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mardi 13 octobre 2020

Peut-on écrire avec enthousiasme sans se laisser aller à de la poésie fautive du point d vue lexical ?

 
J'entends et je lis des mots dont l'acception est... "originale" (oui, je veux bien dire très idiosyncratique).  Arôme, flaveur, saveur, goût ? Alors que je critique l'étrange usage qui est fait de ces mots, on me rétorque que c'est bien difficile d'écrire de façon que l'enthousiasme transpire.

Écrire avec enthousiasme ? Un correspondant me dit que, parfois, l'enthousiasme et la littérature le conduisent à des confusions entre ces termes. Ces confusions sont-elles vraiment indispensables, inévitables, lui demandé-je ? Je suis certain que non et, au contraire, je crois qu'il n'y a aucune raison de ne pas avoir, pour ces termes la même précision que pour les autres mots, car au fond, si la pensée, ce sont les mots, ce ne sont pas avec des mots imprécis, approximatifs, gaucis, biaisés, tordus que l'on fera la moindre des littératures (aucun des adjectifs précédents n'est utilisé dans une acception approximative).

Viens maintenant la question de l'enthousiasme et là,  je reviens de loin, car je suis le premier à être - jadis - tombé dans l'épithétisme :  l'accumulation d'adjectif, d'adverbes, de superlatifs... au lieu d'avoir la force par le verbe juste, le mot juste, et surtout l'idée juste !

Oui, l'idée juste : car c'est cela la force de discours ! Il nous faut des idées étonnantes, surprenantes, remarquables, intelligentes en un mot... et précises. Ce qui fait style, c'est bien de proposer des idées qui ont une originalité si grande qu'elles s'imposeront à tous, sans ces effets de manche un peu vulgaires que sont les accumulations d'adjectifs, d'adverbes, sans les imprécisions, les gauchissements.

L'enthousiasme ? C'est comme dans tous les arts, un souci du détail, une précision incommensurable qui s'apparente à être capable de peindre des mouches sur un tableau de façon si réaliste que l'on s'y trompe.

Bien sûr, il y eut des grands auteurs de l'accumulation, et l'on pense immédiatement à François Rabelais, surtout si l'on est gourmand. Oui, mais son accumulation est en termes d'objets, car quand il évoque les boudins, les jambons, les saucisses, les andouilles, etc., c'est une image qu'il nous donne, une image extraordinairement précise.

Bref, je crois que la maîtrise littéraire résulte de la précision, d'une précision parfaite, d'une maîtrise parfaite des mots, de leur sens, de leurs connotations, de leurs sonorités...
Et c'est ainsi que nous lisons de beaux textes, qui s'apparentent à des dessins où l'encre n'a pas coulé, à des peintures où rien n'est laissé au hasard, à des musiques où tout est réglé pour faire passer un exact sentiment.

mercredi 27 février 2019

Sécurité alimentaire et sécurité sanitaire des aliments

 Un dieu jaloux a voulu éviter la collaboration qui visait, à Babel, à construire une tour qui atteindrait le ciel. De même, aujourd'hui, l'emploi de mots à acception réservée conduit à des confusions. Ainsi, certains désignent pas "sécurité alimentaire" ce qui est en réalité une sécurité sanitaire des aliments.

C'est toujours cette difficulté du partitif, selon laquel le "cortège présidentiel" se distingue du "cortège du président". Expliquons dans l'ordre inverse :
- le cortège du président, c'est l'ensemble des personnes qui accompagnent le président
- le cortège présidentiel, ce serait un cortège qui serait le président !

De même, la sécurité alimentaire se rapporte à la question de produire assez d'aliments pour nourrir les populations.
La sécurité sanitaire des aliments désigne le fait que les aliments soient sains.

Et nos débats publics seraient plus apaisés si tous les protagonistes partageaient ces définitions. Soyez prosélytes !




jeudi 20 décembre 2018

Je suis partagé

Récemment, lors d'une rencontre scientifique, j'ai entendu des enchaînements de mots de plus de trois syllabes où les termes d'excellence, de multi-échelles ou de champs thématiques se tiraient la bourre avec des communautés de travail, des impactages environnementaux, bien sûr des durabilités et des forts potentiels, sans compter les positionnements, des plus-values de regroupement ou des intégration des données assorties de couplages... Quel jargon !

Pour autant, que l'on me comprenne bien : je milite pour une terminologie scientifique précise, et c'est de ce point de vue que je propose de parler plutôt de "traitement thermique en phase aqueuse" que de cuisson de bouillons, de parler de tissus végétaux ou animaux que de légumes, fruits, viandes ou poissons... En science, chaque terme utilisé doit s'adresser à l'ensemble de la communauté, sans ambiguïté. Oui, on peut parler de torréfaction, mais à condition d'avoir dit ce dont il s'agissait. Oui, on peut utiliser des acronymes, mais à condition de les avoir définis.

