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mercredi 11 décembre 2024

Tests charcutiers : assaisonnement et malaxage

Nous venons de terminer le séminaire consacré à la charcuterie et, plus exactement  à l'assaisonnement et au malaxage. 

Nous avons fait une première expérience qui consistait à prendre de la viande (poitrine de porc), à la couper en morceaux et à diviser ces morceaux en deux moitiés : 

- une moitié était assaisonnée de sel et de poivre avant le hachage

- et l'autre moitié était d'abord hachée avant d'être assaisonné. 

Nous avons utilisé une grille de 10 conformément à la pratique de la confection des saucisses de Toulouse. Nous n'avons pas mélangé, toujours conformément à la pratique de la confection des saucisses de Toulouse. Et nous avons formé de petites galettes que nous avons cuites ensemble, dans la même poêle, au même endroit de la poêle et pendant le même temps. 

Puis nous avons organisé un test triangulaire et nous n'avons pas perçu de différence gustatives entre la viande assaisonnée avant ou après le hachage. 

 

Puis nous avons fait une deuxième expérience qui consistait hacher de la viande, à l'assaisonner, puis à diviser la viande hachée en deux moitiés 

- l'une était malaxée  (à la main, en triturant, jusque environ 7 minutes)

- et l'autre moitié n'était pas malaxée. 

Le résultat a été parfaitement clair : visuellement, il y a une différence considérable et au bout de 6 minutes de mélange à la main, l'opérateur a senti comme de l'eau qui sortait de la masse malaxée. Mais l'aspect visuel suffisait à montrer combien il y avait de changement. 

Puis à la cuisson, nous avons vu une autre différence  : la viande qui avait été malaxée gonflait plus que l'autre. Après cuisson, elle se tenait bien mieux : elle formait une masse homogène tandis que pour la viande hachée et non malaxée, les parties se défaisaient, se séparaient,  avant ou après la cuisson d'ailleurs. Au test triangulaire, nous avons vu une belle différence non pas de goût mais évidemment de consistance.

Parfois, dans nos séminaires, les expériences sont préliminaires et il y a lieu de les répéter ultérieurement, mais cette fois-ci, les effets sont si clairs qu'il n'est sans doute pas nécessaire de répéter les tests... sauf évidemment avec des apprenants, afin qu'ils voient par eux-mêmes les effets qu'on leur annonce.

mardi 19 novembre 2024

Pourquoi s'imposent des travaux techniques au plus haut niveau de la charcuterie ?

Nous sommes bien d'accord que les beaux produits attirent légitimement le chaland, et comme le disaient justement les Tontons flingueurs, le prix s'oublie, mais la qualité reste. 

Pas étonnant que nous acceptions de faire la queue quand nous achetons du pain : le mauvais pain ne vaut pas la somme même modeste que nous le payons, et le bon pain est tellement merveilleux. De même, pour la charcuterie : ah, un merveilleux boudin, un extraordinaire saucisson, une andouillette d'anthologie... Tout cela mérite un long déplacement tandis que ces mêmes produits réalisés de façon médiocre nous font en réalité dépenser notre argent en pure perte. 

Bref, il faut viser l'excellence et non seulement quand on est charcutier et que l'on veut vendre sa charcuterie, mais aussi simplement pour le plaisir du travail réalisé. 

 

D'où la question : qu'est-ce qu'un bon boudin  ? Une belle andouillette ? Une bonne terrine ? Un bon pâté froid ? Une belle Knack ?  Une jolie rillette ? 

Le problème est que, à ce jour, les produits ne sont pas évalués de la même manière par différentes personnes, ce qui montre que nous manquons de critères explicite sur lesquels nous puissions fonder nos jugements. Pourtant, il y a nombre de possibilités d'y parvenir, notamment quand on regarde à contrario en quelque sorte. 

Par exemple, quand on embosse, quand on pousse un appareil dans un boyau, il est de toute première importance de ne pas laisser de poches d'air sans quoi il y a des risques de rancissement. 

Pour une terrine par exemple, il est essentiel de bien malaxer les chair hachées, sans quoi les tranches de la terrine ne se tiendront pas à la coupe. Et de même pour du boudin blanc, qui ne doit pas se défaire,  ce qui serait sans doute le signe que le liquide (le lait) a été mis trop chaud dans la préparation de base. 

Et ainsi de suite : il y a urgence  à recueillir auprès des bons professionnels des indications techniques qui permettent non seulement un meilleur jugement, un jugement plus solide, partagé surtout, mais aussi un enseignement pour les jeunes qui sauront alors quels sont les principaux écueils et qui, ainsi, sauront les éviter. 

