Sur cette image, on voit du bleu et des formes de fil. De quoi s'agit-il ? Pour qui s'intéresse à la matière molle, on reconnaît immédiatement des polymères linéaires dans de l'eau, ou plus généralement, dans une solution aqueuse, avec un interface semble celui qui limite l'eau et l'air.
Cela fait penser, par exemple, à des molécules de protéines dénaturées dans du blanc d'œuf, par exemple comme quand on bat un blanc d'oeuf en neige. En effet, le blanc d'oeuf est fait de 90 pour cent d'eau et de 10 pour cent de protéines. IL y a environ 300 sortes de protéines (connues), et toutes les protéines ont des molécules comme des fils plus ou moins repliés, fait d'enchaînements de petits segments qui sont nommés résidus d'acides aminés.
Sur la figure qui est donnée ici, on ne voit pas cette constitution des protéines en résidus d'acides aminés ; il y a seulement la forme générale des molécules de protéines.
Dans le blanc d'oeuf, nombre des protéines sont globulaires, ce qui signifie que leurs molécules forment comme des pelotes. Mais il est exact que le cisaillement exercé par le fouet qui bat les blancs en neige dénature ces pelotes, les déroule, au moins partiellement.
Or il se trouve que si les molécules de protéines sont naturellement en pelotes, c'est qu'une partie des molécules établit peu de liaisons avec l'eau, se plaçant au coeur des pelotes, tandis que d'autres parties peuvent se lier à des molécules d'eau, et peuvent s'y placer, formant l'extérieur des pelotes natives.
La description que je donne ici est simplifiée mais c'est l'idée générale : il est vrai que pour des protéines déroulées, les parties les moins solubles dans l'eau iront se placer plutôt dans l'air, le reste se plaçant dans l'eau, et c'est cela qui conduit à l'image que nous considérons ci-dessus.
Ainsi, une bulle d'air dans un blanc en neige est tapissée de molécules plus ou moins déroulées de protéines, qui forment comme une coque protectrice, laquelle évite que des bulles d'air voisines ne fusionnent et que la mousse ne soit trop rapidement déstabilisée.
Mais là, il y a un grand écart entre le macroscopique et le moléculaire et il vaut mieux faire ce trajet pas à pas, par ce que je nomme la méthode descendante d'analyse des systèmes physico-chimiques.
Partons donc du macroscopique, la mousse vue de loin : c'est un solide blanc, très délicat certes mais qui subsiste un certain temps, disons plusieurs dizaines de minutes.
Si l'on s'approche, si l'on utilise une loupe ou un microscope optique, alors on voit maintenant que cet objet blanc est constitué de bulles d'air tassées les unes contre les autres, des bulles plus ou moins grosses.
Quelle taille ? Si on ne les voit pas à l'oeil nu quand on les regarde à 20 centimètres de distance, c'est que leur taille est inférieure à 0,2 mm environ 20 cm. Dans un blanc en neige en début de battage, on voit les bulles, mais en fin de battage et surtout si l'on a fouetté avec du sucre, alors on ne les voit plus ce qui donne une idée de leur taille maximum.
C'est seulement ensuite, quand on passe au grossissement supérieur, à l'échelle des assemblages supramoléculaires, que les physiciens nomment échelle mésoscopique, que l'on peut avoir une image comme celle que nous avons montré ci-dessus.
Si nécessaire on peut grossir encore et avoir l'information atomique que nous cherchions. Les sauts d'échelle n'ont pas été réguliers mais qu'importe : ce qui compte, c'est de bien avoir à chaque étape une idée des ordres de grandeur des tailles
L'image ci-dessus montre qu'elle n'est pas compréhensible sans une foule d'informations supplémentaires. Elle n'est pas fausse, mais ne dit rien des ordres de grandeur de taille, par exemple. Elle ne dit pas non plus que tout cela est en mouvement : l'eau, par exemple quand elle est liquide à la température ambiante, est constituée de molécules dont la vitesse moyenne est de 400 mètres par seconde ! Les molécules de protéines, dans l'eau, heurtées en tous sens, ne cessent de se déformer et l'image qui est donnée ici ne doit être considéré que comme un instantané.
En outre, l'image est idéalisée et la surface de l'eau n'est certainement pas un trait bien droit, car il y a des molécules d'eau qui quittent l'eau liquide, d'autres qui reviennent, les pelotes bougent, etc.
Une image, c'est une description, une description théorique, une théorie et c'est donc plutôt une perche tendue à la pensée pour discuter de ce que l'on voit et non pas pour l'accepter et c'est ainsi que les images, considéré avec circonspection nous mène vers une meilleure connaissance
https://icmpg.hub.inrae.fr/international-activities-of-the-international-centre-of-molecular-gastronomy/international-journal-of-molecular-and-physical-gastronomy/3-educational-practices/3.2.-developments-practices-and-policy/3.2.2.-courses/descending-approach