Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
vendredi 2 septembre 2016
Un liquide absorbé par une masse solide, en cuisine ?
Cela est discuté sur http://gastronomie-moleculaire.blogspot.fr/2016/09/quand-les-liquides-sont-ils-absorbes.html
jeudi 1 septembre 2016
Chimie et compagnonnage
Tous les métiers sont manuels, tous les métiers sont intellectuels
Pourquoi cette idée
d'une absence de différence entre des métiers dits fautivement
manuels et des métiers dits fautivement intellectuelle ? Parce
qu'elle est juste ! Et, aussi, parce que j’observe un fossé
qui n'a pas lieu d'être entre ces métiers dits fautivement manuels
ou dits fautivement intellectuels. Oui, un fossé qui n' a pas lieu
d'être, car nous avons tous une tête et des mains. Et puis, comme
le disait justement Confucius, l'homme n'est pas un ustensile, ce qui
signifie que l'être humain n'est pas comme un objet, limité à
une fonction, qui serait de bouger les mains ou de bouger la tête.
Surtout, comme cela
est discuté au moins depuis Denis Diderot avec sa Lettre
sur les aveugles, nous pensons à partir de données
sensorielles, Oui, il n'y a pas la tête d'un côté et les mains de
l'autre. Les travaus d'intelligence artificielle ont amplement montré
que nos raisonnement se fondent sur un contexte, une culture, un
contexte concret. Sans tout ce qui nous vient des sens, nous ne
pouvons ni raisonner, ni comprendre, ni échanger, ni même agir !
Nos notions sont comparatives, et le rapport au monde concret, perçu
par les sens, est constant ! Je ne fvais pas en faire une
théorie qui a déjà été largement faite, mais je rappelle
simplement qu'il n'y a pas de pensée sans les « mains ».
De même, il y a pas d'individu manuel, dont les mains bougeraient
sans que la tête ne le fasse : que la tête nous aide ou nous
gène, elle est là, et les métiers manuels sont donc parfaitement
intellectuels. La tête intervient dans nos gestes puisqu'elle guide
la main… mais nos mains guident aussi notre tête : quand nous
prenons un verre entre les doigts, c'est la main qui dit à la tête
combien presser pour éviter que le verre ne glisse, insuffisamment
tenu, ou qu'il casse, trop pressé.
Et quand nous
pensons, nos images mentales ne sont que par référence à des
expériences, le monde ayant été « saisi » par les
sens, la « main ».
Bref il n'y a pas de
métier manuel ni de métier intellectuel : il y a seulement
des métiers exercés par des individus qui ont une tête et des
mains.
Chimie et compagnonnage
Tout cela étant
dit, je peux maintenant en arriver à la relation annoncée en titre
entre la chimie et le compagnonnage.
La chimie est une
activité technique, de production de molécules nouvelles. Il est
très nécessaire, d'être parfaitement habile de sa tête et de ses
mains, pour faire de la chimie sans danger, efficacement,
intelligemment. De ce point de vue, la chimie est un métier manuel.
Et intellectuel aussi… comme tous les métiers.
D'autre part, la
chimie transforme la matière, puisque précisément elles change la
nature des corps. Certains ont même dit que son objet est la
transformation de la matière. Elle transforme d'ailleurs bien plus
la matière que ne le fait le tailleur de pierres, que ne le fait le
cuisinier, que ne le fait le bourrelier, que ne le fait
l’électricien, tous métiers du compagnonnage.
Or le compagnonnage
accueille en son sein des métiers qui transforment la matière. Ne
serait-il donc pas parfaitement anormal que le compagnonnage
n'accepte pas la chimie ?
Et la recherche
scientifique ? J'ai largement expliqué, dans d'autre billets,
que les sciences chimiques ne se confondent pas avec la chimie,
puisque dans un cas, il y a des sciences, et dans l'autre de la
technique. Les sciences sont bien l’activité qui met des équations
sur des phénomènes, activité quasi mathématiques, donc. De sorte
que l'on pourrait penser que, cette fois, on est bien loin d'un
métier manuel. Erreur ! Les sciences de la nature ne sont pas
réductibles aux mathématiques (sans quoi on les nommerait
« mathématiques »), car elles partent des phénomènes,
qu'elles quantifient, par des travaux de laboratoire, techniques
donc, pour arriver à des théories (du calcul)… que l'on réfute
par d'autres travaux de laboratoire, à nouveaux techniques.
