Affichage des articles dont le libellé est atomes. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est atomes. Afficher tous les articles

vendredi 18 août 2023

Quel modèle avons-nous de la matière ?

 

J'ai récemment interrogé des amis à propos de la représentation mentale qu'ils se faisaient des atomes... et j'ai été surpris des réponses.

Comme je me doutais que la question était difficile, que je voulais être certain d'être bien compris en la posant,  j'ai fait aussi pratique et concret que possible  : la question que je posais à mes amis était la suivante  "Je verse du sel sur la table, on voit des petits grains blancs, j'en isole un. Quelle est sa structure interne ? Comment est-ce organisé à l'intérieur ?

La première personne à qui j'ai posé la question était un médecin et,  après des contorsions, cette personne  m'a avoué, un peu gênée, qu'elle ignorait absolument tout de cette structure interne. Elle m'a dit qu'il y avait des atomes, mais c'était tout.
Puis, quand j'ai repris la question avec un électricien et une infirmière, le mot atome n'a pas été prononcé, et la représentation mentale était analogue à une page blanche.

Cela fait des décennies que je le dis, mais le constat s'impose : le public ne sait rien de la constitution moléculaire et atomique de la matière. Nos vulgarisations scientifiques sont donc trop souvent des récits un peu poétiques, des histoires à endormir les enfants, mais pas véritablement des explications.

Qu'attendais-je comme réponse ? Dans le cas du sel, les cristaux sont comme des empilements réguliers de cubes, sauf que les cubes sont des atomes.
Sont-ils cubiques me demandent mes interlocuteurs ?  Non. Sont-ils des boules ? Non plus ; ce sont des objets dont la forme est compliquée à supposer qu'il y ait un sens à parler de la forme d'un atome. Evacuons la discussion, en revenant sur le fait que ces objets  sont empilés régulièrement dans les trois directions de l'espace.

Évidemment, les chimistes m'objecteront que les cristauxc de sel ce sont plutôt des empilements d'ions, et non pas d'atomes, mais je réponds que, pour la vulgarisation, c'est un détail très gênant, très inutile, et qu'il vaut bien mieux parler d'atomes sachant que les ions sont des atomes qui ont perdu ou gagné quelques  électrons, mais qui gardent essentiellement leur structure d'atomes.
Il y a également la question de l'empilement et, là,  on a peut-être intérêt à expliquer que ces cubes s'attirent comme des aimants. Bien sûr, je sais que les forces sont électriques et non pas magnétiques, mais je rappelle que nous devons partir d'une page blanche et qu'il sera bien temps, plus tard,  d'introduire des subtilités de ce type.

Ayant fait cette expérience à propos du sel, je l'ai répétée à propos de la vodka (la considérant comme une solution d'éthanol dans l'eau à 40 °).
Là,  le médecin a su me dire que qu'il y avait des molécules dans le liquide, mais sans pouvoir en dire plus sur la répartition des molécules d'éthanol et des molécules d'eau, ni sur leurs éventuels mouvements.
Pour les autres, c'était encore une page complètement blanche.

Comment on arrive t-on à une telle situation ? Le médecin m'a déclaré que sa compétence était tout autre, quelle était surtout de savoir approprier des traitements à des symptômes et à reconnaître des maladies particulières, compétences pour lesquelles la connaissance atomique ou  moléculaire du monde n'est jamais sollicitée.
Pour les autres, le monde où ils vivent n'effleure même pas la question posée ; ils sont dans un monde tout différent, sans intersection.

Ma conclusion et que nous devons absolument ne pas surestimer les connaissances de nos interlocuteurs quand nous expliquons des résultats scientifiques. Nos explications ne doivent jamais faire l'économie de bases qui nous semblent élémentaires !

vendredi 9 décembre 2022

 La décantation



La décantation ? C'est une opération physique et non chimique.

La décantation est un procédé utilisé en cuisine depuis longtemps. Par exemple, si l'on réunit de l'eau et de l'huile dans un récipient, nous savons tous bien que l'huile viendra flotter à la surface de l'eau.
Il suffit donc d'incliner doucement le récipient contenant l'eau et l'huile pour que s'écoule d'abord l'huile, et que l'on ne conserve que l'eau dans le récipient.
La séparation est une décantation.

De même, quand il y a des particules qui sédimentent au fond d'un liquide, on peut effectuer une décantation, en inclinant le liquide pour récupérer le liquide qui surnage.

