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lundi 2 décembre 2024

Comment faire un document ?

Comment préparer un document ? En pensant constamment à son lecteur, en ne faisant que des choses qui ont du sens, en structurant pour que nos amis lecteurs s'y retrouve.

Faire un document, une note, un compte rendu, un article, un livre, etc. ? Je veux donner des indications générales  et simples, dont je sais d'expérience qu'elles seront utiles.

Commençons donc par la forme, en observant que :
1. un document est destiné à un lecteur
2. nous devons tout faire pour aider ce dernier à bien recevoir les informations que nous voulons donner.

Il y a donc lieu  d'être clair, explicite, simple... et de bien structurer le document pour que nos lecteurs puissent s'y retrouver dans l'ensemble du récit.

En corollaire, il est souvent utile de faire des paragraphes, et, mieux, de numéroter les paragraphes que nous faisons.
À ce propos, on devra savoir que les institutions de normalisation (Iso, Afnor...) préconisent de n'utiliser que des chiffres arabes avec des numéros (1, 2,3,4, etc.). Si l'on subdivise,  alors on utilisera encore des chiffres arabes  : 1.1, 1.2, 1.3... et ainsi de suite 1.1.1, 1.1.2, 1.1.3, etc.
Observons l'avantage par rapport à des I, A, 1, a : non seulement, il faut faire des efforts de traduction quand on lit V.C.2.b, mais, de surcroît, on s'interrogue : pourquoi des chiffres romains avec les chiffres arabes, pourquoi les lettres ? Bref, la méthode AFNOR est utile parce qu'elle permet immédiatement de se situer dans le récit, sans s'interroger sur les raisons parfois inexistantes du choix d'une autre structuration.

Il y a donc des titres des intertitres, et l'on comprend que les titres doivent apparaître en caractères plus fort que les intertitres.
Là, on rencontre encore des variations souvent aléatoire entre le titre en majuscules (on parle aussi de "capitales"), le titre en gras, le titre en italiques, le titre souligné, des titres de différents caractères, etc.
Aidons plutôt nos amis en étant systématiques, d'une part, et lisibles d'autre part : sachons que les italiques sont régis par le Code typographique (qui m'importe de mettre ce mot en italiques, d'ailleurs)  ; sachons aussi que les italiques sont la traduction, version  imprimée, du souligné que l'on utilise quand on écrit avec crayon et papier ; sachons aussi que les textes en majuscules sont difficilement lisibles.
Et concluons :   tous nos titres seront avec une capitale initiale mais en lettres minuscules (aussi nommées  bas de casse). Et si l'on a des titres et des intertitres, c'est plutôt sur la taille des lettres que l'on jouera, par ordre décroissant évidemment.

Nous savons généralement qu'il existe différentes sortes de types de lettres, qui sont nommées des  "polices".
Or des études de vitesse et de confort de lecture ont établi que certains caractères sont plus visibles que d'autres, et, notamment, le Times romain est particulièrement lisible, qu'on l'aime ou non.
Bien sûr, on peut vouloir faire plus moderne avec un caractère comme l'Arial, mais en tout cas, la chose importante, c'est de choisir un caractère et de s'y tenir, sans quoi on conduira le lecteur à s'interroger sur la signification  des changements de caractère... ce qui n'est pas l'objectif : nous devons l'aider, l'entourer au mieux pour qu'il se focalise sur le contenu que nous lui présentons.

Le texte ainsi rédigé doit  être mis en page et, là encore,  il y a lieu d'être simple, car nous ne sommes pas assez savants, pas assez artistes, pour être capables d'inventer des maquettes compliquées... qui seraient d'ailleurs hors sujet car difficiles à lire. Pensons plutôt que les lecteurs occidentaux lisent de gauche à droite et de haut en bas. Une telle observation semble une évidence, mais elle nous rappellera la règle : faire simple.

Pour la maquette, d'autre part, si nous regardons la page de loin, nous voyons un texte central et des marges. Restons-en à la règle la plus simple qui est "2 3 4 5" : ce sont les valeurs des blancs à gauche, en haut, à droite, en bas. Je n'explique pas la raison pour laquelle on utilise ces valeurs, mais quiconque ne la connaît pas devrait bien s'empêcher de changer de règle.

Reste à discuter la question des lignes de blanc entre les textes. Dans un texte qui court au long, il n'y a aucune raison de mettre une ligne de blanc entre deux paragraphes car cette ligne devrait avoir un sens que le lecteur risque de ne pas trouver,  ce qui gênera sa lecture. En revanche, quand il y a un intertitre, on comprend que ce dernier se rapporte au texte qui le suit, de sorte que l'on pourra mettre deux lignes de blanc au-dessus de l'intertitre et une ligne de blanc en dessous. C'est les règles des "deux tiers un tiers".

Des couleurs ? Là encore elles doivent avoir un sens, et le bariolage fondé sur des choix idiosyncratiques est à exclure : comment nos lecteurs interpréteraient-ils nos idiosyncrasies? Répétons-le : il faut faire simple, il faut que tout ait un sens facilement accessible. Déroulons un tapis rouge à nos lecteurs.

Comment préparer et mener un travail ?



Faire un projet ?
Planifier un travail ? Il y a lieu de bien le préparer, de façon structurée, et de corriger nos prévisions au fur et à mesure du déroulement des travaux. Ne nous empêtrons pas dans mille considérations accessoires, et restons-en d'abord au plus important.

Surtout, comme un travail est un cheminement abstrait, représentons-le graphiquement. Et simplement.

Commençons par observer que si nous voulons aller d'un point à l'autre, il faut partir du point de départ et nous diriger vers la destination, le point d'arrivée.
On représentera cela graphiquement en mettant à gauche un point, le départ, et à droite l'arrivée.
Le départ :  nous savons bien où nous sommes, ici et maintenant, mais il ne s'agit pas d'un point "physique : bien plutôt d'un point "intellectuel". Et cela fait toujours du bien de nous situer dans le contexte particulier du travail. Par exemple, si nous étudions les mousses, alors nous pourrons déposer au point de départ les connaissances que nous avons à leur propos (on écrit cela sous le point, par exemple, ou bien plus bas que la représentation graphique, avec un renvoi par un numéro, si l'on ne veut pas surcharger le graphique du chemin).

Pour la destination, le point d'arrivée, c'est un "objectif". Et avant chaque mise en route, nous avons toujours intérêt à nous demander où nous voulons aller : quel est l'objectif ?
J'insiste un peu, parce que cette question de l'objectif est la source d'erreurs fréquentes : sans cesse, entre le moment où nous planifions un travail et le moment où nous le terminons, il y a lieu d'être bien clair, de bien garder l'objectif en tête, sans quoi nous nous égarerons.

Puis entre les deux points de départ et d'arrivée, il y a un grand nombre de chemins possibles, mais c'est évidemment la ligne droite qui est le plus rapide. Souvent, dans les travaux professionnels, c'est celui que nous devons chercher lors de la planification.  

Comme pour un véritable chemin, physique, dans un pays, le "chemin du travail" se parcourt pas à pas, mais généralement par étapes.
Lors de la planification, il n'est pas  inutile de représenter une structuration du chemin, divisé par des étapes, et sans rentrer dans le détail des pas individuels :  on verra ainsi mieux les sous-objectifs successifs.
Bien sûr, il y a des cas où plusieurs chemins devront être parcourus en parallèle et cela correspondra à des bifurcation du chemin principal sur des lignes différentes. Pour chacune, il pourra y avoir des structurations, des étapes encore.

