Il y a des gestes professionnels, que l'on apprend à faire, et sans doute dans tous les métiers, mais pour la chimie en particulier, il y en a un qui consiste à ne pas poser sur la table le bouchon d'une bouteille.
Plus exactement, dans un laboratoire, n'y a pas de table, mais des paillasses, qui sont des tables professionnelles sur lesquelles on peut expérimenter sans dommage pour le meuble.
Souvent, elle sont couvertes de carreaux de céramique, ou, aujourd'hui, par des verres spéciaux.
Mais qu'importe. Je veux surtout arriver à ce geste courant en chimie qui consiste à prendre un flacon de réactif pour en utiliser une partie.
C'est là que survient la question d'ouvrir la bouteille, et de verser une partie du réactif dans un récipient plus petit, qui sera utilisé pour l'expérience.
On prend la bouteille, on la pose donc sur la paillasse, et long dévisse le capuchon.
La pire des fautes consisterait à poser le capuchon directement sur la paillasse dans la même position qu'il avait sur la bouteille, car ce capuchon est vraisemblablement souillé du réactif et il souillerait la paillasse, en même temps que des souillures de la paillasse viendraient sur le capuchon... qui contaminerait tout le réactif.
Autre possibilité : poser le capuchon à l'envers sur la paillasse : c'est guère mieux, car la pailasse souillerait ensuite le capuchon, et tout ceux qui manipuleraient le flacon.
C'est la raison pour laquelle les chimistes font différemment : ayant ouvert la bouteille, ils conservent le capuchon dans le creux de la main pendant qu'ils utilisent la bouteille de réactif.
Ce n'est pas un geste difficile, mais c'est la signature la chimiste qui a réfléchit à ce qu'il fait. Une "compétence professionnelle", donc.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
lundi 2 mai 2022
On reconnaît les chimistes à ses gestes
dimanche 1 mai 2022
Le travail du verre en chimie
Les chimistes utilisent beaucoup de verrerie pour leurs expérimentations, parce que l'on réduit ainsi les réactions possibles entre les réactifs que l'on étudie et les contenants où ils sont placés.
Souvent, il y a des liquides ou des gaz à conduire, ce qui se fait donc par des tubes en verre.
Ces tubes en verre doivent être coudés, ce qui s'apprend facilement.
Prenons donc une petite lampe à alcool comme celle d'un appareil à fondue, et prenons un tube en verre entre les deux mains espacées d'une vingtaine de centimètres.
Nous mettons la partie centrale du tube au-dessus de la flamme et nous le tournons afin de chauffer régulièrement toute la surface en un point particulier.
Progressivement, on voit la flamme jaunir : c'est le signe que le verre commence à devenir très chaud.
D'ailleurs, quand le verre est bien jaune, on peut s'amuser à le tirer doucement, en tirant la main gauche vers la gauche et la main droite vers la droite : on voit le tube en verre s'affiner jusqu'à la rupture.
Si l'on casse l'extrémité en la tapant contre la table, alors on obtient tube effilé.
Bien sûr, il y a des chances pour que l'on puisse faire mieux que ce premier essai, surtout si l'on veut faire ce qu'on nomme une pipette pasteur, c'est-à-dire un tube avec une effilure très longue.
Si l'on coude le tube chauffé, au lieu de l'étirer, on fait... un coude.
Là, il faut apprendre à obtenir un coude régulier, car il y a deux écueils. Le premier, c'est quand on coude le verre alors qu'il est trop froid : la partie externe vient faire une sorte de méplat qui réduit le diamètre du tube. Autre écueil : quand le verre est trop chaud, la partie de l'intérieur de la courbure fait une sorte de bourrelet, de repli.
Bref il y a lieu, encore une fois, à apprendre à repérer l'exacte température qui convient, en se fondant notamment sur la couleur de la flamme dans laquelle on tourne le tube avant de le travailler.
Il y a bien d'autres manipulation avec du verre, mais, en tout cas, en voici deux élémentaires qu'un jeunes chimiste pourrait s'amuser à obtenir.
