mardi 11 mai 2021

Comment faire une lettre de motivation

Le problème avec les lettres de motivation, c'est que personne n'y croît plus : de l'autre côté de la barrière, les personnes qui les reçoivent en ont eu des milliers  qui leur disaient "je suis  motivé,  je suis très motivé,  je suis compétent, je suis très compétent et j'ai plein de connaissances et de compétences". Et cela fait des années qu'ils ont eu l'occasion de voir que tout cela était du baratin, au moins pour les connaissances et les compétences, ce qui les intéresse en réalité, car quand on embauche quelqu'un, c'est pour faire un travail... pour lequel il doit être compétent.

Bref, la question n'est pas de dire que l'on est motivé, que l'on a des connaissances et des compétences... mais de le démontrer !

Evidemment, pour démontrer que l'on a des connaissances et des compétences, il faut les avoir ! Mais cette observation fait apparaître deux cas : (1) on est motivé et l'on a des connaissances et des compétences, (2) on est motivé et on est "insuffisant", "ignorant", "incompétent".
J'écarte évidemment les deux autres cas où l'on est pas motivé, car, au fond, pourquoi faire quelque chose qu'on a pas envie de faire ?


Commençons donc par le premier cas : on est motivé et on a des connaissances et des compétences.
 

Là il faut être modeste,  mais pas trop :  je me souviens d'un ami du laboratoire, qui était un des meilleurs de tous ceux qui nous ont rejoint et qui, pendant un an, n'a pas trouvé de travail parce qu'il n'osait pas mettre en avant ses  connaissances et ses compétences. D'ailleurs il n'avait même pas osé me demander de lettre de recommandation, alors qu'à l'opposé,  j'ai vu les plus nuls de ceux qui nous ont rejoint ne pas hésiter à me demander d'écrire qu'ils étaient merveilleux, ce que j'ai refusé  de faire évidemment.

Supposons donc que l'on soit motivé, que l'on ait des connaissances et des compétences. Je répète qu'il s'agit non pas de le dire,  mais de le démontrer, et quoi de mieux que de transmettre en annexe de la lettre de motivation le RCC ("répertoire de connaissances et de compétences"),  dont on peut expliquer la teneur par la lettre ?  

D'ailleurs dans les RCC, il y a une colonne que je n'aime guère,  et qui contient une indication du niveau de connaissances  et de compétences, pour chacune d'elle :  novice, confirmé, et cetera.
Au fond, c'est peut-être une mauvaise chose que de remplir cette colonne, et il vaudrait peut-être mieux donner des indications précises,  qui pourront être testées par votre interlocuteur.

Par exemple, si l'on dit que je connais l'expression du potentiel chimique, alors mon interlocuteur peut me la demander, et je la lui dirai. Si je dis que je suis  capable d'utiliser le potentiel chimique dans des cas pratiques, alors je donne  à mon interlocuteur la possibilité de me poser une question sur un cas pratique où le potentiel chimique sera être utilisé, et j'aurai la possibilité de lui démontrer que j'ai bien cette compétence. Et ainsi de suite.

On voit donc que les RCC sont un excellent moyen de commencer une discussion et, puisque nos interlocuteurs veulent des lettres de motivation concises, nous mettrons le gros RCC en annexe. D'ailleurs, la pratique est suffisamment originale pour retenir un peu leur attention. Finalement, ainsi, modeste ou pas, nous aurons la possibilité de commencer un dialogue et de montrer nos connaissances et nos compétences, sans prétention, sans mensonge, sans modestie excessive (ce dernier cas de figure n'est pas le plus courant).


Examinons maintenant le cas où nous sommes motivé, mais insuffisant. 

Là  nous n'avons plus le temps de gémir sur  le passé,  et, au fond, il n'y a pas lieu de le faire, car parfois la barre n'est pas si haute qu'on le croit. Par exemple imaginons une entreprise qui veuille un conducteur de voiture :  cela ne sert à rien de se lamenter en disant qu'on ne sait pas réparer un moteur, car ce n'est pas cela qu'on nous demande.

Dans toutes les affaires d'embauche, il y a une question de l'adéquation d'un profil avec un poste, et la question de notre interlocuteur est de bien évaluer si notre profil correspond aux besoins de l'entreprise. Pour cela, il y a... une liste de connaissances et de compétences nécessaires.... ce qui correspond précisamment au RCC !

Or  votre RCC ne sera jamais totalement vide,  de sorte que vous aurez au moins la possibilité d'aller postuler pour quelque chose à votre niveau.

En tout cas, ne cherchez jamais à mentir,  car croyez-moi, non seulement on s'en aperçoit très vite, et, surtout, le fait de s'en apercevoir conduit à une réputation qui se répand très vide dans le milieu professionnel.

D'ailleurs, n'oublions pas, aussi, que la motivation n'est pas tout : quand il s'agit de sauter à deux mètres de hauteur, aucune motivation ne nous permettra de le faire si nous savons seulement sauter à un mètre. Bref, la motivation n'est pas tout, et, en tout cas, ce n'est pas le fond de la question des lettres de motivation.


J'ajoute que j'ai des amis chasseurs de tête qui me disent que pour eux, l'essentiel est qu'on ait démontré que l'on était capable de faire quelque chose de remarquable.
 

Par exemple, l'un d'entre eux a embauché pour une banque un jeune homme qui était si bon pianiste qu'il avait donné des récitals, et dans autre chose qu'un patronage !

Pour mon ami chasseur de tête, quelqu'un qui a montré qu'il était capable de s'accrocher au point de réussir un "exploit" devait être capable de réitérer. Au fond, le chasseur de têtes avait fait sienne la phrase de Pascal "Dieux vomit les tièdes".

De sorte que, si vous êtes en cours d'études, c'est un bon conseil que de vous inviter à faire preuve d'une excellence quelque part. Et si vous êtes en situation d'envoyer une lettre de motivation, alors il faut faire état d'une compétence exceptionnelle, même en dehors des matières qui feront l'objet du travail en question. 

 

J'ai oublié de la petite intendance  

 

Oui, j'ai oublié de la petite intendance : il faut être un peu... simple pour écrire des phrases comme "Votre offre de poste a retenu toute mon attention" ; il faut être impoli  pour commencer la lettre par "Je", etc.
Evidemment, les lettres qui contiennent des fautes d'orthographe finissent immédiatement au panier, et l'on aura intérêt à utiliser un langage un peu "fleuri", avec des mots plus intéressants que truc, machin, chose, bidule...  

Mieux, on se souviendra aussi de l'idée la phrase magique,  qui vaut pour l'écriture d'un article  : il suffit d'une idée exprimée de façon originale, bien exprimée, pour que notre interlocuteur arrête son geste de mettre la lettre au panier. N'oublions pas qu'il  en reçoit des centaines, toutes identiques : il y a lieu de l'aider à ne pas s'ennuyer, de faire apparaître une étincelle d'intelligence.

Just published

 

Just published in the International Journal of Molecular and Physical Gastronomy :
Vilgis TA. 2021. About the book Molecules, Microbes, and Meals, by Alan Kelly (Oxford University Press, Oxford, UK). 1, 1-3.
 
See http://www2.agroparistech.fr/Vilgis-TA-2021-About-the-book-Molecules-Microbes-and-Meals-by-Alan-Kelly-Oxford.html

lundi 10 mai 2021

L'analyse d'un plat

 L'analyse d'un plat

Au fond, le déclic est venu quand j'ai publié mon livre la cuisine c'est de l'amour de l'art et de la technique

Il y a plus de 20 ans, quand on considérait la cuisine, c'était souvent seulement du point de vue technique : je me souviens de ce directeur de cabinet d'un ministre de la culture pour qui la cuisine n'était pas un art.
On parlait d'art culinaire, mais, en réalité, on ne mettait pas la cuisine au même rang que la littérature, la peinture, la sculpture, la musique...

Et un jour, en plein milieu d'un cours de gastronomie moléculaire, j'ai expliqué que la question technique était simple, et que l'intérêt de la cuisine venait surtout de ses composantes artistiques ou sociales (ce que je nomme l'amour).

 Je propose de le voir avec un plat de Pierre Fagnaire, dans son livre sur la Cuisine des cinq saisons. 

Dans ce plat, une préparation verte avec des escargots, des tomates cerises travaillées et des feuilles croustillantes.

Pour la préparation verte, on fait un beurre noisette, que l'on étend avec un peu de lait, puis ajoute du cresson, et l'on mixe le tout avec un peu d'ail. 


Pour les escargots, on les fait revenir dans cette préparation. 


Pour les tomates cerises, on les coupe en quartiers, et on les fait revenir dans de l'huile d'olive avec un peu de bon vinaigre. 


Pour les feuilles de brick, on détaille des triangles que l'on passe au beurre fondu avant de passer au four.


Au fond, il n'y a bien peu de transformations physico-chimiques dans cette affaire.

Pour le beurre noisette, il faut partir du beurre, qui est en réalité ce que l'on nomme un "gel", avec un réseau solide de matière grasse où sont emprisonnées de la matière grasse liquide et de l'eau.
Quand on chauffe le beurre, le réseau solide fond, et c'est ainsi que le beurre libère le petit lait, qui sédimente au fond de la casserole, surmonté par la matière grasse fondue.

Quand on chauffe plus fort, le petit-lait se met à bouillir,  puisque c'est essentiellement de l'eau avec des protéines et d'autres solutés. C'est ce qui conduit à la formation de bulles de vapeur.
Puis, quand il n'y a plus d'eau, la température dépasse 100 °C, et les protéines réagissent, allant jusqu'à former des dépôts noirs.

Dans cette opération, les triglycérides sont peu modifiés : la meilleure preuve en est que l'on ne peut pas faire de beurre noisette avec un beurre clarifié, c'est-à-dire débarrassé préalablement de son petit lait, avec notamment les protéines.

Décuire le beurre noisettes avec le lait, c'est ajouter un ingrédient qui apporte de l'eau, laquelle refroidit le beurre noisette au bon degré de brunissement. La matière grasse du lait s'ajoute aux triglycérides du beurre, et l'on obtient une émulsion, bien lisse.

Pour le cresson, il est fait de feuilles, qui sont elles-mêmes constituées que cellules, sortes de sacs plein une solution qui a un goût de cresson,  emprisonné dans un réseau fait de beaucoup de cellulose (qui donne la cohésion aux feuilles).

Quand on broie le cresson, on libère ce liquide de l'intérieur des cellules, en même temps que l'on disperse le matériaux solides des parois végétales sous la forme de groupes de cellules, de cellules isolées entières ou ouvertes, de fragments de parois végétales.