Lors du travail, nous aurons généralement des informations nouvelles, et elle conduiront peut-être à des modifications du chemin, ce qui pourra être représenté.

De la sorte, on obtiendra un grand arbre couché, que nous parcourons de la gauche vers la droite (soyons simple !), et l'on pourra utiliser des couleurs pour distinguer ce qui a été fait, et ce qui est à faire.
Bien évidemment, on fera apparaître dans la première ligne ce qui est le plus urgent, et dans les lignes suivantes par ordre descendant ce qui l'est de moins en moins.
Parfois, il y aura des rameaux, que l'on ne parcourra pas, sauf en cas de besoin : ce sont des questions peut-être passionnantes, mais qui risquent de nous détourner de notre objectif.

Et ainsi, avec différentes indications de date, de temps de parcours, des annotations, et cetera, on aura fait cet "arbre et rameaux" que je propose à tous ceux qui mènent un projet.

On observera que ce n'est pas exactement un diagramme de Gantt, lequel a d'autres intérêts.

Quel outil utiliser pour représenter tout cela ? Un certain monde professionnel recourt à Excel, ou  Calc, mais les chemins n'apparaissent alors pas et pour cette raison, je dois conclure que ce n'est pas la meilleure des solutions.
Alors... soyons simple : pourquoi pas un simple logiciel de dessin ? 



mercredi 14 février 2024

Pour enseigner, pensons stratégie didactique

Hier, j'ai été invité à rapporter un manuscrit soumis à une revue scientifique, et plus exactement un texte didactique, présentant une méthode générale statistique. 

Au-delà de toutes les imperfections du manuscrit, qui étaient d'ailleurs nombreuses puisque j'en ai relevé presque une par ligne du texte, il y avait une faute didactique essentielle à savoir que l'auteur donnait d'abord une idée générale incompréhensible, puisqu'elle était à la fois générale, abstraite, et que l'on ignorait tout de son application particulière, et ensuite seulement, il prenait un exemple seulement à moitié pratique, à moitié concret, de sorte que l'on n'avait pas vraiment idée de ce dont il s'agissait.


Mais supposons que les exemples donnés aient été  mieux explicités, je crois de toute façon que les auteurs faisaient une erreur en les donnant après la loi générale,  parce que l'idée générale incompréhensible mettait les lecteurs dans la désagrable position de ne pas comprendre. Bien sûr, si l'exemple avait été bon, les lecteurs auraient pu ensuite éventuellement se raccrocher aux branches mais pourquoi au fond les mettre dans un état de déséquilibre et d'incompréhension ?
 

À l'inverse, si l'auteur avait commencé par un exemple pratique, simple et concret, alors les lecteurs auraient bien compris ce dont il s'agissait. Et s'il avait ensuite donné l'idée générale, les lecteurs ayant bien compris auraient interprété correctement l'idée générale donnée,  de sorte que je conclus que la seconde méthode est certainement meilleure que la méthode utilisée par les auteurs. 

 

Je m'étonne que des enseignants en soient encore à devoir découvrir ce genre de phénomènes, et je plains leurs élèves de tout mon cœur.

jeudi 29 septembre 2022

Suivre un cours : de quoi s'agit-il ?

 Suivre un cours : de quoi s'agit-il ?

Alors que nous sortons d'un excellent de physico-chimie, donné par une collègue dans le cadre d'un master, je m'aperçois que notre collègue a prononcé des mots techniques, notamment des noms de composés mais aussi des des termes qui décrivent des notions de physique, et que je suis quasiment certain que nombre d'étudiants présents ne les comprennent pas "parfaitement".

J'explique plus loin ce "parfaitement", mais, ici, j'insiste pour dire que ce que je dis n'est pas une critique, mais seulement une observation factuelle.

Dans le feu de la présentation, nos jeunes amis n'ont pas interrompu sans cesse la collègue, de sorte que tout cela a glissé : on pourrait dire que "le cours s'est achevé" avec la fin de la présentation... mais je veux, au contraire, dire ici que non, le cours ne s'est pas achevé tant que nos amis n'ont pas été creuser plus loin.

Par exemple, il a été question de "groupe fluoré" : nos amis savent-ils PRECISEMENT ce dont il s'agit ? Il a été question d'esters de sucrose : de quoi s'agit-il ? comment les obtient-on ? quelles sont leurs  propriétés chimiques et physiques ? Il a été question d'entropie de mélange : nos amis savent-ils ce que c'est, comment on le définit, comment on le calcule ?
Suivre un cours : de quoi s'agit-il ?

Alors que nous sortons d'un excellent de physico-chimie, donné par une collègue dans le cadre d'un master, je m'aperçois que notre collègue a prononcé des mots techniques, notamment des noms de composés mais aussi des des termes qui décrivent des notions de physique, et que je suis quasiment certain que nombre d'étudiants présents ne les comprennent pas "parfaitement".

J'explique plus loin ce "parfaitement", mais, ici, j'insiste pour dire que ce que je dis n'est pas une critique, mais seulement une observation factuelle.

Dans le feu de la présentation, nos jeunes amis n'ont pas interrompu sans cesse la collègue, de sorte que tout cela a glissé : on pourrait dire que "le cours s'est achevé" avec la fin de la présentation... mais je veux, au contraire, dire ici que non, le cours ne s'est pas achevé tant que nos amis n'ont pas été creuser plus loin.

Par exemple, il a été question de "groupe fluoré" : nos amis savent-ils PRECISEMENT ce dont il s'agit ? Il a été question d'esters de sucrose : de quoi s'agit-il ? comment les obtient-on ? quelles sont leurs  propriétés chimiques et physiques ? Il a été question d'entropie de mélange : nos amis savent-ils ce que c'est, comment on le définit, comment on le calcule ?

En réalité, suivre un cours, ce n'est pas seulement écouter celui ou celle qui parle, mais,  surtout, se faire une liste de tous les objets que l'on doit travailler ensuite pour mieux les comprendre.

Par exemple, pour ce qui concerne les composés, il faudra trouver la formule chimique, mais ne pas s'arrêter à une image. Il faudra également y repérer des groupes donneurs, accepteurs, utiliser un logiciel pour voir la forme des nuages électriques, dépister des dipôles, , accepter, chercher les orbitales, voir des dipôles, et cetera. Pour des notions de physique, également, il y a beaucoup de travail à faire et, par exemple pour l'entropie de mélange, il faudra plonger à nouveau dans la définition et dans son maniement.

C'est seulement quand TOUT, je dis bien tout, ce qui a été entendu sera explicité que le cours sera terminé. Pas avant.

En réalité, suivre un cours, ce n'est pas seulement écouter celui ou celle qui parle, mais,  surtout, se faire une liste de tous les objets que l'on doit travailler ensuite pour mieux les comprendre.

Par exemple, pour ce qui concerne les composés, il faudra trouver la formule chimique, mais ne pas s'arrêter à une image. Il faudra également y repérer des groupes donneurs, accepteurs, utiliser un logiciel pour voir la forme des nuages électriques, dépister des dipôles, , accepter, chercher les orbitales, voir des dipôles, et cetera. Pour des notions de physique, également, il y a beaucoup de travail à faire et, par exemple pour l'entropie de mélange, il faudra plonger à nouveau dans la définition et dans son maniement.

C'est seulement quand TOUT, je dis bien tout, ce qui a été entendu sera explicité que le cours sera terminé. Pas avant.


jeudi 23 décembre 2021

Du positif, toujours du positif !



