samedi 15 août 2015

L'homéopathie efficace chez les animaux ? Apparemment pas !

La discussion a propos de l'homéopathie  suscite souvent la réponse, par les partisans de cette méthode, que l'homéopathie serait efficace chez les animaux... mais est-ce vrai ?
Dans le numéro 313 de Science  & Pseudo-sciences,  Jacques Bolard rapporte les résultats d'une méta analyse  récente : la plupart des études qui ont été faites étaient mauvaises, et les deux qui restent  ne montrent pas d'effet.
Bref, cessons d'accepter l'argument d'une efficacité sur les animaux, car il n'est pas fondé.

Récompense

L'enseignement conduit à des rencontres. Parfois on est récompensé par une impression que l'on a fait  durablement.
Ce matin, reçu une carte postale d'un étudiant parti dans le vaste monde, qui m'écrit :

"I wish you many oments of joy and sharing your passion"

Cela figure sur  une carte postale où est imprimé :


Jacques Brel : « Le seul fait de rêver est déjà très important. Je vous souhaite des rêves à n'en plus finir, et l'envie furieuse d'en réaliser quelques uns. Je vous souhaitee d'aimer ce qu'il faut aimer et d'oublier ce qu'il faut oublier. Je vous souhaite des silences. Je vous souhaite des chants d'oiseaux au réveil, des rires d'enfants. Je vous souhaite de résister à l'enlisement, à l'indifférence, aux vertus négatives de notre époque. Je vous souhaite surtout d'être vous. »



Quel bonheur ! 

mardi 11 août 2015

Un témoignage terrible

Cela me revient, mais je crois qu'il n'est pas inutile de faire connaître les faits terribles: l'histoire (vraie) date de la "crise de la dioxine dans les poulets belges", un de ces épisodes qui agitent l'alimentation occidentale périodiquement.

A l'époque, j'avais été invité sur une grande chaîne nationale de télévision, pour discuter des "dangers de la chimie". Les journalistes, que je connaissais, m'avaient averti : il s'agirait d'un débat qui m'opposerait à des personnes très remontées contre la chimie. Allons, pourquoi pas : puisque je n'ai rien à gagner dans l'affaire, j'accepte le plus souvent de rendre service à la collectivité en disant des faits justes, contre les idéologues et les malhonnêtes de tous poils.
D'autant que, en l'occurrence, dire "la dioxine" est un non sens chimique : les dioxines sont des composés de plusieurs types, et seulement certains membres  de cette famille de composés sont toxiques (à une dose qu'il faut préciser). De surcroît, les poulets qui faisaient alors l'actualité (pourquoi, d'ailleurs ?) avaient été contaminés par des dioxines provenant d'usines d'incinération (comme quand nous faisons brûler un tas d'herbes au fond du jardin), et non d'usines chimiques.

Bref, je me retrouvais sur le plateau d'enregistrement, face à un groupe d'individus étranges, très remontés contre cette chimie qui n'était pas en cause. Et, en cours d'émission, j'ai compris que le public qui nous regardait voyait en réalité :
- un groupe d'individus un peu originaux, qui faisaient miroiter des choses étranges et fausses (les pouces qui auraient été verts en vertus de dons tombés du  ciel,  l'influence -prétendue bien sûr- de la musique sur la croissance des plantes, d'étranges manipulations de l'eau de pluie, lors de la pleine lune, qui auraient fait croître à des tailles inouïe les fleurs qu'on aurait arrosées avec, la mémoire de l'eau, de sais-je...), avec un aplomb terrible, jouant malhonnêtement de l'argument d'autorité, par exemple, et ne citant des sources que très inaccessibles, ce qui doit bien sûr faire penser à ce beau  dicton "A beau mentir qui vient de loin" ;
 - un groupe de scientifiques, dont j'étais, qui essayait désespérément d'expliquer des faits expérimentaux avérés, testés, mesurés... mais qui manquaient de temps (à la télévision, on a le temps de sujet-verbe-complément) pour donner les rudiments scientifiques nécessaires à la compréhension des faits expérimentaux, ces faits réels, tangibles, vérifiables par tous, dont la science ne cesse de partir.

