lundi 13 mai 2024

A quoi bon des travaux pratiques, dans les enseignements scientifiques ?

 Faut-il des travaux pratiques ? 

La question des travaux pratiques est régulièrement discutée dans l'enseignement supérieur, car ces séances pédagogiques coûtent évidemment plus cher que des cours théoriques, où l'on se contente d'un tableau, naguère noir, aujourd'hui blanc. On ne manquera pas, à ce propos, de rappeler la disparition des "préparateurs", qui étaient des assistants des professeurs, chargés de préparer les expériences qui illustraient les cours : avec la disparition de ces derniers, les professeurs ont dû faire eux-mêmes les expérimentations... qui ont finalement entièrement disparu. 

Restent donc les travaux pratiques. Sont-ils bien nécessaires ? La question s'est posée il y a quelques années, quand certaines universités anglaises ont voulu les supprimer... et il a fallu que des lauréats du prix Nobel annoncent qu'ils rendraient leur diplôme en cas de suppression des travaux pratiques pour que les universités retirent leurs projets. Mais il y a eu un chantage, et non un vrai débat. 

La question mérite d'être posée, comme d'ailleurs toutes les questions "qui fâchent" : faut-il vraiment que les étudiants fassent des travaux pratiques ? On observera d'abord que la science expérimentale est... expérimentale ! Il faut des données expérimentales pour que, ultérieurement, des élaborations théoriques puissent s'ériger. 

On observera ensuite que les étudiants font des "stages", dont l'objectif officiel (voir le site du Ministère de la recherche) est la transformation de connaissances en compétences : on pourrait alors imaginer que les entreprises soient en charge de former les étudiants aux manipulations pratiques... à cela près que cette formation est une charge considérable (souvenons-nous du point de départ : le coût), qui mobilise des personnels, et que les entreprises seraient alors en droit non pas de rémunérer les stages, mais, au contraire, de revendiquer le versement de sommes au titre de la formation qu'elles dispensent. 

On observera que les étudiants qui nous arrivent en stage, au niveau du Master, ne savent souvent pas changer un plomb, scier, visser, percer, etc., les cours de technologies des collèges et des lycées ayant échoué à leur donner ces compétences (c'est un fait, pas une critique), sauf évidemment (peut-être) dans les filières technologiques. 

Enfin, on observera, par une métaphore juste et puissante, que l'on peut avoir reçu tous les conseils théoriques du monde, on ne jouera au tennis ou au violon qu'après un très long entraînement pratique. Que notre intelligence y trouve ou non son compte, c'est ainsi : nos mains doivent apprendre, et il n'est pas vrai que la tête soit toute puissante. 

Bref, il faut donc des séances de travaux pratiques. Sur la base de cette conclusion irrémédiable, nous pouvons maintenant chercher à organiser ces derniers, pour qu'ils soient efficaces, mais on observera, en reprenant l'exemple du tennis ou du violon, que le temps passé doit être considérable. Et on se souviendra que c'est en vertu de tels raisonnements que Louis Joseph Gay-Lussac, puis son élève Justus von Liebig, organisèrent des formations pour les étudiants en chimie. 

On n'oubliera pas que le grand Antoine Laurent de Lavoisier parvint à ses avancées scientifiques par une parfaite maîtrise de ses expérimentations : la "balance de Fortin" ou son aéromètre étaient des outils célèbres dans toute l'Europe scientifique, avant que Louis Joseph Gay-Lussac ou Jons Berzélius ne deviennent les plus grands chimistes de leur temps, leurs analyses étant également bien plus précises que celles de leurs contemporains. 

 

Mens sana in corpore sano.

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