dimanche 21 mai 2023

Dans la série des questions que pose la cuisine note à note, il y a celles qui sont relatives à l'odeur des aliments.

Jusqu'à présent, les composés odorants étaient dans les ingrédients de base, et l'on opérait évidemment quelques transformations, mais, comme pour la couleur dont je parle ailleurs, il avait surtout trois options : soit on conserve les composés odorants présents, soit on en crée de nouveaux, soit on en ajoute. 

 

Par exemple, la troisième façon correspond à l'utilisation des épices et des condiments. Le couvercle est une manière d'obtenir que les composés odorants demeurent dans les aliments. Pour la production de composés odorants, il y a la cuisson, notamment, ou les fermentations. 

 

La cuisson, elle, est très mal maîtrisée, et la chimie qui se fait reste très mal connue. On se débarrasse du problème en parlant de caramélisation, de réactions de Maillard, mais, au fond, le milieu est si complexe que l'on ignore complètement ce que l'on fait, sauf par une habitude des résultats. D'ailleurs, une habitude très approximative, car les ingrédients changent, les conditions de cuisson sont très mal maîtrisées, de sorte que l'on est bien en peine de savoir ce qu'il adviendra de l'odeur de l'aliment cuit. Les amis poètes me feront observer que c'est très bien ainsi, et je n'en disconviens pas, mais j'observe quand même les faits. Le « c'est très bien ainsi » est une manifestation de mauvaise foi, une manière de se justifier, au fond, si l'on est honnête intellectuellement ; une manière de vivre, d'encaisser les coups que le monde nous porte... 

 

Revenons à la question de mettre des composés odorants dans un plat de cuisine note à note. C'est très simple : il suffit de les mettre ! Comment ? C'est ce que l'industrie alimentaire, alliée à l'industrie des préparations odoriférantes (nommée fautivement industrie des arômes : un arôme, c'est l'odeur d'une plante aromatique, un point c'est tout !) a bien appris à faire. 

"Bien appris" ? Disons seulement "appris", avec toutes les limitations que l'industrie rencontre aujourd'hui. Il ne s'agit pas ici de dénoncer l'industrie alimentaire, car celle-ci est confrontée à des problèmes redoutables, tel le stockage des produits avant l'achat. La préservation des caractéristiques d'un aliment sur une longue durée est d'une difficulté considérable, et l'on doit aussi reconnaître honnêtement que l'industrie alimentaire doit non seulement donner l'odeur aux aliments, mais donner une odeur durable, ce qui conduit à des méthodes très particulières, qui ne sont pas celles de la cuisine.

 

Revenons donc encore à la cuisine note à note : en pratique, puisque l'on n'a pas ces problèmes de conservation en vue, il suffit d'ajouter à un aliment que l'on construit les composés odorants que l'on choisit. Cela semble simple, mais... mais on ne va quand même pas se fatiguer à faire des mélanges de  composés odorants afin de reproduire des odeurs connues ! Sans quoi l'utilisation d'extraits, d'oléorésines, de concrètes, d'absolues, de résinoïdes … répond entièrement à la question. 

Non, avec la cuisine note à note de nouvelles questions se posent. Par exemple la suivante, élémentaire mais non résolue : imaginons que, dans un aliment, nous mettions à la fois de l'octénol, composé à odeur de sous bois ou de champignon, et du citral, odeur de peau d'agrumes. Qu'obtiendrait-on ? Ce mélange ne se rencontre pas, à ma connaissance, dans des ingrédients alimentaires connus, de sorte que je ne sais pas le résultat qui sera obtenu, quelles que soient les proportions des deux produits. Sentirons-nous le champignon ? Ou l'agrume, ou bien une troisième odeur apparaîtra-t-elle, comme quand on met une goutte de pastis dans un fond de tasse à café et qu'une odeur de réglisse survient, ou comme quand on ajoute de l'eau de fleur d'oranger à des fraises et qu'un goût de fraises des bois survient ? Décidément, la question est passionnante. Comment prévoir l'odeur d'un mélange de deux ou plusieurs composés odorants ?

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