samedi 4 février 2012

Je me répète un peu, mais c'est pour la bonne cause

Lors des cours de gastronomie moléculaire, il y eut (heureusement assez brièvement) un petit débat sur les pesticides.

J'ai alors cité ceci :

"Même pour les agriculteurs, les plus exposés aux pesticides, la grande enquête Agrican (Agriculture et Cancer), entreprise par la MSA et soutenue, entre autres, par l’Anses et plusieurs organismes et associations de lutte contre le cancer, qui vient d’être publiée (13), a montré que leur espérance de vie était plus grande que la moyenne nationale et que la fréquence de décès par cancer était plus
faible de 27 % par rapport à la population générale. Bien qu’ayant été obtenues sur une cohorte de plus de 50 000 hommes déclarant avoir utilisé des pesticides, ces données sont tellement contraires aux idées reçues qu’elles ne manqueront
pas d’être mises en doute, voire « canardées », par des médias hostiles à l’agriculture conventionnelle."

sans donner la référence, que je n'avais pas, de tête, et que je ne voulais pas perdre de temps à chercher.

Pourtant, il y en a eu pour douter. Comme quoi la dernière phrase de mon collègue Léon Guéguen était clairvoyante. Il n'y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir !

vendredi 3 février 2012

Militons!

Les "arômes alimentaires" : l'expression est dans la réglementation, mais si cette dernière est bien (ce qu'il faudra examiner), il n'en reste pas moins qu'il est insupportable que le monde industrie utilise l'expression.
Un arôme, il faut le rappeler, c'est l'odeur d'une plante aromatique. Ce n'est donc pas un produit préparé par l'industrie pour donner du goût à un aliment.

1. Je n'ai rien contre l'industrie, qui fait vivre la population
2. Mais il y a confusion, entre l'arôme, au sens réel, rappelé plus haut, et ce que l'industrie utilise pour donner du goût.

Autrement dit, le mot "arôme" tel qu'utilisé par l'industrie ne répond pas aux critères de la loi de 1905 sur le commerce : les produits doivent être sains, loyaux, marchands. En l'occurrence, l'expression incriminée ici est déloyale.

Il faut donc sans attendre la changer... en observant que la même confusion n'a pas lieu en langue anglaise, où l'on utilise "flavouring" pour dénommer les préparations qui donnent du goût.

Ne soyons pas en retard d'un éclaircissement, dans un pays qui a vu le développement des Lumières !

jeudi 2 février 2012

Une fois de plus, le classement des restaurants

Année après année, je ne cesse de critiquer le classement des restaurants, par une revue anglaise sponsorisée par un industriel.
Décodons

D'abord, c'est une façon pour la revue de vendre du papier.
D'autre part, la revue organise un vote... mais 2+2=4 peut-il résulter d'un vote?
Ensuite, le meilleur restaurant du monde, c'est celui que je préfère. Je me fiche de l'opinion des autres, en la matière.
Et puis, selon mes humeurs du moment, il y a des moments où je préfère Bach, et d'autres où je préfère Mozart. Alors, qui est le plus grand?
Et puis encore, quel est le critère?
Et puis...
Et puis... tiens, j'y pense : savez vous que les choix ne sont pas toujours transitif, à savoir que l'on peut préférer une pomme à une banane, une banane à une orange, mais l'orange à la pomme ?
D'ailleurs, "la" pomme, c'est une vue idiote de l'esprit : il y a mille pommes, toutes différentes... De laquelle parle-t-on ?
Etc.
J'en passe, parce que je m'échauffe devant tant de malhonnête (ou d'imbécilité) !

Regardons plutôt ce qui est merveilleux, et admirons de grands artistes culinaires, sans cette tendance idiote à les classer. Travaillons à identifier des styles, et, surtout, au lieu d'être des oies que l'on gave, contribuer à embellir l'art culinaire de mille idées positives. Bref, au lieu d'être des censeurs, soyons des catalyseurs. Faisons la cuisine de demain encore meilleure que celle d'aujourd'hui !

mardi 31 janvier 2012

Une question et une réponse

"Une question d'un internaute à propos de cuisine note à note :
Je me pose la question suivante depuis un certain temps déjà : est-ce que vous prônez le remplacement total de la cuisine traditionnelle par la cuisine note-à-note (par exemple pour des raisons d'efficacité énergétique lors de la préparation des plats), ou bien l'évolution de la cuisine artistique des restaurants vers la cuisine note-à-note, qui permet de faire des plats nouveaux, qui ne ressemblent en rien aux plats traditionnels ?