Le système obtenu est-ce que l'on nomme une suspension, car, effectivement, les particules solides sont suspendues dans le liquide, et elles ne sédimentent que très lentement, donnant au liquide formé une consistance un peu épaisse

Pour les tomates, la cuisson amollit, également, parce que la chaleur dégrade un peu les parois végétales, ciment entre les cellules.

Quant aux escargots, ils sont juste réchauffés : la chaleur communiquée à leur surface, par le contact avec le liquide chaud où ils sont placés, se propage progressivement vers l'intérieur. Cela se fait en proportion de leur diamètre.

 

On le voit : la question technique est vite discutée, mais c'est la question artistique qui doit nous retenir.

Pour la préparation verte, par exemple,  il y a à la fois le goût envoûtant du beurre noisette, son épaisseur un  peu liquide et lisse, un goût aillé, le piquant du cresson,  le goût du lait, et la chaleur qui est agréable.
Par-dessus,  les escargots sont de vedette, qu'il faut mâcher : on a alors leur goût terreux, mais on percoît mieux le goût de la préparation verte, d'autant que cette dernière est une émulsion, avec la matière grasse qui tapisse la bouche, et laisse sentir longuement
Enfin il y a les tomates qui sont revenus, donc tiède dans leur vinaigrette,  et le croustillant des feuilles de brick, qui emporte dans une autre direction.


La question sociale ?

Il y a le vert printanier de la préparation verte, la forme en triangle des feuilles de brick, le rouge des tomates qui vient sur le vert, mais la matière grasse, le sucré, le petit piquant, également, sont des éléments de communication.

Il y a le soin avec lequel l'assiette est dressée, le temps passé par la cuisinière ou le cuisinier, qui est en réalité un temps donné aux convives. Il y a aussi le soin de la préparation, l'assemblage des ingrédients, le souci que la préparation soit équilibré gustativement, bien salée, pas trop acide, un peu sucrée mais pas trop, piquante mais raisonnablement, avec des goûts qui se font entendre comme des chants.


Cela,  c'est l'essentiel, car comme je l'ai dit mets de la cuisine c'est de l'amour, de la et de la technique,  mais c'est l'amour qui vient en premier.

samedi 8 mai 2021

Je vous présente l'ovalbumine


Si vous entendez parler d'albumine, au singulier, soyez assuré que e n'est pas quelqu'un qui sait bien de quoi il parle.

Car l'albumine est une notion introduite il y a plus de deux siècles, par les chimistes, pour désigner le principe coagulant de l'oeuf.

Puis, avec la découverte des diverses coagulations, notamment dans les plantes, on a d'abord étendu ce terme à des produits présents dans les végétaux, parlant d' "albumine végétale".

Mais on a vite découvert que ces diverses "substances" (encore un mot bien compliqué, à traquer) étaient différentes.

Et, en 1910, la communauté des chimistes (dont tout cela est la spécialité, ne l'oublions pas) a décidé de parler "des" protéines.

A cette époque, on a conservé le mot "albumine" pour désigner de petites protéines globulaires, telles qu'on en trouve dans le sang, l'oeuf, par exemple.

L'ovalbumine -on y arrive enfin- est une des protéines que l'on trouve dans le blanc d'oeuf.
Car ce dernier est fait de 90  pour cent d'eau, et de plus d'une centaines de protéines.

Evidemment, pour chaque protéine, chaque sorte, il y des milliards de milliards de molécules.
Pour l'ovalbumine, il y a environ 20 milliards de milliards de moléculs d'ovalbumine dans un blanc.

Et ces protéines permettent la coagulation, quand les chauffe en présence d'eau : les protéines, qui sont comme des pelotes, se déroulent et s'attachent, formant un grand filet où sont piégées les molécules d'eau.

Tout cela fait un solide mou : pensons au blanc cuit d'un oeuf sur le plat !

jeudi 6 mai 2021

Etourdi ? Maladroit ? Non, paresseux.

 Non, tu n'es pas incapable... mais il faudra travailler. Non tu n'est pas maladroit, mais il faudra travailler. Non, tu n'est pas "nul en maths", mais il te faudra travailler...



Note : pour ne blesser personne, je ne parle pas ici de personnes réelles, et j'ai composé avec des centaines d'exemples.


Un jeune ami me dit avoir oublié le chargeur de batterie de son ordinateur, et il est obligé de repartir chez lui pour travailler, ce qui dérange considérablement son programme de travail. Personnellement, cela m'indiffère absolument,  parce que son travail n'est pas le mien: son "insuffisance" n'empiète pas sur ma liberté. Mais je lui fais quand même observer que c'est la quatrième fois en deux semaines qu'il lui arrive une aventure analogue. Et, la fois précédente, cela n'avait pas non plus de raison particulière de m'ennuyer, puisque cela ne concernait pas mon propre travail... mais pourquoi ces oublis à répétition qui séparent en réalité le bon professionnel du mauvais ?
Il me fait penser à ce jeune ami en stage dans notre groupe, il y a quelques années, qui était "maladroit", et l'on verra pourquoi.

A vrai dire,  je ne devrais pas me mêler de cela, puisque, comme je l'ai expliqué, cela n'a pas de conséquences pour moi, mais je n'oublie pas que ce jeune ami est venu de loin pour que je l'aide à grandir en intelligence, en méthode... De sorte que je dois dire quelque chose de ces oublis.

D'ailleurs, ce cas précis que je rencontre n'est pas isolé, et c'est bien la raison pour laquelle il y a lieu d'évoquer la question.

Chaque fois, on me dit que, depuis tout petit, on est tête en l'air... Mais ne sommes-nous pas tous tête en l'air ? Pour moi, j'oublie tout ce qui ne m'intéresse pas... mais je le l'oublie pas, puisque je me suis mis des tas de systèmes d'alertes, sur mon agenda électronique : ma tête est libre pour penser à ce qui m'importe, à ce qui m'intéresse, sans subir les conséquences d'étourderies.
D'ailleurs, ne serait-ce pas cela que ne pas être étourdi : avoir mis en place des systèmes pour ne pas oublier ce que l'on ne doit pas oublier ?

Cette question de l'étourderie n'est qu'une partie émergée de l'iceberg. Le même jeune ami me dit avoir une orthographe déficiente, ne pas être assez bon en mathématiques, en chimie...

Et là, je réponds invariablement que ne sont bons que ceux qui ont appris !

Oui, ne savent écrire les mots que ceux qui ont appris à les écrire. Écrire sans faute d'orthographe ? Il suffirait de le faire un peu plus lentement que notre ami ne le fait, de faire un peu attention aux mots que l'on pose, aux phrases que l'on construit, aux lettres que l'on trace. Michael Faraday, par exemple, notait tous les mots nouveaux qu'il rencontrait, et passait du temps, le soir, à les explorer à l'aide de dictionnaires : du temps passé à apprendre.
Oui, ne savent calculer que ceux qui ont appris à calculer. Et le remède est simple : on prend un cours de mathématiques et l'on travaille. Du temps passé à apprendre.
Oui, ne savent la chimie que ceux qui l'ont apprise... Il y a des cours par milliers en ligne. Et il faut passer du temps à les lire, pour avoir la moindre chance de les connaitre.
Enfin, j'arrive aux "maladroits" : nous le sommes tous, surtout quand nos mains vont plus vite que notre tête... et d'ailleurs, notre ami qui oublie est un peu maladroit.
Et ainsi de suite !

Bref, être "bon en", être adroit c'est du travail ; pas des heures passées dans des bars, dans des stades, que sais-je... Oui, quelqu'un qui sait, c'est quelqu'un qui a appris, et tout le reste, les histoires idiotes de dons ou d'insuffisances, c'est du baratin, de la paresse, de la mauvaise foi.

Au fond, il n'est pas question d'aller, tel un psychanalyste, chercher bien loin les raison des déficiences de notre ami, et ce serait même faire fausse route : il faut lui conseiller de travailler, d'étudier, d'apprendre.

Sans passer des heures à regarder des séries, des "infos", à chater, à sortir, et ainsi de suite.

La vraie difficulté est là : il est tellement plus facile -et paresseux- d'accepter, telle une fatalité, que l'on soit "insuffisant en".

Mais là est la question : ne peuvent apprendre ceux qui ont la capacité d'apprendre, que ceux qui parviennent à ne pas se disperser, à se focaliser...

Certes, nos jeunes amis ont des excuses, parce que nombre de professeurs ne les aident guère. Je me souviens que l'on m'a dit "Concentrez-vous". D'accord, je veux bien, mais comment faire ? Dans mon cas, j'avais la chance d'être de ceux que les matières étudiées fascinaient, de sorte que je n'avais pas d'effort à faire pour y passer du temps.
Mais pour quelqu'un de plus "évaporé" ?

lundi 3 mai 2021

Je vous présente l'amylose et l'amylopectine


Le problème, avec les mots "amylose" et "amylopectine", c'est d'abord la présence de l'y. Mais ce n'est pas tout : la maladie de la vache folle a popularisé l'expression "dépôts amyloïdes", tandis que l'on trouve "pectine" dans "amylopectine".
Et tout le monde s'y perd !

Bon, pour le y, disons que je n'y peux rien, pas plus que pour le notre de syllabes supérieur à trois pour "amylopectine". Pour amylose, pas de relation directe, et pas de rapport entre amylopectine et pectine... sauf que ce sont des polysaccharides (aie : encore un mot de plus de trois syllabes !).

Partons simplement, du grain de blé. Quand on le mout, on fait de la farine, laquelle est composée de petits grains blancs et de protéines... comme on  peut s'en apercevoir en effectuant une "lixiviation"  : on part de farine, on pétrit avec un peu d'eau jusqu'à avoir une boule ferme, puis on malaxe doucement dans l'eau ; c'est là que l'on voit une poudre blanche sortir, et sédimenter, tandis qu'il reste entre les doigts une matière à la fois visqueuse et élastique, qui a été nommée "gluten" au 18e siècle. Le gluten est en réalité un mélange de plusieurs protéines.

Mais c'est la poudre blanche qui va nous intéresser. Cette poudre, c'est de l'amidon. Elle est formée de petits grains d'amidon, ellipsoïdaux, avec des tailles qui dépendent des espèces végétales.

Et chaque grain est fait (je simplifie un peu) de couches concentriques.
Dans chaque couche, des molécules linéaires (comme des fils) et des molécules ramifiées (comme des branches, ou des arbres).

