Pourquoi faut-il démarrer la cuisson des pommes de terre à l'eau froide et celle des pâtes à l'eau chaude ?
La principale différence entre des pommes de terre et des pâtes, c'est la structure : l'organisation cellulaire des pommes de terre, comme des autres tissus végétaux, est absente des pâtes.
Examinons-le en partant d'un tubercule de pomme de terre : c'est un agrégat de petits sacs vivants, nommés cellules, emplis d'eau, de grains d'amidon, et de tout ce qu'il faut pour les faire vivre.
Dans les tissus végétaux, les cellules sont cimentées par ce que l'on nomme la paroi cellulaire, faite de molécules de pectine, de molécules de cellulose et de molécules d'hémicellulose.
Pour comprendre la cuisson des pommes de terre, commençons par examiner celle d'une carotte, qui a la même structure sauf qu'elle est dépourvue des grains d'amidon.
Cuire la carotte, cela signifie l'amollir, puisqu'elle est dure.
Et on l'amollit par la cuisson, qui affaiblit la paroi cellulaire, le ciment entre les cellules.
Et pour cela, rien ne vaut une température élevée, tel 100 degrés.
Toutefois, le résultat de l'expérience suivante est éclairant : si on chauffe une carotte à température très modérée (par exemple 40 °C), alors des enzymes (des protéines) de la carotte sont activées, et l'on favorise les échanges ion calcium naturellement présents dans le tissu végétal. Cela conduit à un renforcement du ciment intercellulaire, au point que des carottes qui ont été ainsi chauffées à environ 40 degrés pendant plusieurs dizaines de minutes, deviennent ensuite quasi impossibles à cuire.
C'est le même phénomène que celui qui consiste à verser du vinaigre chaud sur des cornichons : ces derniers sont alors raffermis et ils ne se défont pas lors d'un stockage prolongé dans le vinaigre.
Autrement dit, pour bien abolir un tissu végétal, il vaut mieux le démarrer à chaud afin de ne pas opérer ce raffermissement.
Mais alors pourquoi ne pas déparer à chaud également les pommes de terre ?
Parce que dans ce cas précis, le raffermissement n'a pas lieu comme dans la carotte et, surtout, on donne du temps pour que l'augmentation de température à l'intérieur du tubercule permettent aux grains d'amidon de s'empeser : progressivement, ils se gorgent d'eau et, au lieu d'être des petits grains très durs, ils deviennent des grains gélifiés très mou.
On notera que quand on écrase une pomme de terre cuite, on ne détruit pas les cellules mais on les sépare seulement les unes des autres, et l'on obtient ainsi des petits sacs plein d'une sorte de sauce blanche ou bien des agrégats de quelques petits sacs ainsi constitués.
Pour les pâtes, le problème est bien différent.
Oui, le problème est différent parce qu'il n'y a pas de cellules ; les pâtes sont faites seulement de grains d'amidon assez mal tenus par un réseau de protéines, que celles-ci viennent du gluten du blé (gluténines ou gliadines) ou bien qu'elles proviennent d'œuf qui aurait été ajouté à la pâte.
En tout cas, pensons alors à une sorte de filet dans lequel les grains d'amidon sont enchâssés : si l'on cuisait à l'eau froide, on donnerait beaucoup plus de temps pour que les grains d'amidon puissent fuir du réseau, laissant de surcroît sortir beaucoup de leur matière dans l'eau.
Il s'agit donc d'être aussi rapide que possible, pour à la fois constituer le réseau, par exemple s'il y a des protéines de l'œuf qui coagulent et empeser les grains d'amidon en les laissant aussi intègres que possible : le chauffage à l'eau bouillante s'impose.
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jeudi 18 décembre 2025
Pourquoi faut-il démarrer la cuisson des pommes de terre à l'eau froide et celle des pâtes à l'eau chaude ?
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