vendredi 1 janvier 2016

L'induction

Dans des billets précédents, à propos de la quatrième étape de la méthode scientifique (des sciences de la nature), j'ai évoqué l'"induction"... mais on m'a justement fait observer que cette notion pouvait être inconnue de certains de mes amis.
Il faut donc expliquer.

Précisons d'abord que  l'induction que j'évoquais n'est ni l'induction électromagnétique, ni l'induction, au sens des raisonnements par récurrence ou des définition par récurrence.
Pour ces dernières, il s'agit de dire que si une propriété est vraie pour un nombre 1, et si le fait que la propriété soit vraie pour le nombre n a pour conséquence qu'elle soit vraie pour le nombre n+1, alors la propriété est toujours vrai.
Un exemple ? Considérons une grande file d'étudiants. Si le premier a un pull bleu, et si l'on nous dit que tout étudiant qui a un pull bleu est suivi d'un étudiant avec un pull bleu, alors nous pouvons savoir que tous les étudiants ont un pull bleu. Bien sûr, cet exemple est d'un intérêt limité, mais en mathématiques, avec des ensembles infinis, la récurrence s'impose absolument.

Toutefois l'induction à propos de laquelle on m'a reproché d'être implicite n'est pas celle-là. C'est une opération mentale qui consiste à généraliser un raisonnement ou une observsation à partir de cas singuliers. Elle a un statut bien particulier, et, en particulier, elle s'oppose un peu à la déduction.
Pour cette dernière,  on part d'axiomes ou de définitions, et l'on  produit des conséquences logiques. Avec la déduction, on n'obtient que des résultats tautologiques, déjà contenus dans les prémisses dont on tire les conclusions.
L'induction,  en revanche,  génère du sens en passant des faits à la loi, du particulier au général. En ce sens, la déduction logique ne produisant aucune nouvelle connaissance, au sens où les propositions déduites sont virtuellement contenues dans leurs axiomes, elle est par conséquent analytique ; au contraire, l'induction enrichit la conscience de nouveaux faits : elle est alors synthétique.

Un exemple ? Mettons-nous dans la peau  du physicien allemand Georg Ohm, qui, au 18e siècle,  met une pile en série avec un fil métallique, et qui mesure la différence de potentiel entre les bornes du fil, ainsi que l'intensité du courant électrique qui parcourt alors le fil. Il mesure donc un couple de valeurs  (U1, I1). Puis il branche une autre pile, et mesure un autre couple (U2, I2). Une troisième pile, et ainsi de suite.
Pour chaque couple de mesures, il divise la différence de potentiel par l'intensité du courant... et il découvre que ce rapport est environ constant.  Il induit alors que la différence de potentiel est proportionnelle à l'intensité du courant, et il  nomme "résistance" la constante de proportionnalité, qui dépend uniquement du fil conducteur considéré.

A la réflexion, cette opération de généralisation, par "induction", qui prétend établir une loi générale à partir de cas particuliers, est tout à faire extraordinaire, d'une audace immense ! Mais cet espoir dans une certaine simplicité du monde est, aussi, remarquablement efficace : l'ensemble de l'édifice scientifique est fondé sur l'induction. 

jeudi 31 décembre 2015

Comment faire une thèse ?

Ce  matin,  je reçois un e-mail d'une ancienne étudiante du groupe, qui me dit s'apprêter à commencer une thèse. Je la félicite... et lui demande aussitôt si elle s'est demandée comment faire une thèse, puisque c'est là la méthode que je propose : pour chaque acte que nous faisons, ne devons-nous pas "retenir nos  mains",  qui ne savent pas faire si elles ne sont pas guidées par notre tête, et chercher une stratégie, une méthode,  tant il est vrai que pour aller d'un point à un autre, il faut avoir choisi le chemin que l'on va emprunter avant de parcourir celui-ci ?

Dans notre groupe de recherche,  nous avons, en conséquence, une série de documents intitulés « Comment faire » :  "Comment peser", "Comment mesurer une température", "Comment utiliser un appareil de résonance magnétique nucléaire", "Comment décomposer un groupe de signaux  dans un spectre", etc. Ces « Comment faire » ne se rapportent pas seulement à des gestes techniques,  mais aussi à des comportements : "Comment présenter un poster dans un congrès", "Comment se comporter dans un laboratoire", etc.
Ici, la question  est : "Comment faire une thèse ?"... et nous avons évidemment un document qui propose des réponses. 

L'objectif est clair : notre jeune amie va passer trois ans dans un laboratoire pour faire un travail. Et il faut donc qu'elle sache comment le faire. Je pourrais bien sûr lui donner immédiatement notre document,  mais n'est-il pas plus formateur de  lui poser la question : Comment faire une  thèse ?