Dans les deux cas, les molécules linéaires ou ramifiées sont faites d'enchaînement de petites parties qui sont toutes identiques... et semblables à des molécules de glucose, à quelques atomes près. C'est la raison pour laquelle on dit que ces molécules linaires et ramifiées sont des "polysaccharides", et, mieux, des polymère du glucose.

Ah, j'y arrive : les molécules linéaire sont des amyloses, et les molécules ramifiées sont des amylopectines.

dimanche 2 mai 2021

Attention aux fortes concentrations en molécules odorantes

De même que l'on apprend à se servir d'un couteau, il y a lieu d'apprendre à se servir des composés, qu'ils proviennent de végataux ou non. Avec cette idée forte (et insuffisante) selon laquelle la dose fait le poison. J'insiste : c'est une bonne idée pour commencer, mais elle est insuffisante, et le cas des perturbateurs endocriniens.

Mais allons-y lentement, et commençons par des choses simples.
Pour certains composés, telles certaines vitamines, il y a un effet bénéfique, à petite dose, puis un effet négatif quand la dose augmente.
Pour d'autres composés, on ne connaît pas d'effet positif à  petite dose, et, à partir d'une certaine dose, des effets négatifs sont observés.

Or les composés odorants des plantes (par exemple, les aromates) sont... des composés. Et ils sont donc des deux types précédents, par exemple.

Autrement dit, si l'on peut manger sans difficulté du persil, de la ciboulette, du thym, par exemple, il serait inconscient de boire un verre d'huile essentielle de persil, de ciboulette ou de thym. Ou pire, d'estragon, de basilic, de noix muscade !

Ce qui est dit ci-dessus des aromates vaut en réalité pour tous les fruits et légumes, mais, aussi, pour de nombreux composés des viandes et des poissons. Répétons  : c'est la dose qui fait le poison, et c'est la (petite) dose qui fait que quelque chose n'est pas poison.

D'où des précautions à prendre par ceux qui extraient des composés  afin de les concentrer. Par macération, par infusion, mais aussi par distillation, entraînement à la vapeur d'eau, distillation sous vide, et ainsi de suite.

Bien sûr, il n'est pas impossible d'utiliser des huiles essentielles en cuisine... mais il faut alors apprendre à les diluer... et tout cela se fonde sur des données toxicologiques qu'il est important de connaître. Souvent, ces données sont publiques, dans des articles scientifiques ou dans les bases de données des agences de sécurité sanitaire, telle l'agence européenne (Efsa) ou l'agence française (Anses).

Ayant ces données, il faut apprendre à diluer... sans se tromper dans les calculs, bien évidemment... et je dis cela partce que j'ai vu nombre d'étudiants en science et technologie des aliments qui faisaient des erreurs de calcul. Autant cela n'est pas gravissime quand on passe un examen, autant il devient criminel de le faire si l'on fait consommer des composés trop concentrés.

Et j'en arrive à ces perturbateurs endocriniens... qui sont sous nos fenêtres. Par exemple, une revue médicale a publié il y a quelques années le cas de petits garçons qui se mettaient à avoir des seins... parce que leurs parents mettaient des sels de bain à la lavande dans leur bain. La lavande contient des "perturbateurs endocriniens", à savoir des composés qui interagissent avec les hormones, même à de très faibles doses.
De sorte que, personnellement, j'évite les aliments où les chefs ont mis de la lavande : oui, cela sent bon, mais je vous le laisse. Tout comme je laisse les épluchures de pommes de terre, les plats trop chargés en noix muscade, les infusions  de grappes de tomates, et bien d'autres préparations.

La conclusion ? De même qu'il faut apprendre à se servir d'un couteau, il faut apprendre à se servir des techniques de conservation (si nous ne voulons pas intoxiquer les convives), il faut apprendre à se servir des composes (si nous ne voulons pas empoisonner les convives).
Et le goût n'est pas une garantie de sécurité suffisante : par exemple, les sels de plomb sont merveilleusement "sucrés", mais ils provoquent une terrible affection nommée saturnisme, dont je ne donne pas ici la description pour ne pas troubler votre digestion.

On nourrit nos amis, notre famille ? Apprenons la prudence !

jeudi 29 avril 2021

A propos de "stages"


Décidément, je ne crois pas avoir été parfaitement clair, par le passé, à propos des stages.

La question se pose de la façon suivante : je corresponds avec des étudiants qui me disent vouloir faire un stage pour déterminer leur carrière.
Et je leur réponds que c'est un mauvais moyen, parce que ne pas aimer "le steak", parce que l'on en a mangé un qui était trop salé, c'est une erreur logique grave. Tout comme aimer "le steak" parce que l'on en a mangé un bon.

Mais il faut que je m'explique mieux, puisque je n'ai pas été bien compris

La question se pose pour des étudiants qui ne sont pas entièrement déterminés... et qui font d'ailleurs des stages bien trop tardivement : c'est bien plus tôt, dans la première année de leurs études universitaires, ou au lycée, qu'ils auraient dû faire ces stages déterminants.
Car en master, il est déjà trop tard pour se donner une motivation pour étudier !

Je reprends. Supposons que l'on suive un cursus universitaire : il faut donc étudier.
Mais on n'étudie bien que ce qui nous "intéresse".

Etre intéressé  ?  Il y a ceux qui aiment étudier, et pour ceux-là, la motivation est là d'emblée.
Mais pour les autres ? Ils ne voient que l'intérêt en vue  de travaux qu'ils feront. On peut comparer cela à l'apprentissage du maniement d'un marteau : souvent, c'est pour enfoncer des clous que l'on est prêt à apprendre à utiliser un marteau. Il en va de même pour le potentiel chimique, l'entropie, etc.

De sorte qu'il serait bon que, pour ces étudiants-là, l'objectif soit connu le plus vite possible, afin qu'ils étudient bien, et non pour la seule raison que leur cursus comprend des matières mises là... comment, au fait ?

Et puis, aussi, s'ils n'ont pas d'objectif, comment choisiraient-ils de se lancer dans des études spécifiques ?
Mais on revient là  à la question du choix d'une carrière, en général, à la question des motivations, ce pour quoi j'ai déjà fait deux billets récents.

Revenons donc aux stages. Imaginons qu'un étudiant veuille/doive faire un stage de "recherche", ou un "stage de technicien", ou un "stage industriel".
La première question est de trouver un tel stage, et, là, l'expérience me montre que nos amis s'y prennent bien trop tard. Quand ils se lancent, les stages sont déjà pris depuis longtemps, et ils se retrouvent avec des choix limités, des possibilités qui ne correspondent pas à leurs souhaits.
Il y a donc une forme de sélection. Pourquoi pas, au fait ?

Mais supposons qu'ils aient trouvé un stage dans un laboratoire de recherche scientifique, et qu'ils arrivent dans un environnement détestable (cela arrive). Devront-ils conclure que la recherche scientifique n'est pas ce qui leur correspond ? Evidemment non !

Ou encore, imaginons que, pendant leur stage, on leur confie des travaux techniques, alors qu'ils préfèrent la théorie, ou vice versa : là encore, ce serait une erreur de conclure quoi que ce soit de général sur la recherche scientifique.

Inversement, s'ils arrivent dans un environnement merveilleux, ce serait une erreur que d'être attiré tels des phalènes par le lumignon (cela signifie : des papillons de nuit qui viennent se brûler à une bougie).

Bref, les stages ne peuvent pas avoir de fonction de détermination d'une carrière : c'est une grave erreur de le penser, de le dire, de le faire penser.
A quoi servent-ils, alors ? A voir du pays, à découvrir de la méthode...

Pour ceux qui se destinent à la technique, à voir comment leurs connaissances peuvent se transformer en compétences.
Pour ceux qui se destinent à la technologie, idem.
Pour ceux qui se destinent à la recherche scientifique,  les stages sont une vague confirmation, mais, aussi, un début de travail de recherche, de la découverte d'idées utiles.

Pour tous, les stages doivent être de la formation, de l'apprentissage de ce qui n'a pas été appris lors des cours théoriques, la découverte du monde de l'entreprise, qu'il s'agisse d'entreprises industrielles ou d'institutions de recherche.
Pour tout, les stages sont l'occasion d'apprendre de la méthode... parce que je vois hélas que cela fait gravement défaut. C'est même le pire handicap de beaucoup de ceux qui viennent en stage près de moi.

Launching Event for the publication of the Handbook of Molecular Gastronomy

 

Happy to announce the final program of the

Launching event for the publication of the Handbook of Molecular Gastronomy


(LE MG Handbook 12 May 2021)



May 12th, 2021

Connect to : https://eu.bbcollab.com/guest/999ba035210a478db00a4c09f61bce5d




The four Editors of the Handbook of Molecular Gastronomy (Roisin Burke, Alan Kelly, Christophe Lavelle, Hervé This vo Kientza) are organizing an online conference, about the book, on the 12th of May (include the time span).

the topics discussed will reflect the 3 parts of the book:

- Molecular and physical gastronomy: scientific aspects

- Education practices of molecular and physical gastronomy

- Applications of molecular and physical gastronomy to culinary art





The Programme is :



14.00-14.30 :


Hervé This : Molecular Gastronomy, Molecular Cooking, Molecular Cuisine, Note by note cooking, Note by note Cuisine


Roisin Burke : The Handbook of Molecular Gastronomy, a huge project



Session 1.

Chair : Alan Kelly


14.30-14.50 : Molecular Gastronomy, Stability of crystallising emulsions, by Thomas Vilgis


14.50-15.10 : Molecular Gastronomy, The Glycation and Maillard Reactions as the  Major Non- Enzymatic Browning Reactions in Food, Frederic Tessier



15.10-15.30 : Molecular Gastronomy, What are Lecithins for the food industry, Elzbieta Kosakiewicz


15.30-15.50 : Molecular Gastronomy, Frying, by Franco Pedreschi


Session 2

Chair : Chistophe Lavelle


16.00-16.20 : Education practices, Teaching Argumentation and Inquiry through Culinary Claims, by Erik Fooladi


16.20-16.50 : Application to culinary art, by Sophie Dalton


16.50 : Questions, Follow up with the IJMPG, etc.



The link for connection will be https://eu.bbcollab.com/guest/999ba035210a478db00a4c09f61bce5d








Des vidéos sur la chaîne Youtube de l'Académie d'agriculture de France

 


Je m'aperçois que j'ai omis de vous signaler des vidéos que j'ai enregistrées pour la chaîne Youtube de l'Académie d'agriculture.
Il y a notamment :
Les modalités du goût, ou comment déguster :

Les protéines, c'est quoi, au juste ?