La décantation est un procédé très ancien qui, dans la mesure où l'on chauffe pas, ne s'accompagne pas de réarrangement d'atomes en molécules nouvelles : les molécules initialement présentes, d'eau d'une part et d'huile d'autre part,  dans le premier des exemples considérés, restent des molécules d'eau ou des molécules d'huile.
Il y a à la fin, en deux groupes séparés certes, les mêmes molécules qu'au début.
De même pour l'exemple de la décantation du liquide avec les particules solides : les molécules du liquide ne changent pas au cours du procédé, et les particules solides, également, restent identiques à elles-mêmes.

Car on a dit il y a juste titre que la chimie est la "science du feu" : cela signifie que les modifications qui ont lieu lors de réactions étudiées par la chimie sont d'une énergie comparable à celle d'un chauffage.

Et il est vrai que si l'on chauffe du sucre, ou du fer réduit en poudre, ce que l'on nomme de la limaille de fer, alors il y a des rangements des atomes : le sucre caramélise, parce que les atomes des molécules de saccharose du sucre se réorganisent. Et, dans le deuxième cas, le dioxygène de l'air vient réagir avec les atomes de fer pour former des oxyde de fer : le dioxygène a été transformé, le fer aussi. Et c'est cela qu'étudient les chimistes, raisons pour laquelle on peut parler de "réactions chimiques" (mais quand les chimistes n'étudient pas les réactions, ce sont seulement des réactions moléculaires, ou des réarrangements d'atomes).

jeudi 1 décembre 2022

 L'ilchimisme ? Il ne faut pas le sous-estimer


À propos d'ilchimisme (que je vois tout à fait parallèle à l'illettrisme, mais pour la chimie), nous devons nous souvenir de cet épisode tout à fait terrible qui eut lieu dans mon laboratoire il y a quelques années : alors que je discutais du sujet de stage d'une étudiante venue d'un IUT français de chimie, je me suis aperçu que celle-ci ignorait que l'eau était faite d'objets très petits (des molécules), en mouvement incessant. Quand je lui demandais de quoi l'eau était faite,  l'étudiante me répondit "De H2O", mais elle ne faisait pas la relation entre ce mot, qui désigne la constitution des molécules d'eau en atomes (d'oxygène O et d'hydrogène H) et le fait que l'eau était faite de molécules d'eau, composées chacune, donc, d'un atome d'oxygène et de deux atomes d'hydrogène.

Le même matin, recevant ensuite dans mon bureau une étudiante d'un autre IUT français de chimie, j'ai eu l'occasion, en l'interrogeant, de voir que cette étudiante-là savait que l'eau était faite de molécules, petits objets très nombreux, mais qu'elle n'avait pas la notion d'un quelconque mouvement de ces objets. J'explique que l'image suivante est assez juste : 



... mais à condition de ne pas oublier le mouvement, que l'on trouvera sur : https://www.youtube.com/watch?v=x8Atqz5YvzQ
Et un troisième étudiant, venu d'une université, croyait que l'eau était comme une sorte de matière élastique qui se serait allongée à l'infini, ignorant également la constitution moléculaire de la matière, "granulaire" en quelque sorte mais avec une idée dynamique.



De l' "élite" à la population générale


Si les étudiants de l'enseignement supérieur,  de chimie de surcroît, en sont là; on voit que la population française n'a pas de raison d'être mieux lotie,  jusqu'aux prétendues élites de domaines qui ne sont pas scientifiques (et je l'ai vérifié mille fois).

Quand je parle d'ilchimisme, ce n'est pas une critique que je fais mais une observation.

Et si ilchimisme il y a, il doit être combattu car comment nos concitoyens pourraient-ils se comporter dans un monde aussi technique que celui d'aujourd'hui, s'ils ignorent les bases de la constitution de ce monde ?

vendredi 15 avril 2022

Atome, molécule, substance, élément... Pour bien comprendre, ne confondons pas les objets matériels et les catgérories (le chien Mirza n'est pas la catégorie des chiens)

Alors que je prépare un article de didactique de la chimie, je m'aperçois qu'il n'y a pas de raisons de ne pas mettre immédiatement en application les idées que je propose de partager avec des collègues.

L'article discute les notions d'éléments, d'atome, de molécule, de composé, de substance...

Mais partons de l'idée d'atome. Oublions les acceptions anciennes, périmées, qui ont eu cours jusque dans les années 1960, et commençons par considérer un peu d'eau.

Ce que l'on nomme "eau", et dont le nom est légitime, c'est une "substance", un objet matériel.
Qu'il soit liquide, gazeux, solide, l'eau est de l'eau.



