Je viens de comprendre comment mieux expliquer le phénomène de la distillation.
Partons de vodka : cette "matière" est faite de molécules qui sont -en première approximation- soit des molécules d'eau, soit des molécules d'un alcool que l'on nomme éthanol ; il y a aussi des molécules de quelques autres composés, mais extrêmement minoritaires.
Pour de la vodka, il y a environ 4 molécules d'éthanol pour 9 molécules d'eau.
Quand on chauffe la vodka, la température augmente : partant de 20 degrés, le liquide est à 21, 22, 23..., 30, 40, etc. ...mais quand on approche de 80 degrés, alors la température cesse d'augmenter tandis que des bulles apparaissent.
Ces bulles laissent échapper une vapeur, que l'on peut enflammer si l'on y met une allumette : ce sont les molécules d'éthanol qui quittent la vodka et passent donc en phase vapeur.
Quand la flamme s'éteint, c'est qu'il n'y a quasiment plus d'éthanol présent dans le liquide et l'on voit alors la température augmenter à nouveau jusqu'à atteindre 100 degrés, température qui se stabilise tant qu'il reste du liquide puisque c'est la température d'ébullition de l'eau.
Il y a donc deux étapes : d'abord l'évaporation de l'éthanol, et, ensuite, l'évaporation de l'eau.
Si l'on avait récupéré les vapeurs d'éthanol au lieu de les enflammer, dans la première étape, et si on les avait refroidies, alors on aurait récupéré de l'éthanol liquide : c'est cela la distillation à ceci près que l'on ne cherche pas avoir l'éthanol pur, mais simplement une concentration du liquide initial en éthanol, que l'on parte du vin, de la bière, du cidre, et cetera ou de tout autre liquide contenant un peu d'éthanol.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
jeudi 15 décembre 2022
La distillation mieux expliquée que par le passé (j'espère)
mardi 6 décembre 2022
La distillation, c'est une séparation physique, pas de réaction chimique
Au premier ordre, la distillation est une opération de physique et pas de chimie.
J'ai expliqué que les matières alimentaires étaient le plus souvent fait de molécules, très petits objets de différentes sortes : molécule d'eau dans l'eau, molécule de triglycérides dans les huiles, molécules de saccharose dans les cristaux de sucre....
La chimie est cette science qui explore les transformations des molécules.
Par exemple, quand on chauffe énergiquement du sucre, alors il se transforme comme chacun sait quand on fait du caramel : on part de cristaux transparents, et l'on obtient une matière brune, avec une saveur moins sucrée, un peu amère, et une belle odeur de caramel.
Lors de cette transformation qu'est la caramélisation, les objets tous identiques qui étaient les molécules de saccharose du sucre sont cassés, et certains morceaux se ré-associent de sorte que finalement on obtient des molécules différentes de celles du saccharose initial.
Il n'y a pas de "molécule de caramel" au sens d'une seule sorte de molécules, mais des molécules de tas de sortes différentes avec des noms qui n'ont pas d'intérêt ici.
Dans d'autres cas, il n'y a pas de réorganisation des molécules (brisure, morceaux qui se lient, etc.), mais simplement une séparation.
C'est le cas de la distillation.
Partons par exemple de vodka, qui est faite de 60 pour cent d'eau et de 40 pour cent (en volume, mais c'est un détail) d'un alcool que l'on nomme éthanol : avec un super microscope ,on verrait environ 6 molécules d'eau pour 4 molécules d'éthanol.
Et tout cela grouille en tous les sens, car la vodka est liquide à la température ambiante.
Si l'on chauffe cette vodka, alors les molécules d'éthanol partent les premières du liquide, formant une vapeur (invisible) qui s'élève au-dessus du récipient qui contient la vodka chauffée.
Cette vapeur, à ce stade, est faite quasi exclusivement de molécules d'éthanol. Et, à ce stade, la température, du liquide, comme celle de la vapeur, est alors d'un peu moins de 80 degrés.
Mais quand toutes les molécules d'éthanol sont parties sous la forme de vapeur, il ne reste presque que des molécules d'eau dans le liquide.
