mercredi 19 août 2020

Les Alsaciens sont travailleurs, rigoureux, hédonistes, droits

1. Les Alsaciens sont travailleurs, rigoureux, hédonistes, droits... Oui, les Alsaciens sont travailleurs, rigoureux, hédonistes, droits ; oui, les Alsaciens...
Oui, car même si l'on se doute bien qu'il y en a (vraiment ? ;-)) de paresseux, d'imprécis (vraiment ?), de moroses (ah bon ?), de malhonnêtes (quand même pas !), ceux-là ne doivent pas compter, et je ne désespère jamais qu'ils reviennent dans le droit chemin. Et, surtout, ce n'est pas là la question : l'important, c'est d'afficher un idéal auquel nous puissions tous adhérer.

2. A l'aide de cette "bannière", le moindre des Alsaciens s'efforcera d'être travailleur, rigoureux, hédoniste, droit... Nous jugerons nos défaillances à l'aune de l'étalon que nous nous serons donnés, et c'est parce que nous aurons affiché un drapeau que nous le mériterons.
Il y a dans cette idée la même préoccupation que celle de l'Alsacien qui fleurit sa maison de géranium pour faire un beau village.

3. L'écrivain anglais Lewis Carrol (John Dodgson), le père d'Alice au pays des merveilles, disait : "Ce que je dis trois fois est vrai". Il y a de la litanie, certes, dans l'idée, mais pourquoi pas ? Oui, pourquoi ne pas répéter que les Alsaciens sont travailleurs, rigoureux, hédonistes, droits, afin de faire advenir l'idée ?

4. On retrouve aussi, ici, l'idée de Marcel Achard, qui proposait la volonté individuelle comme vision du monde. Bien sûr, ce type d'idées mérite d'être partagé, mais... on y arrive. Dans le cas de Jean de la Lune d'Achard, c'est une fiction, bien sûr, mais une fiction qui contribue à doubler l'idée, ou, plus exactement, à la porter au carré.

5. Dans le cas de Jacques Waltz, l'illustrateur francophile et germanophobe qui signait Hansi, comme avec Erckmann et Chatrian, qui visaient des caricatures, on a... des caricatures, et, là encore, on donne de la force à l'idée collectivement partagée. C'est parce que le trait est mieux visible que l'on distingue bien la forme.

6. Ceux qui s'y refusent ? Ils ont le droit, évidemment, mais qu'importe, puisque notre objectif n'est pas exclusif, mais, au contraire, enthousiasme, en vue de nous aider à avancer dans une direction dont les valeurs sont difficilement contestables : qui de droit ne mettrait la droiture en exergue ? qui oserait proposer l'imprécision comme objectif, à part quelques originaux qui veulent se faire remarquer ? qui oserait proposer la paresse comme finalité (en tout cas,  je n'en veux pas dans mes amis) ? et qui voudrait proposer d'être pisse-vinaigre ?

7. En tout cas :
- oisiveté est mère de tous les vices (s nix tüa isch dr Àfàng vo àlla Làschter)
- la rigueur n'est pas le rigorisme ;
- il n'est pas nécessaire d'être lugubre pour être sérieux ;
- on relira Montaigne traversant l'Alsace dans ses voyages, pour discuter l'hédonisme alsacien, sur des bases aussi lointainement établies ;
- pas besoin de commentaire pour la droiture, à part peut-être "Le summum de l'intelligence, c'est la bonté et la droiture", qui ne donne que des bases, un petit minimum, oubliant cette qualité éminemment alsacienne qu'est l'activité.


vendredi 7 août 2020

La complainte de certains doctorants



Plus j'y pense, moi je comprends que certains doctorants puisse se plaindre de la difficulté de la préparation d'une thèse.

1. Tout d'abord, j'observe qu'avoir la possibilité de faire de la science (un financement, un travail qui ne nous abîme pas le corps, sans compter de l'intérêt intrinsèque, qui est premier !) est un immense bonheur, et quiconque ne le ressent pas ne doit  certainement pas continuer dans cette voie (de même, si l'on n'aime pas nager, faire des marathons, jouer de la musique... personne ne nous y force !).

2. Évidemment, il y a aussi les circonstances, et l'on peut imaginer que le doctorant se retrouve avec un directeur de thèse qui serait une méchante personne... mais alors, il est inutile de se plaindre, et  il faut changer immédiatement de laboratoire, de directeur de recherche, sans quoi on cause son propre malheur.
D'ailleurs les institutions ont bien pris la mesure de cette affaire,  et aussi les mesures nécessaires, puisqu'elles organisent maintenant des visites, des réunions, des entretiens,  qui visent précisément à s'assurer que tout va bien de ce point de vue-là.
Mais je le répète : ne travaillons jamais avec des salauds, et prenons nos responsabilités, sans nous plaindre, si nous décidons de rester en leur compagnie.