Mais, bien plus généralement, il y a tout cela, par moi et par bien d'autres :

Des informations qui ne sont pas "fake" et qui méritent d'être largement distribuées

mercredi 21 avril 2021

Comment ne pas décevoir ? En expliquant bien ce qu'est la gastronomie moléculaire. Et ce n'est pas de la cuisine !

 
Je reçois un de ces innombrables email d'un jeune homme qui me dit vouloir faire un stage dans notre groupe de gastronomie moléculaire "parce que" il aime beaucoup la pâtisserie. 


Invariablement, je commence par lui expliquer que la pâtisserie, comme les autres métiers du goût, a trois composantes : sociale, artistique, technique  : à minima, le pâtissier est un technicien, à savoir qu'il doit être capable de suivre une recette, de faire les gestes précis, soigneux, qui parviendront à faire exister la préparation visée, qu'il s'agisse d'une génoise ou d'un soufflé, par exemple. 


Mais, mieux que cette technique que tout le monde peut maîtriser (à condition d'y passer du temps), il y a la question "artistique", à savoir que la préparation doit être "bonne", c'est-à-dire "belle à manger". Et là, si les recettes donnent quelques indications, c'est un bon un peu médiocre, qui ne fera sans doute pas le succès d'un artisan. Pour faire bon, il faut notamment faire soigneux, mais il faut faire mieux : imaginer des goûts, des ajouts qui donnent un petit quelque chose de plus aux recettes. Certains parlent de "supplément d'âme"... et ils sont rares.
Enfin, il y a la composante sociale : en bouche, la pâtisserie doit nous dire que l'on nous aime, et cela est le plus difficile.

Mon jeune correspondant me dit donc qu'il veut faire un CAP de pâtisserie, et je lui réponds que c'est effectivement un bon début, pour être pâtissier. Mais il insiste en disant qu'il est "fasciné" par la compréhension des gestes techniques... et c'est tant mieux. Mais il insiste : puisqu'il est fasciné, il veut faire un stage, qui, de surcroît, le décidera à choisir entre deux "passions" (mais son email est manifestement outré), à savoir l' "alimentaire" (dit-il) et l'écologie.

Là, il y a beaucoup à dire, à commencer par expliquer que ce n'est pas un stage dans un laboratoire de recherche scientifique qui lui dira ni s'il aime  l'"alimentaire", ni s'il préfère cela à l'écologie.

D'ailleurs, je lui signale que nous n'avons pas de casserole au laboratoire, que nous ne faisons ni cuisine ni pâtisserie : les sciences de la nature ne sont pas des techniques !

J'insiste un peu en lui expliquant que, au laboratoire, nous faisons des analyses par résonance magnétique nucléaire, que nous explorons des équations différentielles....

J'insiste encore, parce qu'il faut être clair :  par exemple nous avons un projet qui explore la diffusion de composés fluorescents dans un gel à plusieurs couches, et cela est l'occasion de calculer sans cesse. Certes, il y a au coeur du projet une expérience apparemment très simple,  qui consiste à faire un gel à plusieurs couches, et cela doit prendre à peu près une demi-journée, en calculant correctement les concentrations,  mais il y a surtout la conception de ce gel, en tenant compte de différences de pressions osmotiques, des diffusions attendues des solutés qui seront dans le gel,  et là, c'est devant un ordinateur, avec des calculs, que se fait le travail, qui prend bien une semaine...  à condition d'avoir appris à le faire, de savoir calculer. Une fois les échantillons prélevés,  nous les analysons par spectroscopie de fluorescence, et là, on a le nez collé à  des tableaux de nombres, les absorption et les émissions de la lumière aux différentes longueurs d'onde que nous utilisons pour sonder les échantillons recueillis. Une fois ces tableaux de nombres obtenus, il s'agit de relier les nombres en équations, pas différentielles celle-là, mais en équations quand même. Et nous n'en sommes qu'au début, car va pouvoir alors commencer le travail scientifique, qui consiste à explorer les ensembles d'équations recueillies.

On voit  dans cette description honnête qu'il n'y a pas beaucoup de place pour la pâtisserie ni pour la cuisine dans tout cela,  et l'on voit que je n'exagérais pas, en faisant une belle différence entre cuisine et science.

Comme mon interlocuteur insistait, je lui ai demandé s'il pouvait me dire comme ça, en claquant des doigts,  la primitive du produit du sinus de x par le cosinus de x (une question de calcul parfaitement élémentaire, mais juste pour voir), et  il n'en savait rien.
Je lui ai alors demandé si cette question l'intéressait, et, de fait,  elle ne l'intéressait pas...  parce qu'il voulait faire de la pâtisserie.

La conclusion tirée en commun s'imposait :  ce n'était pas la recherche scientifique qui l'intéressait et donc pas la gastronomie moléculaire puisque la gastronomie moléculaire est une discipline scientifique.

Oui, notre propos, en recherche scientifique, n'est pas, comme le croyait notre ami, d'expliquer "comme cela", "avec les mains", les phénomènes qui surviennent lors des transformations culinaires. Nous ne cherchons qu'indirectement à comprendre la préparation de la génoise, le gonflement du soufflé ou l'épaississement de la crème anglaise... car tout cela est assez simple, et, surtout, bien éloigné de notre ambition, qui est de faire des découvertes scientifiques.

Finalement il y avait donc lieu de restituer les choses entre technique, technologie et sciences de la nature. Notre ami n'avait en réalité aucune idée précise d'aucun des trois (y compris la pâtisserie), et j'espère l'avoir éclairé. Oui j'espère lui avoir été utile en lui évitant de faire un stage où il aurait été malheureux parce qu'il n'aurait pas été capable de faire ce qui aurait été attendu de lui.

Derrière sa confusion, il faut quand même analyser que la difficulté, c'est le mot "gastronomie" qui est dans "gastronomie moléculaire", et qui est souvent confondu avec "cuisine".  Mais qui puis-je si mes interlocuteurs ne connaissent pas bien la langue française ?

mardi 20 avril 2021

Je vois beaucoup d'étudiants, jusque en master, qui ne savent pas vers où ils se dirigeront, et cela m'inquiète pour eux, car les études s'achèvent avec la seconde année de master, de sorte qu'ils quitteront l'université sous peu... Pour aller où ?

 


La seconde année de master devrait être  le moment où l'on trouve un stage qui préfigure le poste que l'on aura l'année suivante, et ce stage doit se faire dans l'industrie, puisque c'est là qu'il y a de l'emploi.

Il y a lieu, donc, dès le début des études universitaires, c'est-à-dire en première année de licence, mais aussi en deuxième année de licence, et aussi en troisième année de licence, puis en première année de master, et enfin en seconde année de licence, d'organiser des (j'ai bien dit des : là, il y a une obligation de résultats, et pas seulement de moyens) longues séances de détermination, de choix professionnel, d'orientation car on ne peut pas imaginer que des étudiants puissent étudier sans but. C'est parce qu'ils auront identifié un travail, un métier, qu'ils seront prêts à comprendre qu'il y a des compétences à avoir pour l'exercice de ce travail, de ce métier.

Il faut les aider à se déterminer... au lieu de les laisser dans leur indécision. Car hélas, presque chaque jour, je vois des étudiants qui disent qu'ils se détermineront plus tard.

Plus tard ! Mais quand, plus tard  ? Cette décision, ils ne cessent de la reporter, avec une mauvaise foi infinie : "Je verrai à la fin", "Je déciderai avec mon stage", etc.
Bref, demain on rase gratis !

Faut-il tolérer cette mauvaise foi ? Je vois qu'elle a comme néfaste conséquence à court terme que  nos amis étudieront mal (puisqu'ils n'ont pas de réelle motivation à étudier). Et, à plus long terme, puisqu'ils auront mal étudiés, ils seront médiocres. Et encore à plus long terme, personne ne voudra d'eux pour les postes auxquels ils prétendront (on a bien entendu la racine du mot "prétention").

Bien sûr, on peut ne pas s'en faire, être défaitiste : reconnaître que l'université doit accueillir tout le monde, sans sélection, sans aide aux étudiants, et les laisser avancer à leur gré, en distribuant à tous des diplômes qui ne valent rien...
Mais pourrons-nous bien nous regarder dans la glace le matin, si nous faisons ainsi ?

Oui, d'autre part, certains pourront étudier un peu au hasard, sans savoir vraiment ce qui leur est utile. Bien sûr, certains peuvent vouloir avoir autant de culture que possible, et donc accumuler les connaissances.
Mais viendra bien un jour où il leur faudra non seulement  des connaissances particulières, adaptées aux tâches à exécuter, mais aussi des compétences.

Et c'est de ce point de vue-là qu'il faut absolument, chaque année, commencer par ces séances très particulières, avec tous les étudiants qui ne sont pas déterminés.

Pour les autres, le problème est résolu : puisqu'ils savent le métier qu'ils veulent exercer, alors il est facile de les aider à acquérir les connaissances  et les compétences qui seront nécessaires à l'exercice de ce métier, en plus d'un socle de base qui leur permettra ensuite d'élargir le spectre de leurs connaissances et compétences.

Je prends un peu de recul maintenant pour signaler que oui, l'université peut être là pour donner de la connaissance, mais j'observe quand même que, ces dernières décennies, elle s'est donné pour mission de former des jeunes à des métiers, de sorte qu'est terminée l'ère où l'université ne dispensait que du savoir général.

Il faut entrer dans le vif, et aider les étudiants à devenir "capables" (en termes de connaissances, de compétences, de savoir être, de savoir vivre...).

A propos d'actualités

 Oui, j'ai un site (), mais je donne bien plus d'information sur ce blog que sur le site. C'est peut-être une erreur, mais je n'ai pas non plus un temps infini pour faire connaître ce que je produis... d'autant que je préfère faire les choses que les annoncer ! 

Cela étant, les services de presse des institutions dont je dépends me signalent que, en raison des encombrements de boîtes aux lettres électroniques, il vaudrait mieux déposer les fichiers sur un site. 