Si l'on chauffe alors d'avantage, alors la vapeur qui s'échappera sera constituée de molécules d'eau.
La vodka, c'est donc un mélange de deux sortes de molécules : des molécules d'eau, et des molécules d'éthanol.
Et la distillation consiste à chauffer pour évaporer, puis refroidir les vapeur pour qu'elles se "recondensent", qu'elles forment un liquide.
Et c'est ainsi que le liquide obtenu d'abord, c'est de l'éthanol bien plus concentré, tandis que l'eau reste dans le liquide.
La distillation, qui ne casse pas les molécules, n'est pas une transformation moléculaire, ce n'est pas de la chimie, mais de la physique, comme ces opérations que la filtration, le broyage, la décantation...
vendredi 29 octobre 2021
Distiller ?
Comment peut-on distiller quand on ne connaît pas la différence entre l'éthanol et le méthanol ?
Récemment, je m'étais étonné que des artisans distillateurs d'eau-de-vie ne connaissent pas la différence entre le méthanol et l'éthanol.
Le méthanol est le premier des alcools, le plus petit, avec une molécule composée d'un atome de carbone, de trois atomes d'hydrogène et d'un atome d'oxygène. Ce composé rend fou et aveugle.
D'autre part, l'éthanol, qui est le principal alcool du vin, de la bière, du cidre, etc., est le deuxième composé de la série des alcools, avec cette fois une molécule faite de deux atomes de carbone, six atomes d'hydrogène et un atome d'oxygène. L'éthanol est un poison, comme chacun sait, mais en petite quantité, il modifie les perceptions "agréablement".
Méthanol et éthanol sont deux composés bien différent. Ils sont présents en différentes quantités dans les solutions qui ont résulté d'une fermentation alcoolique, et il est important de les séparer lors de la distillation.
Partons d'une telle solution, qui est faite, dans l'ordre, d'eau, d'éthanol, mais aussi de méthanol et de divers composés odorants. Quand on augmente la température, vient un moment où le méthanol se met à bouillir, ce qui signifie qu'il s'élimine rapidement, tandis que l'éthanol et l'eau restent dans la solution.
Puis, quand la température augmente encore, vient un moment où c'est l'éthanol qui bout, de sorte que, si l'on refroidit les vapeurs formées à ce moment, on récupère l'éthanol liquide. Et, enfin, quand la température augmente encore, c'est l'eau qui passe.
Note importante pour les collègues : merci de ne pas me faire l'injure de penser que je ne sais pas que cette description est carricaturale, un peu fausse !
La distillation bien conduite consiste donc à éliminer ce qui part en premier (le méthanol, notamment), et ce qui passe en dernier (l'eau). On a vu que je n'ai pas considéré tous les autres composés présents, notamment les composés odorants, parce que s'impose d'abord la séparation précédente. Le reste suit comme il peut.
Et je reviens maintenant à mon opération de distillation en disant que les bons distillateurs enlèvent les premières fractions distillée, pour ne laisser passer que l'éthanol et un cortège de composés odorants, puis qu'ils arrêtent la distillation quand arrive l'eau... sans quoi on retrouverait le liquide initial, qui ne serait pas concentré en éthanol, comme on le souhaite.
J'arrive maintenant à la question que je posais initialement : est-il possible de distiller sans savoir tout cela ?
La réponse est évidemment oui. Parce que c'est ce qu'on l'on fait depuis toujours dans les campagnes : on distille depuis des siècles, et pour des raisons empiriques que je ne comprends pas, on a appris que des fractions de tête devaient être éliminées, ce qui tombe bien car elles contiennent ce méthanol qui rend fou et aveugle !
Oui, on peut distiller sans connaître l'existence du méthanol, tout comme on peut conduire une voiture sans savoir qu'il y a une bielle ou un rupteur. Il y a à considérer la différence entre un mécanicien et un conducteur de voiture. Le conducteur de voiture ne sais pas comment marche le moteur mais il peut éventuellement très bien conduire la voiture, mieux même qu'un mécanicien. Le mécanicien, lui, peut très bien ne pas savoir conduire la voiture, mais il sait parfaitement comment elle fonctionne.