Bref, le public se trouvait en face de deux discours aussi incompréhensibles l'un que l'autre, mais  nos adversaires tenaient un discours chatoyant, tandis que les scientifiques tenaient un discours rigoureux... et barbant. Devinez quel choix  le public aurait dû faire  ?
En réalité, ce jour-là, il a sans doute majoritairement choisi le camp des sciences... parce que le journaliste qui animait les débats était un ami, qui avait voulu  me faire "gagner". A quoi cela tient-il !

En revanche, je n'ai jamais oublié la leçon : il est bien inutile de dire des faits justes en étant incompréhensibles et barbant, d'autant que les sciences ont mille attraits, en ce qu'elle se fondent sur les faits expérimentaux ! Cela va du soleil, clarté blanche, qui devient rouge au couchant, au blanc d'oeuf, jaune quand il est cru, qui blanchit quand on le fouette, en passant par le fait que l'huile et l'eau ne se mélangent pas, sauf quand on y ajoute  du savon...
Les sciences ne sont qu'étonnement ! Et il n'est pas nécessaire de mentir pour les faire paraître belles.
Expliquer les équations ? Cela viendra après, et non pas dans une émission de télévision. 

Quant aux débats, il serait naïf d'oublier qu'il ne s'agit pas de dire le vrai, mais de débattre, et cela fait des millénaires que l'on sait que c'est le plus beau parleur qui gagne généralement. Le fond et la forme...
Et si la science décidait de soigner les deux, afin d'aider nos communautés à prendre les bonnes décisions  ?

Je tiens mes références à votre disposition

Alors que chacun peut publier sur internet à peu près n'importe quoi, se pose la question de savoir quel crédit accorder à des propos ainsi publiés. Le fait qu'un site soit "plébiscité" (sélectionné par le peuple) ne dit rien de sa qualité, et l'on connaît milles sites internet pourris ou minables qui sont pourtant largement visités. D'ailleurs, la recette est simple : si l'on publie des "actualités", si l'on est un peu populiste ou démagogue, alors on aura des chances d'être lu. La recette de la malhonnêteté est connue depuis longtemps : le philosophe grec Platon, il y a plus de 2000 ans, dit déjà combien l'art oratoire peut convaincre, alors même que les idées propagées sont fausses ; et l'auteur grec Aristophane nous décrit un état de la Cité qui ressemble étrangement à celui d'aujourd'hui. Rien de nouveau sous le soleil.
Mais là n'est pas l'objet de mon billet. Je veux oublier les minables, pour me consacrer à la diffusion de faits justes, d'idées intéressantes, de valeurs loyales... Mes billets vont toujours dans le sans de la vérité, et pas de l'idéologie ni de la tromperie, quelles que soient mes "opinions" (d'ailleurs, je préfère les idées aux opinions, parce que je n'ai pas de temps à perdre en discussions d'opinions discutables par essence).
Je produis donc des billets qui donnent des faits... mais je suis conscient que mes amis sont en droit de se demander si ce que j'avance est juste. En quoi mes blogs différeraient-ils d'autres qui seraient plus tendancieux ?
Une solution pourrait être de donner des références scientifiques, mais elle ne serait pas parfaitement satisfaisante, car bien des sites citent des références "pourries". Faire une référence n'est pas une garantie : les scientifiques le savent bien, eux  qui croisent les références, font des études aussi exhaustives possibles des sources, tout en analysant ces dernières (par exemple, les parties intitulées "Matériels et méthodes" des publications scientifiques en disent long sur la qualité des travaux). Les bons scientifiques ne confondent pas les corrélations et les causalités, par exemple, et ils évitent comme la peste les adjectifs et les adverbes, les remplaçant par la réponse à la question "combien ?". Ils refusent absolument l'argument d'autorité, et ils veulent des monstrations de tout ce qui est avancé.
Scientifique moi-même, je fais donc ce travail, mais je n'ai pas pris la décision d'encombrer mes textes avec les références que j'ai consultées. Pour autant, je tiens à la disposition de tous mes  amis (et aussi mes ennemis si j'en ai... bien que je sois de ceux qui considèrent que les chiens aboient et que la caravane passe) toutes ces références, et aussi les textes complets, quand j'ai le droit de les partager. Naguère, j'avais un blog où, une fois par semaine, je faisais l'éloge d'un bel article, mais, parce qu'il y avait plus urgent (notamment à propos de l'apprentissage par les étudiants), j'ai mis cela de côté. Pour autant, je continue de tenir à la disposition de qui veut les références des articles qui établissent que "bon pour la santé" est une impossibilité, que 99,99 pour cent des pesticides ne sont pas produits par l'industrie chimique mais par les plantes elles-mêmes, que la peau des pommes de terre nous expose à des poisons, lesquels résistent aux températures des bains de friture, etc.
 Bref, n'hésitez pas : je me ferai un plaisir de donner mes références, le cas échéant.