3. Un autre cas : que le doctorant ne soit pas "capable" de faire ce qui lui est demandé. De même que l'on aurait du mal à nous produire en concert si nous ne savons pas jouer d'un instrument, de même j'ai peur qu'il y ait parfois des personnes engagées dans des thèses sans en avoir la capacité, ou sans que soit mis en oeuvre le travail nécessaire pour faire une bonne thèse. Là, c'est d'insuffisance des doctorants dont il est question... et pourquoi se plaindraient-ils ? Après tout, les jérémiades des incapables ou des paresseurx ne nous intéressent pas, et d'ailleurs, ils se rendent un mauvais service, puisque tout le temps pris par ces plaintes serait mieux utilisé à se mettre au niveau.

4. Il y a aussi une sorte de personnes qui se plaint, quoi qu'il arrive, et ces personnes m'insupportent, moi qui ait le point de vue que nous devons montrer le ciel bleu à nos amis, moi qui écrit inlassablement que nous devons montrer des sourires, apprendre à voir le ciel bleu, apprendre à sourire...
Et je fuis comme la peste ceux qui se plaignent, parce que je les juge impolis.
J'ajoute que, pour moi comme pour les autres, la bouteille n'est ni à moitié vide, ni à moitié pleine, et j'ai le devoir d'apprendre à la voir à moitié pleine. J'exclus de mon champ ceux qui ne font pas l'effort d'être ainsi.

5. Quels cas restent-ils ? Le sentiment de ne pas être aimé, pas reconnu ? Oui, je sais qu'il y a des familles terribles, effroyables, des situations familiales désastreuses... Mais je me souviens de mon père, sur son lit d'hôpital, qui chantait encore (pour nous qui étions réunis autour de lui) "Quoi qu'il arrive, j'ai toujours le sourire  ; je vois la vie du bon côté, car je sais bien qu'il peut m'arriver pire, et ça suffit, pour me mettre en gaîté". Quel homme merveilleux c'était  ! Quel exemple !

Oui, apprenons l'optimisme, par politesse envers nos interlocuteurs.

Des questions de conservation


Conserver ?

Cela fut la grande préoccupation de l'humanité, avant la découverte de l'appertisation, des micro-organismes et du froid ! On n'a pas assez répété que nos saumons fumés, nos yaourts, nos fromages, nos vins, nos confitures... ne sont pas seulement des préparations délicieuses, mais des moyens de préserver, en prévision de disettes, des ingrédients soudainement abondants.
Que faire des haricots qui abondent, d'un coup ? Des conserves. Que faire des fruits qui font casser les branches des arbres ? Des confitures. Que faire du lait d'une traite, trop abondant pour être bu ? Du fromage. Et ainsi de suite.

Une idée simpliste, mais utile pour notre discussion : les aliments ne se conservent pas, parce que notre environnement (l'air) est plein de micro-organismes, lesquels sont des êtres vivants aux besoins analogues aux nôtres : il leur faut des températures modérées, de l'eau, des nutriments ; bref, tout ce que les ingrédients alimentaires classiques ont à leur surface. D'où des fermentations pas toujours bénéfiques : que l'on pense à ces Clostridium botulimum qui produisent la toxine botulique, mortelle !

Allons-y, en principe :

∘ Pour du yaourt, pas difficile : on ajoute des échantillons de deux micro-organismes, qui consomment lentement le lactose du lait (un sucre) et le transforment en acide lactique, qui fait "cailler", en un gel lisse qui est le yaourt. La recette est simplement d'ajouter au lait un peu de yaourt déjà fait, à du lait que l'on tiédit.

∘ Pour du fromage, pas difficile : on prend du lait, et on lui ajoute simplement de la présure, qui fait cailler ; on casse le caillé, on fait égoutter, et l'on récupère une matière sèchée que l'on peut saler, afin de guider des proliférations bactériennes utiles, comme pour le munster. Bien sûr, il y a mille variations... parfaitement décrites dans le livre du merveilleux et défunt Jean Froc, aux Editions Quae.

∘ Pour de la viande séchée, pas difficile : on passe au sel pendant plusieurs heures/jours, afin de faire croûter, le sel tirant l'eau (par le phénomène d'osmose) et imprégnant un peu la surface, puis on met dans un courant d'air, pour faire sécher : de la sorte, les micro-organismes manquent de cette eau dont ils ont besoin. Cela vaut pour les jambons ou les saucissons, mais aussi pour des pièces différentes. Et l'on garde cette idée forte : sans eau, la conservation se fait mieux.