Dont acte : c'est ici le "site" que j'utiliserai à cette fin.

lundi 19 avril 2021

A propos de caramel



1. Je retrouve un message ancien, à propos de caramel :

Par exemple, je rate bien souvent mes caramels... ce qui est frustrant c’est qu’il n’y a pas de technique précis et bien que le caramel à sec semble facile en vidéo, en pratique c’est tout de même bien difficile de contrôler le processus et arrêter le caramel au bon moment…
Par contre, quand on réussit un caramel à sec, c’est vraiment satisfaisant - la fonte du sucre en poudre en sirop caramélisé est une très belle transformation…
De conception, l’idée de laisser «brûler» une poudre sèche sans y toucher afin qu’il fond est relativement frustrant comme on se sent très exposé au désastre du caramel brulé et l’envie de repartir la chaleur en remuant est bien présent… mais proscrit par les pro's !
Peut-être que le sucre blanc en poudre est bien plus facile à utiliser que le sucre de canne blond que je préfère utiliser. En tout cas, la qualité et le type de sucre varie et la granulométrie également. Certains conseillent du sucre glace supposé «plus pure». Pour des grandes quantités du sucre il faut aussi procéder par ajout successifs ce qui ne facilite pas la tâche pour un amateur, et - c’est long...
Vous avez mentionné dans un article* comment l’ajout d’eau pourrait être un avantage et que l’eau s’évapore lors de la cuisson laissant en théorie un caramel possiblement aussi pur qu’un «caramel à sec».
Est-ce qu’un caramel «mouillé à l’eau» serait aussi «pur» qu’un "caramel à sec", et/ou comment controler la caramélisation précisement sans bruler le sucre ?
Il serait bien de comprendre comment mieux maitriser la caramelisation avec une méthode simple et quantifiable*. Quel quantité d’eau pour quelle quantité de sucre, la bonne température de la cuisson, quelle taille de récipient pour quelle quantité de sucre, les differences entre sucre raffiné, de canne, sucre roux et sucre glace...
Un aspect de la caramélisation du sucre qui m’intéresse particulièrement est le caramel mou type «bonbon" que j’aime par sa consistance et qui serait intéressant à réaliser avec moins de sucre tout en gardant la consistance du bonbon mou/semi-rigide - ce qui passerait par l’ajout de matière non sucré tout en réussissant de «figer» le caramel. En effet, un caramel en crème (type caramel mou + chantilly) à un gout moins envahissant qu’un caramel mou mais plus intéressant à mon avis comme le goût sucré du caramel est un peu atténué… En diluant un caramel, on dirais que le parfum caramel survit mieux que le goût du sucré. Une plus grande proportion de crème ou autre ajout non sucré semble difficile de reproduire en forme de «bonbon» caramel… sauf bien sûr si la cuisine moléculaire saurait y répondre.



2.  Une réponse générale

Soyons simple : rien de plus facile à produire que du caramel : on prend une casserole, on y met quelques cuillerées à soupe d'eau et l'on ajoute du sucre en poudre, puis on chauffe.
On voit d'abord s'élever une fumée blanche au-dessus de la casserole, c'est-à-dire de l'eau qui s'évapore, tandis que le sucre se dissout. On observe une ébullition, puis on voit l'apparence des bulles changer, avec l'augmentation de la viscosité du sirop, au fur et à mesure de l'évaporation de l'eau. Si l'on avait mis un thermomètre, on aurait vu la température augmenter, à plus de 100 degrés.
Au début, ce changement de viscosité se fait sans changement de couleur, mais, vers 140 degrés, le blanc jaunit, avant de brunir : une odeur de caramel apparaît, et, ensuite, les changements peuvent être rapides.
C'est à ce moment que du caramel est formé. Si on le verse sur un marbre, on obtient une masse vitrifiée, dure, brune. Mais si l'on cuit avec de la crème, par exemple, on peut faire du caramel mou, auquel on peut ajouter du beurre, du sel, etc.
A noter que l'on aurait pu commencer la cuisson sans eau : le sucre en contient un peu, mais il aurait été prudent de chauffer lentement.

Du point de vue chimique, la production du caramel d'une réaction très énergétique, que l'on peut comparer à l'action de l'acide fluorhydrique, l'un des acides les plus puissants connus. Et effectivement, une température de 140 degrés est considérée comme très élevée (excessive ?) pour les chimistes qui prennent bien soin d'utiliser des températures bien plus basses, pour les réactions qu'ils effectuent.
A cett température,  les molécules "organiques", celles des animaux ou des plantes, et, plus généralement, toutes les molécules composés  d'atomes de carbone, d'hydrogène, d'oxygène, d'azote, sont déstructurées par la chaleur. Il y a des groupes d'atomes (donc des molécules) qui se détachent des molécules chauffées, tel l'hydroxyméthylfurfural, qui précisément contribue au goût du caramel.
Mais il y a bien d'autres composés qui se forme, ce que l'on peut comprendre quand on sait que le sucre de table, le saccharose, est composé de deux moitiés que l'on nomme des résidus de glucose et de fructose : ces deux moitiés sont séparées par la cuisson du caramel,  et elles réagissent ensuite.
Par exemple les résidus fructose qui sont détachés se réapparient, formant des composés réactifs nommés dianhydrides de fructose, lesquels s'associent ensuite à des résidus de glucose, ce qui forme des molécules qui sont la masse solide  du caramel.

Et dans le caramel formé, il n'y a plus de saccharose, mais des produits de réaction : un mélange complexe, parce que le procédé culinaire est bien incapable de ne former qu'une seule sorte de produits.
D'ailleurs, on peut obtenir des caramels différents selon les ingrédients que l'on ajoute au sucre, tels des  acides, avec du vinaigre ou du jus de citron, des bases telle du bicarbonate.
Et c'est ainsi que l'industrie du caramel fait des caramels variés... qui sont considérés d'ailleurs comme des additifs avec le code 150, mais avec une lettre qui stipule  la façon dont les caramels sont produits.


3. Et quelques commentaires

En italiques, les phrases de mon correspondant, et en romain mes réponses. 


Par exemple, je rate bien souvent mes caramels... ce qui est frustrant c’est qu’il n’y a pas de technique précis et bien que le caramel à sec semble facile en vidéo, en pratique c’est tout de même bien difficile de contrôler le processus et arrêter le caramel au bon moment…

Je ne comprends pas comment c'est possible. A moins que chauffer trop fort, à sec ? Alors la masse de sucre caramélise trop d'un côté, pendant que le reste est intact ? Allons-y doucement, ou bien, comme j'ai expliqué, commençons avec un peu d'eau.


Par contre, quand on réussit un caramel à sec, c’est vraiment satisfaisant - la fonte du sucre en poudre en sirop caramélisé est une très belle transformation…

Et pourquoi cela serait-il satisfaisant... alors que j'ai jamais raté un caramel. Allons, un peu de soin, de patience, un feu pas trop fort, un peu d'attention.


De conception, l’idée de laisser «brûler» une poudre sèche sans y toucher afin qu’il fond est relativement frustrant comme on se sent très exposé au désastre du caramel brulé et l’envie de repartir la chaleur en remuant est bien présent… mais proscrit par les pro's !

Décidément, je ne comprends pas bien. Et pourquoi suivre les avis des professionnels s'ils sont mauvais ?


Peut-être que le sucre blanc en poudre est bien plus facile à utiliser que le sucre de canne blond que je préfère utiliser. En tout cas, la qualité et le type de sucre varie et la granulométrie également. Certains conseillent du sucre glace supposé «plus pure».

 Non, le sucre glace n'est pas plus pur que le sucre semoule ou cristal... au contraire ! Car pour empêcher qu'il ne fasse des "mottes", on lui ajoute des "antimottants", à savoir de la silice ou de l'amidon.
Oui, les impuretés qui font le sucre roux changent la caramélisation, en apportant des composés de natures variées.


Pour des grandes quantités du sucre il faut aussi procéder par ajout successifs ce qui ne facilite pas la tâche pour un amateur, et - c’est long...


Avec un peu d'eau, peu importe qu'il y ait peu ou beaucoup de sucre !


Vous avez mentionné dans un article comment l’ajout d’eau pourrait être un avantage et que l’eau s’évapore lors de la cuisson laissant en théorie un caramel possiblement aussi pur qu’un «caramel à sec».
Est-ce qu’un caramel «mouillé à l’eau» serait aussi «pur» qu’un "caramel à sec", et/ou comment controler la caramélisation précisement sans bruler le sucre ?


Et pourquoi l'eau serait-elle néfaste ? L'eau s'évapore, après avoir servi à fondre le sucre.


Il serait bien de comprendre comment mieux maitriser la caramelisation avec une méthode simple et quantifiable. Quel quantité d’eau pour quelle quantité de sucre, la bonne température de la cuisson, quelle taille de récipient pour quelle quantité de sucre, les differences entre sucre raffiné, de canne, sucre roux et sucre glace...

Quelle quantité d'eau ? Une ou deux cuillerées suffisent  : il suffit de les apporter au début afin que le sirop se forme. Et, ensuite, l'eau s'évapore.
Quantifier ? Ne faisons pas des choses compliquées : c'est si simple !


Un aspect de la caramélisation du sucre qui m’intéresse particulièrement est le caramel mou type «bonbon" que j’aime par sa consistance et qui serait intéressant à réaliser avec moins de sucre tout en gardant la consistance du bonbon mou/semi-rigide - ce qui passerait par l’ajout de matière non sucré tout en réussissant de «figer» le caramel. En effet, un caramel en crème (type caramel mou + chantilly) à un gout moins envahissant qu’un caramel mou mais plus intéressant à mon avis comme le goût sucré du caramel est un peu atténué… En diluant un caramel, on dirais que le parfum caramel survit mieux que le goût du sucré. Une plus grande proportion de crème ou autre ajout non sucré semble difficile de reproduire en forme de «bonbon» caramel… sauf bien sûr si la cuisine moléculaire saurait y répondre.

La question n'est pas celle du sucre, mais du caramel : dans du caramel bien fait, il n'y a plus de sucre, mais du caramel. Et pour avoir quelque chose de plus mou, il faut plus de matière grasse ou plus d'eau dans le produit final.

dimanche 18 avril 2021

Entre la boue et la lumière



Il existe dans les professions des codes des usages, c'est-à-dire des listes d'opération et de produits autorisés pour avoir le droit à des appellations  par exemple, andouillette, gâteau Saint-Honoré, gruyère, gewurtztraminer, etc.

Il s'agit toujours de prescriptions qui imposent un minimum pour mériter des dénominations, sans déloyauté.

A la réflexion, ces minimum sont des minimum, et je ne les aime pas, parce qu'ils nous font rester au ras du plancher, disons dans la boue en quelque sorte.  

Ce n'est pas nul, bien sûr,  puisque la profession s'est mise d'accord pour autoriser ces nominations mais quand même, ce sont des codes a minima.