lundi 10 août 2015

Réforme à l'Ecole

Certains veulent que l'Ecole soit réformée, en vue d'aider les élèves les plus fragiles, parce que les bons s'en tireraient toujours, et que l'efficacité du système serait due à un entraînement des moins bons par les bons. On a largement entendu le discours. D'autres opposent qu'il ne faut pas "niveler par le bas", que l'Ecole doit avoir de l'ambition pour les citoyens. Là encore, on a bien entendu le raisonnement.
Dans cette discussion, les noms d'oiseaux viennent vite, et les "progressistes" pour certains sont des "idéalistes inconscients" pour les autres, tandis que les "réalistes" pour un bord, sont  "conservateurs" ou "réactionnaires" pour l'autre bord. On passera sur cette division manichéenne, donc simpliste et bête. Ce qui est dommageable, surtout, c'est que le débat actuel ne vise pas la construction d'un système d'enseignement vraiment meilleur, mais plutôt la mise en oeuvre d'une idéologie.

Pour ce qui concerne l'Ecole, regardons la loi du 8 juillet 2013 dite de "refondation de l’école" : elle se fixe l’objectif de "diviser par deux la proportion des élèves qui sortent du système scolaire sans qualification et [d'] amener tous les élèves à maîtriser le socle commun de connaissances, de compétences et de culture […] ;  conduire plus de 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat et 50 % d'une classe d'âge à un diplôme de l'enseignement supérieur".
Diviser par deux la proportion d'élèves qui finissent sans qualification ? C'est évidemment louable. Amener tous les élèves à maîtriser le socle commun de connaissances, compétences et culture ? C'est également très bien... à condition de bien définir ce socle commun : là est un grave point de débat. Conduire toute une tranche d'âge au baccalauréat ? Bien sûr, tout le monde est d'accord... à condition de bien savoir ce qu'est le baccalauréat : si c'est seulement de savoir lire, on y arrivera. Si c'est de savoir résoudre une équation aux dérivées partielles, on aura plus de difficultés. Autrement dit,  les déclarations grandiloquentes sont diaboliques dans le détail. C'est lui qui doit être discuté.