∘ La conservation au sel ou en saumure ? Pas difficile : on met la viande ou le poisson dans du sel, lequel n'est pas un milieu favorable aux micro-organismes, dont il "tire" l'eau par osmose. Attention, je ne dis pas que des micro-organismes ne se multiplient pas dans la saumure, mais quand même, on a salé les jambons pendant des siècles : rappelons-nous l'histoire de Saint Nicolas et les trois petits enfants qui s'en allaient glaner aux champs.

∘ Tout comme le sucre ! D'ailleurs, le sucre est utilisé dans les hopitaux de campagne, directement déposé sur les plaies. Et cela engendre les fruits au sirop, mais aussi les confitures, et aussi quelques poissons : pensons aux gravlax, par exemple.
Tiens, j'y pense : ne manquez pas mon "truc" merveilleux pour bien doser le sirop des fruits au sirop ; cela est dans Mon histoire de cuisine (Editions Belin)

∘ Du sucre, on passe au miel, qui n'est en quelque sorte qu'une solution sucrée : on dit que le corps d'Alexandre le Grand fut rapporté à Alexandrie dans du miel.

∘ Et puisque nous avons évoqué sel et sucre, pensons fumage... qui sèche en même temps qu'il dépose des composés qui  bloquent la prolifération microbienne. Ne pas en abuser, toutefois, car à haute dose, ils sont cancérogènes : à preuve la plus grande incidence des cancers du tractus digestif dans les pays nordiques, qui mangent beaucoup de fumé.

∘ Le salpêtre : c'est une matière que l'on recueillait sur certains murs, afin de préparer de la poudre à canon. Il est utile dans des charcuteries, parce qu'il bloque certains micro-organismes tels que le Clostridium botulinum. Certains l'attaquent aujourd'hui, mais ont-ils raison ? A venir pour dans quelques semaines un rapport, qui explore la question, résultat de plusieurs auditions de spécialistes, scientifiques (différentes spécialités), technologues, techniciens. Sans parti pris politique !

∘ Le vinaigre ? Essentiel : j'ai ainsi dans mon garde-manger des cornichons, des mirabelles, des cerises et des quetsches au vinaigre. Indispensable pour un bon pot au feu à l'Alsacienne.
Une précision : dans mes quetsches au vinaigre, j'ajoute de la cannelle et du sucre.
Et pour les cornichons, il y a un "truc" pour les conserver croquants, à savoir les chauffer doucement dans le vinaigre, initialement, pour activer des enzymes végétales qui feront durcir.

∘ Mais on n'oublie pas que l'acide acétique du vinaigre vient de la fermentation de l'alcool éthylique (ou éthanol) du vin ! Et l'on conserve très bien dans l'eau-de-vie.

∘ L'appertisation : découverte par Nicolas Appert, elle permit de conserver des légumes... et, dans une exposition au Palais de la découverte, j'avais fait exposer des petits pois préparés par Appert  (c'était juste à la Révolution française).

∘ Et le froid : l'humanité a su conserver au froid quand elle en a disposé, mais faut-il vraiment faire un guide de l'utilisation des congélateurs.


En pratique ?

 Internet est plein de "recettes", de sorte que je ne vais quand même pas ajouter ma voix au concert... d'autant que c'est quand même simplissime.



Et l'intérêt  des conserves personnelles par rapport aux conserves industrielles ?

 Le mot "conserves" est ambigu, parce que toutes les préparations évoquées précédemment sont des "conserves", à défaut d'être de l'appertisation... qu'il faut quand même maîtriser correctement : j'ai déjà signalé le cas de tapenades artisanales qui avaient envoyé des clients à l'hôpital... et le fabricant inconscient en prison ! Mais pour des confitures, des quetsches, du saumon fumé,  de la viande séchée, et ainsi de suite, je préfère souvent les miennes !

jeudi 6 août 2020

Visiting the lab


1. After a discussion, colleagues from abroad tell me (this is perhaps only politeness) that they would dream to visit my laboratory. For sure, they are welcome, because this is the rule, in our realm of scientific research: one should be able to share at any time with any colleague.

2. But what are they going to see? A chemistry laboratory, with offices, on one side of two long corridors (on two levels), and laboratories on the other side. In the offices, people and computers; in the laboratories, microscopes, hoods, benches, rotary evaporators, vacuum machines, MNR spectroscope, GC-MS, LC-MS, Infrared, atomic absorption equipments, plus a lot of hardware, compounds, etc.

