Le monde s'enflamme
pour la coupe du monde (je suppose que c'est la coupe du monde) de
football... mais ce serait pour moi l'enfer que d'être obligé de
regarder un match à la télévision. Il doit me manquer le gène du
football.
De même pour les
voitures : je ne vois que de la mauvaise foi (je n'ai pas dit de
la malhonnêteté : seulement des justifications très
personnelles qu'ils donnent) dans le discours de mes amis qui en sont
amateurs. Là encore, un gène doit me manquer.
Mais il y a pire :
au jardin du Luxembourg, des groupes assis dans l'herbe au soleil.
Que peuvent-ils donc bien faire, pendant tout ce temps ? Il doit
encore me manquer le gène du groupe au soleil.
J'en vois qui sont
étudiants, et qui ont un polycopié à la main, de sorte qu'ils
pourraient être en train d'apprendre des cours, mais, quand je
m'approche, je les entends parler d'une soirée qui s'est tenue la
veille. Est ce vraiment une méthode efficace pour apprendre ?
Là, quel est le gène ?
Sur un banc, au
soleil, je vois une jeune femme très bronzée, allongée, qui ne
fait rien. Elle n'a pas l'air fatiguée, de sorte qu'il est douteux
qu'elle ait besoin de se reposer, et elle n'a sans doute pas pu
éviter les messages des dermatologues signalant que le soleil est
mauvais pour la peau. Pourquoi son comportement ?
Je passe maintenant
devant la terrasse d'un bistrot, sans soleil cette fois, mais en
plein air, juste devant la rue. Il y a à peine de quoi s'asseoir,
les clients se gênent et les voitures sont bruyantes. Quel plaisir
ont-ils ?
Un autre jardin
public, un homme qui semble en parfaite santé est assis, sans lire,
sans écrire, sans rien faire, à l'ombre. Que fait-il ?
Plus loin, une dame
plus âgée fait des mots croisés. A quoi bon ? Ce type de
questions me vaudra évidemment la rancune de mes amis
cruciverbistes, mais je répète : à quoi bon ? Il s'agit
d'une occupation, au sens d'occuper un vide, et la question n'est pas
de savoir si elle élève l'esprit ou non, mais de se demander à
quoi bon ? L'être humain revendique à chaque seconde de
changer de condition, mais le fait est que beaucoup se contentent
d'occuper leur temps, et leurs revendications ne sont donc guère que
des gesticulations.
Une étudiante qui
ne réussit pas particulièrement ses études me dit que, en réalité,
elle est moins intéressée par la chimie physique que par
« écrire ». A-t-elle déjà écrit ? Non. A-t-elle
déjà pris du temps pour apprendre à écrire ? Non : ses
compétences se limitent à celles qu'elle a eues lors de ses cours
de français du collège ou du lycée... Cours où, m'avoue-t-elle,
ses notes étaient médiocres. Comment peut-elle croire qu'elle
gagnera sa vie alors que lui manquent, au minimum, des compétences,
lesquelles ne s'obtiennent pas par des claquements de doigts ?
Mon incompréhension d'une telle... naïveté (inconséquence ?
Inconscience ?).
Un étudiant me dit
avoir deux heures de transport en commun, touts les jours, pendant
lesquelles il écoute de la musique ? Pourquoi ne fait-il rien ?
Ses réponses sont toutes de mauvaise foi (et, à nouveau, j'ai
beaucoup de sollicitude). Ce qui est avéré, c'est que son seul
profit est du « plaisir ».
Je passe devant un
petit jardin, et je vois une personne que je connais, directeur de
société, qui cultive des tomates, carottes, choux... Je l'interroge
sur son activité, et il me répond qu'il produit ainsi assez pour
produire sa famille. Dont acte, mais l'efficacité de cette culture ?
Au temps passé, elle est nulle, et la qualité de ses produits reste
inférieure à celle des plus beaux fruits et légumes de la place.
Financièrement, c'est nul. De sorte qu'il faut conclure que seul son
« plaisir », son « envie », sa
compulsion le guident. Pourquoi ce plaisir ? Cette envie ?
Pourquoi rester cassé en deux au soleil, dans le froid, sous la
pluie ?
Dans la rue, une femme marche difficilement perchée
sur des talons aiguilles immense. A quoi bon ?
On aura compris que
la liste de mes incompréhension est longue. Souvent, quand
j'interroge ceux et celles dont je ne comprends pas le comportement,
je ne reçois que la réponse « j'aime ». Je n'ai
évidemment aucun droit à discuter leur goût, mais quelle étrange
chose que ce « plaisir », qui conduit à des
comportements extraordinaires, souvent irrationnels !