Autrement dit, les sciences de la nature ont une composante technique
essentielle, qui s'amalgame avec le calcul. Mais le travail de
laboratoire est fondamental, constitutif, indispensable. La
production de données se fait avec les mains, et des mains habiles !
Le physico-chimiste
Martin Karplus, qui a reçu le prix Nobel pour ses travaux de calcul
sur des données chimiques, ne cesse de répéter que les calculs
ainsi faits doivent être absolument validés expérimentalement, et
que sans les travaux expérimentaux, de laboratoire, ses calcul
risquent de n'être que de vaines élucubrations.
De sorte que le
sciences de la nature ont cette composante manuelle qui justifie
parfaitement qu'elles deviennent des métiers du compagnonnage.
Finalement,
j’exhorte mes amis compagnons à réviser leur position : je
les exhorte à élargir les spectre des métiers qu'ils accueillent,
à ne pas rester frileusement crispés sur des métiers techniques
particuliers qui les coupent d'amis qui seraient susceptibles de
contribuer à des rénovations techniques.
Ce n'est pas en
creusant des fossés entre les groupes humains, entre les humains,
que nous parviendront à plus d'harmonie, mais en sachant accueillir
nos amis avec gentillesse, bienveillance, ouverture d'esprit,
intelligence… c'est le croisement des regards qui nous donnera une
vision plus juste du monde et qui, par un bon retour des choses,
contribuera à embellir nos travaux, à faire grandir chacun.
Oui, que vite vienne
le temps où le compagnonnage saura s'ouvrir à des métiers
nouveaux !
mercredi 31 août 2016
Quel bonheur !
Ce matin, j'avais publié un billet où je disais :
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Vive la Connaissance produite et partagée !
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En effet, lors d'un repas important qui réunissait des centaines de chefs, lundi soir dernier, un très grand nombre de cuisiniers, jeunes ou moins jeunes, sont venus me donner le même message, en substance. J'étais heureux, car j'avais le sentiment que mon épouse ne devait pas avoir honte de son mari.
Puis, il y a eu en début d'après midi un ami qui m'a demandé pourquoi la République ne me décorait pas et pourquoi les associations de cuisinier ne me faisaient pas Membre d'honneur.
Je n'ai su que lui répondre, à part le remercier.
Mais la journée n'était pas finie... et voici ce que je reçois :
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Chers Amis
Depuis plusieurs mois, les messages amicaux se multiplient, et beaucoup me remercient d'aider les métiers de bouche.
Voici un exemple reçu hier matin :
Je
tiens une nouvelle fois à vous remercier pour ce que vous avez apporté à
notre métier et ce que vous m'avez apporté à titre personnel. Grâce à
vous, j'ai progressé et perfectionné ma technique de cuisine, j'ai
appris à comprendre les éléments et leur interaction. Aujourd'hui, je le retransmet à mes collaborateurs avec plaisir et passion.
Suite à vos conseils, je vais m'intéresser à la cuisine note à note et je ne manquerais pas de revenir vers vous.
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Je
suis évidemment très ému, très sensible à tous ces remerciements, que
je vois comme des encouragements à poursuivre cet effort inlassable
d'épaulement technique et de formation.
Je viens de prendre la décision d'intensifier ma production de billets de blog à usage technique.
Je vais réserver mes billets les plus moraux au blog "Hervé This", et
réactiver le blog "gastronomie moléculaire", ainsi que le blog technique
du Centre International de gastronomie moléculaire AgroParisTech-Inra
(avec des précautions : étant fonctionnaire, donc agent de l'état au
service du contribuable, je dois m'empêcher de publier, sur un site
institutionnel, des remarques personnelles déplacées sur un tel site ;
dans ce cas, je mets les billets sur mes blogs personnels).