3. Yes, for scientists, all what we have is not new. No brand new equipment, because today, if you want to make some analysis using a synchrotron, you go to the synchrotron; if you need high field NMR equipment, you go to the NMR Centre; and so on.

4. Finally, my colleagues will not find that very exciting. But perhaps they are wrong, because when they say "lab", it means perhaps "having a scientific discussion".

5. And here, I have a duty to make my interlocutors excited; I have some many ideas, so many questions... It is probably this that they are willing to find. In French, on one of the walls of my office (not a lab, even if the office is in a previous lab, with a bench, old microscopes and a lot of strange stuff), it is written: "enthousiasm is a disease that you can get". But this translation is not good, because in French, the word "get" is does not simply mean that you get the disease, but also that you can "win" it.

6. Anyway, finally, science is very exciting!

lundi 3 août 2020

Des questions d'émulsions

Nous sommes bien d'accord : en cuisine, le plus souvent, une émulsion est une dispersion de gouttelettes de matière grasse dans une "phase aqueuse", qui peut être du bouillon, du vin, du jaune d'oeuf additionné de vinaigre (pour la mayonnaise), de la moutarde et du vinaigre (pour la rémoulade), du jus de légumes ou de fruits, etc. Très rarement, on a l'inverse, à savoir la dispersion d'eau dans une matière grasse liquide, mais en aucun cas l'émulsion ne se confond avec la mousse, laquelle est une dispersion de bulles d'air, dans un liquide. On terminera en signalant que, pour faire la dispersion, il faut des composés "tensioactifs", dont les plus courants culinairement sont les protéines ou les phospholipides (du jaune d'oeuf), ou, ce qui  a été découvert en 1904, mais qui est très à la mode en science et technologie de l'aliment aujourd'hui, des particules variées (pour des "émulsions de Ramsden", parfois fautivement nommées "émulsion de Pickering").

Tout cela étant dit, nous pouvons maintenant examiner la question que je reçois aujourd'hui par email :

Bonjour Monsieur,
Où puis-je trouver la réponse aux questions suivantes :
1. Je fais une vinaigrette allégée en utilisant 50% d’huile, 50% d’eau, du vinaigre, du sel/poivre et une cuillère de fécule de maïs.
2. Par quel procédé physico-chimique l’émulsion est-elle réalisée ?
3. J’imagine que l’amidon de la fécule de maïs entre en jeu, mais comment ? est-ce que le sel joue également un rôle ?
Où puis-je trouver une réponse documentée à ce type de question ? Dans l’un de vos ouvrages ? blog ? Une autre source ?
Par avance, merci INFINIMENT pour votre réponse,
Bien à vous.


Dès le début de la question, je m'étonne que l'huile soit disposée en premier, car si l'on fouette un liquide dedans, on risque de ne pas faire une émulsion huile dans eau, mais plutôt eau dans huile : je suppose que mon interlocutrice a donné les ingrédients dans un ordre  qui n'était pas celui de la recette, et qu'elle  a plutôt commencé par l'eau, le vinaigre, le sel et le poivre, puis la fécule de maïs, avant d'émulsionner l'huile.

Et dans cette hypothèse, on peut imaginer que la fécule de maïs ait été ajoutée dans l'eau chauffée, de sorte qu'elle s'est empesée, ce qui a conduit à une phase aqueuse très visqueuse, où l'huile a pu être émulsionnée grâce aux divers composés tensioactifs qui trainent dans tous les ingrédients, notamment la fécule. Ou alors des particules de fécule auraient dispersé les gouttelettes ? Manifestement, il me faut des précisions sur la recette... et un microscope pour explorer ce système.

Pour la question 2, le procédé est l'agitation, qui divise l'huile en gouttelettes.

Pour la question 3, j'ai répondu plus haut, mais non, le sel ne joue probablement pas de rôle... alors que le poivre pourraient apporter des composés ou des particules utiles.

Mais j'attends des précisions sur la recette, afin de mieux analyser.

dimanche 2 août 2020

Une autre chance

1. Il y a des individus qui, quand il sont à l'école, au collège, au lycée, voire au début de l'université, ont du mal à étudier : terribles hormones de l'adolescence, milieux familiaux  parfois effroyables, fatigue due à un emploi qui s'ajoute aux études... Ces jeunes amis, qui se sont décidés pour la voie universitaire,  risquent alors de ne pas avoir accès aux formations qui leur donneraient des compétences qui ne soient pas celles d'une machine, et, s'ils n'ont pas fait le choix de métiers plus pratiques (tout à fait merveilleux : pensons à celui de cuisinier !), ils iront à l'échec.