Je milite pour que nous aidions les apprenants, pour que nous cessions de faire des enseignements fondés sur la répétition, mais, plutôt, que nous fondions les enseignement sur la compréhension, la transmission explicite. 

Et c'est la raison pour laquelle une académie de la charcuterie s'impose :  ce sera le lieu où d'excellents professionnels pourront échanger,  mettre en commun ces idées techniques qui seront ainsi ensuite transférées. 

Transférées aux jeunes comme je l'ai dit, transférées aux jurés des concours, mais également transférées au public, car il est essentiel que ce dernier comprenne la différence entre des produits de grande qualité  et des produits mal fait par des producteurs plus intéressés par l'argent que par la beauté de la charcuterie. 

Je prends pour expliquer ce point l'exemple de l'andouillette, qui se fait traditionnellement à la ficelle : on tire des boyaux à l'aide d'une ficelle, dans le boyau externe, pour obtenir une série de couches concentriques à l'intérieur du boyau extérieur. 
A la dégustation, on a une sensation bien différente de celles que donnent des andouillettes où des praticiens hâtifs, négligents, auraient poussés des morceaux de boyaux déchiquetés dans le boyau extérieur. 

Bien sûr, certains consommateurs ne verrons pas la différence mais est-ce une raison pour mal faire ?  Après tout, les sourds n'entendent pas la musique... Bien sûr,  cela coûte moins cher de pousser des fragments de boyaux broyés... mais qui pourrait sans rougir vendre de tels produits ? D'ailleurs, est-il vraiment légitime de nommer cela des andouillettes ? Je milite pour que la réglementation impose un autre nom, que l'on ne détourne pas déloyalement la dénomination.  

En tout cas, je crois que cela vaut la peine de travailler à cette Académie française que nous constituons aujourd'hui, pour la charcuterie !

mercredi 25 novembre 2020

Des réponses à un interlocuteur pas parfaitement honnête !

 Je reçois indirectement, à propos du rapport sur les nitrates et les nitrates publié récemment par l'Académie d'agriculture  


Je reconnais la patte de Hervé This et de de la Confédération de la charcuterie CNCT).
Hervé This a une vue réductive de la cuisine, il la considère comme de la chimie. C'est comme si le vin était de l'alcool éthylique et de l'eau :  (CH3-CH2OH) + H2O.
La CNCT est un organisme vieillissant.
Il n'y a rien d'autre dans cette "étude"  qu'une compilation d'informations à décharge.
Des milliers de page "d'études" ont été faites par l'industrie des charcuteries anglo-saxonnes depuis de décennies (avec toujours la mise en exergue du clostridium botulinum qui est en fait hors sujet), celle-ci n'en est qu'un dernier avatar français sans intérêt.
En fait toutes ces "études" sont un combat d'arrière garde de l'industrie de agrochimique pour conserver  un marché juteux, le même combat qu'a mené avec un succès mitigé l'industrie du tabac depuis la fin de la seconde guerre mondiale pour finir par le perdre.
Si vous voulez mieux connaître le sujet, lisez juste ce livre de xxxx [je supprime pour ne pas faire de publicité à un ouvrage douteux]
Vous y trouverez notamment pourquoi le consortium Jambon de Parme a interdit le sel nitrité et le salpêtre dans ses jambons AOP il y a 25 ans. Un combat d'arrière garde, je vous dit. !!! On a 25 ans de retard sur les italiens.


Mon interlocuteur se trompe de plusieurs points de vue :

1. le rapport est une analyse serrée, et je ne cherche pas personnellement à mettre du sel nitrité partout : il me fait donc un procès d'intention, et cela est malhonnête !

2. le rapport n'a rien à voir avec la CNCT ; celle-ci a été auditionnée, tout comme les opposants (ceux qui ont accepté de venir débattre), et c'est tout

3. Je n'ai pas une vue réductive de la cuisine : mon interlocuteur projette ses fantasmes (qu'il lise mon "La cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique" avant de proférer des âneries). C'est à nouveau un procédé intellectuellement douteux.

4. Non, le rapport n'est pas à décharge... car il n'y avait aucun intérêt pour, ou bien contre les nitrites ; seulement une volonté d'y voir clair, et d'avoir des faits bien établis, indépendamment des idées préconçues

5. Des milliers de pages : c'est bien ce que les membres de l'Académie d'agriculture de France ont lu, et bien lu (mais mon interlocuteurs, a-t-il lu les publications ? les a-t-il seulement eues entre les mains ? ou cause-t-il de ce qu'il n'a jamais vu  ;-))

6. Clostridium botulinum hors sujet ? J'aimerais le croire, mais si les incidences diminuent, il y a encore eu des tapenades toxiques il n'y a pas si longtemps.