Bref, j'ai commencé ce matin
avec un billet qui explique qu'il n'existe pas de gélatine végétale,
mais plutôt des gélifiants d'origine végétale. On trouvera la chose ici
: http://gastronomie-moleculaire.blogspot.fr/2016/08/il-nexiste-pas-de-gelatine-vegetale.html
Pour
autant, très exceptionnellement, je donne le billet en clair, pour vous
donner une idée de la chose, et, qui sait, l'envie de vous abonner au
blog où les informations techniques seront données quasi quotidiennement
(c'est public et gratuit, puisque les services de l'état sont au
service des citoyens qui financent ces services) :
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En effet, lors d'un repas important qui réunissait des centaines de chefs, lundi soir dernier, un très grand nombre de cuisiniers, jeunes ou moins jeunes, sont venus me donner le même message, en substance. J'étais heureux, car j'avais le sentiment que mon épouse ne devait pas avoir honte de son mari.
Puis, il y a eu en début d'après midi un ami qui m'a demandé pourquoi la République ne me décorait pas et pourquoi les associations de cuisinier ne me faisaient pas Membre d'honneur.
Je n'ai su que lui répondre, à part le remercier.
Mais la journée n'était pas finie... et voici ce que je reçois :
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Mon cher Hervé
Bravo
pour ce courrier d'un professionnel (je pense) qui te remercie de tous
tes efforts consacrés à la recherche culinaire et en particulier à une
cuisine du futur, la cuisine "note à note" la bien nommée.
J'en suis heureux pour toi mais les compliments sont minces par rapport à tout ce que tu fais pour notre profession
J'insiste
aussi et te remercie également pour remettre sur les rails certains
points sur les " i " concernant les nombreuses appellations
déformées par nos grands de ce Monde. sur les techniques culinaires.
C'est essentiel pour la formation de nos jeunes afin de les guider
"déjà" dans le bon sens et dans le vrai nom des produits. Le chemin sera
tellement plus facile pour eux.
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Merci beaucoup pour cette information et d'une façon plus générale pour le regard que vous me permettez de porter sur quelques uns de vos travaux.
J'apprécie !
Bonne soirée.
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Merci beaucoup pour cette information et d'une façon plus générale pour le regard que vous me permettez de porter sur quelques uns de vos travaux.
J'apprécie !
Bonne soirée.
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Ce n'est pas du bonheur à l'état pur ?
Pâte feuilletée directe ou inversée ? C'est si facile !
Pour les amateurs de cuisine, il y a des monstres sacrés, et la pâte feuilletée en est un. Je sais d'expérience, notamment par les séminaires de gastronomie moléculaire que nous tenons tous les mois, que beaucoup de mes amis s'effraient à la perspective de produire des pâtes feuilletées : ce serait long, ce serait difficile, ça raterait…
Long ? Si l'on veut faire dans les règles de l'art, il y a lieu d'y passer, montre en main, dix minutes au total, mais, dix minutes réparties sur quelques heures. De surcroît, la pâte feuilletée se congèle très bien, de sorte qu'il n'est pas nécessaire, même, de passer ces dix minutes chaque fois.
La pâte feuilletée inversée ? J'en ai même produit dans l'urgence, en mettant bien moins que dix minutes ! Bien sur, mes amis pâtissiers me feront reproche de vanter un travail mal fait, c'est-à-dire qui ne produit pas des feuilletages aussi soufflés qu'ils pourraient l’être. Il y aura des discussions interminables à propos des diverses phases de repos (éventuelles), mais, ce qui est amusant, c'est que j'ai rarement vu publiées des comparaisons des diverses pratiques ; j'entends beaucoup de baratin, mais où sont les résultats expérimentaux fiables ? Oui, il est probable (j'ai dit probable seulement) qu'une pâte feuilletée rapidement faite ne lèvera pas autant qu'une pâte feuilletée faite dans les règles de l'art (d'où sortent-elles, ces fameuses règles de l'art). Mais probable combien ? Le temps de repos est-il vraiment le paramètre essentiel ? Ou la température ? A ce jour, je ne connais pas de compte rendu d'expérience qui l'établisse, de sorte que je ne peux pas le garantir à mes amis.