Ce qui me gène dans la première hypothèse, c'est qu'on perd alors toute la variété des textures produites par la nature et par les méthodes traditionnelles: je n'imagine pas la cuisine note-à-note reproduire le craquant d'une carotte ou d'une pomme chips, ou la texture d'un steak,ni aujourd'hui ni dans 20 ans (mais arrêtez-moi si je me trompe). De plus, la nature est bien plus efficace que l'industrie pour produire des structures complexes à faible coût énergétique (mais elle est bien plus lente, d'où l'intérêt des techniques industrielles)."


Ma réponse :
Je ne suis pas là pour dire ce qu'il faut faire, et l'on aura probablement :
- des cuisiniers qui continueront à faire du traditionnel
- des cuisiniers qui feront du note à note pur
- des cuisiniers qui feront un mélange
Cela sera bien expliqué lors des Cours des 30 et 31 janvier.

Cela étant, quand la question énergétique se posera avec plus d'acuité, alors beaucoup de pratiques seront condamnées.

D'autre part, pourquoi perdrait-on des consistances classiques ? Et pourquoi ne pas, sans attendre, apprendre à faire la consistance d'une carotte, d'une pomme, d'un steak ? Cela n'est pas hors de portée. La nature plus puissante que tout ? J'ai peur que ce soit une idée reçue. C'est vrai que ce serait idiot de ne pas se servir de l'énergie solaire, d'une part, de l'air et de l'eau environnant d'autre part, et des capacités forgées par des milliards d'années d'évolution, mais combien de choses merveilleuses la technologie, fondée sur la science, ne sait-elle pas faire aujourd'hui !

Allons, aimons la nature (si l'on peut dire), mais sans trop la diviniser.

MERCI !

Ces deux derniers jours, nous avons eu le bonheur d'être 420 amis réunis à AgroParisTech (Paris) pour les Cours de gastronomie moléculaire.
Le thème a été annoncé : la "cuisine note à note".
Surtout, des collègues/amis ont eu l'immense gentillesse de venir présenter leurs points de vue (argumentés d'un point de vue scientifique ou technologique) sur cette cuisine, qui deviendra bientôt la prochaine grande tendance culinaire.
Merci, donc à :
Jean Pierre Lepeltier et Julien Mercier, Membres des Toques blanches
Stéphane Baudoin, de la Société Seprosys
Laurent Joron, de Dow Chemicalpe
Jean Louis Escudier, de l'INRA Montpellier
Patrick Caals, de l'ecole Le Cordon Bleu Paris
Claire Gaudichon, professeur à AgroParisTech
Robert Anton, de l'Université de Strasbourg
Pierre Combris, de l'INRA Vitry

A tous, qui ont fait quelque chose de passionnant, j'adresse un MERCI vibrant.
Vous les retrouverez sur : http://podcast.agroparistech.fr/users/gastronomiemoleculaire/


jeudi 26 janvier 2012

Il n'est pas nécessaire d'être lugubre pour être sérieux ! Vive la chimie !

Un message (surtout à l'attention des chimistes) :

L'enseignement de la chimie sera plus efficace si nous faisons sourire cette dernière.

C'est en tout cas ce que nous avons été plusieurs à proposer, lors d'un dernier Comité de rédaction de l'Actualité chimique (revue à rapporteurs, à facteur d'impact)
Pour ce qui me concerne, le raisonnement est le suivant : les textes doivent être de bonne qualité scientifique ou technologique, et les informations doivent être justes. Cela étant, nous ne devons JAMAIS nous priver de nous émerveiller, ni de sourire ; après tout jusqu'à plus ample informé, nous n'avons qu'une seule vie.