La suite sur http://www.agroparistech.fr/Comment-faire-une-these.html

mardi 29 décembre 2015

Et si l'on considérait que la vulgarisation s'arrête à la connaissance, et l'enseignement à la compétence ?

Dans un autre billet, je mettais la limite entre vulgarisation scientifique et technologique, d'une part, et enseignement scientifique et technologique, d'autre  part,  à l'utilisation du calcul.
A la vulgarisation, le discours explicatif, de l'extérieur de l'objet, si l'on peut dire ; à l'enseignement le maniement d'équations, de l'intérieur.
Ici, je propose une ligne de démarcation qui semble différente, mais qui ne l'est pas, en réalité : la vulgarisation viserait à transmettre des connaissances, mais l'enseignement veut transmettre des compétences.


La suite sur  http://www.agroparistech.fr/Et-si-l-on-considerait-que-la-vulgarisation-s-arrete-a-la-connaissance-et-l.html

lundi 28 décembre 2015

Ma bonne résolution

 Mes amis se perdent dans mes blogs : il y en a bien trop !
Et, moi, je vois que les billets ne sont pas toujours comme ils devraient être : certains sont insuffisamment positifs, ils manquent d'enthousiasme.

 Un  bilan, pour commencer :
 - d'abord, il y a le blog "Hervé This", à l'adresse http://hervethis.blogspot.fr/. Il s'agit d'un espace où je peux analyser des questions variées, qui ne trouveraient pas leur place sur le site d'AgroParisTech  (que je décris ci-dessous)
 - ensuite, il y a le site "Gastronomie moléculaire", http://gastronomie-moleculaire.blogspot.fr/. Il donnait des tas d'informations relatives à la gastronomie moléculaire... mais celui-là pouvait migrer vers l'AgroParisTech... et les billets correspondants ont effectivement migré
 - puis la revue Pour la Science m'a proposé de faire http://www.scilogs.fr/vivelaconnaissance/. Pendant plusieurs mois, ce blog n'a pas démérité, parce qu'il était conçu pour être positif, et il discutait des questions de science, de technologie, de connaissance...
 - enfin, est arrivée la proposition d'AgroParisTech, de transférer des billets sur le site de l'Ecole, en même temps qu'a été créé le Centre International de gastronomie moléculaire AgroParisTech-Inra, http://www.agroparistech.fr/-Le-blog-de-Herve-This-Vive-la-connaissance-.html, ce qui a suscité la création de plusieurs "sous-blogs" :
            - des réflexions sur l'enseignement supérieur http://www.agroparistech.fr/-A-propos-d-enseignement-superieur-mais-pas-seulement-.html
            - des réflexions "épistémologiques" : http://www.agroparistech.fr/-A-propos-de-recherche-scientifique-de-sciences-de-la-nature-de-technologie-.html
            - des questions de communication http://www.agroparistech.fr/-Des-questions-de-communication-scientifique-.html
             - des questions morales : http://www.agroparistech.fr/-Il-s-agit-d-agir-de-facon-responsable-.html
             - des réflexions  sur les bonnes pratiques scientifiques : http://www.agroparistech.fr/-Les-bonnes-pratiques-scientifiques-.html
 -  puis des informations variées sont données sur  http://www.agroparistech.fr/-1-Les-travaux-de-recherche-scientifique-ou-technologique-.html ;
              - des informations de gastronomie moléculaire sur http://www.agroparistech.fr/-Quelques-exemples-d-applications-de-la-gastronomie-moleculaire-.html
              - des informations sur la toxicologie sur  http://www.agroparistech.fr/1-Comment-ce-site-est-organise.html
 - il y a aussi des blogs moins fournis, tel le blog sur la cuisine note à note, qui a migré vers AgroParisTech, ou encore le blog Molecular gastronomy, qui a également migré... Et je n'évoque pas des pages de site telles celles qui sont consacrées à la toxicité des produits naturels, sur le site d'AgroParisTech, et qui ne s'apparentent pas à du blog.

Nous sommes bien d'accord : cela est trop ! Mais c'est secondaire, et la remise en ordre se fait progressivement. D'autant  que chaque blog est fait pour intéresser (j'espère) des amis particuliers : les questions de bonnes pratiques en science ne sont pas pour les mêmes amis que les questions de communication scientifique, par exemple.