Evidemment on s'en sort encore mieux quand on a les deux compétences et je ne peux pas imaginer qu'un bon distillateur ne ferait pas encore mieux s'il connaissait la différence entre le méthanol et l'éthanol.
Car, après tout, il en va de la santé des consommateurs d'eau-de-vie, ce qui n'est pas rien !
lundi 6 juillet 2020
À propos de distillation : prenons garde aux premières fractions
Certains de mes amis qui distillent ont appris des anciens à ne pas conserver le liquide qui se condense immédiatement après le début de l'opération : on leur a dit que cette fraction contenait des composés toxiques, et, bien que cela apparaisse comme une "perte", ils ont à coeur de bien faire. Certains jettent un verre de liquide, et d'autres, qui veulent faire mieux, jettent jusqu'à un demi litre (d'accord, cela dépend de l'installation, mais je donne une indication pour fixer les idées).
Pour autant, je sais que beaucoup font cela parce qu'ils reproduisent des pratiques qu'on leur a montrées, et pas parce qu'ils comprennent le mécanisme de la chose. Or je crois que rien ne vaut une bonne explication, en plus de la démonstration de l'opération.
Commençons donc par un marc, c'est-à-dire le résidu d'une fermentation de raisin pressé. Il y a une partie solide, et il y a une partie liquide, et, dans tout cela, il y a des composés odorants, des composés sapides, des composés frais ou piquants que l'on veut récupérer... avec l'alcool : le but de l'opération, c'est de passer de 10 pour cent en volume d'alcool à 40 à 50 pour cent, en évaporant du liquide sans évaporer de l'eau.
Il faut immédiatement ajouter que l' "alcool" dont on parle ainsi est l'alcool éthylique, ou éthanol. On le nommait jamais "esprit de vin". On sait qu'il est toxique, mais on aime le boire parce qu'il engendre une sensation de bien être... quand c'est avec modération, en plus d'un goût remarquable.
A ne pas confondre avec un autre composés de la même famille des alcools, le méthanol (notons le m en début de mot), ou alcool méthylique, ou encore esprit de bois. Dans les jus fermentés, l'alcool éthylique (l'éthanol) est majoritaire, et il y a du méthanol en moindre quantité.
J'insiste un peu : l'éthanol est un composé merveilleux (avec modération toutefois), parce qu'il donne du peps à des breuvage. Il provoque un sentiment d'euphorie, à petite dose, la seule à laquelle un vrai gourmand le consomme.
En revanche, le méthanol est vraiment terrible, et l'on n'insistera pas assez sur la différence entre l'éthanol et le méthanol même s'il n'y a qu'une lettre de différence pour la dénomination chimique.
Mais je m'arrête un peu à cette question de dénomination maintenant. Le premier alcool de la famille des alcools, c'est le méthanol, dont les molécules ne contiennent qu'un seul atome de carbone.
Ce méthanol, ou alcool méthylique, est aussi nommé esprit de bois, comme signalé précédemment, car on l'obtient notamment par la pyrolyse du bois : si on chauffe du bois à sec, se dégage du méthanol, et c'est ainsi qu'on l'a produit pendant longtemps.
Le méthanol, répétons-le, est toxique, et l'on doit absolument l'éviter dans les eaux-de-vie, blanches notamment, sous peine d'empoisonner ceux à qui on offre le breuvage. Il engendre, quand une dose commence à être un peu notable, une crispation des mâchoires, puis, à plus haute dose, il a des effets terribles.
Dans la famille chimique des alcools, après le méthanol, il y a donc l'éthanol, ou alcool éthylique, qui, lui a 2 atomes de carbone dans sa molécule. C'est celui-là que l'on veut récupérer quand on distille : dans un vin, il y en a dix pour cent en volume environ, et la distillation cherche à porter cette proportion à 40 ou 50 pour cent, ce que l'on nomme des degrés.
Mais, dans la famille des alcools, méthanol, puis éthanol, ne sont pas seuls : il y a aussi le propanol ou alcool propylique ; le butanol ou alcool butylique ; pentanol, ou alcool pentylique ; et ainsi de suite avec trois, quatre, cinq, six, sept, huit, etc. atomes de carbone dans la molécule. Je fais simple, parce qu'il y a des complications : je veux seulement dire que la famille des alcools est immense.