A une jeune amie, aujourd'hui repartie du laboratoire, je demandais comment ça allait, ce qu'elle faisait de beau par les temps qui courent, et elle me répond :

"J’ai eu un trimestre assez chargé car j’essayais de valider mes heures de laboratoire et on a fini le programme principal pour l’année (il nous reste les options le trimestre prochain).
En ce moment je m’intéresse aux recherches des professeurs dans le departement de chimie pour voir sur quoi j’aimerai faire ma thèse de master l’an prochain. La bonne nouvelle est que j’ai éliminé  la chimie organique, de sorte que je commence à voir un peu plus ce que j’aimerais étudier !

Et ma réponse est immédiate :

Super pour tes études... mais n'oublie pas que la vie se construit avec des envie, et pas avec des exclusions, car ce sont les enfants qui disent "je n'aime pas" (les épinards).
D'ailleurs, tu me fais penser à xxxx, que j'ai vu hier, et qui est à xxxx, ayant réussi son concours. Je lui avais conseillé d'être excellent dans "quelque chose", n'importe quoi mais quelque chose. Et cet âne s'est décidé, avec un copain, de se lever très tôt et de bosser pour devenir exceptionnel... mais il a fait passer la forme avant le fond.
Ouf, dans nos discussions d'hier, il a compris le message, et il vient de se décider à être bon en "biochimie". Un grand pas de fait.

jeudi 6 mai 2021

Etourdi ? Maladroit ? Non, paresseux.

 Non, tu n'es pas incapable... mais il faudra travailler. Non tu n'est pas maladroit, mais il faudra travailler. Non, tu n'est pas "nul en maths", mais il te faudra travailler...



Note : pour ne blesser personne, je ne parle pas ici de personnes réelles, et j'ai composé avec des centaines d'exemples.


Un jeune ami me dit avoir oublié le chargeur de batterie de son ordinateur, et il est obligé de repartir chez lui pour travailler, ce qui dérange considérablement son programme de travail. Personnellement, cela m'indiffère absolument,  parce que son travail n'est pas le mien: son "insuffisance" n'empiète pas sur ma liberté. Mais je lui fais quand même observer que c'est la quatrième fois en deux semaines qu'il lui arrive une aventure analogue. Et, la fois précédente, cela n'avait pas non plus de raison particulière de m'ennuyer, puisque cela ne concernait pas mon propre travail... mais pourquoi ces oublis à répétition qui séparent en réalité le bon professionnel du mauvais ?
Il me fait penser à ce jeune ami en stage dans notre groupe, il y a quelques années, qui était "maladroit", et l'on verra pourquoi.

A vrai dire,  je ne devrais pas me mêler de cela, puisque, comme je l'ai expliqué, cela n'a pas de conséquences pour moi, mais je n'oublie pas que ce jeune ami est venu de loin pour que je l'aide à grandir en intelligence, en méthode... De sorte que je dois dire quelque chose de ces oublis.

D'ailleurs, ce cas précis que je rencontre n'est pas isolé, et c'est bien la raison pour laquelle il y a lieu d'évoquer la question.

Chaque fois, on me dit que, depuis tout petit, on est tête en l'air... Mais ne sommes-nous pas tous tête en l'air ? Pour moi, j'oublie tout ce qui ne m'intéresse pas... mais je le l'oublie pas, puisque je me suis mis des tas de systèmes d'alertes, sur mon agenda électronique : ma tête est libre pour penser à ce qui m'importe, à ce qui m'intéresse, sans subir les conséquences d'étourderies.
D'ailleurs, ne serait-ce pas cela que ne pas être étourdi : avoir mis en place des systèmes pour ne pas oublier ce que l'on ne doit pas oublier ?

Cette question de l'étourderie n'est qu'une partie émergée de l'iceberg. Le même jeune ami me dit avoir une orthographe déficiente, ne pas être assez bon en mathématiques, en chimie...

Et là, je réponds invariablement que ne sont bons que ceux qui ont appris !

Oui, ne savent écrire les mots que ceux qui ont appris à les écrire. Écrire sans faute d'orthographe ? Il suffirait de le faire un peu plus lentement que notre ami ne le fait, de faire un peu attention aux mots que l'on pose, aux phrases que l'on construit, aux lettres que l'on trace. Michael Faraday, par exemple, notait tous les mots nouveaux qu'il rencontrait, et passait du temps, le soir, à les explorer à l'aide de dictionnaires : du temps passé à apprendre.
Oui, ne savent calculer que ceux qui ont appris à calculer. Et le remède est simple : on prend un cours de mathématiques et l'on travaille. Du temps passé à apprendre.
Oui, ne savent la chimie que ceux qui l'ont apprise... Il y a des cours par milliers en ligne. Et il faut passer du temps à les lire, pour avoir la moindre chance de les connaitre.
Enfin, j'arrive aux "maladroits" : nous le sommes tous, surtout quand nos mains vont plus vite que notre tête... et d'ailleurs, notre ami qui oublie est un peu maladroit.
Et ainsi de suite !

Bref, être "bon en", être adroit c'est du travail ; pas des heures passées dans des bars, dans des stades, que sais-je... Oui, quelqu'un qui sait, c'est quelqu'un qui a appris, et tout le reste, les histoires idiotes de dons ou d'insuffisances, c'est du baratin, de la paresse, de la mauvaise foi.

Au fond, il n'est pas question d'aller, tel un psychanalyste, chercher bien loin les raison des déficiences de notre ami, et ce serait même faire fausse route : il faut lui conseiller de travailler, d'étudier, d'apprendre.

Sans passer des heures à regarder des séries, des "infos", à chater, à sortir, et ainsi de suite.

La vraie difficulté est là : il est tellement plus facile -et paresseux- d'accepter, telle une fatalité, que l'on soit "insuffisant en".

Mais là est la question : ne peuvent apprendre ceux qui ont la capacité d'apprendre, que ceux qui parviennent à ne pas se disperser, à se focaliser...

Certes, nos jeunes amis ont des excuses, parce que nombre de professeurs ne les aident guère. Je me souviens que l'on m'a dit "Concentrez-vous". D'accord, je veux bien, mais comment faire ? Dans mon cas, j'avais la chance d'être de ceux que les matières étudiées fascinaient, de sorte que je n'avais pas d'effort à faire pour y passer du temps.
Mais pour quelqu'un de plus "évaporé" ?

jeudi 1 octobre 2020

A propos de présentations orales


Passionnante séance, hier, avec la restitution de travaux de jeunes collègues de Master : c'était pour eux l'occasion de se confronter avec une obligation de résultats, et non plus de moyens. Car ils devaient préparer une présentation, et la faire devant leurs amis, comme un cours... ce qui imposait :
- qu'ils cherchent les informations
- qu'ils les comprennent
- qu'ils choisissent ce qu'ils voulaient dire
- qu'ils ordonnent les éléments à présenter
- qu'ils le disent, mais non pas seulement pour le dire, mais avec le souci de se faire comprendre des autres !
Il y avait évidemment du moins bon et du bon, et l'objectif, ici, n'est pas de stigmatiser, mais plutôt d'analyser, de tirer des leçons pour la suite.