Ce qui est plus grave, c'est que je m'aperçois aujourd'hui que certains billets sont bien trop négatifs ! Par exemple, les billets consacrés aux bonnes pratiques en science sont excessivement moralisateurs. Pour un tel sujet, où je sais que des amis craignent que  les réflexions ne se transforment en lois assorties de sanction, il importe de bien présenter les propositions comme des possibilités de tendre vers la perfection sans y prétendre, et dans la joie !
Pour les billets de blog "politiques", je vois  que j'exprime parfois un mécontentement. Ce n'est pas utile, cherchons plutôt à améliorer, par des propositions. Que faire des pisse vinaigre qui nous empêtrent un peu ? Rabelais avait résolu d'en rire. La carricature est une solution... mais faut-il prendre du temps à réagir  ? C'est bien trop d'honneur, et je viens de comprendre que la meilleure lutte contre la bêtise, c'est la promotion de la beauté, de l'intelligence, de l'enthousiasme !
L'idée du blog de Pour la Science, elle, était d'emblée positive, puisque le blog était fondé sur des "catégories prédéfinies d'enthousiasmes". Ca, c'est bon !

Ma bonne résolution, c'est donc de me cantonner à des catégories positives. Lesquelles ?
Les bonnes pratiques en science : bien fait, ce blog est sans doute utile.
Vive les  sciences de la nature : j'ai renommé cela "épistémologie", mais l'idée demeure, très positive.
Les merveilleuses applications des  sciences ? Jamais on ne dira assez à nos jeunes amis que le métier d'ingénieur, fait avec intelligence, activité et éthique, est extraordinaire !
La connaissance par la lorgnette de la gourmandise : oui, une belle façon d'aller de l'avant.
Les questions sont des promesses de réponses : c'est bien ce que l'on demande à un intellectuel, non ?
La beauté est dans l'oeil de celui qui regarde : là, on est immédiatement positif !
J'ai lu pour vous un livre merveilleux : ah, le partage des émotions, cela nous fait bien humain.
Apprendre ! : quelle question ! Elle mérite certainement que l'on s'y arrête un peu, que l'on analyse.

Et, pour conclure, je crois que j'ai compris quelque chose d'important, qui a de nouveau un rapport au Ragnarok, cette fin du monde des dieux, contre laquelle Wotan et ses guerriers combattent les géants, à partir du Valhalla : la meilleure  façon de combattre, c'est de construire.

jeudi 24 décembre 2015

Pas d'armée, pas de religion, pas de politique

La chose s'oublie, mais elle  mérite d'être redite : pour  un dîner réussi, chacun  doit s'interdire de parler de religion, d'armée, de politique  !

La question s'est posée avec acuité, lors de l'affaire Dreyfus, mais le bipartisme actuel conduit quasi nécessairement à des dîners où tous les bords coexistent, doivent coexister. Et comme un bon convive est celui qui parle sans prétention et écoute avec complaisance, nous avons le devoir d'éviter les sujets qui fâchent, dans ces circonstances : que nous soyons chez nous, car nous devons à nos hôtes de les rendre heureux ; que nous soyons chez  autrui, car s'il nous reçoit, nous devons nous bien tenir.
A la proposition d'éviter les trois sujets à éviter, je sais que certains grincheux rétorquent alors : "Mais alors, on ne peut parler de rien !". Pauvres grincheux, qui n'ont pas, dans la vie, autre chose!  Et tous ces émerveillements que  nous pouvons partager ? Les oeuvres d'art que nous avons découvertes, qu'il s'agisse de littérature, de musique, de peinture... ou de cuisine. Évidemment, il ne s'agit pas de faire étalage de titres, mais d'essayer de justifier nos émerveillements.
Et puis, la pensée, la merveilleuse pensée, qui nous fait grandir, la Raison, la merveilleuse Raison, dont nous avons tant besoin. N'est-ce pas à partager sans modération ?
Sans aller si loin, n'y a-t-il pas, aussi, le bonheur de nos métiers ? Examinons quelques métiers que j'ai rencontrés récemment. Menuisier ? Le bois est une matière  magique. Médecin ? On se préccupe d'autrui. Ramoneur ? Sans lui, c'est le feu  de cheminée, et il y a le bonheur de discuter avec ses clients. Le couvreur ? De même. Vendeur ? Le sourire qu'il devait afficher rejaillissait sur  son caractère. Ingénieur ? Il fait tourner les usines, donne du travail à d'autres, et leur permet donc de vivre. Scientifique ? Il s'agit de repousser les limites de la connaissances.
Comme pour les épinards, il y a ceux qui les aiment, et ceux  qui ne  les aiment pas, mais ne s'agit-il pas d'apprendre à y mettre de la crème ? Pardon pour la métaphore, mais tous les moyens sont bons quand il s'agit de mettre un peu d'harmonie dans ce monde.
 Je vous souhaite un joyeux réveillon. Ou, plutôt, je vous souhaite plutôt d'être capable de faire  que votre réveillon soit bon, non pas parce qu'il y aura eu de la bonne cuisine et de bons vins, mais, surtout, parce que  vous aurez réussi à faire une conversation merveilleuse.

dimanche 20 décembre 2015

Le même que celui du 19 décembre, mais en plus charitable

On m'envoie un article où je lis :

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci ! J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". 

