Les cannelés ? Rien de plus simple, et il serait d'ailleurs erroné de croire que ces produits sont l'apanage du Bordelais, car ils existent en Angleterre sous le nom Durham popover.
Ils s'apparentent aux soufflés, puisque c'est une préparation qui gonfle, mais, contrairement aux soufflés, ils restent gonflés après la cuisson, de sorte qu'ils s'apparentent également aux gâteaux... dont certains gonflent également.
Ils gonflent ? Oui, ils gonflent, car ils contiennent beaucoup d'eau, et que les conditions de cuisson font évaporer une partie de cette dernière, ce qui engendre un grand volume de vapeur.
Mais commençons par une recette, puisque c'est tout simple. Dans un cul de poule, plaçons du lait (c'est de l'eau qui est du goût, description qui conduit immédiatement à imaginer des dérivés de la préparation, si l'on remplace le lait par du jus de fruits, du thé, du café, etc.) avec de la farine et de l'oeuf. La farine apporte des grains d'amidon, qui empèseront durant la cuisson et feront une architecture molle, qui stabilisera la préparation. L'oeuf apporte également de l'eau, et aussi des protéines qui coaguleront, rigidifiant la préparation. On mélange les trois ingrédients afin d'obtenir une pâte mollette, puis on dépose quelques dizaines de grammes de cette préparation dans un moule, et l'on cuit à une température supérieure à 100 degrés.
Ainsi le moule, surtout s'il est de métal et conduit bien la chaleur, provoque l'évaporation de l'eau, si bien que la préparation gonfle jusqu'à ce que les protéines coagulent et figent le volume. Finalement on récupère une préparation molle, coagulée, alvéolée, avec un bon goût d’œuf, et de tous les ingrédients que l'on utilisés, tels la vanilline, le sucre, le rhum, etc.
Si la cuisson s'est bien passée (elle dure jusqu'à une heure), le produit a une légère croûte croustillante, et si la préparation était sucrée, alors, mieux, le cannelé est légèrement caramélisé, donc coloré et de haut goût. Dans cette préparation, l'important est sans doute le rapport de la partie de croûte et de la partie moelleuse du cœur. Je vous invite, si vous n'avez pas déjà fait, à visionner le film où l'on voit le cuisinier français Michel Bras régler au millimètre la taille du noyau de chocolat de ses célèbres coulants. Ils ont été souvent copiés, mais le savoir-faire du grand artiste dépasse largement l'idée de mettre un noyau qui fond dans un biscuit au chocolat : il y a d'abord la question du goût, et, aussi, le soin infini que le grand artiste a mis dans tous les détails, à commencer par celui de la taille exacte des diverses parties de son gâteau. Pour les cannelés, et pour bien des préparations analogues, la question de la taille, la question du rapport croûte-coeur, la question du moelleux, fixé à la fois par la quantité d'eau et par la cuisson, la question du goût... Tout compte !