Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
vendredi 10 octobre 2025
La flèche des énergies de liaison.
Voilà une image que je ne cesse de transmettre aux étudiants à tous les niveaux parce qu'elle donne une idée des ordres de grandeur en chimie, pour les forces des liaisons chimiques.
La chimie considère des molécules, c'est-à-dire des atomes liés par des liaisons chimiques. Et ces liaisons chimiques sont de différents types, selon les atomes qui sont liés.
Lors des réactions, il s'agit de rompre des liaisons et d'en former de nouvelles, de sorte que l'on comprend que le bilan sera favorable les produits de réactions sont plus stables que les réactifs : cette flèche est importante.
Autrement dit, en chimie (comme ailleurs), il est bon d'avoir en tête des ordres de grandeur, avant d'entrer dans les détails. Le gros avant le détail.
Une référence en chimie, et notamment en chimie organique c'est la liaison entre deux atomes de carbone, ce que l'on a nomme une liaison covalente.
Je ne sais pas pourquoi mais je me trouve bien de savoir que la distance d'une telle liaison est d'environ 1,5 angströms, c'est-à-dire 0,15 nanomètres, je ne sais pas pourquoi mais je retiens aussi que ton énergie est de 350 kilojoules par mole. Mais peut-être est-il inutile dans un premier temps de se souvenir de tout cela, et il suffit peut-être de conserver à l'idée que nous avons la référence de 100 % pour l'énergie de cette liaison.
On peut ranger d'autres énergies de liaison par rapport à celle-ci. Par exemple, il y a des liaisons de van des Waals, des liaisons faibles, qui sont entre 1 et 5 % de la liaison covalente. Je n'entre pas dans les détails de ces liaisons parce que ce serait inutile et je veux simplement dire que, ensuite, la liaison un peu plus forte que l'on peut placer sur cette flèche est la liaison hydrogène, telle celle qui s'exprime entre deux molécules d'eau : environ 10 % de la liaison covalente.
Sur cette flèche, on peut vouloir placer l'énergie de la liaison disulfure, ce que l'on nomme aussi pont disulfure : c'est elle qui fait coaguler les protéines dans le blanc d'oeuf. En réalité, c'est une sorte particulière de liaison covalente, mais environ 75 % de la liaison entre deux atomes de carbone.
Et puis il y a les liaisons électrostatiques, entre des atomes ou des groupes d'atomes électriquement chargés et là, liaison peuvent être très intenses, par exemple atteindre 250 % de la liaison covalente.
Évidemment, cette flèche mérite d'être assortie d'un tableau qui donne des références à des articles précis, mais en tout cas voilà un panorama utile, un ordre de grandeur à transmettre à tous et à nous-même.
dimanche 5 octobre 2025
Derrière l'image : l'aromaticité du benzène
L'image qui est donnée ici est celle de la molécule de benzène : c'est une molécule très importante dans l'histoire de la chimie parce qu'elle a échappé à la théorie... et son analyse a fait progresser la chimie.
Le benzène est une matière qui a été découverte par le merveilleux physico-chimiste anglais Michael Faraday, alors qu'il étudiait lee résidu huileux qui résultait de la production du gaz d'éclairage. Et le nom a été donné plus tard, dérivé de "gomme benzoïne", une résine odorante connent depuis longtemps en Asie et utilisée en parfumerie.
Plus tard, on s'est aperçu que cette molécule avait (disons-le avec les mots modernes) six atomes de carbone et six atomes d'hydrogène, puis on a observé que les atomes de carbone étaient liés en un cycle.
Mais quand la tétravalence du carbone est apparue (le fait que chaque atome de carbone ait quatre liaisons avec des atomes voisins), alors il est apparu que la représentation moléculaire du benzène posait un problème, parce qu'on ne savait pas où placer trois doubles liaisons entre les atomes de carbone.
C'est finalement Auguste Kekule qui a proposé une solution : on a réussi à penser qu'il n'y avait pas les doubles liaisons connues alors, mais ce que l'on nommerait aujourd'hui une délocalisation de six électrons sur l'ensemble des atomes de carbone.
Autrement dit, la représentation qui est donnée ici est parfaitement fautive, et elle méprise l'immense progrès qui a été fait à l'époque de Kekule.
Ce qui est pire, c'est qu'elle induit les étudiants en erreur : je me souviens d'une doctorante qui croyait que l'on pouvait effectuer des réactions d'addition sur le benzène ou des molécules de la même famille, alors que précisément, le phénomène d'aromaticité montre que ce n'est pas possible, ou pas comme elle l'imaginait.
Il est convenu d'utiliser un cercle, dans de la molécule pour bien signaler la délocalisation des électrons.
