Je ne comprends pas pourquoi, mais la théorie culinaire est encore embryonnaire. Baudelaire s’était préoccupé d’esthétique, quand il chroniquait les salons de peinture, et mille intellectuels, comme lui, ont pensé et écrit sur l’esthétique musicale ou sur l’esthétique visuelle, mais bien peu ont pensé à l’esthétique culinaire, l’esthétique du goût, au point que le mot « esthétique », quand on le prononce à propos de cuisine, fait penser à la beauté visuelle des assiettes ou des plats, et non aux choix de goût, lequel comprend l’aspect visuel mais aussi beaucoup d’autres aspects : olfactifs, gustatifs, tactiles, sonores (pour les croustillants, par exemple)…
Je trouve désolant que la théorie culinaire – je parle ici d’esthétique, pas de technique- en soit restée à cette phrase de Curnonsky : « les aliments sont bons quand ils ont le goût de ce qu’ils sont ». Une pomme n’a pas un goût de pomme, mais mille goûts, et chacun a sa légitimité. Il n’existe donc pas de « goût de la pomme ». De surcroît, la cuisine est précisément un jeu de goûts :
La suite ici : https://pierregagnaire.com/pierre_gagnaire/travaux_detail/74
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