Premier exemple :  il y a eu un étudiant qui, dans le fil de la conversation, à toute vitesse, a parlé de « systèmes complexes polydispersés dans le régime d'encombrement ». L'expression était dite rapidement, donc, et il enchaînait allègrement sur des choses qu'il semblait avoir appris par cœur et qu'il récitait rapidement, parce qu'il avait fait trop de diapositives pour le temps qui lui est imparti.
Là, je propose de ne jamais oublier que la clarté est la politesse de ceux qui s'expriment en public et que, pour des esprits lents comme le mien (mais j'ai peur de ne pas être seul dans ma catégorie), il faut un long moment avant de digérer des "systèmes complexes polydispersés dans le régime d'encombrement".
Manifestement, notre ami ne s'adressait pas aux autres; il ne prenait aucun soin d'eux,  et il ne cherchait pas à expliquer, mais seulement à dire... et cela est complètement inutile : qu'il aille parler seul devant l'océan !

Autre exemple un étudiant qui montrait un schéma et qui en donnait les conclusions sans l'expliquer. Là,  par malheur pour lui, il y avait ce fait que j'ai reconnu que le schéma était faux ! Oui, on a bien lu : il expliquait quelque chose de faux... et qu'il n'avait donc pas pu comprendre, puisqu'il n'y avait pas de logique !
Et  c'est parce qu'il n'avait pas pris le temps d'expliquer ce schéma qu'il montrait à tous qu'il ne s'était pas aperçu que son schéma était faux. Il avait fait un rapide copier-coller.
Devant tous, j'ai pris le temps de faire au tableau le schéma, lentement, en m'assurant que je comprenne bien moi-même, en surveillant mes propres mots, en m'assurant que tous mes amis comprenaient, à l'aide de questions que je leur posais...  et cela m'a pris au moins deux minutes, qu'il faut comparer au quelques secondes qui avaient suffi à notre jeune ami.

Là encore, il y avait une sorte de mépris pour ceux à qui notre ami parlait.  Mais le pire, c'est quand quelqu'un qui n'a pas assez travaillé, explique avec aplomb quelque chose qu'il ne comprend pas : est-ce de la bêtise ? de la malhonnêteté ?

Allons, soyons positifs : surtout, cette séance a montré à tous combien le métier de professeur est difficile. Elle a montré qu'il y a lieu d'aller d'aller très lentement, de tenir compte des ignorances de tous, et je ne dis pas ici que les étudiants sont ignorants, mais qu'ils ignorent des choses qu'il faut leur expliquer.
Une bonne idée, dans cette affaire, c'est de bien distinguer les questions de contenu et les questions de communication. Dans les exposés qui sont pratiqués dans universités ou même dans les collèges et lycées, il y a cette confusion entre les deux champs, mais je peux garantir à mes amis qu'il n'y a pas de bonne communication s'il n'y a pas d'abord un bon contenu. Une fois la question du contenu déterminée,  alors, et alors seulement, on peut s'interroger sur la maquette du powerpoint, les couleurs, etc.,  mais on peut pas mettre la charrue.
En quelque sorte, les sciences de la nature ne tolèrent pas la rhétorique au sens du Phidias de Platon, cette rhétorique des malhonnêtes qui visent le pouvoir ou l'argent. Non, les sciences de la nature ne marchent pas à l'hypnose, en quelque sorte, mais la pierre de touche qu'est la logique, l'implacable logique, est toujours sous la main, dégainée, employée.

samedi 25 juillet 2020

Une réponse que je fais à des étudiants

1. Des étudiants avaient analysé le fonctionnement de leur institution de formation, leurs relations avec leurs professeurs, et ils avaient émis un document que j'ai largement analysé dans des billets précédents.
Surtout, je leur avais écrit pour leur dire combien je jugeais leur démarche utile, à poursuivre, et ils s'étaient étonnés que je leur réponde.

J'ai donc répondu à leur réponse :


Chers collègues
Vous ne vous attendiez pas avoir un retour personnel de la part d'un professeur ? Il est vrai que c'est un peu par hasard que vous l'avez, puisque, en réalité,  j'avais vu traîner une copie imprimée de votre document initial, et c'est par une espèce de curiosité mal placée que j'ai vu que vous évoquiez des questions qui me passionnent depuis des années.

Le débat terminologique qui consiste à savoir s'il faut parler d'étudiants, ou de collègues (jeunes, moins jeunes, etc.), ou même d'amis va bien au-delà du clin d'œil, car je suis resté en réalité un étudiant, qui étudie exactement comme je le faisais à l'ESPCI, avec la même fougue, la même passion, la même curiosité, la même naïveté, le même enthousiasme, et la même envie de partager  avec mes amis ce que je découvre... tout comme je l'étais alors (et je me souviens que le corps professoral me trouvait "remuant", dirions-nous par litote).

Mais, surtout, je me suis toujours indigné des mauvais professeurs... Pas seulement ceux qui nous négligeaient, qui considéraient leur mission comme une "charge", mais aussi ceux qui étaient "techniquement" incapables,  ceux qui ne maîtrisaient pas leurs sujets... Ce sont ceux-là qu'il faut empêcher de nuire.

Mais soyons positifs, car s'il y a de mauvais professeurs, il y en a aussi de bons. Que faisons-nous pour les uns et pour les autres ? Comment nous adaptons-nous à des situations notoires ?  Que fait l'institution  pour ne pas punir les élèves en leur infligeant du médiocre... tout en considérant qu'il y a aussi des élèves qui posent des problèmes ?

Là encore, je propose de sortir de la discussion par le haut, en ne restant pas braqués sur des situations particulières, trop nombreuses pour mériter un traitement général, mais en inventant des formes d'études nouvelles.
C'est ce que j'ai fait  à l'Institut des hautes études de la gastronomie, où les auditeurs (qui payent) évaluent les professeurs ; et pour ne pas mettre de bons intellectuels/mauvais communiquants en situation d'échec, nous innovons dans les formes, avec des visites de Rungis, des promenades dans les vignobles, avec des diners historiques, etc. R
ien de pire que ce format où un professeur isolé est en face d'un groupe d'étudiants, rien de plus clivant : oui, il faut changer cette "lutte des classes.

A minima, il y aurait lieu d'avoir des discussions pour rénover sans cesse les formats d'étude. D'ailleurs, comment supporter que  les  formats d'études ne changent pas ? Le système des études supérieurs aurait-il le privilège d'être le seul qui puisse se fossiliser en toute impunité ?
Et puis, plus positivement, j'ai assez dit que pour le professeur comme pour le cuisinier, l'activité a trois composantes  au moins : technique, artistique, sociale...  mais je vous renvoie, pour ne pas allonger la discussion sur ce point, à mon livre intitulé La cuisine, c'est de l'amour de l'art de la technique.

Bref, vous comprenez que j'avais  un intérêt véritable à vous lire et à vous commenter,  d'autant que vous répondiez à des questions que j'avais posées il y a des années, notamment lors d'un "Débat de l'Agro"...  et je trouve anormal que l'institution n'ait pas répondu à nos remarques d'alors.
J'espère qu'elle saura maintenant répondre... mais j'ai des craintes, car certains de mes collègues plus âgés à qui je m'ouvrais de vos observations ont rétorqué en substance que les élèves font périodiquement ce genre d'observations ; alors...

Oui, mais qu'est-ce qui a été fait pour leur répondre ?   De mon côté, j'ai proposé que l'on mette les individus en face de leurs responsabilités : si les étudiants sont capables d'avoir de l'autonomie, donnons-en leur ! Explorons des formats d'études  nouveaux, explorons l'outil numérique,  multiplions les podcasts si c'est un format qui plaît mieux que les amphis,  et ainsi de suite.
Ne supportons jamais de répéter le même cours deux années de suite, car ce serait la démonstration d'une paresse, d'une incapacité, d'une immobilité coupable ;  cherchons à améliorer sans cesse, non pas tous les dix ans, mais tous les jours !

