Dans un débat avec des amis des sciences de l'humain et de la société, j'ai été confronté à l'expression "sciences exactes" :
la terminologie est de mes amis, et pas de moi, qui ait décidé de ne
parler que de sciences de la nature, dont j'exclus les mathématiques,
puisqu'elles sont d'une autre nature, même si demeure ce grand débat
entre mathématiques découvertes et mathématiques inventées.
Sciences
exactes ? Je propose de ne pas confondre le savoir (ou prétendu tel,
surtout en matière de sciences) et la recherche du savoir, à laquelle je
propose de réserve le nom de science. La science, dans cette
définition, est donc la recherche de savoir.
Sciences
exactes ? Il me semble qu'il y a là une difficulté de même nature que
dans "sciences humaines", à savoir un emploi ambigu de l'adjectif.
Commençons
par "sciences humaines" : c'est un pléonasme, car la science est une
activité de l'être humain, et de nul autre espèce. Généralement, ce
pléonasme est une périssologie. Sciences de l'homme ? C'est mieux, mais
la femme ?
Sciences exactes ? Cela voudrait indiquer que
certaines activités de recherche du savoir sont "exactes" ? Que serait
donc une activité exacte ? Selon le TLF (le seul qui vaille), le terme
"exact" signifie "Conforme aux règles prescrites, aux normes, à la
convenance, aux usages, qui s'y conforme".
Nos amis des
SHS qui parlent de sciences exactes pour les sciences de la nature
voudraient-ils alors dire que leur propre activité n'est pas conforme à
leurs propres règles ? Qu'elles ne suivent aucune norme ?
Je
croyais pourtant -on me l'a assez répété- que les historiens avaient
leur méthode, tout comme les sociologues, ou les géographes ? Les
philosophes ?
Laissons-les de côté, afin de ne pas
compliquer un débat qui n'est déjà pas parfaitement clair (quelle
méthode commune entre Héraclite, Platon, Nietzsche ou Meyerson ?).
Pour
les sciences de la nature, oui, il y a des canons, lentement élaborés,
et qui se retrouvent aujourd'hui dans la structure des publications
scientifiques, qui collent à la description que je propose (et qui n'a
toujours pas été réfutée ou critiquée), à savoir :
- observation d'un phénomène
- caractérisation quantitative du phénomène
- réunion des données quantitatives en lois synthétiques
- recherche de mécanismes quantitativement compatibles avec ces lois
- recherche de prévisions expérimentales testables
- test expérimental en vue d'une réfutation de la théorie proposée
- et ainsi de suite.
Toutefois,
cette conformité des sciences de nature ne peut conduire les
scientifiques de la nature (on voit que je distingue la science et ceux
qui la font, sans quoi on tombe souvent dans des erreurs terribles) à
prétendre à l'exactitude de leurs descriptions du monde, pas plus que
les sciences de la nature ne prétendent à la description exacte du
monde, et encore moins à la "Vérité" !
Il faut user d'une rhétorique vraiment nauséeuse, détestable -celle de l'homme de paille- pour le faire penser.
Bref, je propose que nous abandonnions tous l'expression "sciences exactes".
Pour
les sciences de la nature, je propose que nous utilisions l'expression
"sciences de la nature" ou "sciences quantitatives", à moins qu'une
nouvelle expression reste à inventer ?
Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces
(un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de
cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)
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