Mais alors, le jargon que j'avais entendu lors de la rencontre était-il justifié ? Je ne crois pas, car, en réalité, la communauté ne s'entend pas sur des terminologies telles qu'"effet de matrice", ou de "multi-échelles" : il y a autant d'acception que de chercheurs, et cela ajoute à la confusion. Ce qui me fait penser à la terminologie du goût, avec cette "flaveur" que j'ai souvent dénoncée, pour ne désigner que le goût, ces confusions -jusque chez les "spécialistes" !- entre la saveur, le goût, l'odeur, l'arôme et les autres... sensations ou perceptions ? Je pose exprès la question... parce que le travail scientifique doit être si précis que l'un des deux termes seulement peut être légitimement utilisé !


mercredi 3 octobre 2018

Technoscience : un mot caméléon, qui risque de nous conduire à compter les anges sur la tête d'une épingle. Comment voir le bleu du ciel ?



Voyons, il va falloir être positif, alors que certains font exister la poussière dans le monde. L'histoire est la suivante : il y en a qui utilisent le mot de "technoscience" pour désigner... Quoi, au juste ?

Une recherche bibliographique montre que l'acception initiale, qui voulait en quelque sorte reconnaître que les sciences de la nature s'élaborent pour partie sur des données techniques, a été gauchie mille fois, au point que la communauté des épistémologues ne s'entend même plus, sans compter que si l'on utilise le mot dans une acception donnée, viendra un contradicteur qui nous fera perdre notre temps en nous opposant une autre acception... évidemment bien plus "légitime" (selon cette personne).

Un "dieux jaloux" (de quoi, dans un tel cas ?) a refait le coup de la tour de Babel, et c'est donc la cacophonie.


Il faut dire que le mot est quand même mal forgé, parce que il y a "techne", faire, et "science", savoir. De là, passer à "technique" et "sciences de la nature", c'est déjà un pas audacieux, qui fait deux hypothèses... pour arriver à un mot à plus de trois syllabes, ce type de mots contre lesquels je mets mes amis en garde, de peur qu'on leur refile des denrées pourries ou de l'idéologie. D'ailleurs, l'idéologie n'est pas loin, dans ce cas précis, parce que certains interprètent (je ne juge pas, mais me contente de lire) que les sciences de la nature sont produites par des scientifiques payés par l'Etat, lequel se préoccupe de technologie et d'innovations techniques.


Finalement, quelle acception conserver pour "technoscience" ? Aucune bien sûr : pourquoi perdre notre temps à discuter des notions inexistantes, tendues par certains qui jouent au "dragon chinois" : on fait un dragon en papier énorme, puis on le pourfend pour montrer combien on est fort !

Donc je propose d'oublier ce mot idiot pour toujours, et de ne pas entrer dans des discussions où ce mot fluctuant apparaît. Ne comptons pas le nombre d'anges sur la tête d'une épingle, comme le firent certains de ces scolastiques dont Rabelais se moquait si bien.



Le ciel est bleu !



Émergeons donc de la boue où l'on a voulu nous plonger, faisons souffler un grand vent sur la poussière du monde que certains ont créée, levons la tête vers le ciel bleu. La technique ? C'est une activité merveilleuse, en ce sens qu'elle fait. Ou plutôt, disons qu'elle est merveilleuse quand elle fait bien, intelligemment. Les sciences de la nature ? On se doute que je vais dire que c'est  une activité merveilleuse, surtout quand elle se fait intelligemment.

Le rapport entre la technique et les sciences de la nature ? Il y a bien sûr la nécessité d'utiliser des outils techniques (instrumentaux) pour caractériser quantitativement les phénomènes, mais c'est là quelque chose  d'évident, donc de secondaire ; d'ailleurs, ne faut-il pas aussi respirer, manger, boire, dormir, pour faire des sciences de la nature... sans que l'on introduise de mot comme "respiroscience" ?

Puis, pour réunir les données en lois, il faut du calcul, qui ne se distingue pas, en tant qu'outil qui nous aide à atteindre nos objectifs, des spectromètres ou autres instruments techniques, qu'il s'agisse de pied à coulisse ou de synchrotron. L'induction de concepts, sur la base quantitative des "lois" (des équations, il faut le répéter)  identifiées ? Cette fois, la technique n'a guère sa part, au moins pour l'instant. La recherche de conclusions testables ? Là encore, nous faisons cela sans technique particulière, bien que l'on puisse imaginer des systèmes formels le faisant pour nous. Les tests expérimentaux des conclusions théoriques ? Il faut reprendre des outils et repartir dans le "laboratoire", cette pièce où l'on travaille pratiquement.