NB : Sans se brûler, ce qui arrive par mégarde, car le verre chaud ne montre pas qu'il est chaud. Il y a alors des pommades contre les brûlures ;-)
samedi 30 avril 2022
Comment la règle de Faraday à propos des vérifications lui a été utile
L'extraordinaire chimiste et physicien britannique Michael Faraday appliqua explicitement six règles, après avoir eu entre les mains un livre d' "amélioration de l'esprit".
Et l'une d'entre elles était de vérifier ce qu'on lui disait.
Comment cette règle a-t-elle contribué à faire de Faraday le grand Faraday qu'il fut ?
Il y a mille exemples mais l'un des premiers fut le suivant : Faraday, qui était apprenti relieur, eut à relier des Conversations chimique de Madame Marcet, un livre de vulgarisation de la chimie qui proposait des expériences élémentaires. Il les reproduisit, vérifiant ce qui est écrit, et c'est ainsi que, progressivement, il devint extraordinairement compétent en chimie, et qu'il fut à même de parfaitement comprendre la conférence de Humphrey Davis à laquelle il assista un peu plus tard.
Il fut progressivement connu dans Londres précisément parce qu'il reproduisait de telles expériences : ce n'est pas si fréquent qu'un enfant se livre à des reproductions d'expérience de chimie... D'ailleurs, c'est cela aussi qui fit que Justus Liebig, en Allemagne, fut repéré par un chimiste qui passait dans sa ville et qui l'emmena comme assistant.
Oui, vérifions ce que l'on nous dit, avant d'en tirer des conséquences qui n'ont pas lieu d'être si ce que l'on nous dit est faux !
Et c'est pour cette raison précise que, depuis le 24 mars 1980, je teste les "précisions culinaires"... avec des surprises presque chaque fois !
vendredi 29 avril 2022
Entretenir une correspondance
Parmi les six règles que le chimiste et physicien anglais Michael Faraday s'imposait depuis tout jeune, il y avait celle-ci : entretenir une correspondance.
Pourquoi le fait d'avoir une correspondance permet-il de devenir un excellent scientifique ? Bien sûr, il y a manière et manière d'avoir une correspondance, et de vagues messages, par email, sms ou autre ne nous feront guère grandir.
Mais il y a aussi des façon intelligentes de faire et, évidemment, c'est ce que fit Faraday : il avait compris que cette règle visait à élaborer un discours de qualité.
Il y a mille raisons pour lesquelles cela est utile, des raisons le fond et des raisons de communication.
Pour les raisons de fond, on doit évoquer à ce propos l'introduction du Traité élémentaire de chimie par lequel Antoine de Lavoisier réforma la chimie et engendra la chimie moderne : dans le tout début de son livre, il cite Condillac en faisant observer que la pensée, c'est les mots.
Et c'est d'ailleurs ce qui était un des objectifs de Faraday : entretenir une correspondance pour être en position d'explorer les mots, c'est-à-dire les pensées.
Il écrivait à son ami Abott... alors que celui-ci vivait à quelques centaines de mètres... et grâce à cette correspondance d'ailleurs, nous avons des traces du développement de la pensée de ce scientifique extraordinaire que fut Faraday.
Il apprit, en écrivant de façon "élevée", la précision dans les termes, qui épaula sa précision dans les manipulations.
Plus tard, d'ailleurs, quand il enseigna à tes frères et soeur, il insista sur ce point essentiel qui consiste à ne pas passer trop vite sur les mots qu'on ne comprend pas, mais, au contraire, à les examiner, à l'aide d'un dictionnaire, à les recopier, à recopier leur définition, à apprendre ces mots les uns à la suite des autre.
C'est ainsi que l'on communique bien, par oral ou par écrit, mais c'est aussi ainsi que l'on calcule bien, car le calcul est une façon abrégé d'écrire.
C'est aussi par les mots justes que l'on pense bien comme l'avait justement fait observer Lavoisier, et et c'est pour cette raison que ce conseil aida tant notre jeune Faraday, dont on ne doit pas oublier qu'il venait d'une famille extrêmement pauvre.
