce qu'est le bon dans l'absolu, je ne peux pas savoir ce qu'est le meilleur. Je ne sais qu'une chose : ce qu'est le bon pour moi, et le meilleur pour moi. Il resterait donc le fait que le goût des mets change quand on les recuit le lendemain. 

Et là, même dans mon appréciation personnelle, ce n'est pas toujours une réussite. Oui, une viande longuement cuite bénéficie d'un temps supérieur de dissolution du tissu collagénique, de la formation d'acides aminés sapides. Oui, certaines durées de cuisson augmentées permettent de bien dégrader la paroi cellulaire, et d'attendrir... mais, inversement, une surcuisson des légumes verts leur fait perdre leur couleur fraîche, et j'avais présenté il y a quelques années un travail qui montrait que la recuisson du poulet rôti faisait apparaître un goût de carton. 

Enfin, dans un séminaire de gastronomie moléculaire, nous avons une idée des professionnels, à savoir que le goût des terrines de campagne disparaît quand la cuisson est prolongée plus d'une heure et quart. 

 

Bref, je ne crois pas que les constatations soient « évidentes ». Au contraire, je crois que nous avons beaucoup à faire pour quantifier les phénomènes... parce que tout cela est complètement inconnu ! Avec mes respectueux hommages.

lundi 22 mai 2023

Nous avons donc tenu notre séminaire de gastronomie moléculaire du mois de mai sur le thème du coup de buée et de l'eau dans le beurre des feuilletages.

 

Nous avons donc tenu notre séminaire de gastronomie moléculaire du mois de mai sur le thème du coup de buée et de l'eau dans le beurre des feuilletages. 
Commençons par le coup de buée : il s'agit de l'injection de vapeur que les boulangers font soit en début soit en fin de cuisson du pain. Pour le début de cuisson, ils disent que cela donne de la couleur, du brillant, et que cela favorise le gonflement parce que le coup de buée ralentirait le croûtage et permettrait donc que le pain gonfle mieux. 
En fin de cuisson, il y aurait une question de couleur et de brillant. 
Nous avons donc comparé différentes pâtes, pâte à pain, feuilletage, pâte à foncer, avec ou sans un coup de buée, en fin de cuisson, et nous avons comparé la couleur des produits obtenus : elle n'était pas différente. 
Évidemment, nous n'avons pas terminé la question et nous devrons poursuivre les travaux.
 
Pour ce qui concerne la question de l'eau dans le beurre du feuilletage, l'hypothèse était que plus il y a d'eau dans le beurre, plus le feuilletage gonfle. 
Habituellement, il y a un maximum de 18 % d'eau dans le beurre, mais rien ne nous empêche de malaxer du beurre avec de l'eau pour en faire entrer davantage. 
Et c'est ce que nous avons fait, pour comparer ensuite un feuilletage avec un beurre normal et un feuilletage avec un beurre additionné d'eau, les deux feuilletages étant ensuite cuits ensemble dans le même four.
Cette fois, nous avons observé que le feuilletage où le beurre avait été additionné d'eau avait plus gonflé que l'autre. 
 
En réalité, je ne tire pas de conclusion définitive de ces expérimentations, parce qu'il est bien difficile de faire des feuilletages tout à fait identiques, à un ingrédient prêt. D'autre part, nous avons comparé des feuilletages à  quantité de matière grasse égale, mais cela ne correspondait évidemment pas un volume de beurre égal. 
Bref, il y a lieu de poursuivre les explorations sur ces deux questions. 
 
À quoi bon, alors, avoir expérimenté ainsi ? Comme souvent, ces séminaires sont l'occasion de focaliser le questionnement, de le rendre public, de donner des résultats expérimentaux préliminaires et d'inviter chacun à poursuivre les expériences. 
J'espère toujours que nos amis seront ensuite obtenir d'autres résultats que nous pourrons partager.

mercredi 23 mars 2022

À propos de notre dernier séminaire de gastronomie moléculaire

 

Tous les mois depuis 21 ans,  nous nous réunissons pour expérimenter à propos de précisions culinaires, c'est-à-dire de trucs, astuces, tours de main, et, plus généralement, d'idées techniques qui s'ajoutent à la définition d'une recette, laquelle définition est le protocole minimum pour faire la recette.