Faisons donc rapidement, pour commencer, une pâte feuilletée classique, dite « directe et à six tours », ou, plus exactement, à trois fois deux tours simples. On va voir que cela n'est pas compliqué.
On commence par prendre de la farine, de l'eau, un peu de sel, et l'on fait une boule de pâte lisse. C'est donc un jeu d'enfant. Puis on prend du beurre (entre la moitié de la masse de farine, et une masse égale), que l'on malaxe afin qu'il soit bien mou, qu'il n'y ait pas ces sortes de morceaux durs qui, cela est certain pour le coup, nuiraient à la réalisation. On étale le pâton en un disque un peu épais, puis on étale le beurre en un disque plus petit, que l'on pose sur le pâton. On referme le pâton sur le beurre, afin de faire une enveloppe, et, là, certains préconisent un temps de repos au réfrigérateur ou au frais.
Vient alors le premier « tour » : à l'aide d'un rouleau, on étale la masse totale de sorte qu'elle en vienne à être trois fois plus longue que large, et on replie en trois. Puis on tourne l'ensemble d'un quart de tour, on étale à nouveau trois fois plus long que large, et l'on replie encore en trois. Là, encore une étape au frais est parfois conseillée. Il faut ainsi faire trois fois deux tours simples, et l'on a compris qu'un tour simple consiste à étendre trois fois plus long que large et à replier en trois.
Vient alors le moment d'abaisser la pâte, c'est-à-dire de l'étaler pour la mettre dans le moule, puis de la cuire, plutôt par la sole, c'est-à-dire par la base du four, pas trop chaud, afin que la cuisson soit un peu longue, car cette dernière est lente, même à 170 degrés (les pâtes insuffisamment cuites sont un peu indigestes, même si j'en connais qui les aiment). Le tour est joué : à la cuisson, la pâte va gonfler, et l'on aura ainsi produit une pâte feuillée.
Passons maintenant à la pâte feuilletée inversée, qui semble le summum de l'audace, de la difficulté. Pensons : inversée !
Ici, on part encore de deux masses, mais celles-ci sont produites de la façon suivante. Pour un « pâton farine », on prend trois parties de farine pour une partie de beurre. Quand on malaxe, le beurre se disperse dans la farine. D'autre part, pour un « pâton beurre », c'est l'inverse, à savoir que on prend trois parties de beurre pour une partie de farine, et, cette fois, c'est la farine qui vient se disperser dans le beurre. Je passe sur les étapes de repos au frais qui sont parfois conseillées, et j'en arrive à l'étape qui consiste à poser le pâton farine sur le pâton beurre, après les avoir chacun étalés en disques un peu épais. On replie encore en enveloppe, mais, cette fois, on fait deux tours doubles et un tour simple.
Un tour double, cela consiste à étendre en une forme quatre fois plus longue que large et à replier comme un portefeuille, c'est-à-dire d'abord les deux quarts extérieurs sur les deux quarts intérieurs, puis l'ensemble en deux. On cuit comme précédemment, et, selon mon expérience, on obtient souvent des feuilletages qui gonflent mieux que les feuilletages directs, mais je ne peux pas l'affirmer car je n'ai pas fait d'expériences sérieuses, quantitatives, validées… Ce n'est qu'une impression. En revanche, ce que je sais de façon certaine, c'est que le nombre de feuillets n'est pas le même dans les deux préparations, que l’épaisseur de ces feuillets n'est pas la même, et que le gonflement et la dégustation ont donc des raisons théoriques d'êtres différents.
