jeudi 3 mars 2022

Evitons les odeurs en cuisine... sauf quand elles sont mauvaises ;-)

 Au fond j'ai fait une erreur, récemment,  quand j'ai répondu à l'un de mes amis cuisiniers, à propos de l'entraînement à la vapeur d'eau et de la nécessité de mettre un couvercle sur les casseroles, et je veux me rattraper ici.

L'idée est la suivante : j'étais dans une cuisine de restaurant, et je voyais un bouillon en cours de confection. Il y avait une grande marmite avec de l'eau, des os, de la viande et tout cela bouillait à grands bouillons.

Au-dessus de la marmite, il y avait une belle odeur et, en passant, j'ai fait remarquer à mon ami qu'il perdait les composés odorants.

Car j'expliquais qu'il y avait en action ce qu'on nomme un "entraînement la vapeur d'eau",  c'est-à-dire que les composés odorants, qui sont peu solubles dans l'eau, passent dans l'air au-dessus du bouillon, mais que la vapeur d'eau qui s'évapore les emporte avec elle, les entraîne, de sorte que d'autres composés sortent du liquide, et ainsi de suite.

Les chimistes savent que ce procédé est très efficace pour éliminer des composés peu solubles... et c'est même ainsi que fait l'industrie des parfums pour extraire les matières odorantes.

Or l'odeur est une composante essentielle du goût : si l'on élimine de l'odeur du bouillon, on lui fait perdre du goût.

Mais j'ajoutais, dans la discussion, que j'avais fait jadis l'expérience de diviser un bouillon en deux moitiés :  l'une avait été réduite, puis allongée au volume initial, tandis que l'autre avait été laissée en l'état. Quand nous avions comparé la composition des deux moitiés, nous avions découvert qu'il y avait de nouveaux composés dans le bouillon qui avait été réduits.

Hâtivement, j'avais conclu que la réduction pouvait être utile... mais...

Mais, à la réflexion, je crois que je me suis trompé !!

Oui, je crois que je me suis trompé, car si c'est la longue réduction qui a produit les nouveaux composés, alors on les aurait si l'on prolongeait la cuisson à couvert : on aurait les composés initiaux, plus les nouveaux composés.

Bref,  je maintiens que l'usage d'un couvercle est absolument essentiel et que la présence d'une odeur une cuisine est à éviter.

Sauf à considérer que cette odeur puisse être une alarme, pour détecter des produits qui seraient dangereux, toxiques, périmés. Et là, l'odeur est un des signes qu'il ne faut pas négliger.

Il faut donc, semble-t-il, que l'odeur dans une cuisine soit nulle, ou qu'elle soit un signe d'alerte si un produit est à éviter.
Sans oublier les odeurs des fromages ou des durians, bien entendu ;-)

mercredi 2 mars 2022

Acides et bases

 
C'est un fait que la chimie, historiquement, s'intéressa très tôt aux "acides" et aux "bases", que l'on nommait jadis des "alcalis".

En effet, très tôt, alors que la chimie n'était encore que de l'alchimie, on avait observé que le vinaigre avait une saveur agressive, "acide", et, très tôt, on avait observé qu'il y avait ce même type de saveurs dans divers ingrédients de la cuisine : dans une pomme verte, dans un citron par exemple.

Mais on sait que les chimistes ont "l'intelligence du feu" : ils trituraient, dissolvaient, broyaient, distillaient, calcinaient... Et c'est ainsi que, quand on chauffe vivement certains composés, il se dégage des vapeurs que l'on peut  percevoir acides.
Ou encore, certains produits de distillations avaient aussi une saveur acide.

Puis, après bien des travaux et des découvertes, les chimistes ont découvert que certaines matières végétales, tel des pétales de fleurs, changent de couleur en présence de ces corps acides;
Et c'est ainsi que les chimistes en vinrent à utiliser des pétales de violettes broyés dans de l'eau comme "indicateurs colorés" : cela leur permettait de voir la présence des acides sans avoir à goûter des matières qui pouvait être dangereuses.

A la même époque environ, les chimistes identifièrent les alcalis, par exemple la lessive de cendres que l'on récupère en filtrant de l'eau où l'on a mis des cendres. Cette fois,  la saveur n'était pas acide, mais "savonneuse" : ce fut la découverte les alcalis, que l'on nomme aujourd'hui des bases. Il y eut l'ammoniaque, la soude, la potasse...