Pour ce séminaire de mars 2022,  nous avons testé trois précisions culinaires :  à savoir que le cabillaud trempé dans l'eau salée avant la cuisson serait plus tendre que du filet non trempé,  que le cabillaud cuit dans de l'eau trop salée ne prendrait pas de sel en excès,  et que l'artichaut noircirait moins à la cuisson s'il était en présence de citron et d'huile d'olive.

Je passe sur les détails expérimentaux, évidemment importants, et donnés dans les comptes rendus mis en ligne, pour arriver aux résultats.

Pour la première précision culinaire testée, nous n'avons fait qu'une expérience, ce qui est insuffisant ;  mais, quand même, nous avons été surpris d'observer que le cabillaud qui avait été trempé dans de l'eau fortement salée pendant 40 minutes était plus tendre que le cabillaud qui avait pas été trempé.
Cela a été observé au cours d'un test triangulaire en aveugle, et tous les jurés ont été unanimes : la différence était flagrante.

Pour la deuxième précision, c'était plus facile, car il s'agissait simplement de mettre un filet de cabillaud dans de l'eau très fortement salée et de cuire.
La aussi, les résultats ont été très clairs : la partie externe du cabillaud était devenue extraordinairement salés, mais l'intérieur, il est vrai, était restée sans sel. C'est que nous avions poché le poisson, avec le mot pochage qui dit bien ce qu'il veut dire : faire une poche coagulée autour de la chair.
Mais quand même, ce filet de cabillaud était beaucoup trop salé au total.

Pour les artichauts, enfin, nous avons comparé quatre artichauts cuits dans l'eau : d'un même l'eau,  d'une même taille,  d'une origine commune. Ils étaient cuits ensemble, pendant le même temps, dans l'eau bouillante, dans la même quantité d'eau, dans les mêmes casseroles. Mais une casserole ne contenait que de l'eau, tandis que les autres contenaient soit du jus de citron (et les demi citrons pressés), soit dans de l'eau additionnée d'un demi litre d'huile d'olive, soit avec citrons et huile.
Le résultat nous a étonné : nous n'avons eu aucune différence de couleur,  ni sur l'extérieur, ni sur la partie comestible des feuilles,  ni sur le cœur après avoir ouvert les artichauts.

Et c'est ainsi que l'on a des idées techniques plus justes, en cuisine !

lundi 6 décembre 2021

Je m'étonne quand je vois un professeur de cuisine se désabonner de la liste distribution qui envoie les comptes rendus les séminaires de gastronomie moléculaire.


Décidément je m'étonne quand je vois un professeur de cuisine se désabonner de la liste distribution qui envoie les comptes rendus les séminaires de gastronomie moléculaire. Je ne parviens pas à m'y faire, et je ne comprends pas.

Oui,  je m'étonne, car nos séminaires sont des occasions d'expérimenter à propos d'idées qui sont classiquement transmises dans le milieu des métiers du goût (cuisine, pâtisserie, charcuterie, etc.),  et nous avons très souvent l'occasion de voir les "précisions culinaires" réfutées. Rien que pour les derniers séminaires, nous avons observé l'influence des alcools sur les sabayons, mais pas celle des acides. Nous avons vu que l'utilisation d'oeuf dans les pâtes à foncer n'avait pas les résultats prétendus. Nous avons vu que le sel et le sucre ne gênent pas les fermentations. Nous avons vu que l'utilisation de bouchons de liège n'attendrit pas les poulpes. Et ainsi de suite !
Autrement dit, les informations contenues dans les comptes rendus des séminaires  permettent à des  professeurs d'enseigner des choses justes, plutôt que des choses fausses.
Un professeur qui se désabonne de la liste de distribution qui envoie nos résultats expérimentaux sera-t-il au courant desdits résultats ? Comment fera-t-il pour enseigner des choses justes plutôt que des choses fausses ? Car, à ma connaissance, il n'y a pas d'autre endroit que nos séminaires pour faire nos tests.

