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vendredi 14 mars 2025

Jean Jacques et les textes à charge

Alors que je relis un texte du chimiste Jean Jacques consacré à Archibald Scott Couper, je m'aperçois que notre homme avait tendance à prendre des contre-pieds. Il avait notamment rédigé un livre pour montrer que le chimiste Marcelin Berthelot n'était en réalité pas aussi grand qu'il le prétendait, un livre à charge certainement, mais fondé sur des recherches historiques assurées. 

En revanche, dans sa volonté de descendre Berthelot de son piédestal, il avait oublié quelques éloges qui auraient donné plus de force à sa démonstration. 

Là, je retrouve un de ses articles publié aux Comptes rendu de l'Académie des sciences à propos d'Archibald Scott Couper, qui aurait été injustement oublié au profit d'August Kékulé, lequel publia quelques semaines auparavant Couper, et cela parce que Würtz, le patron de Cooper, n'aurais pas transmis suffisamment vite le manuscrit de ce dernier à l'Académie des sciences. 

Là encore virgule Jean-Jacques n'a pas entièrement tort mais il n'a pas entièrement raison parce que les notions débattues à l'époque avaient des interprétations difficiles, et que Kekule et Couper n'ont pas publié exactement la  même chose. 

D'autre part, on peut aussi imaginer que Kekule ait pu être retardé un peu par les contingences. 

Et puis surtout, il y aurait eu lieu de plus fouiller la démonstration, car les notions chimiques de l'époque n'était pas celles d'aujourd'hui et les représentations étaient également différentes.
On sortait à peine du congrès mondial des chimistes qui avait eu lieu en 1860 et au cours duquel avait été semée la graine qui avait permis plus tard de mieux comprendre la notion de molécule. Acette époque, on confondait particules, molécules, atomes : tout cela était très petit et on avait bien des difficultés à imaginer des molécules d'aujourd'hui.
Certes, il y avait eu Le Bel et van t'Hoff, qui avaient proposé la tétralence du carbone, mais la communauté des chimistes était loin d'être convaincue :  jusque après le début du 20e siècle, certains esprits pourtant grands n'admettaient toujours pas l'hypothèse moléculaire et plutôt que de les critiquer, il y a lieu de bien comprendre pourquoi ils hésitaient. 

Au fond, Jean-Jacques, qui savait beaucoup de choses, qui avait beaucoup lu , n'a pas suffisamment pris la peine de bien fouiller les matières qu'il explorait, de bien se les expliquer à lui-même avant de les expliquer aux autres et c'est la raison pour laquelle il a été si peu suivi je crois 

Il y a là une leçon : dans nos démonstrations, nous ne pouvons pas faire l'économie d'explications et surtout quand les matières sont encore confuses pour nous.
Nous ne parviendrons pas à convaincre quiconque si nos idées ne sont pas déjà entièrement claires pour nous-même. Nous ne pouvons pas expliquer les points d'histoire des sciences si nous ne comprenons pas parfaitement comment les choses ont évolué à l'époque que nous discutons sans quoi ferons des textes plein d'arguments d'autorité et qui ne convainquent pas.