Puis on découvrit que le mélange d'un acide et d'une base produit un sel.
Le bon exemple est celui qui consiste à mélanger de l'acide chlorhydrique et de la soude : à condition que les quantités soient bien choisies, on obtient une solution de sel. Oui, de ce chlorure de sodium qui est celui de la mer ou des mines de sel gemme !

Puis, on découvrit d'autres "sels", tels ceux qui sont dans les eaux de boisson, où jouxtent des "ions" nitrate, sulfate, sodium, potassium, chlorure, magnésium... Ce sont ces ions qui donnent leur goût aux diverses eaux, mais cela est une autre histoire,  pour une autre fois.

mardi 1 mars 2022

Les molécules collent les unes aux autres



Partons d'huile : c'est un liquide jaune, mais avec des tas de particularités, à commencer par le fait que ce soit l'ingrédient alimentaire le plus énergétique... raison pour laquelle il n'y a pas lieu de craindre les "pilules nutritives" dont des idéologues nous menacent régulièrement, qui remplaceraient l'alimentation : si l'on ne mangeait que de la matière grasse, il faudrait environ 300 grammes pour se soutenir une journée, et 300 grammes d'huile, ça ne tient pas dans une pilule !

A propos de cette huile, on pourrait dire mille choses, discuter son rancissement éventuel, sa sensibilité à la chaleur, à la lumière, mais ici, je propose surtout de penser que,  si nous avions un super microscope, nous verrions qu'elle est faite de très petits objets,  par milliards de milliards de milliards...

Ces objets sont des molécules. Dans de l'huile bien raffinée, bien propre, ces molécules sont de différentes sortes, mais elles se ressemblent toutes avec  une apparence de petites pieuvres à trois bras.

Or les pieuvres ont des ventouses avec lesquelles elles collent un peu. Et, de même, les molécules d'huile collent un peu entre elles... ce qui évite que l'huile ne s'évapore.

Dans de l'huile, liquide, les molécules bougent en tous sens, comme des boules de billard, mais on comprend que la présence des trois "tentacules" complique le mouvement.

Quand on verse de l'huile, les molécules de l'huile s'écoulent, comme le feraient des grains de sable... mais du sable un peu adhérent, un peu collant : rappelons-nous les ventouses des pieuvres.

Les forces d'adhérence sont faibles, pour les molécules de l'huile, et elles seraient plus fortes pour de l'eau.

Et si l'on refroidit l'huile, leur mouvement qui diminue (c'est cela, la "température") fait que l'énergie de mouvement n'est plus suffisante pour rompre le collage. Bref, les molécules de l'huile s'attachent les unes aux autres... et l'on a un solide, de l'huile figée, comme on en voit dans les bouteilles d'huile que l'on met au froid.  

Ah, j'ai oublié de dire que les molécules de l'huile sont des "triglycérides". Pas des acides gras, comme le dit une certaine publicité trompeuse ! Mais je n'entre pas ici dans les détails, car c'est une autre histoire, pour une autre fois.

samedi 26 février 2022

Je discute le monoglutamate de sodium



Le monoglutamate de sodium ? Il y a beaucoup de bêtises dites à son propos, par ses partisans comme par ses détracteurs.

Commençons par les questions qui fâchent.

Et disons qu'il est souvent utilisé en cuisine asiatique, notamment japonaise. Et il a été soupçonné d'être à l'origine du "syndrome du restaurant chinois"... mais ce syndrome est prétendu, car, en réalité, le seul effet concerne ceux qui prennent des médicaments pour le coeur : le monoglutamate de sodium inactive certains de ces composés.

Et disons qu'il figure sur la liste des additifs, ce qui suffit à certains pour croire qu'on les empoisonne... alors que le caramel, aussi, figure sur cette liste.

Disons surtout qu'il a un goût (une saveur) puissant, qui, selon les personnes, est perçu salé, sucré, ou bouillon de poulet.

Et c'est pour cette raison qu'il est utilisé dans nombre de "bouillons cubes". Initialement, il était le principal, avec le sel, mais d'autres composés se sont ajoutés (inositides, par exemple).