Bref, je me moque que nos collègues soient ou non abonnés, mais ma question est : comment pourront-ils enseigner des choses justes ? Et j'ose pouvoir faire l'hypothèse que c'est un de leur soucis principaux (et, heureusement, j'en connais beaucoup pour qui ça l'est effectivement !).

mercredi 19 mai 2021

Le séminaire de mai 2021


Nous avons tenu un séminaire de gastronomie moléculaire consacré à l'évaporation de l'eau dans les pâte à foncer, qui sont communément nommées pâtes à tarte. La question, c'était d'abord d'explorer l'évaporation pour des conditions différentes : types de farine, types de pâtes, procédés de fabrication, et cetera. En effet, je suppose bien que la rétraction éventuelle est due à cette évaporation.

Comme toujours, nous avons fait quelque chose de rigoureux et quantitatif, c'est-à-dire que nous avons pesé les ingrédients, pesé les pâtes préparées avant cuisson, pesé les pâtes cuites, pesé les pâtes cuites après qu'elles étaient stockées...

Le résultat principal, c'est que l'eau qui avait été initialement mise dans la pâte, soit parce qu'elle est une composante du beurre à hauteur de 16 %, soit parce qu'elle a été ajouté après le fraisage du beurre et de la farine, a été "complètement" évaporée lors de la cuisson.
Enfin, comme on voit un peu plus d'évaporation avec une pâte très mince, c'est quand même qu'il en reste un peu.  

Cela dit, la comparaison de la même pâte à foncer étalées en 5 mm d'épaisseur, ou en  2 mm a fait apparaître une différence :  les pâtes à  2 mm, les plus minces, ont soufflé comme des merveilles,  alors que  les pâtes plus épaisses présentaient, après cuisson, une structure en deux moitiés.
Ce soufflage doit nous faire penser à celui des pommes de terre soufflées, qui ne s'obtient que pour certaines épaisseurs...  qui sont précisément de l'ordre de grandeur de celles que nous avons explorée avec les pâtes.




dimanche 4 avril 2021

Molecular Gastronomy in Thailand

Dear Friends

This was received from Witcha Treesuwan, from Katsesart University, Thailand :

On behalf of the Institute of Food Research and Product Development (IFRPD), Kasetsart University, we are very pleased to inform you that IFRPD and Yamamori Group in Thailand. will organize a Workshop on : Molecular Gastronomy and Molecular Cooking on 9th April 2021.
The purpose of this workshop aims to sharing information on Molecular Gastronomy among network organization, academia, private companies and interested person.

A scheeni Oschtra, as we say in Alsace (Happy Eastern)



samedi 22 août 2020

A propos d'oignons glacés

1. On m'interroge sur une recette d'oignons glacés, où, après avoir mis les oignons avec eau (à mi hauteur des oignons), beurre & sucre, le cuisinier couvre les oignons d'une feuille de papier sulfurisé, sans expliquer pourquoi.

2. Le papier sulfurisé agit comme un mauvais couvercle, qui laisse partir de la vapeur d'eau, mais moins qu'un couvercle, maintenant les oignons dans de la vapeur à 100 °C, de sorte qu'ils cuisent  de toutes parts pendant tout le temps que le papier sulfurisé est présent. Puis on retire le couvercle, afin que l'eau s'évapore et que la graisse & le sucre viennent enrober les oignons.

3. A noter tout d'abord que nous avons fait un séminaire de gastronomie moléculaire (en juin 2016) sur le thème analogue des navets glacés... en montrant notamment que ce que disent certains cuisiniers est faux : le glaçage n'entre pas dans les navets.







4. A noter aussi que le juriste Jean-Anthelme Brillat-Savarin, célèbre pour avoir popularisé le terme de gastronomie (la connaissance raisonnée à propos de l'alimentation humaine), a écrit des tas de choses fausses à ce propos : on consultera mon billet https://hervethis.blogspot.com/2017/12/les-epinards-absorbent-ils-le-beurre-non.html.

5. Et pour terminer : pourquoi s'ennuyer avec un papier sulfurisé, alors qu'un couvercle fait l'effet, associé à un bon réglage de la puissance de chauffage ? On n'est plus au Moyen-Âge, quand même ?

Soyons rationnels : déterminons l'objectif, puis choisissons les moyens techniques pour y arriver... en se souvenant que nous avons des fusées, des avions, des voitures, et que le char à bœufs est périmé !


vendredi 15 novembre 2019

De l'acide citrique dans l'eau fait-il comme du jus de citron ?