Le distillateur empirique, "traditionnel", se contente, pour un appareil donné, d'éliminer une certaine quantité du produit qui est distillé en début d'opération : un verre, un demi litre... Et effectivement, le méthanol bout à une température de 65 degrés, alors que l'éthanol, lui, bout à la température de 79 degrés.
Bref, si l'on conduit doucement la distillation, c'est bien le méthanol qui part en premier, puis ensuite l'éthanol, et enfin l'eau vers 100 °C.
Ce que je dis là n'est pas parfaitement juste, comme on s'en doute quand on sait que le diable est caché dans les détails, mais c'est une idée qu'il faut certainement avoir pour commencer.
Une conclusion merveilleuse : si l'on introduit un thermomètre dans le système, on verra d'abord la température augmenter, puis se stabiliser un peu tant que du méthanol passe dans les vapeurs, et c'est ensuite que la température réaugmentera pour atteindre un nouveau palier, pendant lequel l'éthanol distille... avant que la température n'augmente à nouveau, jusqu'à atteindre les 100 degrés auxquels l'eau s'évapore.
Autrement dit, l'usage du thermomètre qui facilite considérablement la conduite des opérations.
Je termine sur cette observation essentielle, qui est à la base de la distillation fractionnée : généralement, les composés s'évaporent à une température d'ébullition fixe, et tant que le composé présent, alors la température d'ébullition change ne change guère.
Il y a donc mieux que la technique empirique, à condition de comprendre ce que l'on fait. Et c'est là un des apports (anciens) de la chimie. Le fait que ce que j'expose plus haut ne soit pas connu de tous doit nous faire réfléchir aux études que la nation organise pour les citoyens.
vendredi 12 juin 2020
A propos de distillations
1. À propos de changement d'état, nous avons considéré l'évaporation mais nous ne sommes pas encore revenus à la liquéfaction d'un gaz.
Je le prends d'abord du point de vue de l'équilibre la système, puis dans une exception un peu différente.
2. Considérons d'abord un récipient en verre, empli à moitié d'eau (et le reste de l'air) que nos chauffons.
3. Progressivement, de l'eau qui s'évapore entraîne l'air vers le haut, de sorte que le récipient sera bientôt pour partie plein d'eau et pour partie plein de vapeur d'eau.
4. Quand nous fermons le récipient, puis que nous cessons de chauffer, les molécules d'eau (il n'y a plus que cela dans le récipient fermé) se répartissent donc entre la phase liquide et la phase gazeuse.
Oui, dans le récipient, ce qui n'est pas de l'eau liquide est de la vapeur d'eau, et d'ailleurs sous une pression réduite, puisque, après avoir fermé le récipient, la vapeur s'est en partie recondensée en eau liquide, ce dont on pourra s'assurer en essayant de retirer le bouchon... et l'on n'y arrivera pas, car si l'on se souvient de l'expérience des sphères de Magdebourg, on saura qu'il faut deux attelages de chevaux puissants pour y parvenir. Voir par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=mrXxHBi0F8U.
Pour ceux qui veulent le calculer, il y a la pression atmosphérique à vaincre, et à appliquer la relation entre la force et la surface. Ici, les chevaux doivent lutter contre la pression atmosphérique, dont on sait qu'elle est égale à 100 000 pascals.
5. La raison du "vide" fait dans notre ballon, c'est que l'eau liquide prend environ mille fois moins de place que la vapeur : quand on refroidit, après avoir bouché, tout le volume de vapeur se réduit ensuite à un millière de lui-même. Du vide est donc créé.
Ou, plus exactement, s'installe alors, à la pression qui est celle du récipient clos, un équilibre, entre le liquide et la vapeur : des molécules s'évaporent, et d'autres viennent se condenser.
