"Merci pour attention" : souvent dans les conférences, c'est par ces mots que les orateurs terminent leur présentation, et je trouve cela très "faible". Je le critique vivement, et voici pourquoi.
Je le critique d'abord parce qu'il est très conventionnel, et en quelque sorte paresseux : ce n'est pas un vrai merci, et c'est donc un faux merci, donc quelque chose qui n'est pas sincère, factice.
Je le critique aussi, parce que c'est le monde à l'envers : c'est au public de remercier l'orateur... à condition évidemment qu'il ou elle se soit donné du mal pour bien présenter, pour bien expliquer. Et si il ou elle ne s'est pas donné du mal, alors ce merci est encore pire.
Je le critique enfin parce que c'est paresseux, et bête : paresseux, parce que l'on termine ainsi sans se demander comment terminer, bête parce que l'on ne cherche pas à être intelligent, ce qui est donc l'inverse d'une politesse que l'on doit faire à nos interlocuteurs.
Que faudra-t-il dire à la place de cette formule à rejeter, me demande-t-on ?
Je propose d'abord que nous réfléchissons, que nous analysions la situation : nous avons donc présenté un sujet, des résultats, et vient le moment de... conclure : c'est donc la fonction d'une conclusion.
Conclure, contrairement à ce qui est indiqué dans certains documents éditoriaux à propos des articles scientifiques, cela ne veut pas dire répéter ce qui a été dit (ce qui revient à prendre les interlocuteurs pour des idiots), mais plutôt prendre du recul sur ce que l'on a dit, et c'est à ce titre que des conclusions et des perspectives à son préférable à des conclusions.
Dans la conclusion, on évalue ce qui a été présenté, on prend du recul, un peu de hauteur, et dans les perspectives, on envisage ce qui reste à faire, on fait briller les yeux, on rend mémorable des points particuliers.
Mais j'entends mes amis me dire qu'il va falloir s'arrêter de parler, et indiquer à l'auditoire que l'on s'arrête de parler. Il y aurait une finale, en fin de conclusion, et certains justifient ainsi le "merci pour votre attention" qui montre bien que c'est la fin du discours.
C'est vrai... mais c'est un manque terrible d'imagination.
Pour ce qui me concerne, j'ai imaginé une foule de finales possibles. Une de celles que je préfère est un grand "Vive la chimie", dont chacun comprend bien qu'il s'agit d'une conclusion et une conclusion ouverte au lieu d'être une conclusion fermée comme le "merci pour votre attention".
J'ai fait des variantes : vive la gourmandise éclairée, vive la connaissance, vive la gastronomie moléculaire, et cetera, mais je peux en imaginer bien d'autres. Par exemple on pourrait dire "Et voilà ce que je voulais vous raconter", ou bien encore "Et voilà où nous en sommes". Et ainsi de suite. D'ailleurs, Alsacien, je me demande si je ne vais pas m'amuser avec un grand "Hopla", la prochaine fois
Je crois aussi qu'il y a des publics différents, et qu'il y a lieu ce comporter chaque fois en fonction de ces derniers : on ne parle pas à un public académique comme au grand public, et la clarté est la politesse de ceux qui s'expriment en public, disait justement l'astronome François Arago.
En tout cas, il y a lieu de montrer que l'on est très intéressé, très amusé, par le sujet que l'on montre. Bien sûr on peut faire comme le chien Droopy de Tex Avery, qui, d'un air lugubre, disait "You know what, I am very happy". Mais l'humour est un jeu difficile, surtout pour ceux qui ne sont pas à l'aise ; on aura intérêt à être plus simple, car l'humour et le second degré n'est pas toujours bien compris
Finalement, je le répète : c'est une faiblesse ou une paresse que ce merci pour votre attention scientifique, et il y a lieu de faire un petit effort pour contenter notre auditoire, nos amis.
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