Faisons notre miel de son conseil : entretenons des correspondances !
jeudi 28 avril 2022
Soyons prudents, pas craintifs
Je trouve intéressant de me souvenir que, au début des années 1990, alors que j'avais publiquement montré à la télévision, un mélange le basilic et de jus de citron vert, j'avais été interrogé des cuisiniers (pas des moindres) qui me demandaient si ce mélange n'était pas toxique.
J'avais été étonné de cette question, mais j'avais eu la réponse suivante : la cuisine traditionnelle a sélectionné des associations comestibles d'ingrédients, et tout nouveau mélange pouvait être soupçonné d'être toxique.
À l'époque, j'avais été pris au dépourvu, et je n'avais pas très bien répondu à mes amis, pas plus que je ne l'ai fait plus tard quand il était question de toxicité, pour des mélanges de composés individuellement faiblement toxiques : le fameux "effet cocktail" qu'on nous ressort périodiquement, et dont on ne sait guère à quoi il correspond, au-delà des mots (sans compter que, dans un cocktail, le plus dangereux, c'est l'éthanol ;-)).
Mais restons à la première question. Au fond, je comprends aujourd'hui que nos amis qui n'ont pas de connaissances de chimie sont très désemparés pour traiter de telles questions.
D'ailleurs il est bon de bien distinguer la physique et la chimie : dans un mélange physique, les molécules que l'on mélange se retrouvent finalement inchangées dans le mélange ; c'est seulement quand il y a une réaction chimique que les molécules finales sont différentes des molécules initiales.
Pour prendre un exemple visuel, la physique consisterait à mélanger des balles bleues et des balles rouges : on retrouverait les mêmes balles bleues et les mêmes balles rouges.
En revanche, s'il y a une réaction, un mélange de balles bleues et de balles rouges pourrait conduire à des balles toutes orange.
Quand on mélange deux ingrédients alimentaires, tel du basilic et du citron vert, on mélange d'abord essentiellement de l'eau, puisque les aliments sont majoritairement faits d'eau : plus de 90 pour cent pour le basilic, et plus de 99 pour cent pour le jus de citron vert.
Les goûts, eux, sont dues à des quantités infimes de de composés. Et oui, ils pourraient réagir, former de nouveaux composés, mais :
- c'est très rare
- rien n'indique que les composés formés seraient toxiques, et, d'ailleurs, s'il y a réaction, c'est un peu comme quand une bille est en haut d'une montagne : elle descend, et n'est plus en mesure de le faire ensuite ; cela revient à dire que les composés formés seraient moins réactifs -avec le corps humain- que les composés initiaux, capable de réagit.
Mais on aurait doit aussi considérer que le citron vert est très apparenté aux autres agrumes, le citron ou l'orange, tandis que le basilic est apparenté au persil, au gazon, à la ciboulette, à l'estragon. Apparenté, cela signifie que les composés présents sont les mêmes, dans des proportions parfois un peu différence.
Autrement dit, mélanger du basilic et du citron vert, c'est un peu comme mélanger du basilic et du citron : s'il y a des réactions, ce sont les mêmes en nature dans les deux cas.
De surcroît, imaginons le cas -très improbable donc- de réactions : elles se feraient donc entre deux quantités très faibles de composés initiaux, de sorte qu'elles ne pourraient conduire qu'à des quantités très faibles de produits finaux.
De sorte que s'il y a toxicité des produits finaux, c'est un danger plus qu'un risque, puisqu'il y a une infime exposition au danger.
D'ailleurs, il faut comparer la dangerosité EVENTUELLE des produits EVENTUELLEMENT formés à celle des composés toxiques naturellement présents dans les ingrédients.
Or je n'ai pas pris l'exemple du basilic ou de l'estragon au hasard : ces ingrédients culinaires classiquement utilisés contiennent des quantités de méthylchavicol, composé cancérogènes et tératogènes dont la dangerosité laisse tout le monde indifférent : ne voit-on pas, tout l'été, les salades pleines de basilic et d'estragon ?
D'ailleurs, toujours pendant l'été, ne voit-on pas nos concitoyens manger répétitivement des viandes cuites au barbecue, donc chargées en benzopyrènes cancérogènes ? Et là encore, personne ne s'en émeut.