En tout cas, on l'a vu : rien de tout cela n'est difficile, et j'engage tous mes amis à vaincre leur peur et à faire leurs propres feuilletages, à partir de bon beurre et de belle farine, et, surtout, avec cet ingrédient qui fait que nos hôtes apprécient notre cuisine : beaucoup de soin fondé sur beaucoup d'amour.
mardi 30 août 2016
A propos de l'administration de la recherche scientifique
Dans le livre Hommes de science (Marian Schmidt, Hermann, 1990), le physico-chimiste français Jean-Marie Lehn (prix Nobel de chimie en 1987) donne son idée du fonctionnement de la recherche :
"On peut déplorer que partout, et pas seulement en France, l'organisation de la recherche soit devenue très lourde, en raison de son coût. Il est malheureusement vrai que cette pesanteur administrative conduit souvent un chercheur à passer son temps à d'autres choses qu'à son travail scientifique : on ne peut pas y échapper. Ce serait de l'utopie, par exemple, de dire : "On peut faire de la chimie actuellement sans s'occuper d'obtenir le financement permettant d'acheter les produits et les appareils dont on a besoin".
L'administration de la science est inévitable, mais elle pourrait être réduite. Une plus grande légèreté de l'organisation et une plus grande initiative rendue aux scientifiques, et non à ceux qui administrent la science, sont nécessaires pour un meilleur fonctionnement de la recherche. Malheureusement, on a souvent l'impression que l'administration de la science est devenue sa propre justification, oubliant en fait qu'elle existe seulement parce que la science existe, et non l'inverse. [...] Il y a aussi les réunions trop nombreuses de comités, commissions, conseils, etc., où l'on oublie que discourir n'est pas découvrir. Je n'aime pas y aller, et j'ai acquis une assez mauvaise réputation de ce côté ! Cela ne veut pas dire que je sous-estime le rôle de l'administration et de la gestion, mais il faut les alléger au maximum pour permettre au chercheur de passer plus de temps dans son laboratoire ou sa bibliothèque. Par ailleurs, à certains qui se plaignent d'avoir à consacrer trop de temps aux tâches administratives, on pourrait objecter que, souvent, cela ne tient qu'à eux: il pourrait bien s'agir d'un prétexte pour échapper au labeur, à la discipline, aux incertitudes du laboratoire ou de la table de travail".
A méditer, n'est-ce pas ?
"On peut déplorer que partout, et pas seulement en France, l'organisation de la recherche soit devenue très lourde, en raison de son coût. Il est malheureusement vrai que cette pesanteur administrative conduit souvent un chercheur à passer son temps à d'autres choses qu'à son travail scientifique : on ne peut pas y échapper. Ce serait de l'utopie, par exemple, de dire : "On peut faire de la chimie actuellement sans s'occuper d'obtenir le financement permettant d'acheter les produits et les appareils dont on a besoin".
L'administration de la science est inévitable, mais elle pourrait être réduite. Une plus grande légèreté de l'organisation et une plus grande initiative rendue aux scientifiques, et non à ceux qui administrent la science, sont nécessaires pour un meilleur fonctionnement de la recherche. Malheureusement, on a souvent l'impression que l'administration de la science est devenue sa propre justification, oubliant en fait qu'elle existe seulement parce que la science existe, et non l'inverse. [...] Il y a aussi les réunions trop nombreuses de comités, commissions, conseils, etc., où l'on oublie que discourir n'est pas découvrir. Je n'aime pas y aller, et j'ai acquis une assez mauvaise réputation de ce côté ! Cela ne veut pas dire que je sous-estime le rôle de l'administration et de la gestion, mais il faut les alléger au maximum pour permettre au chercheur de passer plus de temps dans son laboratoire ou sa bibliothèque. Par ailleurs, à certains qui se plaignent d'avoir à consacrer trop de temps aux tâches administratives, on pourrait objecter que, souvent, cela ne tient qu'à eux: il pourrait bien s'agir d'un prétexte pour échapper au labeur, à la discipline, aux incertitudes du laboratoire ou de la table de travail".