Quand on le regarde à l'aide d'un super-microscope, on voit que l'eau est faite d'objets tous identiques, et que l'on nomme des "molécules". 



En l'occurrence, on dit parfois que ces molécules sont des "molécules d'eau".

Et si l'on cherche à fragmenter ces molécules par des procédés "chimiques" (plus ou moins l'énergie du "feu"), alors on peut séparer ces molécules en objets qui, eux, ne se séparent plus par des procédés qui mettent ces énergies en jeu. Les objets récupérés sont des "atomes".

Plus précisément, quand on analyse une molécule d'eau, on découvre qu'elle est faite d'atomes de deux sortes : des atomes d'une sorte ont été nommés "atomes d'oxygène", et des atomes d'une autre sorte ont été nommés "atomes d'hydrogène". 

Il y a, dans une molécule d'eau, un atome d'oxygène et deux atomes d'hydrogène.



Et les mots "oxygène", ou "hydrogène", désignent donc des catégories d'atomes. Ce que l'on a nommé des "éléments".

Et c'est ainsi que, d'un côté, on a les objets matériels : atomes, molécules, substance ; de l'autre des catégories : les éléments. 


Du côté des catégories, il y a diverses "espèces chimiques", qui sont par exemple les "composés", les "espèces ioniques", les "métaux"...

- les  composés ? Ce sont des catégories, dont les molécules sont "composées" d'atomes appartenant à des éléments différents.
Pour "tenir ensemble", les atomes partagent des objets nommés "électrons".
 

Par exemple, le méthane est un composé, puisque les molécules de méthane sont faites d'un atome de carbone (appartenant à la catégorie de l'élément carbone) et de quatre atomes d'hydrogène (l'élément hydrogène).


- les espèces ioniques ? Cette fois, ce sont des assemblages d' "ions", c'est-à-dire d'atomes qui se sont échangés une partie, nommée électron.
J'insiste : ici, les électrons ne sont plus mis en commun, mais échangés.
 

Par exemple,  un cristal de sel est un empilement régulier et alterné d'un ion chlore (on dit "chlorure", mais c'est un détail) et d'un ion sodium.
Ici, les atomes de sodium ont cédé un électron, et les atomes de chlore en ont gagné un.


- les espèces métalliques ? Dans un bloc de fer, il n'y a que des atomes de fer (l'élément), mais ils mettent en commun des électrons, et cela est à l'origine de leur aspect brillant.

Finalement, on le voit, on comprend mieux si l'on ne confond pas les objets matériels et les catégories !





samedi 19 septembre 2020

La notion d'éléments

science/études/cuisine/politique/Alsace/gratitude/émerveillement

 

 

1. On voit bien, en parlant "dans la rue", combien la chimie est chose inconnue, et les cours qui sont dispensés en collège ne parviennent pas à éclaircir pour tous les questions de molécule, composé, élément...
 

2. Il faut dire que les abus de langage abondent, et que même des "spécialistes" ne sont pas au clair avec la terminologie... au point que j'en ai vu récemment qui, pour éviter de faire la différence entre molécule et composé (qu'ils n'avaient peut-être pas comprise eux-mêmes), se réfugiaient dans le terme de "substance", quasi médiéval.

3. Je suis bien certain qu'il y a derrière ces confusions la non compréhension de l'idée de classe d'équivalence, de catégorie, la vieille question du nominalisme, et ainsi de suite. Oui, une molécule est... une molécule, un petit objet fait d'atomes, alors que le type de molécules est nommé composé. Et l'élément est également une catégorie : celle d'atomes tous identiques.

4. Arriver à cela  n'a pas été facile, et c'est surtout sur la notion d'éléments que je veux insister aujourd'hui.

5. Aristote avait ses quatre éléments, et, dans le long cheminement qui mène à la chimie, il y a mille "éléments" venu d'en bas : le soufre, le mercure, le "sel", la quintessence... Le plus souvent, il s'agit d'entités imaginées.