Je crois finalement que la chimie fait peur à ceux qui la connaissent trop mal, avec des peurs qui s'apparentent à la crainte des revenants, dans l'ancien temps, et aux superstitions variées, de démons qui enverraient la foudre, la peste, etc.
Bref, l'ignorance est mère de la crainte, et il faut absolument que notre Education nationale développe les enseignements de chimie plus qu'elle ne le fait aujourd'hui : non pas à la marge, mais bien plus qu'aujourd'hui.
Car la connaissance du monde matériel est indispensable pour se comporter en citoyens !
Comment nos concitoyens pourraient-ils débattre sereinement de glyphosate, par exemple, s'ils ignorent ce qu'est une molécule ? Comment nos concitoyens peuvent-ils débattre d'OGM s'ils ignorent le fonctionnement génétique moléculaire des êtres vivants ? Comme nos concitoyens peuvent-ils avoir une approche rationnelle de la toxicité s'ils n'ont aucune connaissance des composés toxiques ?
Ce que je dis pour nos concitoyens vaut évidemment pour nos députés, et ces derniers mériteraient de recevoir, quand ils sont élus, une formation suffisante pour pouvoir juger des questions qui leur sont soumises. A en entendre certains, j'ai peur soit qu'ils n'aient pas d'informations suffisantes, soit, s'ils les ont, qu'ils tiennent des discours qu'ils doivent savoir mensonger.
Mais j'ai espoir, car il y a l'Ecole, avec des professeurs merveilleux, attentifs aux enfants. Mettons-nous entièrement à leur disposition, pour les aider dans leur mission !
mercredi 27 avril 2022
Manuscrits retirés, articles publiés
Je m'étonne de voir certaines revues qui se disent "scientifiques" publier des articles dont les manuscrits qui ont été soumis à des revues scientifiques dont je m'occupe, et pour lesquels les rapporteurs ont fait des remarques pertinentes dont il n'est tenu aucun compte dans les publications que je vois paraître.
Le cas s'est hélas produit plusieurs fois, avec toujours le même mécanisme :
1. un manuscrit est soumis,
2. il est envoyé (de façon anonyme) à des rapporteurs qui font des commentaires et appellent des corrections du manuscrit (parfois, il y a lieu de corriger des erreurs graces, comme par exemple quand des auteurs confondent de la toxicité et de l'immunité);
3. les auteurs font une première révision du manuscrit
4. cette révision est envoyée aux rapporteurs, qui dépistent des corrections encore bien insuffisantes;
5. et les auteurs retirent leur manuscrit et le publient sans rien modifier de plus dans une autre revue minable, qui accepte le texte tel qu'il est, avec ses fautes, ses erreurs, ses insuffisances.
Il y a là une très mauvaise pratique, à la fois pour les auteurs et pour les revues qui publient finalement les articles fautifs.
Il faut dénoncer de telles revues, et sans doute écrire pour commenter négativement les articles qu'elles publient.
Bien sûr, il n'est jamais agréable d'avoir à fournir un travail supplémentaire après la production d'un manuscrit, ce qui demande beaucoup de temps et d'énergie, mais l'objectif des textes n'est-il pas de produire des résultats de qualité ?
Personnellement, je suis très reconnaissant aux rapporteurs qui m'aident, qui m'aident à comprendre, qui m'aident à apprendre, et quand les rapports sont bien fait, c'est un véritable atout pour la qualité finale des publications.
On ne dira jamais que l'évaluation par les pairs, bien conduite, est une pratique merveilleuse de notre communauté scientifique.
mardi 26 avril 2022
Pourquoi la formulation odorante est une activité difficile
Je ne compte plus le nombre de messages que je reçois de personnes qui croient qu'une analyse d'une odeur par chromatographie en phase gazeuse suivi de spectrométrie de masse permet ensuite, facilement, de reconstruire l'odeur analysée.
Expliquons pourquoi cela est une compétence merveilleuse, que l'on n'acquiert pas d'un claquement de doigt, même si elle n'est pas inaccessible.
Signalons d'abord qu'une odeur résulte de la fixation de molécules odorantes sur les récepteurs olfactifs dans du nez.