6. Proches de ces liquéfactions ou évaporations, parce qu'elles y interviennent, il y a a diverses méthodes de distillation : simple, fractionnée, sous vide, par entraînement à la vapeur d'eau... Mais je propose d'en rester à l'expérience la plus simple, qui consiste à us surmonter ballon en verre d'une colonne, laquelle conduit à un réfrigérant. Le liquide s'évapore, monte dans la colonne, arrive dans le réfrigérant, et retombe à côté : évaporation, puis liquéfaction.
7. Avec de l'eau salée, par exemple, on peut ainsi récupérer de l'eau parfaitement pure, car le sel ne s'évapore pas... Raison pour laquelle il est inutile de saler l'eau dans un cuit-tout à la vapeur.
8. Mais avec un mélange d'eau et d'éthanol (l'"alcool"), alors l'éthanol s'évapore dès 76 °C, et c'est lui qui part le premier, pour aller se condenser, formant un distillat plus concentré en alcool.
Dans ce cas, le distillat contient encore un peu d'eau, puisque l'éthanol qui a été évaporé a entraîné l'eau qui était en phase vapeur (on se souvient de la première expérience qu'il y en a toujours).
9. Bref, bien difficile de faire de l'alcool absolu, parfaitement pur. Et, en pratique, on le fait en éliminant l'eau à l'aide de métaux (tel le sodium) que l'on met dans l'alcool absolu.
10. Avec un mélange de plusieurs composés, la distillation fait un fractionnement : on part d'un mélange, et l'on obtient des "fractions". C'est d'ailleurs ce que nous avons déjà évoqué à propos de sel et de sucre : leur cristallisation conduit à la formation de cristaux "purs", par "cristallisation fractionnée".
11. Et d'ailleurs, c'est le lieu de signaler que l'on peut aussi fractionner un mélange d'eau et d'éthanol en le refroidissant à des températures où l'eau congère : si l'on enlève le glaçon formé, il reste de l'éthanol concentré. C'est ce que font certains Canadiens... avec un résultat différent de la distillation dans du cuivre, où le métal réagit avec certains composés. Mais évidemment, on pourra aussi chauffer le mélange dans du cuivre, avant de le congeler... sans oublier que la loi interdit de faire ses petites distillations afin de produire de l'alcool.
lundi 11 novembre 2019
Je vous présente l'éthanol
L'expérience fondatrice, pour ce qui concerne l'éthanol, c'est la distillation, et, mieux, la distillation d'une solution sucrée qui aurait fermenté. Mais il y a pour l'instant trop de syllabes pour que ce soit compréhensible, et le recours à l'expérience, réelle ou décrite, s'impose.
Commençons donc par prendre de l'eau, et dissolvons-y du sucre.
Regardons au microscope : nous ne voyons rien, le sucre étant dissous, et la solution formée étant transparente.
Puis ajoutons un peu de levure, ce que l'on achète chez le boulanger sous forme d'une espèce de pâte très friable. On agite un peu pour disperser la pâte dans la solution sucrée... et cette fois, si l'on regarde au microscope, on voit de petites formes rondes, qui flottent dans l'eau. Si nous sommes patients, nous les voyons libérer des bulles de gaz, grossir et se diviser en deux. En effet, les levures sont des organismes vivants, unicellulaires puisque réduit à une sorte de sac vivant. Laissons-les s'activer un moment, en protégeant le récipient des courants d'air ; puis, à titre expérimental, posons une allumette enflammée juste au-dessus du liquide : l'allumette s'éteint, alors qu'elle resterait allumée si on la mettait au-dessus d'une solution d'eau et de sucre. C'est l'indication que le gaz formé par les levure me permet pas la combustion et, de fait, ce gaz est du dioxyde de carbone.
Si nous goûtons la solution, nous constatons qu'elle est alcoolisés. Filtrons pour éliminer les levures... et nous récupérons une solution parfaitement transparente au microscope : les molécules qui donnent ce goût alcoolisé, comme les molécules qui donnaient la saveur sucrée, sont bien trop petites pour être visibles avec un microscope.
Faisons donc différemment : distillons.