Ne peut-on pas,  au contraire,  imaginer des codes à maxima ? Des prescription qui donneraient des idée du meilleur ? N'est-il pas préférable de proposer aux jeunes... et aux autres des indications de comment très bien faire ?

Là, on aurait le regard braqué sur le bleu du ciel, on deviendrait enfin véritablement humain, au lieu de rester tels des pourceaux dans la fange.

Je ne peux pas m'empêcher de penser que toute prescription a minima devrait être assortie d'une considération à maxima.

Prévisions culinaires

 Que peut-il bien se passer... 


Nous sommes bien d'accord : avant d'avoir fait une expérience, on n'a que des hypothèses. Et ceux qui comprennent bien le mécanisme de la recherche scientifique savent combien un scientifique est plus intéressé de voir ses prévision réfutées que confirmées.
Pour autant, la science produit quand même des théories extraordinairement précises, et c'est pourquoi il y a peu de doute dans les suivantes :

1. Que se passe-t-il quand on met un échaudé (pensons gnochi, par exemple) au four ?
Un échaudé, cela peut être de la farine et de l'oeuf, possiblement additionnés de matière grasse (beurre), de fromage, etc., que l'on fait tomber dans de l'eau bouillante : l'oeuf coagule, et le "pochage" produit donc une "poche", à savoir une couche externe coagulée, qui enferme le reste de la préparation, laquelle peut aussi coaguler ; la farine s'empèse.
Au four après le passage à l'eau bouillante ? La partie externe séchera, et l'on aura le même produit, mais avec une croûte externe. Possiblement un soufflage, et, donc des fissurations.

2. Un échaudé que l'on frit ?
Il y a deux cas : la pâte à échaudé que l'on frit, sans avoir échaudé (et le nom est donc erroné), ou bien l'échaudé qui a été formé et que l'on frit.
Dans le second cas, on aura le même résultat que ci dessus, mais, avec une pâte à échaudé que l'on frit, ce sera... un beignet, n'est-ce pas ? De sorte que la "pâte à échaudé" peut être plus justement nommée pâte à beignet ;-)

3. Peut-on frire une pâte ?
Observons qu'une cuillerée de farine dans de l'huile chaude ne fait rien de bien : les grains de farine ne sont pas solidarisés, et pourquoi le seraient-ils ?
Inversement, si l'on a déjà une structure, et notamment une structure empesée, alors le séchage de la couche externe fait une croûte dure, qui maintient la structure. Evidemment, si la préparation contient de l'oeuf cru, alors la cuisson de l'oeuf ajoute sa solidité à celle de la préparation... à condition bien sûr que l'oeuf soit initialement cru, et non cuit sans former un gel, comme dans une crème anglaise.
Mais on n'oubliera pas, aussi, le phénomène de capillarité qui fera venir l'huile à coeur, s'il y a des a porosités : rien de pire qu'un beignet mal fait, gorgé d'huile de friture, n'est-ce pas ?
Une pâte à tarte ? On peut faire des rissoles. Une pâte à choux ? Au fond, elle s'apparente à une pâte à beignets, sauf que la farine est déjà empesée. Un pâte à génoise ? Cette fois, attention à la porosité. Et ainsi de suite.

samedi 17 avril 2021

Exposer les hésitants à de belles personnalités


Oui, il faut que nous exposions aux étudiants à les industriels beaucoup plus enthousiasmants que nous ne le faisons  !
Dans nos masters,  je vois  beaucoup trop d'étudiants qui disent vouloir se diriger vers la recherche, alors qu'ils n'en n'ont pas l'once d'une possibilité, en termes de connaissances, comme en termes de compétences.

Pourquoi ont-ils cette ambition ? Parfois, il y a de  la prétention, mais, parfois aussi la peur d'aller vers le "vrai monde" (je rappelle qu'un pays, c'est de l' "industrie", au sens où l'entendent nos amis canadiens : artisanats, petites ou grosses entreprises). Et, parfois, il y a des a priori idéologiques mal pensés : ces mêmes personnes qui  consomment ordinateurs, voitures,  aliments, cosmétiques, loisirs, etc. disent détester cette industrie qu'ils cautionnent par leurs comportements de consommations très peu civiques, et, en tout cas, irréfléchis.

Mais le but de ce billet n'est pas de dénoncer l'imbécillité de certains (d'autant qu'il y en a une proportion... habituelle de merveilleux), mais bien plutôt d'aider nos  jeunes amis à mieux se déterminer, et, notamment, à comprendre que c'est dans l'industrie qu'ils trouveront un travail, un salaire...

La question donc, c'est de faire comprendre à des étudiants qu'il y a lieu de bien se diriger vers l'industrie.
Pour cela, je crois qu'il n'y a rien de mieux que l'émulation :  pas l'émulation au sens de la concurrence, mais l'envie de bien faire, en montrant à des étudiants ce qu'ils n'ont jamais vu, à savoir les "industriels" qui font des choses merveilleuses.

Oui, il faut montrer des Jean Muller,  qui construisent les grands ponts du monde, mettant en oeuvre l'idée du béton précontraint.
Oui, il faut montrer des Eiffel, qui construisent le viaduc de Garabit ou la célèbre tour.
Oui, il faut montrer ce Joseph Black qui a reçu le prix Nobel de chimie alors qu'il travaillait dans un laboratoire pharmaceutique, où il a mis au point les premiers agents retroviraux.
Oui, il faut montrer, plus récemment, ces deux chercheurs turcs qui ont produit les premiers vaccins à ARN contre le covid 19.
Oui, il faut montrer ces ingénieurs de l'industrie cosmétique qui, utilisant leur connaissance de l'Université, ont mis au point des systèmes de transfert de principe actif.
Oui, il faut montrer les ingénieurs de l'industrie alimentaire qui mettent au point des nanoparticules pour délivrer des composés odorants, qui résolvent ds problèmes aussi difficile que de faire des pizza surgelée avec du basilic sur la tomate (croyez-vous vraiment qu'on met les feuilles à la main, quand on produit des millions de pizza  par an ?),  qui sont confrontés au terrible le problème de l'emballage, qui ne doit pas laisser migrer des composés vers l'aliment, alors que l'ensemble est stocké longtemps, qui se préoccupent de la sécurité sanitaire des huiles alimentaires, lesquelles ne doivent pas contenir trop d'hydrocarbures aromatiques polycycliques  ni de métaux lourds. Et ainsi de suite.

Oui, il faut exposer nos jeunes amis à des personnalités industrielles remarquables, leur donner l'ambition de changer le monde en mieux.

vendredi 16 avril 2021

Une longue discussion à propos du goût des viandes


Aujourd'hui, une bien longue question, sur une question difficile. Je fais de mon mieux pour répondre.

1. la question :
 

Bonjour Monsieur This,
Je me permets de vous contacter autour d’une question que je n’arrive pas à élucider : Quel processus est le plus intéressant afin d’aromatiser une viande crue avant cuisson à cœur ?
Je comprends que la réponse est fonction de bien des paramètres : type de viande, teneur en gras, complexité des fibres et tissus, taille et sens des découpes (..)
Cette question a soulevé maintes techniques et usages, passées sinon modernisées - Marinade, saumure, injection, enrobage (..) - elles-mêmes régies par des paramètres clés qui impliquent d’autres questions pour la compréhension globale.
Semble-t-il la marinade ne pénètrent que très peu à cœur. L’acidité dénaturerait uniquement les protéines en surface pour faire entrer le liquide aromatique, l’huile comme vecteur des molécules aromatiques.
D’un autre côté, le saumurage est porté par le phénomène d’osmose et l’action du sel. Je comprends le résultat, une viande salée et aromatisée à cœur avec les herbes et aromates déposés dans la saumure. Mais que se passe t’il chimiquement , j’ai lu plusieurs théories :
Première proposition, le fluide contenu à l’intérieur des cellules est naturellement largement plus concentré (en sel) que le soluté de la saumure (même en insistant sur le sel). Le soluté (eau+sel+arômes) de la saumure pénètrerait ainsi la viande.
Seconde proposition, plus largement soutenue bien que confuse sur la finalité d’action. Le soluté de la saumure est plus concentré. L’eau contenu dans les cellules de la viande migre vers la saumure. Mais quel mécanisme permet à la viande de gagner en jutosité puisque les résultats montrent qu’elle gagne en volume, en salinité et en arôme ?
 A. La migration de l’eau par déséquilibre du sel dilue alternativement l’une et l’autre des solutions, puisque la concentration en sel augmenterait de facto dans le milieu où l’eau aurait migré. L’arrêt des échanges se fait quand il y a équilibre des concentrations et pressions : point isotonique.
B. Une différence de pression hydrostatique entre les deux liquides provoque un mouvement du solvant en sens inverse, jusqu'à ce que la pression osmotique soit aussi élevée que la pression hydrostatique. C'est le phénomène de l'osmose inverse. On serait en face d’une mécanique des fluides ?
A cela s’ajoute la « semi-perméabilité » des membranes des cellules. Si j’ai bien suivi votre raisonnement sur la membrane de l'œuf. Seul l’eau est capable de migrer dans ou hors de la viande. Dans le cas présent, les résultats montrant une viande plus salée et aromatisée après saumurage indiquent que les parois des cellules ne sont pas si « semi-imperméables » et laisseraient passer du sel, ou ai-je mal compris le principe de l’osmose ?
De même, pourquoi l’eau uniquement peut-elle circuler au travers des cellules ? Une huile, un alcool, un lait ou tout autre liquide pourrait-il pénétrer de la même manière dans les cellules, typiquement une saumure de rhum ? A date, j’y vois l’action du sel soluble comme déclencheur de l’équation et donc de l’échange osmotique. Dans le cas de l’huile, le sel n’étant pas soluble, élimine toute pénétration efficace à cœur, et de surcroît j’imagine sa viscosité la rendant moins apte à pénétrer - quid des articles qui encense « les marinades pour aromatiser les chairs » ? En ce cas, qui dit saumure, dit nécessairement liquide avec forte teneur en eau pour garantir la solubilité du sel. Ai-je bien compris le rôle du sel ?
Enfin, l’huile dans la marinade et plus globalement, a un fort pouvoir de rétention des arômes. Est-ce bien la même équivalence dans l’eau… Auquel cas pourquoi diable valoriser les marinades à base acide pour aromatiser les chairs si elles restent en surface contrairement à une saumure aux multiples avantages ?
Votre éclairage sur ce vaste sujet m’aiderait grandement. N’hésitez pas à me recommander certaines sources ou l'un de vos ouvrages dans lequel vous auriez étudié la question.