Quand on hume une fleur, par exemple, on ne le voit pas, mais des molécules variées, et très nombreuses (des milliards de milliards) s'évaporent de la fleur, et quand l'air qui les porte arrive dans le nez, certaines d'entre elles peuvent être "perçues", à savoir que ce sont comme des clés qui vont activer des molécules du nez (des "récepteurs") : quand une clé trouve la serrure qui va bien, alors un message électrique est envoyé au cerveau, et nous sentons quelque chose.
L'odeur de la fleur, ce sont de très nombreuses stimulations élémentaires de ce type, avec parfois des molécules olfactivement très actives. Et, d'ailleurs, il y a des molécules évaporées qui ne sont pas perçues, parce que le nez n'a pas de récepteur correspondant.
Ayant dit cela, revenons à l'analyse d'une odeur : on peut très bien, effectivement, capter une odeur, la faire passer dans un très long tuyau ayant un diamètre égal à celui d'un cheveu, poussée par un gaz inerte. Dans leur cheminement dans le tuyau, les molécules odorantes se séparent en fonction de leur taille, par exemple (les petites molécules qui interagissent peu vont plus vite que les grosses molécules).
Bref, après des mètres et des mètres de transit dans ces "colonnes de chromatographie", on recueille à la sortie une fraction moléculaire, puis une autre fraction, puis une troisième fraction, etc., chaque fraction étant un groupe de molécules odorantes d'une seule sorte.
On peut alors, avec un appareil nommé spectromètre de masse, identifier ces molécules, savoir quelle est leur constitution atomique, voire leur quantité dans l'odeur initiale.
Et c'est ainsi que, par une telle analyse, on obtient une quantité d'informations considérable, à propos de la nature des composés de l'odeur et de leurs quantités.
Le problème, c'est que le rendement d'analyse n'est pas constant pour toutes les molécules : on n'a peut-être pas bien tout capté initialement, pas bien tout séparé, et ainsi de suite.
Bref, on a beaucoup d'informations, mais ces informations sont à la fois excessives et insuffisantes.
Car j'ai dit plus haut que le nombre de composés odorants est de 500, mais, en réalité, il y a des milliards de fractions, parfois en très petites quantité...
Avec ce fait terrible que certains composés "traces" sont essentiels pour l'odeur alors qu'ils sont indétectables par nos moyens d'analyse !
Bref, quand on se met maintenant en position de synthèse, il est naïf de penser qu'il suffise de réunir les composés qui sont principaux en terme de quantité, sans compter que certains composés analysés n'ont pas d'odeur (quand le nez humain n'a pas de récepteur olfactif qui leur corresponde).
Il faut ainsi une excellente connaissance du monde des composés odorants, quand on veut reproduire les odeurs, sans compter que la tâche peut-être très fastidieuse : autant il est facile de préparer un mélange de quatre ou cinq composé odorants à seuil olfactif faible (il faut faire les bonnes dilutions dans un solvant qui les laissera s'évaporer), autant la réunion de centaines de composés peut être fastidieuse.
Et, pour certains composés, le dosage est difficile : par exemple, quand les composés sont actifs à des teneurs en parties par milliard, il faut faire une première dilution, qu'on dilue ensuite et ensuite, toujours avec grande précision.
Par exemple, le paraéthylphénol, qui contribue à l'odeur de cuir des vins vieux, se présente à l'état pur sous la forme de cristaux noir qui ont une effroyable odeur de caoutchoux brûlé. Il faut mettre un cristal dans un litre d'alcool pur, puis prendre une goutte que l'on met dans un litre d'alcool pur, et utiliser ensuite une goutte de cette dilution, pour obtenir, dans un litre de liquide, une odeur admissible : imaginons faire cela pour 500 composés !
Bref, il y a une immense compétence à se forger, pour faire de la belle formulation odorante, et c'est la raison pour laquelle quelques grosses sociétés font des ponts d'or à des spécialistes compétents. Ces spécialistes sont excellents techniquement, et, à leur propos, on gagnera à se souvenir du peintre japonais Hokusai, qui disait à l'âge de 70 ans qu'il allait pouvoir commencer à apprendre à peindre.