Nous avons comparé de l'acide citrique à du citron
Oui, le jus de citron doit beaucoup de son acidité à l'acide citrique... mais pas seulement. Et, notamment, le jus de citron a une odeur que les solutions d'acide citrique n'ont pas.
N'empêche que la ressemblance est frappante, au point que nous avons voulu comparer en aveugle du jus de citron et des solutions d'acide citrique.

Pour commencer, nous avons préparer des solutions de diverses acidités, afin de sélectionner celle qui avait la même acidité approximative. Cela se faisait au vu de tous.
Puis nous avons organisé un test triangulaire, lors duquel des participants du séminaires recevaient trois échantillons numérotés, sans savoir leur nature, avec deux échantillons identiques et le troisième différent. Ils devaient dire quels échantillons étaient identiques.
Le résultat a été intéressant : oui, la différence a été faite, mais difficilement !
De sorte que, maintenant, j'utilise souvent de l'acide citrique dans ma cuisine.

dimanche 7 janvier 2018

Note à note, résolument note à note

Lors de notre dernier séminaire, je montrais cette photographie d'un plat servi par Andrea Camastra, dans son restaurant Senses, à Varsovie :



 On y voit de la viande... de sorte que mes amis m'ont fait observer que les plats n'étaient pas 100 % note à note. L'observation était légitime, mais la raison est la suivante :

Le menu est en quatre actes.

Le premier est un jeu 100 % note à note.

Puis il y a un mélange de cuisine classique, cuisine moléculaire, avec des "agréments" note à note... qui tiennent la place gustative principale. Ce second acte veut également rappeler que les cuisiniers de Senses maîtrisent parfaitement toutes les techniques, anciennes ou modernes. Par exemple, il y a des cuissons inédites des viandes, mais en l'occurrence, le goût des plats est un goût note à note.

Les troisième et quatrième acte sont la partie sucrée, entièrement note à note. Bien sûr, les techniques peuvent être classiques ou moléculaires, mais elles sont au service d'un goût entièrement nouveau.

Pas d'inquiétude, donc !  Et n'hésitez pas à aller à Varsovie avant qu'il ne soit trop tard, et que le monde entier de la cuisine ait réservé les places trois ans  à l'avance, comme chez Ferran Adria





Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)  

dimanche 3 septembre 2017

Des séminaires de gastronomie moléculaire dans les lycées

Depuis maintenant 17 ans, nous avons chaque mois un "séminaire de gastronomie moléculaire", à Paris : nous sélectionnons une "précision culinaire" (truc, astuce, tour de main, proverbe, on dit...) que nous testons publiquement, le plus rigoureusement possible, en vue de diffuser les résultats de ces travaux, ainsi que l'envie de les poursuivre. En deux heures par mois, nous ne pouvons pas prétendre résoudre les questions, élucider les mécanismes des phénomènes dont nous montrons l'existence, mais, souvent, nous pouvons en tout cas réfuter des idées culinaires fausses : que l'oeuf ferait souffler en vertu d'un "principe soufflant" (c'est l'eau qui s'évapore qui fait en réalité gonfler les préparations), que laver les fraises leur ferait perdre du goût, que les navets confits absorberaient la matière grasse, etc.
Ces travaux sont consignés dans des "comptes rendus" qui sont diffusés à toute personne qui en fait la demande à icmg@agroparistech.fr.

Mais il y a mieux : après ces séminaires parisiens se sont créés des séminaires dans d'autres lieux : Nantes, Athènes, Montréal, Cuba, Poligny... Là, les collègues font le même travail. Par exemple, à Poligny, des précisions culinaires sont créées dans le cadre du Pôle Science & Culture Alimentaire de Franche Comté (voir par exemple http://www.enil.fr/recherche/culinaire).

Pourquoi n'y aurait-il pas cela dans tous les lycées hôteliers ? C'est à la fois amusant, facile à organiser (pourquoi ne pas proposer aux élèves de s'en charger), et cela contribue à la formation et à l'avancement de l'art culinaire.

Alors : à vous !

mercredi 10 août 2016

Emulsions de beurre noisette


Une question m'arrive ce matin, à propos d'émulsions de beurre noisette... ce qui me donne l'occasion de parler à nouveau de cette merveilleuse sauce  que j'avais introduite il y a de nombreuses années : la "sauce kientzheim" et, aussi, de rappeler des résultats obtenus lors d'un séminaire de gastronomie moléculaire à propos de sauce hollandaise. Je  présente cela, avant de répondre à la question de mon correspondant.