En pratique, c'est tout simple, puisqu'il suffit de chauffer et de conduire ensuite les vapeurs dans un système qui les refroidit, les recondense en un liquide. Si nous laissons refroidir ce liquide distillé et que nous le goûtons, nous n'avons plus aucune saveur sucrée, mais, en revanche, il y a un goût brûlant, alcoolisé, comme pour une vodka très forte.
Cette fois, la solution est quasi exclusivement composée de molécules d'eau et de molécules d'éthanol, de l' "alcool" qui a été formé par la fermentation du sucre par les levures.
Distillons à nouveau le distillat, et sa teneur en alcool augment. Bien sûr, il reste un peu d'eau, mais qu'importe : le produit que nous avons obtenu, c'est ce qui fut nommé de l'alcool.
Pourquoi avons-nous évoqué l'éthanol, et parler maintenant d'alcool ? Parce que d'autres procédé conduisent à des composés très voisins de celui que nous venons de préparer. Par exemple, quand on chauffe du bois à sec, on obtient un autre alcool qui a pour nom méthanol, ce que l'on nommait naguère esprit de bois, alors que l'alcool obtenu par fermentation était nommé esprit de vin.
Quand la chimie progressa et qu'elle découvrit l'existence des atomes et des molécules, vers la fin du 19e siècle, les chimistes arrivèrent progressivement à comprendre que l'eau est faite de molécules d'eau, des objets résultant de l'assemblage d'un atome d'oxygène et de deux atomes d'hydrogène. Ils comprirent aussi que les molécule d'éthanol était faites d'un premier atome de carbone liés à trois atomes d'hydrogène et lié à un autre atome de carbone, qui est lui-même lié à deux atomes d'hydrogène et a un atome d'oxygène lié un atome d'hydrogène. Le méthanol, lui, est d'un seul atome de carbone lié à trois atomes d'hydrogène et à un atome d'oxygène lié à un atome d'hydrogène. Progressivement, les chimistes comprirent que la liaison d'un atome de carbone à un atome d'oxygène lié à un atome d'hydrogène donnait des propriétés chimiques particulières, et les composés ayant ces propriétés (et cette constitution chimique) furent nommés "alcools".
Mais pour revenir à nos vins ou eaux-de-vie, ce sont des solutions aqueuses qui contiennent des teneurs différentes en cet alcool particulier qu'est l'éthanol : il y en a un peu plus de 10 pour cent dans les vins, et environ 40 à 50 pour cent dans les eaux-de-vie (je donne des ordres de grandeur). A noter que l'on dose de l'éthanol dans les fruits ou légumes... mais en très petite quantité.
mercredi 26 novembre 2014
Une merveilleuse idée
C'était en 1969 : pour la fête des mères, je voulais préparer une essence de violette, et j'avais en prévision un entraînement à la vapeur d'eau. Mais, à l'époque, je n'avais qu'une cornue à l'ancienne, en verre, une lampe à alcool, un trépied muni d'une grille de fer.
Je m'étais procuré des violettes, et il fallait donc me lancer. Ce fut facile de mettre les violettes dans l'eau et de chauffer... mais rapidement, ce fut de la vapeur qui sortit de la cornue ! Comment recondenser ? Un torchon imbibé d'eau froide sur le col de la cornue ne suffisait pas, et tout était brûlant. Je changeais le torchon humide, et encore, et encore !
Finalement, je produisis une "eau de violette" peu convaincante, mais je m'étais donné du mal !
J'aurais dû visiter plus tôt la maison de Louis Pasteur à Arbois, parce que s'y trouve la solution à mon problème : sur une table, un ballon et sa colonne à reflux, quand même bien plus efficace que la cornue ; surtout, à côté, un escabeau, avec un seau d'eau froide placé en hauteur, et dont l'eau s'écoule par gravité dans la colonne à reflux, avant de couler dans un autre seau, par terre. Quand le seau du bas est plein, on le reverse dans le seau du haut, et, de la sorte, on évite d'avoir de l'eau courage... et l'on évite aussi la consommation d'eau.
Aujourd'hui, je fais de même : sur une batterie de colonnes à reflux en série, c'est la même eau qui circule, poussée par une pompe. Et l'eau chaude repart dans un gros récipient, dont l'inertie évite l'échauffement.