Bien sûr, c'est la solution ! Chaque fois qu'on ne connais pas quelque chose, cela nous "pose problème". Et quand "cela nous pose problème", on élimine l'usage !
Tiens "pose problème" ? Je croyais qu'en français, on mettait des articles devant les noms ? Soit la mode a changé, soit notre interlocuteur a un usage limité du français. Pardon, je devrais peut-être écrire : soit mode a changé, soit interlocuteur a usage limité français.

Cela dit, la solution qui consiste à supprimer de notre existence tout ce que nous ne comprenons pas est merveilleuse, séduisante non ? Regardons-y de plus prêt.

Nous ne comprenons pas le fonctionnement de l'ordinateur que nous n'utilisons ? Revenons sans tarder à la Gentille Plume d'oie et à la Gentille Encre artisanale ou domestique.
Mais, au fait, d'où vient cette plume ? Il nous faudra aller à la Gentille Ferme voisine (ou faire notre élevage nous-même) pour en trouver sur une l'oie, un canard, sans quoi, on ne sait jamais : le Grand Complot pourrait nous refiler des "fausses plumes" !
Et l'encre ? N'utilisons certainement pas de la Vilaine Encre du "commerce", parce qu'on ne sais jamais : "ils" ont sans doute trafiqué notre produit. Oui, faisons  bouillir des clous rouillés avec de l'écorce d'arbre, puis filtrons, et stabilisons le produit avec de la gomme, exsudation d'arbre.
Bon, d'accord, écrire devient plus compliqué, mais combien "plus en accord avec nous-même" ! Et puis, nous sommes rassurés de tout "bien connaître".

Au fait, bien connaître : comment les oies, les canards, ont-ils ces plumes ? Je l'ignore : cela "pose problème". Pourquoi l'eau où l'on cuit écorce et rouille devient-elle noire ? Aïe : cela "pose problème". Et pourquoi certains arbres font-ils cette gomme ? Cela "pose problème". Et pourquoi la gomme stabilise-t-elle l'encre ?
 J'ai une idée : puisque je ne le sais pas, je ne vais pas utiliser la gomme, et secouer l'encre avant chaque utilisation. Après tout, tant qu'à nous compliquer la vie, ne reculons pas devant de petits sacrifices...

Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause.

Je veux  consommer des ingrédients que je connais ?
Revenons à la question de l'alimentation, puisque c'est cela dont il s'agit. Pour 80 pour cent des Français, qui vivent en ville, les légumes viennent des maraîchers. Selon la Théorie du Grand Complot, ce sont certainement de gros industriels malhonnêtes, qui font leur beurre sur notre dos. Allons chercher les légumes  à la ferme. Pas le temps ? Alors créons des associations, avec nos cotisation qui payeront du  personnel pour nous procurer des fruits et légumes dont nous connaissons l'origine. Non, la solution est mauvaise : si nous payons du personnel, le personnel sera exploité. Alors il y a le système des AMAP, pour lequel des Gentils Producteurs nous donneront nos produits. Mais, au fait, quelle différence avec un marché ? Sur le marché, ne s'agit-il pas de Gentils Producteurs qui viennent vendre leurs  produits ? Ah non ! Il y a les "Affreux Intermédiaires", ceux qui font du beurre sur notre dos et sur celui des Gentils Producteurs.

Bon, nous avons donc supprimé les Affreux Intermédiaires, et nous savons qui produit ce que nous mangeons. Mais, au fait, comment cela est-il produit ? Allons,  chacun sait qu'on met une graine dans la terre et que ça pousse tout seul. Arroser ? Ce n'est pas de la chimie. Des engrais ? Le fumier. Mais les semences ?
Là, deux  possibilités : selon la théorie proposée initialement, de la même façon que l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures  et les semences ? Il y a la solution de virer semences et méthodes de culture. Ou bien de rester aux graines que le légume fait lui-même, et ne pas utiliser des Vilaines Semences du Commerce : le Grand Complot veut certainement faire du blé sur notre dos !
Donc nous n'irons nous fournir que chez les Gentils Maraîchers qui n'achèteront pas les semences de Méchants Semenciers industriels. Oui, "industriels" : le mot arrive. Ce qui est Très Mauvais, c'est l'industrie ! Nous ne traiterons qu'avec des Gentils Artisans.
La voilà, la solution qui nous était proposée !
Pour les viandes ? Avec notre système précédent, nous ne prendrons de la viande que si elle vient d'un Gentil Eleveur "artisanal". Tiens, au fait, combien de bêtes un tel homme peut-il élever au maximum ? Seul ? Nous avons dit un artisan, soit quelqu'un qui n'exploite pas autrui. Limitons donc l'exploitation à un homme et sa famille. Personne en plus, sans quoi nous verserions dans la Méchante Industrie. Oui, parce que, si nous employons quelqu'un, c'est le début de la fin : un employé, deux, trois, dix, cent... D'ailleurs, au Canada, ne disent-ils pas que les chefs sont l'industrie ? Ce qui est juste : je connais des cuisiniers qui ont plusieurs restaurants et qui, de ce fait, employent beaucoup de monde ! L'Abominable Industrie. De sorte que nous arrivons à une conclusion supplémentaire, en chemin : nous n'irons plus que chez les Cuisiniers Artisans, ceux qui font tout eux-mêmes : la cuisine, le service et la vaisselle. Les autres ? D'Affreux Cuisiniers Industriels !