2. Une première réponse

Ouille, c'est un gros morceau !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Je réfléchis à la meilleure façon de vous répondre, mais il y en a pour un long moment, et je me demande si le mieux ne serait pas que je réponde par oral lors du prochain séminaire, le 12 avril entre 16 et 18 h. Etes vous sur la liste de distribution ?
Mais préalable important  : au fait, pourquoi vouloir donner à la viande un autre gout que la viande ? Ou, mieux dit, quel est l'objectif, je veux dire l'idée derrière l'objectif immédiat ? Parce que sans cette vision claire, on patauge et on répond mal.
bien à vous
PS. Une viande n'a pas d'arôme, puisqu'un arôme, c'est l'odeur d'une plante aromatique, d'un aromate. Vous voulez sans doute parler de goût.


3. Un commentaire détaillé de la question

Là, je prends chaque phrase, et je réponds : 


Quel processus est le plus intéressant afin d’aromatiser une viande crue avant cuisson à cœur ?

Si l'on passe sur la faute qui consiste à parler d'aromatisation pour parler de donner du goût (et ce goût peut être un arome si on le fait à l'aide d'aromates), alors il faut quand même observer que cette première question présente d'abord une double faiblesse : elle demande le processus le plus intéressant... alors qu'il s'agit d'un procédé, d'une part, et, d'autre part, qu'elle fait l'hypothèse d'un "plus intéressant". Plus intéressant en termes de temps passé ? de coût ? d'efficacité ? d'efficacité en termes de saveurs ? d'odeurs ? de sensations trigéminales ? Et puis, elle fait l'hypothèse que l'on peut donner du goût à une viande, ce qui n'est pas acquis a priori.
Mais, surtout, pourquoi vouloir donner du goût à une viande crue ? D'ailleurs, avant "cuisson à coeur" ? Me demande-t-on : donner du goût à coeur avant cuisson ?

Tout cela étant dit, on voit que je me dois de répondre autre chose que ce qui est demandé, puisque la formulation de la question reste à désirer. Reste la question : donner du goût à coeur d'une viande. On a de nombreux moyens, à commencer par les plus classiques : les marinades (pour certaines viandes seulement), les piquages (dans le temps, on lardait les viandes, et les lardons étaient salés, poivrés, etc.), les injections de liquides à la seringue, comme pour les jambons...


Je comprends que la réponse est fonction de bien des paramètres : type de viande, teneur en gras, complexité des fibres et tissus, taille et sens des découpes (..)


Moi, avant de penser paramètre, je propose de fixer clairement l'objectif : que veut-on faire et pourquoi ?


Cette question a soulevé maintes techniques et usages, passés sinon modernisés - Marinade, saumure, injection, enrobage (..) - elles-mêmes régies par des paramètres clés qui impliquent d’autres questions pour la compréhension globale.

Décidément, j'ai du mal avec les formulations. Par exemple, comment l'enrobage donnerait-il du goût à coeur ?
Et puis, ces "paramètres clés qui impliquent des questions : je ne comprend pas ce que cela signifie.


Semble-t-il la marinade ne pénètrent que très peu à cœur.

Ce n'est pas exact : j'ai dit plus haut que la marinade fonctionne bien avec certaines viandes, et cela se vérifie facilement.


L’acidité dénaturerait uniquement les protéines en surface pour faire entrer le liquide aromatique, l’huile comme vecteur des molécules aromatiques.

Oui, l'acide peut modifier la surface, mais allons-y doucement avec les mécanismes chimiques, surtout quand on les mêle à des phénomènes macroscopiques. C'est une tendance que je vois apparaitre de plus en plus : des descriptions pseudo scientifiques, dont on ne sait pas d'où elles sortent.
Oui, l'acide modifie la surface, dénaturation ou non des protéines... mais en quoi cette dénaturation ferait-elle entrer le "liquide aromatique" (je me répète, mais un liquide n'est pas "aromatique" ; disons qu'il a du goût). Et puis, comment l'huile entrerait-elle ? D'ailleurs entre-t-elle ? Toujours ? Pour toutes les viandes ? La réponse est non.

D'ailleurs, j'ajoute que si l'on veut évoquer des mécanismes, il vaudrait mieux ne pas oublier la structure de la viande, avec des fibres réunies en faisceaux par du tissu conjonctif. Pas de trous, pas de diffusion possible pour de nombreuses viandes. Les protéines et leur dénaturation : on verra cela plus tard.


D’un autre côté, le saumurage est porté par le phénomène d’osmose et l’action du sel.

La encore, on suppose que sel entre dans les viandes, et cela est vrai pour des temps longs. Mais d'où sort cette idée du phénomène d'osmose ? Quant à dire que le saumurage résulte de l'action du sel, c'est une tautologie.
Et la capillarité ?


Je comprends le résultat, une viande salée et aromatisée à cœur avec les herbes et aromates déposés dans la saumure. Mais que se passe t’il chimiquement ?  j’ai lu plusieurs théories :

J'observe tout d'abord que si je sais qu'un saumurage peut saler à coeur (avec du sel, qui est soluble dans l'eau), je n'ai pas de certitude quand on fait que le goût des herbes, du essentiellement à des composés hydrophobes, pourrait pénétrer dans les viandes. Et j'aimerai voir des travaux corrects à ce propos.


Première proposition, le fluide contenu à l’intérieur des cellules est naturellement largement plus concentré (en sel) que le soluté de la saumure (même en insistant sur le sel). Le soluté (eau+sel+arômes) de la saumure pénètrerait ainsi la viande.


C'est bien gentil... mais la structure de la viande ? Les fibres, les faisceaux de fibre ? Et, j'insiste encore, les composés hydrophobes n'empruntent pas les mêmes voies que les composés hydrosolubles.


Seconde proposition, plus largement soutenue bien que confuse sur la finalité d’action. Le soluté de la saumure est plus concentré. L’eau contenu dans les cellules de la viande migre vers la saumure.


Là, j'ai des mesures de la perte de masse de viandes dans du sel, et c'est bien par osmose que peut se faire le phénomène... Mais pourquoi parler du "soluté de la saumure" : quel soluté de la saumure ?????


Mais quel mécanisme permet à la viande de gagner en jutosité puisque les résultats montrent qu’elle gagne en volume, en salinité et en arôme ?

D'abord, d'où sort cette idée que la viande gagnerait en jutosité ? Et d'où vient cette idée qu'elle gagne en volume ? Et en "arôme" ?


A. La migration de l’eau par déséquilibre du sel dilue alternativement l’une et l’autre des solutions, puisque la concentration en sel augmenterait de facto dans le milieu où l’eau aurait migré. L’arrêt des échanges se fait quand il y a équilibre des concentrations et pressions : point isotonique.

Que l'on me pardonne, mais je ne comprend rien : "déséquilibre du sel" ? Concentration en sel qui augmenterait dans le milieu où l'eau migrerait (si l'eau afflue, la concentration en sel diminue !) ? Et puis, dans un phénomène d'osmose, l'équilibre (qui n'est pas l'équilibre du sel, mais l'équilibre du système) ne correspond certainement pas à un équilibre des concentrations.


B. Une différence de pression hydrostatique entre les deux liquides provoque un mouvement du solvant en sens inverse, jusqu'à ce que la pression osmotique soit aussi élevée que la pression hydrostatique. C'est le phénomène de l'osmose inverse. On serait en face d’une mécanique des fluides ?

Là encore, ça va beaucoup trop vite pour moi. Qui a jamais prouvé un "équilibre hydrostatique" ? Mais, plus généralement, je ne comprends rienà ce paragraphe, désolé.


A cela s’ajoute la « semi-perméabilité » des membranes des cellules.

Une semi-perméabilité des membranes  des cellules ? Dans les viandes, les cellules sont les fibres musculaires, et leurs membranes sont gainées de tissu collagénique. Cela n'a rien à voir avec une membrane semi-perméable, ou, disons que la semi-perméabilité est loin d'être établie.


Si j’ai bien suivi votre raisonnement sur la membrane de l'œuf.

L'oeuf, c'est l'oeuf, sans structure comme dans la viande. De sorte que l'extrapolation n'est pas légitime.


Seul l’eau est capable de migrer dans ou hors de la viande.

D'où cela sort-il ? D'ailleurs, ce n'est pas vrai : les saumures sont rouges.


Dans le cas présent, les résultats montrant une viande plus salée et aromatisée après saumurage indiquent que les parois des cellules ne sont pas si « semi-imperméables » et laisseraient passer du sel, ou ai-je mal compris le principe de l’osmose ?

Hélas, la réponse est oui, d'une part, et, d'autre part, la question de la structure de la viande est omise.
Et puis, une viande plus parfumée après saumurage ? Je voudrais en être bien certain, avant de chercher des explications.


De même, pourquoi l’eau uniquement peut-elle circuler au travers des cellules ?

Mais vous avez vous-même dit que le sel entrait ???? Je ne comprends plus.


Une huile, un alcool, un lait ou tout autre liquide pourrait-il pénétrer de la même manière dans les cellules, typiquement une saumure de rhum ?

Je n'en sais rien : faites l'expérience.


A date, j’y vois l’action du sel soluble comme déclencheur de l’équation et donc de l’échange osmotique.

Où y a-t-il une équation ? Où y a-t-il un "échange osmotique" : qui vous prouve que c'est l'osmose, et non la capillarité par exemple, qui est le phénomène essentiel ?

Dans le cas de l’huile, le sel n’étant pas soluble, élimine toute pénétration efficace à cœur, et de surcroît j’imagine sa viscosité la rendant moins apte à pénétrer - quid des articles qui encense « les marinades pour aromatiser les chairs » ?

Trop compliqué pour moi. D'ailleurs, la viscosité n'a rien à voir : il ne faut pas confondre équilibre et vitesse.
Et puis "le sel n'étant pas soluble" ? Soluble dans quoi  : dans l'huile ?
D'ailleurs les fameux articles (que je ne connais pas, pardon : et écrit par quel physico-chimiste ?) disent-ils que le viandes sont parfumées à coeur ? Ou bien qu'il y a du goût (en surface) ?


En ce cas, qui dit saumure, dit nécessairement liquide avec forte teneur en eau pour garantir la solubilité du sel. Ai-je bien compris le rôle du sel ?

Forte par rapport à quoi ? Et non.

Enfin, l’huile dans la marinade et plus globalement, a un fort pouvoir de rétention des arômes.

Parlons simple : il ne s'agit pas de rétention, ni d'arômes. Disons seulement que les composés odorants sont souvent solubles dans les huiles.