A méditer, n'est-ce pas ?
lundi 29 août 2016
Une vision de la recherche
Dans le livre Hommes de science (Marian Schmidt, Hermann, 1990), le physico-chimiste français Jean-Marie Lehn (prix Nobel de chimie en 1987) donne son idée de la recherche scientifique :
"L'important est de poser des concepts et de résoudre des problèmes, et non d'étudier un sujet : la méthode n'est pas la même. Les études approfondies, minutieuses, sont nécessaires, mais il faut essayer d'éviter de se laisser enfermer dans la spécificité d'un sujet. Par ailleurs, quand il s'agit de résoudre un problème, tous les moyens sont bons : il convient donc d'utiliser une approche beaucoup moins stricte, d'autant plus que si certains problèmes n'ont qu'une seule solution, il y en a aussi beaucoup qui peuvent être abordés par des voies différentes. Il s'agit de garder l'esprit extrêmement ouvert. Le plus important est de ne pas se spécialiser dans ce que l'on sait, ou ce que l'on envisage de faire, de n'avoir pas peur d'entrer dans un autre domaine, même - et surtout !- si l'on n'y connaît rien et s'il faut tout réapprendre. [...] La découverte ou l'invention peuvent être le fruit du hasard ou d'un cheminement rigoureux, mais l'esprit y est d'autant mieux préparé qu'il est plus ouvert, plus disposé à aborder la nouveauté et l'inconnu, plus accessible à une nouvelle vision du problème."
"L'important est de poser des concepts et de résoudre des problèmes, et non d'étudier un sujet : la méthode n'est pas la même. Les études approfondies, minutieuses, sont nécessaires, mais il faut essayer d'éviter de se laisser enfermer dans la spécificité d'un sujet. Par ailleurs, quand il s'agit de résoudre un problème, tous les moyens sont bons : il convient donc d'utiliser une approche beaucoup moins stricte, d'autant plus que si certains problèmes n'ont qu'une seule solution, il y en a aussi beaucoup qui peuvent être abordés par des voies différentes. Il s'agit de garder l'esprit extrêmement ouvert. Le plus important est de ne pas se spécialiser dans ce que l'on sait, ou ce que l'on envisage de faire, de n'avoir pas peur d'entrer dans un autre domaine, même - et surtout !- si l'on n'y connaît rien et s'il faut tout réapprendre. [...] La découverte ou l'invention peuvent être le fruit du hasard ou d'un cheminement rigoureux, mais l'esprit y est d'autant mieux préparé qu'il est plus ouvert, plus disposé à aborder la nouveauté et l'inconnu, plus accessible à une nouvelle vision du problème."
dimanche 28 août 2016
Regarder avec les yeux de l'esprit
Dans les phrases écrites sur les murs de notre laboratoire, il y a celle-ci : "regarder avec les yeux de l'esprit".
Regarder avec les yeux de l'esprit ? Regarder, c'est généralement avec les yeux. Il y a d'ailleurs lieu de distinguer regarder et voir, mais quand même, il s'agit d'un acte qui, normalement, conduit à percevoir à l'aide des yeux. Autrement dit, regarder avec les yeux de l'esprit doit être interrogé. Et puis, l'esprit n'a pas d'yeux, puisque les y
eux sont ces globes que nous avons sur l'avant visage. Mais la proposition invite à y penser mieux et, surtout, elle invite à utiliser notre esprit comme nous utilisons nos yeux. Il faut braquer notre intellect sur des objets et la comparaison a l'intérêt que l'on peut imaginer un faisceau lumineux soit focalisé soit diffus. il y a les yeux, il y a également la lumière.
La métaphore est intéressante, parce qu'elle permet d'y penser un peu plus.
Regarder avec les yeux de l'esprit ? Regarder, c'est généralement avec les yeux. Il y a d'ailleurs lieu de distinguer regarder et voir, mais quand même, il s'agit d'un acte qui, normalement, conduit à percevoir à l'aide des yeux. Autrement dit, regarder avec les yeux de l'esprit doit être interrogé. Et puis, l'esprit n'a pas d'yeux, puisque les y
eux sont ces globes que nous avons sur l'avant visage. Mais la proposition invite à y penser mieux et, surtout, elle invite à utiliser notre esprit comme nous utilisons nos yeux. Il faut braquer notre intellect sur des objets et la comparaison a l'intérêt que l'on peut imaginer un faisceau lumineux soit focalisé soit diffus. il y a les yeux, il y a également la lumière.
La métaphore est intéressante, parce qu'elle permet d'y penser un peu plus.
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