Un doute m'étreint : d'accord, le Gentil Eleveur aura élevé seul ses bêtes, mais qui les abattra ? Ouf, je viens de comprendre que ce sera un Gentil Boucher Artisan, comme dans le Bon Ancien Temps. Qui aura acheté des couteaux à un Gentil Artisan coutelier, lequel aura fait les couteaux un à un, des ses Propres Mains. Le métal ? Il l'aura acheté à un Gentil Métallurgiste, artisan qui aura acheté le charbon de bois à un Gentil Charbonnier, et le minerai à un Gentil Mineur. Le Gentil Mineur ne peut pas extraire seul le minerai ? Il aura fait une association, une Gentille Coopérative !

Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Un "artisan respectueux  des matières premières" ? Ah, oui : il y a les Gentils Artisans, mais ceux-ci ne sont pas tous gentils ! Il faut qu'ils soient "respectueux des matières premières" et qu'ils utilisent produits et vocaculaires compréhensibles.
Respectueux des matières premières, quand même c'est compliqué, non ? Je dois pas avoir le Bon Etat d'Esprit, parce que j'ai vraiment du mal à comprendre ce que signifie respecter des matières premières.
Allons, un effort : pensons à de la cuisine. Et, plus précisément, pensons à la recette de poulet rôti avec des pommes de terre qui sera sur la table à midi. J'ai donc un poulet qui vient d'un Gentil Eleveur, puis d'un Gentil Boucher. Comment le cuire en le respectant ? Je vois bien que je peux le manipuler avec une grande douceur... mais il est mort. Alors le cuire sans le chauffer trop ? La peau ne sera pas croustillante ! Une idée : chercher dans le dictionnaire ce que "respecter" signifie. Le Gentil Trésor de la langue française informatisé nous dit "action de prendre en considération". Bon, si je prends la cuisson en considération, je respecte. Autrement dit, il faut que je réfléchisse... D'ailleurs, l'article que l'on m'avait signalé disait bien "réfléchir en connaissance de cause".
Mais, au fait, pourquoi ne pas "prendre en considération" les additifs ? Ah, non, quand même  pas les additifs, puisque c'est une Méchante Invention.
Alors que farine, sucre, beurre, légumes, sel... Au fait, sais-je bien ce dont il s'agit ? Farine ? Je l'aurai achetée à un Gentil Meunier, un artisan, lequel se sera fourni à un Gentil Agriculteur, qui aura travaillé seul. Comment ? Là, les calculs les plus simples montrent que, sans mécanisation, un homme ne peut faire vivre que quatre personnes, à condition de ne faire que travailler. Pas de vacances pour notre Gentil Agriculteur ? Bon, d'accord, laissons-le Laissons avoir un tracteur. Un tracteur qui viendra d'où  ? D'un Gentil Artisan fabriquant de tracteurs ?

Vite, vite, passons au  sucre, puisque je ne sais pas répondre à la question : après tout, n'avions-nous pas comme conseil de supprimer de notre vie tout ce qui nous "pose problème" ?
Donc le sucre : ne l'achetons qu'à un Gentil Artisan, qui aura  lui-même lavé les betteraves d'un Gentil Agriculteur, qui aura lui-même broyé ses betteraves, aura ajouté de l'eau, de la chaux... De la chaux ? Oui, il se sera procuré la chaux d'un Gentil Artisan. Comment ce dernier aura-t-il  chauffé son four à chaux ? Pas d'électricité, parce que, là, on risque gros. Pas de nucléaire, bien sûr. Pas de centrale à charbon. Pas de pétrole. De l'éolien et du  solaire ? Pas des panneaux solaires, puisqu'ils sont fabriqués par de Méchants Industriels, et pas de ces grosses éoliennes industrielles modernes. Des moulins, de Gentils Moulins !
Passons au beurre. Facile : cela vient d'un Gentil Eleveur, ou d'un Gentil Crémier. Le sel ? Un Gentil Saunier. Il sera venu au marché, avec son sel, et nous saurons d'où vient le sel. Au fait, il aura fait six cent kilomètres pour venir du bord de mer ? Ben... oui. Et qui extraira le sel, pendant ce temps ? Allons, on sait bien que le vent et le soleil évaporent l'eau sans intervention humaine.

