Les
crêpières ont-elles raison
de dire que la pâte doit être bien battue ?
J'ai rencontré cette question il y a bien longtemps, alors
que, travaillant dans une crêperie, en Bretagne, j'étais notamment
chargé de la préparation de la pâte à crêpes et à galettes.
J'utilisais alors une
énorme bassine en plastique bien propre, où je mettais de la
farine de blé noir, du lait, de l'eau, du sel. Pas d'oeufs,
évidemment, car la tradition bretonne n'en préconise pas, limitant
les oeufs aux crêpes de froment ; pour la galette de sarrasin,
ou blé noir, l'oeuf changerait le goût de la pâte, ferait perdre
son caractère puissant.
Je me mettais alors torse nu, puis je mélangeais les ingrédients, à la main, jusqu'à ce que la pâte soit lisse. Toutefois les crêpières avaient observé que, lorsqu'elles utilisaient cette pâte, les galettes collaient parfois au bilic (l'instrument sur lequel on cuit crêpes et galettes), alors que, d'autres fois, elles ne collaient pas. Nous avions identifié que les galettes semblaient moins coller quand, lors de la préparation de la pâte, je l'aérais, en soulevant la pâte de la paume de la main, et en la lançant vers la bassine, afin de faire cloquer, de faire apparaître de grosses bulles d'air.
Je me mettais alors torse nu, puis je mélangeais les ingrédients, à la main, jusqu'à ce que la pâte soit lisse. Toutefois les crêpières avaient observé que, lorsqu'elles utilisaient cette pâte, les galettes collaient parfois au bilic (l'instrument sur lequel on cuit crêpes et galettes), alors que, d'autres fois, elles ne collaient pas. Nous avions identifié que les galettes semblaient moins coller quand, lors de la préparation de la pâte, je l'aérais, en soulevant la pâte de la paume de la main, et en la lançant vers la bassine, afin de faire cloquer, de faire apparaître de grosses bulles d'air.
Il semblait... Il
semblait, mais comment en avoir le coeur net ? Dans le feu du
travail d'une crêperie, il y a peu de place pour des
expérimentations, et je me posais la question depuis 35 ans...
Finalement, l'introduction d'air dans la pâte à galettes a-t-il un
effet sur la confection des galettes de blé noir ? Passons sur le
pléonasme « galettes de blé noir », car les vraies galettes sont
toujours obligatoirement de blé noir, mais conservons la question :
l'introduction d'air change-t-il quelque chose aux résultats ?
Le test s'est finalement
fait correctement sur le stand d'AgroParisTech, au Salon de
l'agriculture, en public, où nous avons introduit de l'air n'ont pas
la main, mais avec un batteur électrique. Une pâte à galette été
divisée en deux moitiés, dont l'une était fortement aérées au
batteur électrique, et l'autre non. Puis des galettes ont été
produites à partir de ces deux pâtes, non pas sur un bilic, mais
dans une même poêle, sur le même feu...
Le résultat a été
spectaculaire : oui il y a une différence considérable entre les
galettes bien aérées et les galettes qui n'ont pas été battues.
Pourquoi ? Je n'en sais toujours rien, mais je sais que l'expérience
nous a fait progresser. Après des décennies d'incertitude, nous
avons maintenant un résultat assez bien établie : il y a une
différence entre des pâtes bien aérées et des pâtes qui n'ont
pas été aérées. D'autres pourront maintenant monter sur dce
socle, pour poursuivre le travail d'analyse, et identifier les
mécanismes des phénomènes établis.
A vous !
A vous !
Pourquoi dans toutes les recettes, on préconise de laisser reposer la pâte à crêpe quelques heures avant utilisation alors ?
RépondreSupprimerDans l'expérience, avez vous fait cuire les crêpes directement après avoir battu la pâte ou l'avez vous laissé reposer ?
Dans cette expérience du Salon de l'agriculture, nous n'avons pas fait reposer, mais nous avons eu d'autres séances consacrées aux crêpes, notamment avec la participation de Rolande Ollitrault, qui est allée jusqu'en Chine, afin d'explorer le blé noir chinois.
RépondreSupprimerCertains des travaux sont publiés dans les comptes rendus en ligne des Séminaires de gastronomie moléculaire.