6. Avec Lavoisier (1789 , Traité élémentaire de chimie, Paris, Cuchet, XVI à XVII), c'est toute la perspective qui change, parce que, au lieu d'inventer n'importe quoi, on se fonde sur l'expérience :
"Je me contenterai donc de dire que, si, par le nom d'éléments, nous entendons désigner les molécules simples et indivisible qui composent les corps, il est probable que nous ne les connaissions pas ; que si au contraire nous attachons au nom d'éléments ou de principes des corps l'idée du dernier terme auquel  parvient l'analyse, toutes les substances que nous n'avons encore pu décomposer par aucun moyen, sont pour nous des éléments ; non pas que nous puissions assurer que ces corps que nous regardons comme simples ne soient pas eux-même composés de deux ou même d'un plus grand nombre de principes, mais puisque ces principes ne se séparent jamais, ou plutôt puisque nous n'avons aucun moyen de les séparer, il agissent à notre égard à la manière des corps simples, et nous ne devons les supposer composés qu'au moment où l'expérience et l'observation nous en aurons fourni la preuve."

7. Et c'est par ce sain principe que l'on est arrivé à nos éléments actuels. Quel génie ! 




vendredi 13 mars 2020

Une molécule est une molécule



Ce matin, plusieurs questions, mais en voici une en particulier, qui mérite un commentaire public :


J'ai une question par rapport aux molécules synthétiques vs naturelles. Je sais que les propriétés physiques ainsi que l'odeur et le goût des molécules synthétiques vs naturelles sont identiques ex linalool synth vs naturel. Qu'en est-il de leurs activités biologiques et de leur propriétés toxicologiques ? Pouvez-vous me diriger vers des articles et références qui étudient cette question ?

Ici, je sais d'expérience qu'il y a la question des mots, qui est source de confusions. Une molécule, c'est donc un tout petit objet, fait d'atomes de divers éléments, liés par des forces interatomiques (une sorte de pléonasme que cet adjectif). Les éléments considérés, ici, sont principalement le carbone, l'hydrogène et l'oxygène. Et pour ces trois éléments, les atomes sont faits d'un "noyau", assemblage de protons et de neutrons, avec autour des électrons, comme la terre autour du soleil.
Les effets biologiques des molécules ? Une molécule a un effet si elle a un "récepteur", à savoir si l'organisme comporte une molécule agissant comme une serrure vis à vis de la molécule bioactive, qui est comme une clé. Et la disposition des atomes est donc très essentielle. Donc tout est simple, au premier ordre. Et une molécule est entièrement déterminée par ses atomes, leur disposition. 
Maintenant, il peut y avoir des effets qui sont au niveau du détail des détails. Par exemple, certains atomes d'hydrogène peuvent avoir dans leur noyau, en plus du proton, un neutron, et c'est ce que l'on désigne par "deutérium". Les propriétés chimiques sont quasi identiques, mais des outils de mesure très sensibles voient des différences... et c'est ainsi qu'une entreprise française d'analyse a fait son succès commercial en devenant capable de détecter du sucre ajouté dans les vins, pour des chaptalisations ou pour des fraudes. Mais, je le répète, c'est un détail au regard de la question posée.

Maintenant, synthétique et naturel ? Une molécule naturelle, c'est une molécule qui se trouve dans la nature, fabriquée par les plantes ou par les animaux, voire par les éléments (la chaleur, la foudre, etc.). En revanche, une molécule synthétisée, c'est une molécule qui a été... synthétisée, à savoir qu'on a rassemblé des atomes d'une certaines façon pour faire la molécule. Et, évidemment, si l'on même les mêmes atomes organisés de la même façon, on obtient la même molécule, qui ira ouvrir les mêmes serrures !

Cela dit, on peut répondre plus subtilement que cela à la question de notre interlocuteur, parce que l'on peut synthétiser avec des niveaux de précision variés, parce que la question des "impuretés" est essentielle : les composés extraits de produits naturels ne sont pas accompagnés des mêmes "impuretés" que les produits de synthèse (parfois plus purs que les produits naturels).
Par exemple, notre correspondant parle de linalol, qui est un composé odorant présent dans de nombreux végétaux. Parler du linalol au singulier, c'est une erreur, parce qu'il y a divers linalols, et que le (S)-(+)-linalol n'a pas la même odeur -donc pas les mêmes effets biologiques que le (R)-(-)-linalol. Mais une molécule d'un de ces deux linalols est une molécule de ce linalol-là, quoi qu'il arrive. Et la question "isotopique" précédente (l'hydrogène vs le deutérium) ne se pose pas, du point de vue de l'odeur.
En revanche, quand on a un de ces deux linalols dans une matière végétale, elle n'est pas seule, et aucune  plante n'a donc l'odeur de ce linalol particulier. Puis, si l'on extrait ce composé, il n'est plus "naturel", mais d'origine naturelle... et son extraction ne permet généralement pas de l'avoir pur ! De sorte qu'il y a des "impuretés"... et que ces impuretés peuvent être essentielle. C'est ainsi que le mélange des deux limonènes R et S n'a pas d'odeur quand il est fraîchement obtenu par distillation... et que cette odeur de Citrus n'apparaît qu'ensuite, sans doute  due aux impuretés, plutôt qu'aux limonènes.
Pour les composés de synthèse, il y a également des impuretés, qui résultent du procédé de préparation, et il n'est d'ailleurs pas dit que ces impuretés soient plus abondantes ou plus dangereuses, bien au contraire : les opérations de synthèse étant mieux contrôlées que les extractions (qui partent de mélanges complexes), il est possible qu'il y ait bien moins d'impuretés.