Est-ce bien la même équivalence dans l’eau…

Equivalence ? Je ne comprends ce que me dit mon interlocuteur.

Auquel cas pourquoi diable valoriser les marinades à base acide pour aromatiser les chairs si elles restent en surface contrairement à une saumure aux multiples avantages ?

Avant toute chose, l'expérimentation ! Etablissons les faits avant de chercher des explications, s'il vous plaît.


Votre éclairage sur ce vaste sujet m’aiderait grandement. N’hésitez pas à me recommander certaines sources ou l'un de vos ouvrages dans lequel vous auriez étudié la question.


4. avant que j'ai fait cette réponse, je reçois la suite de la question

Cela fait un moment que le goût de la viande ne m’a plus excité, si je peux parlé ainsi. Aussi je crois que cela va de pair avec le retrait au végétarisme. Tout un programme!
Côté arôme, tout à fait on est dans l’abus de language, j’imagine que je devrais davantage dire « charger la viande de molécules aromatiques via l’eau/l’huile notamment ». A vrai dire, je n’ai que très rarement dégusté - à titre privé ou en restaurant - une viande savoureuse, à comprendre chargée en épices, aromates & autres légumes infusés, y compris quand elle est estampillé marinée, elle est certainement mal maîtrisée. De mémoire, seule une marinade bulgogi de cubes de viande et une autre pour des Karaages m’avaient vraiment bluffé en goût imprégné. Corrélativement la viande devient une denrée de plus en plus chère et la qualité supermarché se banalise. A titre personnel toujours il y a donc un certain ennui au palais, et de fait une envie d’innover. Pour le peu que j’ai pu en goûter, en plat comme en sandwich, souvent une sauce ou un glaçage ne suffit pas à galvaniser la viande en son centre, qui de surcroît comme je le disais est bien souvent de piètre qualité : on place donc un morceau de denrée animale « par usage » qui reste tout de même le plus onéreux à l’assiette mais fait finalement défaut par rapport à une sauce bien exécutée. Donc, l’objectif est multiple, innover en ayant un goût imprégné et identifié à cœur dans le palais et pourquoi pas apporter des solutions ‘épicées’ sur des morceaux de qualité moins nobles ou de qualité discutable. Pourquoi par exemple réserver la saumure aux viandes blanches, aux pièces maigres ou coté bœuf uniquement « à la famille des pastrami » ?


5. et ma nouvelle réponse

Cela fait un moment que le goût de la viande ne m’a plus excité, si je peux parlé ainsi. Aussi je crois que cela va de pair avec le retrait au végétarisme. Tout un programme!

Bon, si cela plait à notre ami, il a le droit... mais je m'inquiète toujours : sait-il équilibrer son alimentation ? En vertu de quel savoir ?


Côté arôme, tout à fait on est dans l’abus de language, j’imagine que je devrais davantage dire « charger la viande de molécules aromatiques via l’eau/l’huile notamment ».

Non ! D'ailleurs, il a une autre brèche qui s'ouvre : l'expression "molécules aromatiques" est ambiguë, puisqu'elle désigne aussi bien des molécules présentes dans des aromates que des molécules dont les électrons sont "délocalisés" (pardonnez-moi de ne pas expliquer, pour ne pas allonger inutilement).
Pourquoi ne pas simplement dire  : introduire des composés odorants dans la viande, soit en solution dans l'eau, soit en solution dans l'huile ?


A vrai dire, je n’ai que très rarement dégusté - à titre privé ou en restaurant - une viande savoureuse, à comprendre chargée en épices, aromates & autres légumes infusés, y compris quand elle est estampillé marinée, elle est certainement mal maîtrisée.

Mais pourquoi vouloir charger une viande en un tas de composés, alors que la viande a son propre goût ? Moi, au contraire, j'ai mangé des viandes extraordinaires, la plus belle étant une entrecôté que j'ai mangé dans une ferme auberge du Petit Ballon, en Alsace. Sans parler des boeufs de Kobé, ou autre.
Quand même, un faisan bien faisandé, un canard, un beau boeuf, un superbe poulet, un agneau...


De mémoire, seule une marinade bulgogi de cubes de viande et une autre pour des Karaages m’avaient vraiment bluffé en goût imprégné.

Bon, mais je ne comprends toujours pas la question initiale du goût à coeur. Et puis, soyons simple, si c'est difficile de mettre du goût à coeur en plus du goût de la viande, pourquoi ne pas le mettre à l'extérieur ? N'est-ce pas, aussi, la fonction des sauces ?


Corrélativement la viande devient une denrée de plus en plus chère et la qualité supermarché se banalise.

Bof, je ne sais pas d'où cela sort, ni si c'est vrai. Je n'aime pas les "tout fout le camp ma bonne dame". Et puis, ne puis-je dire au contraire que jamais dans l'histoire de l'humanité on a aussi bien mangé ? Aussi sainement ? Et à suffisance ? C'est un fait que je suis de la première génération à ne pas avoir connu de famine, dans l'histoire de l'humanité !!!!


A titre personnel toujours il y a donc un certain ennui au palais, et de fait une envie d’innover.

Rien à commenter, sauf pour l'envie d'innover : pourquoi pas ? Mais alors, pourquoi s'intéresser spécifiquement aux viandes, alors que j'ai proposé la "cuisine note à note" ?


Pour le peu que j’ai pu en goûter, en plat comme en sandwich, souvent une sauce ou un glaçage ne suffit pas à galvaniser la viande en son centre, qui de surcroît comme je le disais est bien souvent de piètre qualité : on place donc un morceau de denrée animale « par usage » qui reste tout de même le plus onéreux à l’assiette mais fait finalement défaut par rapport à une sauce bien exécutée.

Pas d'accord, mais en matière de goût, cela fait bien longtemps que j'ai cessé d'avoir des discussions.
Cela dit, une belle viande froide en sandwich... Et l'odeur envoûtante (pour moi) d'une viande bien grillée ? Et puis, je me répète, pourquoi en son centre alors que je peux l'avoir en surface ? D'ailleurs, pour l'avoir en son centre, pourquoi ne pas faire griller, et mettre au centre, dans une sorte de steak haché reconstitué ?
Simple usage ? Pas en ce qui me concerne.



Faire d'emblée une séance de choix de carrière


On voit trop d'étudiants, en master, qui ne savent pas vers quelle carrière ils se dirigeront... alors que la seconde année de master est celle qui les mettra dans le "monde du travail".

"Je verrai", disent certains que l'on interroge. Bon, mais tu verras quand ? Et, inlassablement, j'observe des décisions qui ne sont pas prises. Les plus aisés (ceux dont les parents marnent et payent) enchaînent un deuxième master derrière le premier ; d'autres échouent à des postes qui n'ont rien à voir avec les études qu'ils ont faites ; d'autres encore cherchent à se réfugier en thèse, acceptant des propositions qui les condamnent ensuite à  ne pas trouver de travail ni dans l'industrie ni dans la recherche scientifique.

C'est évidemment intolérable, et les efforts d' "orientation" de la classe de Troisième sont complètement insuffisants ! Non seulement nos amis ne sont pas décidés, mais tout leur temps a été passé à ne pas se renseigner, afin d'être en mesure de choisir.

C'est, je crois, une obligation qui est faite aux équipes universitaires que d'organiser, répétitivement, jusqu'à ce que chacun soit décidé, des séances d'orientation.

En tenant compte des connaissances et des compétences ! Croit-on qu'il soit bien responsable de laisser s'engager vers l'astrophysique quelqu'un qui n'a que des notes médiocres en physique ? De laisser s'engager vers la chimie quelqu'un qui confond molécules et composés, qui ignore (en seconde année de master) des réactions aussi élémentaires que celle de Diels-Alder ? De laisser s'orienter vers les sciences quelqu'un qui ne sait pas résoudre un système de deux petites équations à deux inconnues ?

Mon objectif n'est pas de faire une collection d'insuffisances, mais bien, plutôt, d'inviter mes collègues à être très actifs, non seulement dans leurs enseignements, mais, aussi, dans l'aide qu'ils peuvent apporter à nos jeunes amis indécis. Je le répète : il est irresponsable de les laisser aller au casse-pipe. Il est de notre devoir de les alerter, non pas une fois, mais dix, cent, mille...

Inversement, plus positivement, nous devons présenter des possibilités. Non pas des possibilités théoriques, mais des possibilités concrètes, pratiques, assorties de descriptions des activités quotidiennes qui sont -en réalité, sont- les métiers possibles, accessibles avec les études qui sont faites.

Bien sûr, labor improbus omnia vincit, un travail acharné vient à bout de tout ; bien sûr, chacun d'entre nous peut se réveiller un jour, se retrousser les manches, changer, devenir capable de tout... mais il faudra quand même se retrousser les manches, et plus tard on le fait, plus il y aura de travail pour récupérer les années perdues.

Perdues : je viens d'entendre un jeune ami me dire que ce temps n'était pas perdu, qu'il avait appris plein de choses... Mouais : interrogé sur ce qu'il avait appris, j'ai vu surtout qu'il avait beaucoup oublié... en supposant qu'il ait vraiment appris.

Non, sans un objectif clair, nos amis n'ont pas de motivations à étudier, à rester chez eux, seul, à la table de travail, pour apprendre, c'est-à-dire retenir ces connaissances qu'il faudra ensuite transformer en compétences pour exercer un métier.

jeudi 15 avril 2021

Les bons élèves, et les bons élèves


Il est intrigant d'observer que les meilleurs élèves ne sont pas toujours les meilleurs élèves.

La formulation étant paradoxale, je m'explique : à plusieurs reprises, dans mes cours, j'ai rencontré des étudiants très intéressés, attentifs, précis, ponctuels,  organisés... Et, évidemment,  j'avais le sentiment que ceux-là étaient les meilleurs de leur promotion ; je m'apprétais à leur mettre la meilleure note. Mais, quand les travaux ont été rendus, les leurs n'étaient pas les meilleurs !

J'ai eu beau faire, m'interroger, je ne parvenais pas en quelques sorte à les classer mieux que d'autres étudiants, plus iconoclastes, plus turbulents, moins policés, mais qui rendaient des travaux bien plus intéressants, fignolés, intelligents...

Il y a lieu de s'interroger : mes observations (sur plusieurs années quand même) sont-elles parfaitement anecdotiques, ou bien reflètent-elles une réalité ? Y a-t-il une sorte d'opposition entre ces deux notions de bon élève en terme de moyen, et de bon élève en termes de résultats ?

A ce jour, je ne sais vraiment pas,  mais je crois utile de poser la question.