Disons surtout que l'acide glutamique, dont le monoglutamate est un sel (de sodium, par exemple) est un acide aminé, un des 20 maillons des protéines. Nous en avons plein l'organisme.

Disons que la société qui en produit et en vend n'a pas un message parfaitement honnête : elle prétend que ce monoglutamate de sodium est le principal composés sapide, elle prétend que c'est "la" cinquième saveur (alors qu'il existe une infinité de saveur), elle le trouve partout, en vante les mérites... alors qu'on a parfaitement le droit de ne pas aimer la saveur de ce composés.

Il va falloir que je change mes billets, ou, plus exactement, que j'indique à qui je m'adresse

 Un ami cuisinier me dit que beaucoup de billets que je fais sont trop difficiles parce que, lors de ses études, il n'a pas eu les bases de chimie et de physique qui lui serait nécessaire pour comprendre ce que j'écris.

De fait, il est vrai que je fais toujours l'hypothèse que mes amis qui me lisent savent ce qu'est un acide, une base, un composé, un atome, et cetera.
Pour bien me faire comprendre de ces amis-là, il faut que j'explique tout cela. 

Inversement, d'autres, qui ont déjà des notions de chimie, peuvent trouver ces informations inutiles, gênantes. 

 

De sorte que je conclus qu'il faut des billets de différentes sortes, selon les amis à qui je m'adresse. 

En conséquence, il faudra aussi annoncer à qui je m'adresse et c'est ce que je viens  de me résoudre à faire :  il y aura une série de billets d'initiation, d'une part, et, d'autre part,  une série pour ceux qui en savent plus. 

Cela sera annoncé en tout début de texte.

vendredi 25 février 2022

Comment nommer ce qui n'est pas un macaron ?

 Le 22 février 2022, nous avons exploré la cuisine note à note, avec une dizaine de chefs étoilés. 


Et, lors de nos travaux, nous avons préparé ce joli produit, mis au point par le cuisinier Julien Binz, d'Ammerschwihr : 



Cela faisait quelque temps que je nommais cela un "maracon"... mais le terme choquait... Et avec raison ! 


Car un macaron contient essentiellement de la poudre d'amandes, du blanc d'oeuf et du sucre. 


Alors que ce produit est fait d'eau, de protéines de blanc d'oeuf, de glucose.


Ce n'est donc pas un macaron, mais qu'est-ce ? 

 

Réponse : c'est manifestement une meringue fourrée. 


jeudi 24 février 2022

La cuisine moléculaire n'a (presque) rien à voir avec la gastronomie moléculaire

 

Ce matin, construction d'une page wikipédia, parce que la recherche de "cuisine moléculaire" arrivait sur "gastronomie moléculaire"... ce qui n'a rien à voir.

 

Voici ce qui a été mis :

 

Cuisine moléculaire

A bien distinguer de la "gastronomie moléculaire" (qui est une discipline scientifique), la cuisine moléculaire est une forme de cuisine qui se définit par l'emploi de matériels venus des laboratoires de chimie, de physique, de biologie.

Elle a été introduite depuis le début des années 1980, notamment quand Nicholas Kurti a proposé l'emploi du vide, ou quand Hervé This a proposé l'emploi de systèmes de foisonnement (pompes, siphons), d'émulsification (sondes à ultrasons), de filtration (ampoules à décanter, frittés de laboratoire), de broyage (broyeurs à billes), de distillation (évaporateurs rotatifs, avec ou sans piège froid), de chauffage (thermocirculateurs). Fut aussi introduit l'emploi de l'azote liquide (Peter Barham, Hervé This, Nicholas Kurti) et, surtout l'ajout de divers gélifiants (alginates, carraguénanes, gommes de guar, caroube, xanthane, etc.).

Philippe Conticini (La Table d'Anvers, Paris), Raymond Blanc (Le manoir des quatre saisons, Oxford) ou Ferran Adria (El Bulli, Espagne) furent parmi les premiers cuisiniers à utiliser ces techniques qui se sont rapidement popularisées.

Le nom de "cuisine moléculaire" a été donné en 1999 par Hervé This, pour éviter la confusion avec la gastronomie moléculaire.