Enfin, mon interlocuteur me parle d' "activités biologiques et propriétés toxicologiques" : amusant, car les effets toxicologiques sont des activités biologiques, non ? Car je fais l'hypothèse, vu les composés qu'il discute, que ce sont de toutes petites quantités de composés qui sont considérées ici, de sorte que l'on est bien dans le cadre des clés et des serrures, des composés bioactifs et de  récepteurs. Là, les impuretés sont essentielles, car elles peuvent avoir des récepteurs, que les composés soient d'origine naturelle ou synthétisés, et quelqu'un qui fait bien son travail, d'extraction ou de synthèse, se préoccupe de cela.
Mais finalement, une molécule est une molécule, n'est-ce pas ?

mardi 26 février 2019

Je vous présente le chlorure de sodium

Aujourd'hui, des amis m'interrogent à propos de chlorure de sodium. De quoi s'agit-il ?

Pour expliquer la chose, et pour expliquer pourquoi le chlorure de sodium n'est pas exactement le sel de table, il est bon de reprendre les choses d'un point de vue historique et technique.

Partons donc de la mer, qui est de l'eau salée. Si on évapore l'eau (dans une poêle ou dans un marais salants), on récupère des cristaux plus ou moins blancs, et que l'on a nommés cristaux de sel. On peut aussi extraire des cristaux de sel de mines, et c'est alors du "sel gemme".
Si l'on s'y prend bien, on peut recristallier ces matières et obtenir des cristaux très blancs, qui sont alors du chlorure de sodium quasiment pur. Cette fois, ces cristaux sont des assemblages  réguliers de deux types d'atomes : des atomes de sodium, et des atomes de chlore. Et comme ces atomes s'échangent des électrons, on les nomme des ions.

Mais le monde est imparfait, et quand on cristallise le sel à partir de la mer, les cristaux ne sont pas exclusivement composés d'atomes de chlore et de sodium. Il y a des atomes d'iode, de potassium, et plein d'autres ions que l'on pourrait nommer impuretés, non pas que ces atomes soit moins bien que ceux de chlore et sodium (il y a même de l'or, dans le lot), mais qu'il ne font pas partie du chlorure de sodium.
 Autrement dit, le sel marin stricto sensu n'est pas stricto sensu du chlorure de sodium puisqu'il contient des impuretés , et il en va de même pour le sel gemme. La différence n'est pas grande quand les sels sont raffinés mais elle peut le devenir pour le sel gris, pour le sel de mer non raffiné, et là, le contenu en ions autre que chlore et sodium peut-être important, ce qui explique d'ailleurs que le sel puisse parfois être non seulement salé, mais aussi un peu amer : les ions calcium confèrent une certaine amertume, quand ils sont abondants, ce qui doit nous conduire d'ailleurs à observer que notre appareil sensoriel détecte parfaitement ce calcium essentiel pour la constitution de notre organisme. La découverte n'est pas très ancienne, et elle préfigure sans doute d'autres découvertes du même type.

mardi 3 avril 2018

La découverte des molécules et des atomes

On dit parfois qu'Albert Einstein a découvert atomes et molécules. Ou le physicien Jean Perrin. Bref, les physiciens créditent les physiciens de cette découverte.

Pourtant, c'est oublier des images comme la suivante :




 Il s'agit d'une des figures de "La chimie dans l'espace", de Jacobus Henricus Van't Hoff, un texte paru en... 1875, soit bien avant qu'Einstein ne fasse ses travaux ou que Jean Perrin n'étudie le mouvement brownien.  Et vous avez bien lu le titre ! Quatre ans avant, d'ailleurs,  Van't Hoff avait publié un article où il représentent les atomes de carbone d'une molécule de glucose, en indiquant même les angles entre les liaisons chimiques, et les distances interatomiques.