Oui, dans un monde de plus en plus technologique, où les machines se sont imposées,  l'"ouvrier" qui entrait en masse dans les usines et les mines a de moins en moins de place. Oui,  le pays gagne à être composé de citoyens éclairés, capables de s'adapter rapidement à des changements techniques (le fabricant de machines à écrire n'a plus sa place ; l'informaticien trouve la sienne). Oui, l'Ecole n'a pas pour mission de faire de la "chair à canon", mais doit se donner comme objectif de former des citoyens éclairés, responsables, soucieux du bien collectif, et non des individus égoïstes que gave une certaine presse (on n'est pas sorti du panem et circenses ; pardon pour le latin, objet de discussions dans le débat sur l'Ecole) et que flatte démagogiquement un certain politique.
Tout cela étant dit, il y a la question du diplôme, baccalauréat ou autre. Pour faire avancer le débat, il est bon de rappeler (principe de réalité) que  notre pays n'est pas isolé du monde, et que nos entreprises (grosses, moyennes, petites, artisanat...) sont dans un monde très large, où ceux qui produiraient encore des machines à vapeur péricliteraient. L'innovation est la clé, et l'avancée technologique est essentielle, quel que soit le champ d'activités : qu'il s'agisse de produits agricoles ou d'avions, nous devons produire des objets techniquement avancés ; qu'il s'agisse de médecine, d'enseignement, de culture, nous devons faire du mieux que nous pouvons, le mieux étant évalué  à une échelle internationale. Nous pouvons refuser les organismes génétiquement modifiés, nationalement, mais nous devrons in fine comparer nos rendements avec ceux d'autres pays qui les acceptent... parce que nos végétaux sont comparés à d'autres, sur les marchés internationaux ; oui, nous pouvons décider de travailler d'une certaine façon, mais nous devrons finalement comparer les prix des produits fabriqués à ceux d'entreprises présentes dans d'autres pays où le travail se fait autrement. On ne peut à la fois vouloir un "village global", en termes humanitaires, et un "marché" isolé en termes économiques.
Pour nos diplômes, baccalauréat ou enseignement supérieur, il en va de même : nos étudiants sont comparables aux étudiants d'autres pays, et il faut s'étonner que le débat sur l'Ecole discute si peu ce point, ainsi que le numérique, qui, pour l'enseignement supérieur international, est en plein bouleversement, avec l'apparition des MOOC, ces cours que chacun peut trouver en ligne, en n'importe quel point du monde. Notre Ecole n'est pas isolée du monde, il faut le redire.

Nous avons donc deux points fixés : le point de départ, avec l'enfant qui ne sait ni lire, ni écrire, ni compter (pour simplifier : la vie est faite de bien d'autres compétences, tel que vivre en société, avoir une morale, etc.), et le point d'arrivée, qui est la seconde année du Master, à l'Université.
Entre ces deux points, il y a diverses étapes, divers diplômes... qui sont moins utiles en tant que diplômes qu'en tant que compétences pour vivre dans le monde actuel. Là est l'essentiel : ne pas confondre diplôme et compétences ! Bien loin sont les arguments selon lesquels l'Ecole serait actuellement conçue pour les bons élèves, écrémerait année après année ceux qui ne peuvent pas suivre, sans beaucoup se soucier des plus en difficultés. Et c'est en vertu de cette observation que certains en viennent à proposer qu'"il faut s'attacher  aux élèves les plus en difficultés et aux décrocheurs, et non pas donner plus d’école à ceux qui sont déjà au niveau".
Je suis (hélas ?) de ceux pour qui les clivages politiques passent toujours derrière l'analyse des faits. Commençons par rappeler un principe qui fonde notre société française : l'Ecole est pour tous. Et elle ne doit donc pas être "en priorité" pour les plus faibles, ni d'ailleurs pour les plus forts. Ensuite, on n'attaquera jamais assez cette idée comtienne idiote selon laquelle il y aurait une hiérarchie de savoirs, avec les mathématiques au sommet, puis la physique, puis la chimie, puis la biologie, et ainsi de suite. Idée idiote et pernicieuse, puisqu'elle conduit à comparer des activités qui n'ont rien de commun (les pommes sont-elles meilleures que les poires ?), et à dévaloriser des savoirs... qui sont en réalité principaux, puisque indispensables à la bonne marche d'un pays. On ne dira jamais assez qu'il n'y a pas de hiérarchie entre technique, technologie et sciences de la nature ! Un bon technicien est mieux qu'un scientifique médiocre, et vice versa (pardon d'utiliser du latin, objet actuel de litiges).
Le baccalauréat (par exemple), dans  cette affaire ? Pourquoi vouloir à toute force conduire au baccalauréat des élèves qui voudraient se lancer dans la plomberie ? La question est celle de l'âge à partir duquel on peut travailler. Entre les enfants employés dans  des usines avant dix ans et des individus ne commençant à travailler qu'à la majorité, il y a un intervalle terrible qui doit être considéré... avec un espace de liberté donné au citoyen ! Notre pays crève de règles, de lois... Et si, au lieu de discuter des questions techniques (le français, l'histoire, la géographie, les mathématiques, les langues vivantes ou mortes...), nous discutions d'abord les questions de fond, à l'Ecole ? Il est étonnant de constater que les amphithéâtres des universités sont emplis d'étudiants qui ne savent pas ce qu'ils feront plus tard ! On a compris qu'ils misent sur l'éducation supérieure pour avoir du choix, mais ne serait-il pas meilleur, pour notre collectivité, que cette question soit prise plus tôt ? Ne devrions-nous pas, très tôt, montrer les métiers, non pas de façon abstraite, mais dans le quotidien ?
D'autre part, il est remarquable d'observer (on constate que je donne ici des faits) que les élèves et étudiants ne savent jamais ce qui est requis, dans les diplômes, et qu'ils se contentent de "suivre" les études où ils sont engagés. Ne serait-il pas bon que les "compétences" requises soient clairement définies, dans des contrats d'enseignement ? Pourquoi, par exemple, ne pas remettre des listes de compétences, explicites, afin que chacun ait sous les yeux un bilan réactualisable de ce qu'il ou elle sait vraiment ? Qu'il ou elle puisse se situer par rapport à des diplômes ?
Et puis, il y a la question de l' "enseignement". Parler d'enseignement, c'est mettre d'abord en avant l'enseignant, au  lieu de mettre l'apprenant. On comprend bien que les partis politiques y aient intérêt  (les enseignants sont des électeurs, contrairement aux élèves), mais on comprend aussi que le vrai débat est mort-né si l'on ne place pas la question de l'apprentissage d'abord. La question n'est pas que les enseignants enseignent, mais que les élèves et étudiants apprennent !