Je propose de toujours utiliser plutôt la représentation correcte même la représentation avec des doubles liaisons est acceptée, interprétée correctement par ceux qui savent déjà.
Mais notre but n'est-il pas d'aider les étudiants à apprendre ?
samedi 4 octobre 2025
À partir d'une image
Quand on voit une telle image, on ne peut manquer de penser à ce que l'on nomme l'opération de régression linéaire et, aussi, à la possibilité d'une triche !
Souvent, lors des analyses, on obtient une série de valeurs que l'on peut ranger sur un diagramme à deux dimensions, avec la valeur de commande en abscisse et le signal enregistré en ordonnée. Par exemple, imaginons que l'on mesure l'intensité d'un courant électrique créé par une différence de potentiel électrique, ou l'absorption lumineuse quand on éclaire une solution d'un composé dont on étudie la concentration.
Les couples de valeurs sont ce que l'on nomme des points expérimentaux.
L'opération d'ajustement, qui apparaît en troisième lieu, dans la démarche scientifique, consiste à chercher des relations entre ces points.
Par exemple, souvent, on cherche à savoir s'ils sont alignés, auquel cas il y aurait une relation de proportionnalité entre les valeurs des abscisses et les valeurs des ordonnées.
Pour les commençants, cette opération se fait avec ce que l'on nomme la régression linéaire, et plus précisément la recherche d'une droite par la méthode des moindres carrés, introduite par le merveilleux mathématicien Carl Friedrich Gauss : on cherche une droite qui, ne pouvant passer exactement par tous les points expérimentaux (sauf miracle), passe le mieux possible, ce qui se calcule en minimisant la distance des points à la droite.
La qualité de cet ajustement s'exprime notamment par un paramètres que l'on note R2 (je renvoie vers les cours complets), et qui s'approche de 1, pour les ajustements qui seraient parfaits (ce qui est impossible). J'ajoute qu'il n'y a pas lieu d'être braqué sur cette méthode, et notamment le R2, et qu'il existe une "hyperbole de confiance" qui mérite d'être mieux connue qu'elle ne l'est.
Mais revenons à notre R2 : comme il s'agit d'expérience, il ne peut y avoir de proportionnalité exacte et R2 sera toujours inférieur à 1.
Certes, dans les bons cas, il pourrait être de 0,99 ou 0,9999 mais pas 1 exactement !
De sorte que si l'on voit un R2 = 1, cela peut signifier soit que la valeur de R2 a été arrondie, ce qui n'est pas à faire puisqu'on laisserait penser à un alignement parfait, soit que l'on a changé les valeurs des points pour qu'il s'alignent exactement... ce qui n'est pas admissible.
Les points expérimentaux sont des points expérimentaux jamais parfaitement alignés, et la droite que l'on trace est une droite parfaitement rectiligne, mais elle ne peut pas passer exactement par les points expérimentaux.
Il y a un monde entre les points expérimentaux, qui relèvent de l'expérience, et la droite, qui de relève de la modélisation. Il ne faut pas tout confondre
lundi 3 octobre 2022
La question des représentations 3/3
Dans la série des interprétations d'images, nous avons considéré les schémas et les images produites par des outils d'analyse mais au 21e siècle, il y a lieu de considérer les images produites par des ordinateurs.
Par exemple, voici une modélisation de l'eau.
Ici, on se limite à une image statique, mais il y a pire, en quelque sorte, à savoir que cette image est un instantané détaché d'un film entièrement calculé.
Ce film était évidemment fascinant et l'on s'amusera d'observer qu'il était accompagné d'une musique. Or, évidemment, il n'y a pas de musique dans l'eau, sauf si l'on en met : la musique a été ajoutée au film, et il faut prendre garde au fait que si l'on avait mis une musique beaucoup plus violente, on serait tenté d'interpréter les phénomènes de façon beaucoup plus violente.
Oui, ne nous laissons pas influencer par un objet tout à fait extrinsèque.
Mais, avec les mêmes molécules d'eau, les mêmes conditions de température, de pression, etc., on peut faire de nombreux films et représenter les molécules de nombreuses façons différentes. En voici une parmi une infinité :
Il y a donc lieu de faire très attention à ce que l'on voit avec ces images calculées, car on peut représenter par le calcul mille choses différentes à notre volonté, et l'on fait voir aux autres et à soi-même des objets qui, éventuellement, n'existent pas. De même qu'il ne suffit pas de parler de "père Noël" pour que celui-ci existe, il ne suffit pas de montrer un objet pour qu'il ait la moindre chance d'exister.
Comme pour les schémas, comme pour les images de nos appareils d'analyse, les images calculées doivent être décodées. Et là, nous avons des outils : les notions d'énergie, de temps, de masse, de vitesse, d'électron, de neutron, de proton, etc.