En suivant votre réponse, maintenant : pour ce que pour ce qui concerne votre document, rassurez-vous  (;-)) :  oui, il en ressort bien que vous critiquez certains professeurs ou, du moins, certains "enseignements" (terme que je récuse, voir les billets à ce propo)s. Et cela ne me choque pas,  car quand la critique est constructive, positive, elle permet l'amélioration.
Ce qui m'inquiète, c'est que vos observations tombent début juillet, et que je pressens des départs vers les plages qui feront retomber le soufflé ! Aurez-vous donné un coup dans l'eau ?

Un détail maintenant :  mon expression "suppression des cours obligatoire" était  fautive  : je voulais dire plutôt "suppression de l'obligation d'assister aux cours" (à l'ESPCI, cette suppression a eu lieu en 1977 !).

Puis, il me semble en lisant votre réponse, mais aussi votre document initial, que la première année d'études après un concours pose une vraie difficulté. Je sais que l'on dit (on le dit, mais faut-il le croire) se remettre lentement de la préparation des concours,  tout comme les jeunes médecins admis après le concours de première année, par exemple.
Mais raison de plus pour y mettre le meilleur du meilleur, en termes d'études ! 

Cela dit, très  honnêtement, je travaille aujourd'hui bien plus que quand j'étais en classe préparatoire, de sorte que le fameux prétexte du relâchement après le concours me fait un peu sourire ! Mais qu'importe : oui, il faut donner un peu d'air (ouvrons la fenêtre vers des sujets passionnants), favorisons la socialisation... sans pour autant tomber dans les beuveries hélas trop courantes parmi les petits esprits.

Surtout pouvons-nous imaginer qu'une année sur trois soit perdue ? Je vous dis cela alors que j'ai été un élève bien dissipé de l'ESPCI, et que, passionné par la chimie depuis l'âge de six ans, je n'ai pas su faire tout mon miel de l'environnement merveilleux qui m'était donné une fois entré à l'Ecole.
Raison de plus pour réfléchir à des moyens d'éviter à d'autres de faire cette même erreur. Et cela de façon positive, sans rétorsion, bien entendu.

D'ailleurs, mon analyse rétrospective me fait souvenir que, malgré des soirées souvent bien "occupées", nous restions passionnés par quelques matières merveilleuses, la théorie de la mesure en mathématiques, les calculs de chimie quantique à l'aide des premiers ordinateurs, la thermodynamique hors d'équilibre...
A nous tous, élèves, professeurs, personnel administratif d'inventer des moyens pour qu'il n'y ait pas une année gâchée sur trois. A nous d'inventer des formes d'étude amusantes, stimulantes, socialisantes même ; à nous d'inventer des organisations pour que le corpore sano vienne avec le mens sana ;  à nous d'inventer des formes d'études qui permettent aux  élèves de s'amuser en étudiants, et aux  professeurs de s'amuser aussi, en aidant les élèves à apprendre... mais on pourrait tout aussi bien dire "pour que les professeurs s'amusent, et les élèves aussi".

En vous lisant à la suite, je vois l'expression "projet professionnel", alors que j'avais écrit "projet personnel".  Nous voulons sans doute dire la même chose, mais je préfère ma formulation, qui ne sépare pas le travail professionnel de la vie, car je déteste l'idée d'un métro-boulot-dodo qui fait toujours apparaître le travail comme une punition. Comme je vous l'ai dit précédemment, mon métier est si passionnant que je n'ai même plus besoin de prendre de vacances. Dans votre document, vous évoquez bien des matières stimulantes intellectuellement, et nous nous rejoignons.

A propos des séances de l'Académie d'Agriculture  : oui, vous avez raison de signaler qu'elles sont souvent passionnantes, car en réalité, elles s'apparentent à des regroupements de conférences de type TED sur un thème  (je le sais, puisque j'en organise). Avec ces séances, nous voulons donner  le meilleur aux auditeurs, et je parle d'auditeurs à bon escient,  car nos séances sont podcastées. Et si nous avons là le meilleur, pourquoi ne pas en faire profiter les étudiants, leur donner ipso facto le meilleur  ? Nous éviterions la critique des "mauvais enseignements" (puisque le meilleur), et il serait facile d'organiser des formats d'études fondés sur le visionnage de ses documents vidéo.

Arrivons maintenant à vos mots à propos de "cursus généraliste"  : je viens de faire un billet où je discute ce terme de "généraliste"... mais, surtout, je fais partie de ceux qui pensent que les ingénieurs ne font bien leur métier que s'ils ont une formation théorique solide (voir l'ESPCI). Cela est également vrai des étudiants qui deviendront scientifiques. Quant à ceux qui seront banquiers, assureurs, voire ministres, ils gagneront à bien connaître les faits sur lesquels ils érigent leurs activités, quitte à ce qu'ils épaulent physique, chimie ou biologie par des matières plus appropriées à leur projet... sans tout confondre : ceux qui veulent faire Sciences Po n'ont qu'à y aller  (et pourquoi pas avec des doubles diplômes ?).

Vous parlez ensuite de la difficulté d'intéresser plusieurs centaines d'étudiants...  mais pourquoi vouloir se lancer dans de vaines entreprises ? Si les goûts diffèrent, n'est-ce pas aller dans le mur que de chercher à leur imposer une unique direction ? C'est le sens de mon analyse sur les "études matricielles", dans un billet précédent.

Et puis, ce qui compte, c'est moins de "recevoir" que d'apprendre : invitons les élèves à créer leur propre chemin, et, surtout, à bien identifier leur projet, en les exposant le plus tôt possible à des sujets variés, qui facilitera leur choix s'il n'est pas fait par avance. Proposons leur des fleurs, afin qu'ils fassent leur propre bouquet, l'institution ayant aidés les individus dans l'art du bouquet.

A propos d'une banque de cours, celle-ci a existé par le passé entre toutes les écoles de ParisTech et c'était absolument merveilleux. Inutile de vous dire que j'y ai largement contribué.
Aujourd'hui nous avons les Cours en ligne d'AgroParisTech (où j'ai personnellement mis des dizaines de cours, en plus de podcast),  de sorte que  l'outil nécessaire pour faire ce que vous demandez et que je propose aussi n'est plus à créer  : il existe !

A propos de parrainage : peut-on trouver 320  parrains ? D'abord, on peut imaginer qu'un même parrain ait plusieurs filleuls, et ensuite, oui : le total des personnes permanentes à l'Agro est supérieur à 320. D'autant que l'on peut sans doute compter sur des chercheurs Inrae dans les UMR, et que l'on pourrait recruter des anciens élèves  ! Soyons inventifs, et trouvons des solutions.

Enfin, les travaux pratiques : je suis certain que, si la chose s'impose, alors elle s'impose. L'intendance doit suivre, et à nous, à nouveau, d'inventer des formes adaptées à nos possibilités.

Bref, je ne vois que des opportunités de faire évoluer des formats qui  sont trop longtemps restés figés : nous sommes à l'ère du numérique, et nous n'avons pas la possibilité de ne pas utiliser ces méthodes pour faire mieux qu'au Moyen Âge.

lundi 20 juillet 2020

Mesurer les distances !

1. L'automne dernier, j'ai testé pour la première fois, avec des étudiants d'un master international,  un cours de gastronomie moléculaire conforme à cette analyse que j'avais faite l'été précédent, à savoir notamment que le cours était entièrement écrit,  que, professeur,  je m'étais donné comme rôle de donner de l'enthousiasme, d'indiquer ce qu'il était bon d'étudier, notamment à l'aide d'une carte de la matière, de faire des points d'étapes réguliers sur le chemin que mes jeune amis devaient emprunter.