D'abord, la sauce kientzheim

Cette invention que j'ai faite il y a de nombreuses années est une sorte de mayonnaise de matière grasse chaude. Voici le protocole, pour une des versions :
1. dans une terrine, mettre le jaune d'un ou deux oeufs
2. puis ajouter le jus d'un citron
 3. saler et poivrer vigoureusement (pour le poivre)
4. faire un beurre noisette (on chauffe du beurre jusqu'à ce que l'apparence des bulles de vapeur change et qu'une légère coloration se forme, avec une belle odeur
5. attendre que le beurre noisette refroidisse un peu (mais reste liquide : il faut  pouvoir poser la main sur le bord de la casserole, preuve que la température ne sera pas suffisante pour coaguler l'oeuf)
6. ajouter le beurre noisette refroidi goutte à goutte dans le mélange oeuf+citron, en fouettant comme pour une mayonnaise.
C'est absolument délicieux et, on le voit, c'est une émulsion de beurre noisette dans un liquide (jaune d'oeuf + citron). Je rappelle en passant qu'une émulsion n'est pas une mousse : la mousse, c'est obtenu par foisonnement (ajout de bulles de gaz), alors que l'émulsion correspond à la dispersion de gouttelettes de matière grasse dans un liquide avec lequel la matière grasse n'est pas miscible).


Puis notre séminaire

Dans notre séminaire, nous avons examiné, à une occasion, la question de la hollandaise que l'on rate : pouvait-on la rattraper en ajouter une goutte d'eau froide ? Et la réponse est oui : nous sommes devenus "champions du monde" de la hollandaise ratée (exprès) et rattrapée : il suffisait, une fois la sauce tournée, de mettre une ou deux cuillerées à soupe d'eau, et la sauce reprenait spontanément... comme je l'avais d'ailleurs signalé dès 1992 dans mon livre Les Secrets de la casserole (éditions Belin).
Après quatre ou cinq rattrapages, nous avons décidé d'en finir, et de pousser la cuisson de la sauce... jusqu'au beurre noisette. Et quand nous avons mis une cuillerée d'eau froide, la sauce s'est rétablie, preuve que nous avions retrouvé une émulsion de type huile dans eau.


Jusqu'à mon "beurre feuilleté"

On le voit, on peut parfaitement faire des émulsions de beurre noisette dans un liquide, mais on peut  faire aussi des émulsions d'un liquide dans du beurre noisette, et c'est ce qui m'a conduit à inventer, il y a plusieurs mois, le "beurre feuilleté". Dans cette préparation inspirée par la pâte feuilletée inversée, j'ai proposé qu'une des couches soit faite par une émulsion d'un liquide aqueux dans du beurre, et l'autre par une émulsion de beurre dans un liquide aqueux. Mon ami Pierre Gagnaire en a fait bon usage : http://www.pierre-gagnaire.com/#/pg/pierre_et_herve/travail_du_mois.
Disperser du beurre noisette dans un liquide est, on l'a vu, sans aucune difficulté, mais disperser du  liquide dans du beurre noisette ? Pas de problème non plus, et, de toute façon, si les protéines manquaient, il serait facile d'ajouter un blanc d'oeuf, ou un jaune d'oeuf, ou de la gélatine en solution dans le liquide, ou de la lécithine.


Bref, on n'a aucune difficulté  à émulsionner du beurre noisette !

jeudi 8 mai 2014

Séminaire de gastronomie moléculaire, en mai 2014

Chers Amis
Je suis heureux de vous rappeler que le prochain séminaire de gastronomie moléculaire se tiendra le lundi 19 mai, de 16 à 18 heures, au 28 bis rue de l'abbé Grégoire, 75006 Paris.
Le thème a été voté lors du passionnant séminaire d'avril. Ce sera :
les jaunes d'oeufs froids font-ils durcir la masse chocolat+beurre, lors de la préparation d'une mousse au chocolat
On se propose de tester divers types de chocolats, et, aussi, de tester l'ajout des jaunes battus avec du sucre, jusqu'au ruban.

mardi 8 avril 2014

Séminaire d'avril 2014

séminaire d'avril 2014

Chers Amis,

La date du séminaire d'avril a changé de date : il se tiendra le lundi 14 avril, de 16 à 18 heures, au 28 bis rue de l'abbé Grégoire, 75006 Paris.
Le thème : la durée de cuisson des terrines de campagne. Est-il vrai que le goût soit perdu après 1h15 de cuisson ?

lundi 21 janvier 2013

La neige ne nous arrêtera pas !