Ah, que cette activité de production de connaissances est belle, que le ciel est bleu !

jeudi 6 septembre 2018

Pourquoi être précis ??????

Un  collègue me demande notamment pourquoi j'accorde tant d'importance aux mots.

Oui, pourquoi est-ce que je maintiens (avec beaucoup d'intellectuels du passé) que les mots doivent être justes, dans leur  dénotation comme dans leur connotation d'ailleurs ?
 Un exemple : il est vrai que je fais une différence essentielle entre les mots "enseignant", "tuteur", "professeur", "maître"...
 Ce n'est qu'un exemple, mais j'explique, pour commencer, sur cet exemple : en l'occurrence, je récuse le mot "enseignant" pour la double raison que c'est un participe présent jargonnant et qu'il est bien impossible d'enseigner (on peut seulement apprendre, quand on est étudiant) ;  le tuteur, lui, est quelqu'un qui exerce une activité de tutorat, de guide, avec des objectifs bien différents de celui qui voudrait "enseigner" ;  le maître à une activité que je n'ai pas encore analysée et que je ne peux pas donc décrire... mais comment oublier ce "Ni dieu ni maître" ;  et le professeur doit étymologiquement "parler devant", et j'ai analysé qu'il s'agissait de transmettre beaucoup d'envie de connaître et d'apprendre, beaucoup d'enthousiasme, pour que les études se fasse le plus activement possible.

Dans le même ordre d'idée, je distingue le pédagogique,  l'éducatif, l'instructif, le didactique, par exemple. Le pédagogique, par définition, s'adresse à des enfants  ;  l'éducatif et l'instructif n'ont pas la même signification puisque l'un se rapporte à l'éducation, en gros à l'apprentissage des règles de bienséance,  et l'autre à l'instruction, c'est-à-dire aux matières qui relèvent du collège,  de l'école,  du lycée ou de l'université. Mais on trouvera dans un autre billet les analyses plus approfondie de cette question, précisément avec des considérations étymologiques et historiques. Enfin le didactique s'applique à ce qui m'intéresse en réalité,  c'est-à-dire les études.


Mais je reviens maintenant à ma discussion initiale, en observant que je cherche à employer effectivement les mots  avec une signification bien particulière qui ne dépend pas de moi mais d'un fonds commun de la langue donné par le dictionnaire. Je veux des acceptions justes, fondées, répertoriées, partagées...

Et je m'interroge quand même sur la remarque de mon collègue, car si l'on se met idiosyncratiquement à nommer "chat" un animal à quatre pattes et à poils qui fait wouah, wouah, alors on risque d'être mal compris de ses semblables, non ? Or mon collègue se demandait aussi pourquoi je ne faisais pas référence à d'autres collègues ayant étudié la didactique :   ma réponse tiens dans cette observation que beaucoup d'entre eux ont leur propre  terminologie, leurs propres acceptions idiosyncratiques, fondées sur des "systèmes" que je n'apprécie pas toujours ; ils ont leurs propres définitions... mais  je refuse absolument d'être ballotté par des intellectuels parfois un peu faibles, qui  voudraient faire passer des terminologies qui fonderaient leur "compétence".
Et puis, je n'oublie pas  le grand Lavoisier, qui observa avec Condillac que la langue est un outil analytique, et que les mots vont de pair avec la pensée. C'est une hypothèse que j'ai partiellement réfutée, mais qui reste juste en première approximation : il nous faut les bons mots pour bien penser.

Tout cela fait un billet, mais il y a en réalité une réponse beaucoup plus rapide : je ne me résous pas à utiliser d'autres mots que les mots justes... parce que si je me mets à dire n'importe quoi, alors je dis... n'importe quoi ! 
Pour être juste et précis, ou, au moins pour avoir l'espoir de l'être un peu, je dois trouver les bons mots. Ce qui me fait immédiatement penser à cette citation du poète : "L'écrivain est quelqu'un qui ne trouve pas ses mots, alors il cherche, et il trouve mieux". Oui, ce n'est pas en pissant des phrases, sans contrôle,  sans réflexion suffisante, que l'on aura une chance de penser un peu bien. De même que dans un calcul, la moindre lettre compte (on fait des catastrophes si on confond avec  x avec un y), je ne vois pas pourquoi, quand on parle, une précision au moins égale ne serait pas de mise.

Bref, utilisons de bons mots !







PS. Un ami alsacien me signale  :
"Concernant la langue, on oublie que bien des Alsaciens qui ont suivi une scolarité allemande durant la deuxième guerre dans des établissements comme le lycée ou l'université, ont par la suite pour leurs discours notamment (un exemple d'un parent très proche) toujours pensé en premier en allemand puis rédigé en français.
Sans passer par une première rédaction en allemand, leur réflexion sur le contenu et les formulations se faisaient en allemand dans leur tête, et enfin la rédaction en français."