2. Tout cela a assez bien fonctionné, mais j'ai observé que le temps réservé au professeur avait rapidement tendance à s'étendre à l'infini, au détriment du temps d'études par les étudiants, en autonomie. Entre le professeur qui cause, voyant l'immensité des notions indispensables à ses jeunes amis, & ces derniers qui aiment l'entendre causer, grappillant sans relâche des notions, méthodes, informations toutes indispensables, il y a tous les ingrédients pour faire déborder le vase.

3. J'ai conclu que le système élaboré nécessitait plus que ce que j'avais imaginé : il faut aussi que le professeur fixe des objectifs raisonnables, précis, notamment à propos de méthodologie ;  il y a lieu de laisser mille pistes ouvertes à côté des chemins que l'on aura effectivement parcouru. Pour le professeur, il y a ce  travail supplémentaire qui est, non pas seulement de baliser le chemin, mais aussi de bien mesurer le temps à accorder aux étapes que les étudiants doivent parcourir.

vendredi 17 juillet 2020

Apprendre, c'est retenir


1. À propos des études, il y a cette question de savoir si recevoir une information est suffisant pour en disposer.

2. Par exemple, peut-on apprendre à partir d'un livre ? D'un film ? D'un podcast ? Combien de fois faudra-il voir le film, lire le livre, écouter le podcast  ?

3. La question est importante, car il est exact qu'on ne retient généralement pas tout d'un premier coup. Et j'ai entendu nombre de professeurs dire qu'il ne suffisait pas de comprendre, et qu'il fallait apprendre.

4. Dont acte, mais apprendre comment ? Pour des sciences de la nature, on m'a dit "refaire les démonstrations",  "faire des exercices", "faire des problèmes". Mais pour d'autre disciplines ?

5. Et puis, mes professeurs étaient-ils bien placés pour me conseiller ? Après tout, ils n'avaient ni le prix Nobel, ni n'étaient tous professeurs au Collège de France ! Bref, d'où sortaient-ils leurs conseils ? Sans "référence", j'invite les étudiants à ne pas gober n'importe quelle méthode.

6. Mais alors ? Pardon pour l'évocation d'idiosyncrasies, mais je suis de ceux qui, quand ils doivent apprendre quelque chose, le prennent, le triturent, l'ingèrent, le ruminent,  avant de le digérer, y reviennent, y reviennent encore.
Quand il s'agit d'un  calcul,  je le refais, je le réécris, je cherche à changer des paramètres... Quand c'est une poésie,  je la prends, je la divise en petits morceaux, je cherche  des associations,  & ainsi de suite.

7. Bref mon apprentissage est actif... mais mon apprentissage personnel n'est  pas la question, qui est  "Quelle est la bonne méthode ?".
Par exemple,  regarder un film est-il plus efficace que lire un livre, ou qu'écouter un podcast ? Etudier en marchant est-il mieux qu'en restant assis à une table ?

8. Je n'ai aucune idée de la réponse à ces question, et j'ajoute que je ne veux surtout pas recueillir  le sentiment personnel de chacun. Nous avons besoin de données fiables, sur lesquelles nous pourrions trouver une méthode qui soit digne d'être propagée... & que je puisse éventuellement m'appliquer à moi-même,  changeant ma propre méthode  empirique, puisqu'elle n'est  peut-être pas la plus efficace.

9. Efficace ? Un adjectif  : on se souvient que j'invite  mes amis et moi-même à les remplacer par la réponse à la question "Combien ?"... et cela se mesurera au fait que je me souvienne de ce que j'ai appris !




jeudi 16 juillet 2020

L'étude

1. Mes billets précédents m'ont largement montré que l'essentiel, c'est donc l'étude. Pas l'enseignement ; pas les professeurs ! Non, les étudiants, l'étude.

2. Et la clé de l'apprentissage, c'est l'étude. On n'apprend que si l'on étudie, & l'on n'étudie bien que si l'on aime cela.

3. Ce qui a comme conséquence que nos institutions d'études doivent en priorité contribuer à développer ce goût de l'étude. 
Ce qui a des conséquences sur le métier de professeur. 

3. Et "sélectionner" sur cette capacité d'étudier.
Mais je me hâte d'ajouter que ce mot de sélection va pour moi avec celui d'orientation : il s'agit moins de classer (ce serait bien impossible) que de ne pas laisser des étudiants perdre leur temps à faire quelque chose qu'ils n'aiment pas. Si l'on aime étudier la chimie, on est à sa place dans un cursus de chimie ; mais si l'on aime étudier autre chose, alors on est à la place ailleurs qu'en chimie... et l'on voit que c'est le goût pour une matière qui peut être à la base d'une sélection positive !

4. L'étude se fait-elle seul ou à plusieurs ? Pourquoi ne pas penser que les deux solutions sont possibles. Le tout est d'être dans un position active de recherche : on doit prendre plutôt que recevoir... ce qui a des conséquences sur le métier de professeur.

A suivre, évidemment !

mercredi 15 juillet 2020

Plus que jamais, mettre en garde

1. Lors d'une formation académique, un samedi matin dans un lycée parisien, j'avais montré un oeuf (entier, dans sa coquille, tenu entre deux doigts, le gros bout en bas), & j'avais demandé à plus de 400 professeurs réunis où se trouvait le jaune.
Comme dans n'importe quelle assemblée, environ 80 pour cent de personnes ont répondu qu'il était dans la partie inférieure, 15 pour cent ont répondu qu'il était au centre, & reste ne savait pas.
Puis, j'avais ouvert l'oeuf en décalottant la partie supérieure, & on avait bien vu que le jaune flottait : le jaune d'oeuf est dans la partie supérieure, parce que, constitué de 50 pour cent de lipides, il flotte dans le blanc, lequel est une solution aqueuse de protéines (dix pour cent).

2. Cette présentation me servait à introduire la discussion sur la position du professeur devant sa classe, & nous avions eu un débat : doit-on dire aux élèves que l'on ignore la réponse à une question, quand on l'ignore ? Peut-on faire état de son ignorance, à propos d'une question même simple ? Moi qui répond évidemment que c'est la meilleure des solutions, j'avais été étonné de voir la moitié de l'assistance ne pas adhérer à l'idée. Et je n'ai toujours pas compris les arguments de ceux qui n'étaient pas de mon avis (si vous avez une idée pour m'aider, merci de me la donner).

3. Car se poser en sachant est très téméraire : n'est-ce pas, notamment s'exposer à se faire réfuter ? Et n'est-ce pas mentir, en quelque sorte ? En tout cas avoir une prétention... indue ? Je ne sais pas bien pourquoi (j'y réfléchis), mais je vois le même mécanisme que dans les publications de science & technologie des aliments, quand s'alignent à l'infini ces textes  qui nous disent que tel ou tel composé est bon pour la santé.

4. Tiens, dans une table des matières qui m'arrive aujourd'hui même d'une revue scientifique internationale, je trouve :
- un nouveau mode d'encapsulation : évidemment une révolution dans le contrôle de la faim
- un nouveau pesticide : évidemment bien mieux que tous les précédents
- un nouvel antifongique : excellent (mais...  in vitro ; pour l'in vivo, un voile pudique est jeté)
- encore un système d'encapsulation : "nouveau", meilleur...
- encore un nouveau produit pour traiter le foie
- un nouvel antibactérien qui réglera la question
- et j'arrête là, car à lire cette table des matières, il y a lieu de penser que tous les problèmes de santé sont résolus, n'est-ce pas ?