Quand il s'agit de choses aussi importantes que de savoir si la mise à la température ambiante des viandes améliore leur goût après cuisson, la neige ne peux pas nous arrêter : nous nous retrouverons, pour le séminaire de gastronomie moléculaire, à 16 h, au 28 bis rue de l'Abbé Grégoire, 75006 Paris.

dimanche 23 décembre 2012

Des nouvelles de la semaine

Et si ce blog racontait aussi l'histoire du Groupe INRA/AgroParisTech de gastronomie moléculaire ?

Essayons : vous me direz si cela vaut la peine que je continue.


Cette semaine, nous avons donc commencé par notre Séminaire de gastronomie moléculaire, consacré à l'étude de l'arrosage des volailles que l'on rôtit. Pas d'effet manifeste, lors d'un test triangulaire, soit pour les volailles arrosées à l'eau, soit pour celles qui étaient arrosées à l'huile. Etonnamment, les premières étaient plus gonflées, par de la vapeur.

Puis, mardi, il y a eu (notamment) l'évaluation des étudiants de Master 2 "Physicochimie pour la formulation et structuration des aliments", du Master Ingénierie Produits Procédés (IPP) d'AgroParisTech.
Nous avons testé un dispositif pédagogique qui consistait à faire une première évaluation "à blanc", où les étudiants étaient lourdement critiqués, avant de faire une seconde évaluation en "réel"... et il est apparu que, quand les étudiants sont bons, ce système pourtant intellectuellement séduisant ne fonctionne pas.
Mais, à la réflexion, était-il si intelligent que cela ? Un étudiant qui est "bon" n'a pas besoin d'évaluation, de sorte que tout dispositif d'évaluation devient inutile, quel qu'il soit !

Mercredi, grand jour pour la "cuisine note à note", puisque s'est tenue à l'Académie d'agriculture de France, de 15 à 17.30, une séance publique sur ce thème, avec :
- introduction (votre serviteur)
- la question économique, par Pierre Combris
- la question du fractionnement, par Geneviève Gesan-Guiziou
- la question toxicologique, par Fabrice Pierre
- des conclusions tirées par Gérard Pascal.
Tout cela a été filmé, et sera bientôt en ligne, sur le site de l'Académie.

Jeudi : rien que du travail de laboratoire, avec une foule d'élèves de 2nde en stage d'observation. Un symptôme amusant : le calcul les ennuie, et l'expérimentation leur plait. D'où la vraie question de l'enseignement scientifique : comment parvenir à l'état inverse ?

Vendredi : depuis plusieurs semaines, une équipe de télévision était au laboratoire, afin de produire un film de 52 minutes sur la gastronomie moléculaire. Il a bien fallu répondre à leurs questions !

Cela fait une bonne semaine, surtout quand on sait que tout le temps libre de chacun a été réservé à la pratique scientifique, et que plusieurs textes ont été produits :
- un article pour la revue La Cuisine collective (le "compte rendu" de notre séminaire du lundi)
- un article pour la revue Pour la Science, qui réserve chaque mois sa page 93 pour la chronique "Science et Gastronomie"
- un compte rendu pour la réunion de la Section VIII ("filières alimentaires") de l'Académie d'agriculture de France
- un compte rendu du séminaire du lundi, pour tous ceux qui se sont abonnés à cette "lettre"
- et j'en oublie.

N'hésitez pas à laisser des commentaires pour demander des précisions (sites, liens...).

lundi 5 novembre 2012

Prochain séminaire : le 19 novembre

Chers Amis

Pour ceux qui veulent+peuvent, rendez vous pour le prochain séminaire, à l'ESCF, 28 bis rue de l'abbé Grégoire, 75006, le lundi 19 novembre, de 16 à 18 heures.
Nous y examinerons des techniques "infaillibles" pour rattraper les sauces hollandaises tournées.

A bientôt