Il y a égalité et équité

Trouvé dans Nietzsche (Crépuscule des idées) :

"La doctrine de l'égalité ? Mais c'est qu'il n 'y a pas de poison plus toxique : c'est qu'elle semble prêchée par la justice même, alors qu'elle est à la fin de toute justice... "Aux égaux, traitement égal ; aux inégaux traitement inégal" :  telle serait  la vraie devise de la justice. Et ce qui en découle : ne jamais égaliser ce qui est inégal."

jeudi 6 août 2015

Réponse à un correspondant

 Ce matin, je reçois ce message :
Décidément, le journal xxxxx s'intéresse à la santé. Je ne sais si vous avez vu l'article sur le thème de la cuisine moléculaire. Il est sévère quant aux risques, et aux incidents "d'empoisonnement" réels survenus en nombre chez les "chefs" célèbres.
En fin d'article, H. Thys est cité, d'une façon tout à fait neutre, comme le précurseur scientifique sur les travaux duquel cette forme de cuisine est assise.
Il me semble qu'il y ait là une image d'un problème réel : le passage de la science à la technique et sa diffusion, puis de cette diffusion sans compétence au marketing et à la communication.
Est aussi soulevé l'hyper-spécialisation du jugement sur les  techniques ; ici, on cuisine "à froid" , mais on ne veille pas au développement des bactéries qui se multiplient en toute liberté, et les médias sont aveuglés.
Cordialement.
CB

Comme d'habitude, je réponds publiquement, puisque je n'ai rien à vendre, rien à cacher... sauf le nom du journal où figure l'article désigné : l'article étant un torchon, le journal qui l'a publié n'est pas d'une honnetêté parfaite, de sorte que je me refuse à faire de la publicité... tout comme je ne cite pas les journalistes auteurs de l'article, parce que je ne parle pas aux roquets.
Phrase à phrase, maintenant, voici la réponse à mon correspondant :

 1. Oui, le journal xxx s'intéresse à la santé. D'ailleurs, tous les journaux s'intéressent à la santé. Le palmarès des hopitaux, le scandale des honoraires des médecins, les déserts médicaux, le coût des mutuelles... C'est de l'ordre du marronnier.