Mais, plus généralement, la France était terriblement en retard, sur le reste du monde chimique, notamment depuis que Marcellin Berthelot s'était opposé à cette idée de molécules composées d'atomes. En France, il avait eu quelques opposants, avec Würtz, Gerhardt, Laurent, mais Berthelot et sa clique, qui verrouillaient les postes, considéraient avec retard que la théorie était abusive. D'ailleurs, alors que Berthelot se vantait d'être un pionnier de la synthèse organique, la France était très en retard de ce point de vue (et Berthelot n'était certainement pas le pionnier qu'il prétendait être).


Bref, il ne faut pas reconnaître à Perrin d'avoir montré l'existence des atomes, puisque les chimistes la connaissait déjà depuis plus de 40 ans !

samedi 16 décembre 2017

Pour la science nommée chimie, une partie d'analyse, une partie de synthèse


La « chimie »  serait une grande famille, qui aurait la volonté de réunir des techniciens, des ingénieurs, des scientifiques ?

Pourquoi pas : toutes ces personnes se retrouvent autour de l'idée selon laquelle le monde est constitué d'atomes qui se réorganisent selon des lois particulières.
C'est donc, du point de vue de l'étude scientifique, quelque chose qui est de nature physique, puisque la physique est la science de la nature par définition, mais une branche de la physique particulière, car cette étude n'a rien à voir avec l'optique, ou l'électricité, ou l'hydrodynamique...

Et j'ai longtemps hésité, à propos du nom à donner à cette science, mais mes recherches historiques me montrent qu'il faut sans doute employer le nom de chimie pour l'activité scientifique qui étudie les réarrangements d'atomes.


Pour cette science, la tradition a toujours fonctionné avec au moins deux pieds : l'analyse et la synthèse.

L'analyse a toujours été essentielle, puis qu'il fallait comprendre la nature de la matière et son évolution.
Et la synthèse est essentielle, puisqu'elle construit des systèmes nouveaux que l'on peut analyser. D'ailleurs, il y a de la synthèse dans deux types d'activités : soit pour tester la nature, et en comprendre les lois ; soit pour obtenir des résultats, à savoir des médicaments, des pesticides (je répète qu'il vaut mieux des pesticides bien conçus que les pesticides naturels, non ciblés...).

Evidemment les individus dont l'esprit n'est pas assez élevé pour comprendre qu'il n'est pas nécessaire de dénigrer l'objet dont on veut faire l'éloge n'ont pas manqué d'abaisser l'analyse quand il faisaient de la synthèse, et vice versa. Mais les individus les plus éclairés, eux, savent qu'il faut deux pieds pour tenir debout.

Apprenons à dépasser ces querelles idiotes. Pour la chimie, il faut de la synthèse et de l'analyse, et c'est ainsi que la chimie est une science merveilleuse !






Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)  

jeudi 28 février 2013

Qu'est-ce que la chimie (suite) ?

Chers Amis
Dans une précédente lettre, j'avouais avoir fait la faute de penser que l'on devait nommer "chimie" l'activité scientifique d'exploration des réarrangements atomiques, et que l'on ferait mieux de nommer chimie l'activité technique de production d'assemblages atomiques.
Je concluais en disant que l'on devait trouver un nom pour cette activité scientifique, et j'évoquais l'atomologie, par exemple.
Cela étant, je discutais aussi les relations avec la "physique" (de physis, nature), mais je n'étais pas allé assez loin : de même que la géologie est une science qui est nommée par son objet d'étude (la Terre, les cailloux...), la science que nous cherchons à nommer doit avoir un nom qui soit spécifique.
Autant la physique peut se ramifier, avec une branche qui se nomme biophysique, autant l'atomologie (un mot qui restera en travers de la gorge) pourrait se nommer physico-chimie.

Physico-chimie, ou bien chimie physique ? En langue française, c'est le substantif qui porte le sens (le gros) et l'adjectif qui fait le détail. Physique d'abord, géo ensuite.

De ce fait, la chimie physique semble devoir être une activité de chimie, donc de production d'assemblages atomiques (molécules, etc.), et il va falloir que je réfléchisse bien pour savoir en quoi elle pourrait être physique, sauf à considérer que l'on considère aussi bien les modifications atomiques et des propriétés physiques, relatives à des transformations à d'autres échelles d'énergie que celles du "feu".

Autrement dit, la science qui explore les mécanismes afférents aux réarrangements d'atomes n'est pas la chimie physique, mais la physico-chimie.

Nous y sommes!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!


Finalement, la science qui étudie la chimie, c'est la physico-chimie. D'accord ?