7. Le "combat juteux" ? bof, je vois mal pourquoi, car le chiffres d'affaires du sel nitrité ne doit pas être considérable ;-). Et puis, personnellement, cela ne m'intéresse pas (je rappelle que je ne touche pas un centime de toute cette affaire).

8.XXXX : s'il y a bien quelqu'un de peu recommandable, c'est lui ; moi, je cite des scientifiques, et mon interlocuteur cite des journalistes bizarroides... qui me calomnient sur twitter (je dis bien calomnient, pas médisent : mon interlocuteur sait-il la différence entre les deux mots ?)

9. Oui, on peut parfaitement faire des jambons secs, voire des jambons de Paris sans sel nitrité, à condition de bien faire.

10. Il y a eu des artisans (je dis bien des artisans) qui utilisaient le sel nitrité pour la couleur, comme colorant... tout comme il y en a qui font du fumage pour la couleur ; ce ne sont pas des pratiques recommandables (dans le second cas, car les produits de fumée ne sont pas ce qu'il y a de plus sain, surtout avec les procédés de fumage anciens).

11. Mais je suppose que mon interlocuteur est braqué, donc pas la peine de discuter avec des personnes comme cela.

12. J'ajoute que je n'ai aucun intérêt dans toute cette affaire, comme je l'ai expliqué publiquement sur twitter.

Mais  les chiens aboient, et la caravane passe.

jeudi 10 novembre 2016

A propos de viande rouge et de charcuterie


Faut-il s’inquiéter lorsqu’un aliment se trouve soudain classé parmi les cancérogènes par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) ? Oui, mais raisonnablement.

L’annonce du CIRC avait fait grand bruit en octobre 2015. Comment la charcuterie pouvait-elle se retrouver au même niveau que l’ennemi numéro 1 de la santé publique qu’est le tabac ? Incompréhensible pour qui ne connaît pas les méthodes d’évaluation du
CIRC.

Trois jours après cette annonce controversée, l’OMS précisait dans un communiqué de presse que le classement du CIRC ne signifiait pas qu’il ne fallait plus manger de viande, mais simplement «que réduire la consommation de ces produits pouvait réduire le risque de cancer colorectal».
Pourtant, le mal était fait : un sondage Odoxa effectué pour Le Figaro quatre jours après l’annonce du CIRC révélait que 86% des Français en avaient entendu parler et que 13% envisageaient même de réduire leur consommation.

«Nos classements (groupe 1, 2a, 2b, 3...) n’indiquent pas le niveau de risque associé à un agent carcinogène, mais le niveau de preuve scientifique montrant qu’il est carcinogène»,
s’est défendu le Pr Dana Loomis, l’un des auteurs de la fameuse évaluation.
Le fait que le tabac ou la viande rouge se retrouvent tout en haut de l’échelle du CIRC (groupe 1) signifie simplement que le lien de causalité entre ces produits et le risque de cancer est scientifiquement des plus robustes.
En revanche, si l’on aborde la question par le nombre de morts, ce sont 34.000 décès par an dans le monde qui seraient imputables à une alimentation riche en viandes transformées et 50 000 à la viande rouge, alors qu’un million sont dus au tabac.

L’OMS précise que l’augmentation du risque de cancer colorectal (le principal cancer incriminé avec la viande) est de 18 % pour chaque portion quotidienne de 50 g de charcuterie et de 17 % pour chaque portion quotidienne de 100 g de viande rouge.
Le groupe de travail du CIRC qui s’est penché sur la viande, épluchant près de 2300 articles scientifiques publiés sur le sujet, a décortiqué les données chez l’homme, chez l’animal et, plus fondamentalement, sur les mécanismes de cancérisation. Il apparaît que les données chez l’homme sont jugées «limitées» pour la viande rouge, «ce qui signifie que le lien de causalité est crédible, mais que des biais statistiques ne sont pas complètement exclus». Les preuves sont néanmoins «suffisantes» pour établir un lien de causalité s’agissant de la charcuterie. À l’inverse, les mécanismes de cancérisation sont solidement établis pour la viande rouge, moins clairement pour la charcuterie. Les données des études animales ne permettent pas de trancher.

Conclusion: on peut continuer à manger de la viande rouge et de la charcuterie, mais avec modération… comme pour tous les autres aliments (c'est moi qui ajoute ce qui figure derrière les points de suspension)