5. Comment s'expliquer, alors, que nous soyons si démunis face au dernier coronavirus ? Et que des maladies frappent encore ? Puisque tout ou presque est "bon pour la santé" ou "mauvais pour la santé", comment est-il possible, avec nos certitudes, nous ayons encore à explorer ces questions ? C'est évidemment que les publications scientifiques sont bien excessives, dans leurs revendications.

6. Car c'est un fait que nombre de publications scientifiques imposent de "vendre" les manuscrits, au point qu'elles demandent aux auteurs de préparer des résumés qui attirent les lecteurs. Oui, dans les milieux scientifiques ! Et comme pour les professeurs qui hésitaient à se dire ignorants (d'un sujet), certains d'entre nous ne résistent pas à la pression sociale, & acceptent de faire croire qu'ils ont trouvé la panacée.

7. En matière de saveurs, la question du glutamate  est du même type : à en croire certains qui étudient la question, c'est la clé parfaite du goût... mais alors, pourquoi l'industrie alimentaire ne cesse-t-elle d'ajouter d'autres composés à ses bouillons cubes : inositides et autres ? Pourquoi la question n'est-elle pas résolue depuis longtemps ? Le glutamate, finalement, ne serait-il pas non plus un Graal ? On nous aurait donc menti ?

8. La réponse à cette dernière question est évidente : un composé ne fait pas le goût à lui tout seul, fut-il soutenu commercialement et publicitairement par des lobbys industriels puissants. Et mieux encore, c'est une naïveté immense que de croire qu'elle pourrait être résolue : on ne progressera qu'en pensant le contraire.

9. Bref, tout cela est à dire aux étudiants : rien n'est résolu ! La lutte contre les champignons est à peine entamée ; la connaissance des effets biologiques des composés des aliments reste très rudimentaire ; les saveurs sont extrêmement mal connues, &, en tout cas, les théories des quatre ou des cinq saveurs sont fausses ; & ainsi de suite.

10. Bref, il y a de la place pour :
- de la belle recherche scientifique et technologique
- une lutte contre les prétentions, même dans le milieu scientifique
- une recherche didactique de qualité, afin de permettre aux étudiants de mieux apprendre.


dimanche 23 février 2020

Apprendre, c'est retenir

Il y a cette observation récurrente et terrible : je vois en Master 1 ou 2 de jeunes amis qui ignorent ce qu'est le potentiel chimique (par exemple) : à quoi il sert, quelle est son expression... Ou qui ne savent pas calculer le pH d'une solution un peu complexe. Ou qui ne connaissent  pas des réactions chimiques élémentaires de chimie organique (la réaction de Diels-Alder, de Friedel-Craft...).

Ces notions ont fait l'objet de leurs cours de licence, et ce sont des outils intellectuels des physiciens ou des chimistes,  un peu comme les marteaux ou les ciseaux à bois pour les menuisier, comme les poêles ou les couteaux pour les cuisiniers... On comprend qu'un menuisier a intérêt à savoir l'existence des ciseaux à bois, à savoir à quoi ils servent, à savoir comment les utiliser. Il en va exactement de même pour le potentiel chimique, et c'est la raison pour laquelle il est enseigné plutôt vers le début des études de sciences de la nature et de technologie.

Mais, surtout, j'espère que l'on comprend aussi mon étonnement quand mes jeunes amis arrivent dans mon entourage et que je constate -ils sont honnêtes avec moi, puisqu'ils savent que je suis leur ami, et que je cherche d'abord à les aider- qu'ils ignorent tout du potentiel  chimique (je répète : c'est un exemple)  sauf le nom  : ils sont un peu comme un jeune menuisier qui aurait des cours sur le ciseau à bois mais qui n'aurait retenu que le nom, et  même pas à quoi sert cet outil.
Bref, je constate que les cours de licence ont été inutiles, que les collègues professeurs, tout comme les étudiants qui ont suivi ces cours, ont peredu leur temps.

Que l'on me comprenne bien  : je ne suis pas en train de critiquer ni mes collègues professeurs, ni mes amis étudiants,  et je me limite à observer des faits. Et les faits sont que, année après année, mes jeunes amis  ignorent tout du potentiel chimique, sauf le nom... et encore : parfois, ils confondent le potentiel chimique avec le potentiel ionique (merveilleux qu'ils aient entendu le mot), voire la différence de potentiel.
Oui, je ne critique pas, mais j'observe que nos amis qui sont arrivés en master ont réussi leurs examens, où le potentiel chimique a sans doute fait l'objet de questions : une formule que l'on apprend la veille et que l'on oublie le lendemain ? C'est du temps perdu pour tous, et un examen mal conçu, inutile, hypocrite en quelque sorte. Oui, une connaissance éphémère est inutile, répétons-le : ceux qui ne veulent pas retenir (puisque apprendre, c'est cela), doivent faire autre chose qu'apprendre, sans quoi ils perdent leur temps.
Bien sûr, je sais que retenir impose d'y revenir plusieurs fois.... mais alors, revenons-y plusieurs fois ! Jusqu'à ce que nous le sachions ! 
Bref, il y a certainement quelque chose à changer dans le système des études supérieures, pour bien faire comprendre qu'apprendre, c'est avoir une connaissance durable... sans quoi on a rien appris. Ne perdons pas notre temps à faire des choses inutiles ; faisons des choses utiles, apprenons pour retenir, seulement pour retenir !


dimanche 27 janvier 2019

Les bonnes pratiques du professorat : une question tabou ?

Je vois une question amusante, mais qui risque de faire du bruit :  nous parlons ici de bonnes pratiques scientifiques, mais au fond, les "enseignants-chercheurs" ont ce que l'on nomme des "charges d'enseignements" et même les chercheurs aujourd'hui sont sollicités pour une activité  d'"enseignement".
Sans tarder, je vous renvoie à mes billets du chapitre consacré aux études (http://www2.agroparistech.fr/-A-propos-d-etudes-superieures-mais-pas-seulement-.html) pour voir pourquoi je me refuse à parler d'enseignements et je propose de parler d'études : en substance, je dis que l'essentiel n'est as que des enseignants enseignent, mais que les étudiants étudient !  D'autre part, il y a le fait que le mot "enseignant" se rapporte, par un affreux néologisme, à une activité impossible, et que nous devons parler de professeurs.
Mais, au delà de la parole prononcée devant un ou plusieurs étudiants, il y a le fait qu'il faut orchestrer les études, les coordonner. De sorte que la phrase précédente appelle deux questions :
1. comment bien professer ?
2. comment bien orchestrer les études ?

La question est difficile, ou, du moins,   jusqu'à présent, on s'en est débarrassé en disant que le professeur est maître dans sa classe.
 Mais sa formation ? Alors qu'il y a des instituts de formation des professeurs pour l'Education nationale, il faut bien reconnaître que la formation des professeurs d'université  est extrêmement réduite. Lors de la thèse, la soutenance doit être la preuve que le professeur est capable de faire cours. Puis l'habilitation à diriger des recherches et une autre façon de sanctionner une compétence. Mais où sont les informations nécessaires pour bien professer ? Où où tout cela est-il écrit ? Quelles sont les règles pour bien faire ? En existe-t-il ?
En 2017, un décret a imposé une formation, mais on en est environ à un état des lieux ! Et en mars 2018, on n'en était qu'à une réunion de concertation : http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid128659/lancement-de-la-concertation-sur-la-reconnaissance-de-la-mission-de-formation-des-enseignants-chercheurs.html !

