mardi 18 février 2025

Complexe ? Réfléchissons avant de dire ou d'écrire le mot.

Relisant un article ancien sur ces plaques qui se forment à la surface du thé qui refroidit, je m'amuse d'y trouver le mot "complexe" en fin d'article, pour décrire le réseau organique qui est associé à calcium notamment : les auteurs disent que le matériau des plaques est complexe. 

En réalité, les travaux ultérieurs ont assez bien montré qu'il n'y avait pas de grand mystère, et le mot complexe signifiait surtout "inconnu". 

Je prends cet exemple... comme un exemple, et j'invite mes amis à se surveiller quand il se préparent à dire ou à écrire le mot complexe,  à s'interroger quand il le lisent sous la plume d'un collègue. 

J'ai l'impression (provisoire, toujours provisoire) que en général le mot complexe indique seulement que la personne qui l'emploie ne comprends pas, et  que la complexité n'est qu'inversement proportionnelle à son entendement. 

Dans un autre article, j'ai discuté la question des adjectifs et des adverbes qu'il faut éviter le plus possible  lors de la rédaction de textes scientifiques,  : le plus souvent, nous devrions  les remplacer par la réponse à la question "Combien ?".
Ici, je crois que le conseil est bon : complexe, mais combien ? 

Certes, il y a des systèmes fait de nombreuses parties, des enchaînements de phénomènes dont la causalité nous échappe : felix qui potuit rerum cognoscere causas (heureux qui peut connaître la cause des choses), disait Virgile.  Il y a aussi des systèmes avec des parties interdépendantes, dans un vaste réseau d'actions et de réactions. I y a des systèmes pour lesquels il a été montré que les frottements ne suffisaient peut-être pas à assurer la stabilité, tel le système solaire.

Surtout, je crois comprendre que nous n'avons pas fait le travail suffisant pour bien poser la question de la complexité, car même dans des cas simple, les choses sont en réalité... complexes.
Par exemple, on peut effectivement calculer les orbitales d'un système de l'ion H2+, fait de deux protons et d'un électron, mais c'est parce que nous avons simplifié considérablement le système, avec des hypothèses, certes raisonnables, mais quand même simplificatrices. Par exemple, nous supposons les noyaux immobiles : ils le sont... presque. D'autre part, there are  wheels within wheels, il y a des rouages dans les rouages, car les protons sont des particules constitué de quarks, et notre description n'en tient pas compte. Oui, les résultats du calcul sont raisonnables, éventuellement bons, mais il n'en reste pas moins qu'il y a lieu de nous en émerveiller, tant les véritables systèmes sont plus... complexes que nos simplifications.

Pour en revenir au mot complexe, soyons charitable avec les autres et avec nous-même : parfois, nous pouvons l'employer sans avoir à rougir de honte. Mais si nous voulons faire de la bonne science et non pas une communication, si nous visons la compréhension du monde, plutôt que d'impressionner nos collègues nous avons intérêt à nous interroger sur l'emploi du mot "complexe".

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