Cette idée est dite plus "raisonnablement" par Paul Rigny, Rédacteur en Chef de l'Actualité chimique, qui m'a autorisé à diffuser le message qu'il avait envoyé au Comité de rédaction, et dont voici la teneur :

Bonjour à tous,

Notre dernier  Comité de Rédaction a émis un souhait  non conventionnel mais bien pertinent : celui que l'on introduise une note "un peu ludique" dans le revue. Il s'agirait de publier, lorsque l'opportunité s'en présente, un article ou une lettre qui adopte le mode humoristique, ou de publier - avec la prudence qui s'impose pour ne pas être mal interprété - une caricature ou dessin humoristique.
Croulant sous les tâches impérieuses de rédacteur en chef, j'observe que mon sens de l'humour - que je croyais beaucoup plus solide - a tendance à s'émousser. Je me tourne donc vers mon précieux Comité de Rédaction et je vous demande de rabattre auprès de vos connaissances, ou de vous coller vous mêmes à la tâche, des articles ou dessins qu'on pourrait voir de temps en temps dans L'Actualité Chimique.

Merci d'y réfléchir et si possible de contribuer : je suis convaincu qu'au moment où nous cherchons à intéresser davantage de lecteurs, cette "note de légèreté" nous serait d'un grand secours.
Merci à tous et...à vos crayons.
Paul Rigny


Voilà, la diffusion est faite. Merci de m'aider à distribuer ce message... afin que notre revue soit encore plus belle demain qu'aujourd'hui.

mardi 24 janvier 2012

Je ne suis pas certain de bien suivre les règles des blogs

Je ne connais pas bien les règles des blogs, en matière d'abonnés, de commentaires, mais vous avez déjà vu que j'utilise des commentaires pour mes billets. Ce n'est jamais injurieux envers mes amis correspondants, bien au contraire, même quand je ne suis pas d'accord.

En l'occurrence, je n'ai pas à imaginer des antagonismes, à propos du commentaire suivant :

"Comme Hervé This l'a fait remarqué sur quelques-uns de ses billets, son ami, cuisinier et artiste Pierre Gagnaire a expérimenté la cuisine note à note. Il en a fait des plats (ou devrais-je dire des oeuvres d'art ?), tout en continuant son travail d'artistes sur des plats plus traditionels, si tant est qu'on puisse appeler traditionnel ce que fait un artiste comme Pierre Gagnaire.
Et ca n'est pas un problème, tout comme la cuisine moléculaire n'a pas non plus besoin d'être unique.
Si je me permet de faire une analogie, il est tout a fait possible de faire cohabiter musique moderne (rap, hip hop) avec de la musique beaucoup plus ancienne (classique), et même avec de la musique qui a une culture complêtement a part (jazz).
Je me risquerais tout de même a répondre, de mon point point de vue personnel, à votre examen de l'hypothèse que vous avancez. J'ai eu la chance de pouvoir expérimenter la cuisine note-à-note a plusieurs reprises.
L'expérience la plus marquante a été de déguster un soufflé au homard accompagné d'une sauce au vin. Sans homard. Sans vin. Et bien cela a été une des expériences les plus troublantes que j'ai pû faire, tant l'impression d'avoir un vrai soufflé au homard était forte.
Je réponds bien entendu a votre commentaire en mon propre nom, et je ne m'avance pas sur ce que pourrait vous répondre Hervé This."

Une précision, pour ceux qui n'ont pas eu la chance de manger ce soufflé. Il avait mesurait environ 50 centimètres de diamètre, avait été préparé trois jours à l'avance, et était servi par grosses parts, avec une sauce wöhler (aux polyphénols de syrah). D'ailleurs, je me suis opposé à ce qu'on le nomme "soufflé au homard sauce au vin", parce que précisément, il n'y avait ni homard ni vin. Cela étant, il est vrai qu'on avait l'impression d'avoir du homard, et que la sauce wöhler fait très "sauce au vin".
Dans un tel cas, je regrette un peu que l'on colle à quelque chose de connu... mais c'est là une question merveilleuse : la cuisine note à note doit-elle, ou pas, coller à du connu ?
Une métaphore musicale : les synthétiseurs doivent-ils servir à jouer Au clair de la lune ?
Ma réponse argumentée sera donnée lundi ou mardi prochain, lors du Cours de gastronomie moléculaire 2012.