2. Oui, j'ai vu l'article sur la cuisine moléculaire... et ce qui est amusant, c'est qu'il ressemble comme deux gouttes d'eau à un article des mêmes journalistes il y a deux ans, et que, comme ces articles, il est plein d'erreurs. Par exemple, il ne dit pas que, pour ce qui concerne Heston Blumenthal, l'enquête des services vétérinaires avait finalement établi que tout était venu des huîtres ! L'article confond donc tout, de la cuisson basse température avec les additifs, oubliant que le braisage est une cuisson à basse température, et  que le caramel est un additif. Bref, un article minable, par des journalistes pas complètement honnêtes (rien que la "généralisation" est une faute).
Cela étant, cela fait longtemps que j'ai signalé aux chefs qu'il était dangereux de cuire à des températures trop basses (par exemple 65 °C), et je ne cesse de signaler des risques de tous ordres, les pires étant sans doute les métabolites secondaires des végétaux. Et cela, ce n'est pas de la cuisine moléculaire ! Je m'inquiète, par exemple, de voir la peau des pommes de terre servie avec les tubercules, alors qu'une étude récente a montré que le seuil de toxicité en glycoalcaloïdes est atteint au Pakistan, pour la cuisine de rue (ces alcaloïdes résistent très bien aux températures de friture par exemple). Par exemple, je m'inquiète de voir des infusions d'estragon dans l'alcool (le méthyl chavicol est soluble dans l'éthanol, et très toxique), ou des macérations  de grappes de tomates dans l'huile (ce qui extrait un composé toxique), sans parler des plantes dont on ne sait pas bien la toxicité.
Ces pratiques "traditionnelles" ne justifient pas, évidemment, les mauvaises pratiques de cuisine moléculaire, mais c'est moins le principe que son application qui est en cause : un steak trop salé, cela ne condamne pas le steak grillé en général, mais un steak trop salé en particulier.
Donc, pour terminer : "incidents d'empoisonnement réels", c'est discutable ! Sans parler du fait que l'on ne mets pas ces incidents en face de ceux qui ont lieu soit à domicile (personne n'en fait un article), soit dans des restaurants moins célèbres.

3. Mon nom n'est pas H. Thys, mais H. This. Et oui, je suis  bien à l'origine de la cuisine moléculaire, cuisine dont je rappelle la définition "cuisiner avec des ustensiles modernes".

4. "Il me semble qu'il y ait là une image d'un problème réel" : une image d'un problème, ou bien un  problème ?

5. le passage de la science à la technique : oui, c'est toujours là une question terrible. La découverte de l'atome, et la bombe atomique ; la découverte de l'électricité et la chaise électrique ; la découverte des micro-organismes et des attaques à l'anthrax ; la découverte du feu et les incendies... Je maintiens que les responsables d'un acte condamnable sont ceux qui ont fait cet acte, et non les scientifiques qui ont fait la découverte. Pierre et Marie Curie ne sont pas responsables d'Hiroshima !

6. Pour la partie diffusion, marketing, communication, c'est un trop gros morceau, et cette partie de la lettre est trop floue pour que je réponde quelque chose de raisonnable, en peu de mots.

7. "l'hyperspécialisation du jugement sur les techniques" : je ne sais pas ce que cela signifie, donc je ne peux pas répondre.

8. on "cuisine à froid, mais on ne veille pas au développement des bactéries : à noter qu'une salade de carottes, c'est cuisiner à froid, donc rien de nouveau sous le soleil, de ce point de vue. En revanche, les professionnels doivent faire attention, et c'est la raison pour laquelle l'Education nationale promeut la méthode HACCP.

9. les médias sont aveuglés : que cela signifie-t-il ?

Voilà, j'espère avoir répondu correctement, mais si je ne suis pas clair, merci de me le dire, pour que j'ajoute des explications.