Et c'est ainsi que nous avons des  légumes, des viandes, de la farine, de l'huile, du sucre, du sel. Avons-nous vraiment besoin  d'additifs ?
Faisons l'essai d'une crème au caramel, pour le savoir. Il suffit d'avoir des oeufs, du sucre, du lait, de la vanille. Tout va bien... jusqu'au caramel : c'est un additif de code E150 ! Oui, mais c'est un Méchant Additif si nous l'achetons, mais si nous le faisons nous-même, cela devient un Gentil Caramel. A la limite, d'ailleurs, pourquoi ne pas l'acheter à un Gentil Artisan fabriquant de Gentil Caramel.
Une autre recette : une tarte au  citron meringuée. De la farine, du sucre, de l'eau, du citron, des oeufs, du sel. Le citron ? Il  sera acheté à un Gentil Maraîcher. Le citron n'est pas local ? Il sera donc venu du sud de la France. Le sud de la France ne produit pas assez de citron pour tous les Parisiens ? Tant pis : ceux-ci se passeront de tarte au citron, et ils mangeront des tartes au poires ou aux pommes.
Après tout, si nous mangeons des produits locaux, nous devons aussi manger des produits de saison. Ainsi, plus de Méchants Conservateurs, lesquels font partie de la catégorie des Méchants Additifs !
En hiver, il nous reste donc Gentils carottes, choux, pommes de terre, poireaux... Qu'avons-nous besoin du reste ? Et puis, en nous limitant ainsi, nous faisons disparaître les Méchants Supermarchés.

La proposition initiale était donc Merveilleuse : de la soupe aux choux tous les jours, des tartes aux pommes, et nous ne cherchons pas à savoir d'où viennent les plumes des canards, l'énergie...
Ne nous posons pas de question, et soyons Respectueux. Quelle Vie Merveilleuse s'offre à nous !

Le même que celui du 19 décembre, mais en plus charitable

On m'envoie un article où je lis :

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci ! J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". 

Bien sûr, c'est la solution ! Chaque fois qu'on ne connais pas quelque chose, cela nous "pose problème". Et quand "cela nous pose problème", on élimine l'usage !
Tiens "pose problème" ? Je croyais qu'en français, on mettait des articles devant les noms ? Soit la mode a changé, soit notre interlocuteur a un usage limité du français. Pardon, je devrais peut-être écrire : soit mode a changé, soit interlocuteur a usage limité français.

Cela dit, la solution qui consiste à supprimer de notre existence tout ce que nous ne comprenons pas est merveilleuse, séduisante non ? Regardons-y de plus prêt.

Nous ne comprenons pas le fonctionnement de l'ordinateur que nous n'utilisons ? Revenons sans tarder à la Gentille Plume d'oie et à la Gentille Encre artisanale ou domestique.
Mais, au fait, d'où vient cette plume ? Il nous faudra aller à la Gentille Ferme voisine (ou faire notre élevage nous-même) pour en trouver sur une l'oie, un canard, sans quoi, on ne sait jamais : le Grand Complot pourrait nous refiler des "fausses plumes" !
Et l'encre ? N'utilisons certainement pas de la Vilaine Encre du "commerce", parce qu'on ne sais jamais : "ils" ont sans doute trafiqué notre produit. Oui, faisons  bouillir des clous rouillés avec de l'écorce d'arbre, puis filtrons, et stabilisons le produit avec de la gomme, exsudation d'arbre.
Bon, d'accord, écrire devient plus compliqué, mais combien "plus en accord avec nous-même" ! Et puis, nous sommes rassurés de tout "bien connaître".

Au fait, bien connaître : comment les oies, les canards, ont-ils ces plumes ? Je l'ignore : cela "pose problème". Pourquoi l'eau où l'on cuit écorce et rouille devient-elle noire ? Aïe : cela "pose problème". Et pourquoi certains arbres font-ils cette gomme ? Cela "pose problème". Et pourquoi la gomme stabilise-t-elle l'encre ?
 J'ai une idée : puisque je ne le sais pas, je ne vais pas utiliser la gomme, et secouer l'encre avant chaque utilisation. Après tout, tant qu'à nous compliquer la vie, ne reculons pas devant de petits sacrifices...

Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause.

Je veux  consommer des ingrédients que je connais ?
Revenons à la question de l'alimentation, puisque c'est cela dont il s'agit. Pour 80 pour cent des Français, qui vivent en ville, les légumes viennent des maraîchers. Selon la Théorie du Grand Complot, ce sont certainement de gros industriels malhonnêtes, qui font leur beurre sur notre dos. Allons chercher les légumes  à la ferme. Pas le temps ? Alors créons des associations, avec nos cotisation qui payeront du  personnel pour nous procurer des fruits et légumes dont nous connaissons l'origine. Non, la solution est mauvaise : si nous payons du personnel, le personnel sera exploité. Alors il y a le système des AMAP, pour lequel des Gentils Producteurs nous donneront nos produits. Mais, au fait, quelle différence avec un marché ? Sur le marché, ne s'agit-il pas de Gentils Producteurs qui viennent vendre leurs  produits ? Ah non ! Il y a les "Affreux Intermédiaires", ceux qui font du beurre sur notre dos et sur celui des Gentils Producteurs.

Bon, nous avons donc supprimé les Affreux Intermédiaires, et nous savons qui produit ce que nous mangeons. Mais, au fait, comment cela est-il produit ? Allons,  chacun sait qu'on met une graine dans la terre et que ça pousse tout seul. Arroser ? Ce n'est pas de la chimie. Des engrais ? Le fumier. Mais les semences ?
Là, deux  possibilités : selon la théorie proposée initialement, de la même façon que l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures  et les semences ? Il y a la solution de virer semences et méthodes de culture. Ou bien de rester aux graines que le légume fait lui-même, et ne pas utiliser des Vilaines Semences du Commerce : le Grand Complot veut certainement faire du blé sur notre dos !
Donc nous n'irons nous fournir que chez les Gentils Maraîchers qui n'achèteront pas les semences de Méchants Semenciers industriels. Oui, "industriels" : le mot arrive. Ce qui est Très Mauvais, c'est l'industrie ! Nous ne traiterons qu'avec des Gentils Artisans.
La voilà, la solution qui nous était proposée !
Pour les viandes ? Avec notre système précédent, nous ne prendrons de la viande que si elle vient d'un Gentil Eleveur "artisanal". Tiens, au fait, combien de bêtes un tel homme peut-il élever au maximum ? Seul ? Nous avons dit un artisan, soit quelqu'un qui n'exploite pas autrui. Limitons donc l'exploitation à un homme et sa famille. Personne en plus, sans quoi nous verserions dans la Méchante Industrie. Oui, parce que, si nous employons quelqu'un, c'est le début de la fin : un employé, deux, trois, dix, cent... D'ailleurs, au Canada, ne disent-ils pas que les chefs sont l'industrie ? Ce qui est juste : je connais des cuisiniers qui ont plusieurs restaurants et qui, de ce fait, employent beaucoup de monde ! L'Abominable Industrie. De sorte que nous arrivons à une conclusion supplémentaire, en chemin : nous n'irons plus que chez les Cuisiniers Artisans, ceux qui font tout eux-mêmes : la cuisine, le service et la vaisselle. Les autres ? D'Affreux Cuisiniers Industriels !

Un doute m'étreint : d'accord, le Gentil Eleveur aura élevé seul ses bêtes, mais qui les abattra ? Ouf, je viens de comprendre que ce sera un Gentil Boucher Artisan, comme dans le Bon Ancien Temps. Qui aura acheté des couteaux à un Gentil Artisan coutelier, lequel aura fait les couteaux un à un, des ses Propres Mains. Le métal ? Il l'aura acheté à un Gentil Métallurgiste, artisan qui aura acheté le charbon de bois à un Gentil Charbonnier, et le minerai à un Gentil Mineur. Le Gentil Mineur ne peut pas extraire seul le minerai ? Il aura fait une association, une Gentille Coopérative !

Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Un "artisan respectueux  des matières premières" ? Ah, oui : il y a les Gentils Artisans, mais ceux-ci ne sont pas tous gentils ! Il faut qu'ils soient "respectueux des matières premières" et qu'ils utilisent produits et vocaculaires compréhensibles.
Respectueux des matières premières, quand même c'est compliqué, non ? Je dois pas avoir le Bon Etat d'Esprit, parce que j'ai vraiment du mal à comprendre ce que signifie respecter des matières premières.
Allons, un effort : pensons à de la cuisine. Et, plus précisément, pensons à la recette de poulet rôti avec des pommes de terre qui sera sur la table à midi. J'ai donc un poulet qui vient d'un Gentil Eleveur, puis d'un Gentil Boucher. Comment le cuire en le respectant ? Je vois bien que je peux le manipuler avec une grande douceur... mais il est mort. Alors le cuire sans le chauffer trop ? La peau ne sera pas croustillante ! Une idée : chercher dans le dictionnaire ce que "respecter" signifie. Le Gentil Trésor de la langue française informatisé nous dit "action de prendre en considération". Bon, si je prends la cuisson en considération, je respecte. Autrement dit, il faut que je réfléchisse... D'ailleurs, l'article que l'on m'avait signalé disait bien "réfléchir en connaissance de cause".
Mais, au fait, pourquoi ne pas "prendre en considération" les additifs ? Ah, non, quand même  pas les additifs, puisque c'est une Méchante Invention.
Alors que farine, sucre, beurre, légumes, sel... Au fait, sais-je bien ce dont il s'agit ? Farine ? Je l'aurai achetée à un Gentil Meunier, un artisan, lequel se sera fourni à un Gentil Agriculteur, qui aura travaillé seul. Comment ? Là, les calculs les plus simples montrent que, sans mécanisation, un homme ne peut faire vivre que quatre personnes, à condition de ne faire que travailler. Pas de vacances pour notre Gentil Agriculteur ? Bon, d'accord, laissons-le Laissons avoir un tracteur. Un tracteur qui viendra d'où  ? D'un Gentil Artisan fabriquant de tracteurs ?

Vite, vite, passons au  sucre, puisque je ne sais pas répondre à la question : après tout, n'avions-nous pas comme conseil de supprimer de notre vie tout ce qui nous "pose problème" ?
Donc le sucre : ne l'achetons qu'à un Gentil Artisan, qui aura  lui-même lavé les betteraves d'un Gentil Agriculteur, qui aura lui-même broyé ses betteraves, aura ajouté de l'eau, de la chaux... De la chaux ? Oui, il se sera procuré la chaux d'un Gentil Artisan. Comment ce dernier aura-t-il  chauffé son four à chaux ? Pas d'électricité, parce que, là, on risque gros. Pas de nucléaire, bien sûr. Pas de centrale à charbon. Pas de pétrole. De l'éolien et du  solaire ? Pas des panneaux solaires, puisqu'ils sont fabriqués par de Méchants Industriels, et pas de ces grosses éoliennes industrielles modernes. Des moulins, de Gentils Moulins !
Passons au beurre. Facile : cela vient d'un Gentil Eleveur, ou d'un Gentil Crémier. Le sel ? Un Gentil Saunier. Il sera venu au marché, avec son sel, et nous saurons d'où vient le sel. Au fait, il aura fait six cent kilomètres pour venir du bord de mer ? Ben... oui. Et qui extraira le sel, pendant ce temps ? Allons, on sait bien que le vent et le soleil évaporent l'eau sans intervention humaine.

Et c'est ainsi que nous avons des  légumes, des viandes, de la farine, de l'huile, du sucre, du sel. Avons-nous vraiment besoin  d'additifs ?
Faisons l'essai d'une crème au caramel, pour le savoir. Il suffit d'avoir des oeufs, du sucre, du lait, de la vanille. Tout va bien... jusqu'au caramel : c'est un additif de code E150 ! Oui, mais c'est un Méchant Additif si nous l'achetons, mais si nous le faisons nous-même, cela devient un Gentil Caramel. A la limite, d'ailleurs, pourquoi ne pas l'acheter à un Gentil Artisan fabriquant de Gentil Caramel.
Une autre recette : une tarte au  citron meringuée. De la farine, du sucre, de l'eau, du citron, des oeufs, du sel. Le citron ? Il  sera acheté à un Gentil Maraîcher. Le citron n'est pas local ? Il sera donc venu du sud de la France. Le sud de la France ne produit pas assez de citron pour tous les Parisiens ? Tant pis : ceux-ci se passeront de tarte au citron, et ils mangeront des tartes au poires ou aux pommes.
Après tout, si nous mangeons des produits locaux, nous devons aussi manger des produits de saison. Ainsi, plus de Méchants Conservateurs, lesquels font partie de la catégorie des Méchants Additifs !
En hiver, il nous reste donc Gentils carottes, choux, pommes de terre, poireaux... Qu'avons-nous besoin du reste ? Et puis, en nous limitant ainsi, nous faisons disparaître les Méchants Supermarchés.

La proposition initiale était donc Merveilleuse : de la soupe aux choux tous les jours, des tartes aux pommes, et nous ne cherchons pas à savoir d'où viennent les plumes des canards, l'énergie...
Ne nous posons pas de question, et soyons Respectueux. Quelle Vie Merveilleuse s'offre à nous !