J'observe aussi que le mot "pédagogie" revient souvent, alors que son étymologie fait référence à des enfants... alors que les étudiants de l'université sont majoritairement des adultes qui ont le droit de vote. C'est indique.
Le mot "didactique" serait-il meilleur ? Il se rapporte à ce qui vise à "instruire". Instruire ? Il s'agit de "Former l'esprit, la personnalité de quelqu'un par une somme de connaissances liées à l'expérience, à la vie, aux événements." Pourquoi pas, mais, au risque de me répéter, je préfère que les étudiants se forment eux-même l'esprit, et j'aime pas l'idée du bétail que l'on nourrit !

Bref, je me demande s'il n'est pas possible de produire des billets de bonnes pratiques pour l'encadrement des études comme je l'ai fait pour la pratique scientifique ? Question tabou ?

jeudi 20 septembre 2018

Passons à autre chose

 Je vois que, depuis plusieurs mois, j'ai beaucoup discuté :
- des questions didactiques
- des questions épistémologiques

Pour le premier point, tout tient en une phrase simple : "la question n'est pas que les professeurs enseignent, mais que les étudiants étudient". Et tout le reste n'est que fioriture.

Pour le second point, j'ai donc testé mes extravagances auprès de personnes dont j'estime le jugement, et j'ai vu que  mes idées étaient très largement partagées. De sorte que le problème est assez bien réglé.

Au total, je vois donc que je perdrais mon temps à poursuivre ces discussions, et que  je risque de me répéter sans rien ajouter de notable. Il faut donc que je mette un terme à ces réflexions-là, pour aller sur des terrains neufs, et notamment plus scientifiques.
Bien sûr, il y aura sans doute des traînes de comète, mais ce sera mineur.

La question de lutter contre les idées fausses ? C'est perdre son temps que de chercher à convaincre ceux qui ne veulent pas être convaincus, et il faut donc négliger ceux-là.
Et ceux qui sont "naïfs"? Il suffit de répéter ce qui a été dit, raison pour laquelle je republierai périodiquement quelques billets synthétiques sur ces deux points : mes amis sauront que c'est la répétition de billets anciens, et les autres auront la possibilité de découvrir ces billets.


Allons, marchons !


mercredi 5 septembre 2018

Ce que dit ce blog

Ceux qui consulte parfois ce blog se sentent peut-être "bousculés" par son hétérogénéité apparente, mais cela n'est qu'apparent, et ceux qui sont plus réguliers ont compris, je suppose, qu'il  y a environ quatre grands courants.


1. Il y a tout d'abord des billets de cuisine,  où j'analyse des techniques culinaires, où je réponds à des questions techniques, où, parfois, je présente des réflexions esthétiques, sachant que,  de ce dernier point de vue, je me suis quand même beaucoup exprimé dans mon livre La cuisine, c'est de l'amour, de la technique.

2. Il y a aussi une série de réflexions scientifiques. Non pas des informations, comme le ferait une revue de vulgarisation, mais surtout des notions, des concepts, et plus encore des méthodes.

C'est ainsi que j'ai produit une longue salve de billet consacré aux bonnes pratiques en recherche scientifique, mais il y a aussi des réflexions épistémologique fréquentes, et, surtout, des réflexions de stratégie scientifique, ce grand champ oublié des "enseignements", disons des études scientifiques.

3. Troisième grand groupe  : les réflexions didactiques, et on voit ici pourquoi j'ai utilisé des guillemets autour de ce mot "enseignement" que je déteste : dans les temps récents, j'ai largement évoqué le fait que les professeurs ne peuvent pas enseigner, mais seulement "professer" ; et puis, les professeurs ne sont rien, car ce sont les étudiants qui comptent, et ceux-là doivent étudier, apprendre... Les professeurs ne peuvent que donner de l'enthousiasme, de l'énergie pour que les étudiants obtiennent efficacement  des connaissances, des compétences et des savoirs être. C'est là une synthèse de beaucoup de billets des dernières

4. Enfin, il y a des billets que je qualifie de politiques, même si la terminologie est un peu inappropriée. En réalité, il s'agit de réflexions différentes des trois précédentes, et je laisse mes amis les caractériser mieux en allant consulter les billets successifs.


 Y a-t-il un ordre dans l'émission de ces billets ? Non, j'essaie seulement, au gré des circonstances, de l'actualité, et, surtout, de mes avancées personnelles, de  proposer des réflexions à mes amis. Tout doit être très positif, très enthousiaste,  et je n'ai d'ailleurs pas beaucoup d'efforts à faire pour y parvenir tant il est vrai que l'enthousiasme et l'optimisme peuvent être communicatifs, et que, en tout cas, c'est mon espoir qu'ils le soient.







dimanche 19 février 2017

Ne faut-il pas avoir l'esprit clair pour bien enseigner ?

Dans un document pédagogique, je lis :

"Les sciences expérimentales -notamment la physique-chimie-  au travers de leur enseignement, sont un domaine privilégié au sein duquel l'enseignant et les élèves ont la possibilité d'interpeller les valeurs de la république".

Commençons à lire calmement. On nous parle de "sciences expérimentales", mais cela pose une question épistémologique essentielle, car cela reviendrait à considérer que l'expérience est le critère de démarcation entre les sciences classiquement -et internationalement- dites "de la nature", et des sciences de l'humain et de la société.
En l'occurrence, Galilée, qui n'était pas moins grand que nos pédagogues modernes, disait justement que les sciences de la nature ont deux pieds : l'expérience et le calcul. Ne conserver que l'expérience pour désigner ces sciences, c'est appauvrir considérablement le champ... et aller dans une direction qui n'est pas souhaitable : ne vaut-il pas mieux être honnête avec les élèves, et leurs faire comprendre :
- que les sciences de la nature imposent du calcul ("le monde est écrit en langage mathématique", disait Galilée)
 -  que ce calcul est merveilleux, facile ?

Puis on nous parle d'une science qui serait la "physique-chimie". Quelle confusion ! Il y a la physique, qui est une science de la nature (physis signifie "nature", en grec), et il y a la "chimie" qui est... une science de la nature aussi, qui s'intéresse aux assemblages d'atomes, et, notamment, aux réorganisations de ces derniers assemblages, ce qui se nomme des réactions. Cette science se distingue de la préparation de composés nouveaux (les "produits") à partir de composés initiaux, que l'on nomme les "réactifs". La cosmétique, la cuisine, la métallurgie, la préparation de médicaments, de peinture, de bougies...


Mais vient maintenant "au travers de leur enseignement" : au travers ? Que veulent dire nos amis ? Par leur enseignement ? Au cours de leur apprentissage ? On sent le jargon pas bien pensé, et donc pas bien dit.

Mais vient le meilleur : les élèves et les enseignants peuvent interpeller les valeurs de la République... Je m'interroge : il y a donc les valeurs de la République, qui sont l'égalité, la fraternité, la liberté. Les interpeller ? Vite, le recours au (bon) dictionnaire : je n'y trouve pas d'usage du mot qui convienne. En effet, on interpelle quelqu'un, et pas quelque chose. Interpeller quelqu'un ? Appeler quelqu'un ; lui adresser la parole (d'une manière brusque) pour attirer son attention, lui demander quelque chose ou l'insulter. Décidément, je vois mal les valeurs de la République là-dedans.

Moralité : les didacticiens qui ont produit le document qui commence par le paragraphe que je cite  sont des ânes ! Et pire, ils sont dangereux, car on leur confie des enfants.