2. J'insiste un peu : je ne dis pas que les études supérieures à l'université soient la  panacée :  il vaut mieux un bon plombier, un bon cuisinier, qu'un mauvais scientifique, qu'un mauvais ingénieur ! En revanche, je dis que si la formation que visent nos jeunes amis ne leur est pas accessible, alors nous devons collectivement un moyen de les aider. Car ces personnes ont parfois joué de malchance, et l'on comprend que c'est la moindre des humanités que de leur donner une autre chance.

3. Cela étant dit,  je ne crois pas juste de déroger à l'idée saine selon laquelle les diplômes sont des façons d'attester un niveau de connaissances et de compétences, et je suis très opposé à l'idée d'attester de connaissances et de compétences quand elles ne sont pas présentes, parce que les institutions de formation se déjugeraient, ainsi, et parce que ce serait mentir.

3. Donner une autre chance, cela ne signifie pas naïvement croire que tout le monde finit par être capable de résoudre des équations aux dérivées partielles, car les faits sont plus forts que nos idées généreuses  : pour des raisons qui restent à bien analyser et à bien comprendre, tout le monde ne parvient pas à travailler, à étudier ; tout le monde n'a pas ce goût d'être non pas au bistrot, mais à une table de travail, même quand il fait beau dehors, même quand les amis sont ensemble (on aura évidemment compris qu'il s'agit là d'une métaphore : on peut très bien travailler au bistrot... à condition de travailler et ne pas passer son temps à autre chose que l'objet d'étude).

4. Oui il faut donner une autre chance, accorder des années en plus à des personnes qui en ont besoin quand elles pourront en faire usage, les guider sur le chemin de l'étude, mais il faut aussi reconnaître que, à la fin de ces années, une évaluation est nécessaire, et que les diplômes doivent être le résultat de cette évaluation. Quand les  matières ne sont pas maîtrisées,  il faut le reconnaître sous pleine d'affaiblir la valeur des diplômes  qui, rappelons-le, sont des documents à valeur internationale. Les professeurs ou les institutions de formation doivent le courage de recaler des étudiants, bien qu'il vaille mieux s'y prendre bien plus tôt, et ne pas laisser s'engager sur une voie ceux et celles qui ne pourront pas la parcourir.

5. Et puis, quand même : pourquoi ferions-nous jouer au football des gens taillés pour l'haltérophilie, et vice versa ?  Je répète qu'un cuisinier, un électricien, un plombier, un garagiste habiles, soigneux, attentifs, efficaces dans leur métier, valent mille fois mieux qu'une personne égarée ou réfugiée en science.

6. Au fond, quelle est notre "place" ? Et pourquoi ?




samedi 1 août 2020

Nos erreurs nous font grandir


1. Dans notre groupe de recherche, nos bilans de chaque soir comportent une partie essentielle, consacrée aux "symptômes", à ce qui "a coincé".

2. Cette partie est essentielle, parce que c'est un fait d'expérience que nous répétons nos erreurs, et que, même, souvent, elles sont la partie émergée d'iceberg que nous nous cachons à nous-mêmes, des "symptômes.

3. Un "g" mal tracé et que l'on confond répétitivement avec un 9, ce qui engendre des erreurs de calcul ; l'utilisation d'un résultat de calcul que nous ne comprenons pas, de sorte que notre utilisation est fragile ; le maniement insuffisamment assuré d'un formalisme chimique, qui nous expose à des erreurs, dès que les cas considérés sont plus délicats ; un mot dont l'acception est incertaine, et qui nous fait verser dans la faute ; l'absence de méthode, dans une tâche, qui nous ralentit considérablement, l'utilisation d'un concept dont les bases ne sont pas absolument certaines...  Tout cela nous retombe dessus  : les conséquences sont à la fois délétères, et répétitives. Sans faire de psychologie, on sait bien que nos névroses sont des carcans : les obsessionnels (en alsacien, Diffalaschiassar, chieurs de rondelles) qui passent leur temps à ranger inutilement, les hystériques qui ne se maîtrisent pas, les angoisses qui nous paralysent... Tout cela nous tombe dessus, et, ce qui est pire, nous empêche de bien penser.

4. D'où l'idée de nos introspections écrites, analytiques. Nous tirons le fil que la journée nous a tendu, et nous ne nous arrêtons évidemment au constat du détail des erreurs, mais, au contraire, appliquons l' "abstraire et généraliser" des logiciens, en nous fondant de surcroît sur le faisceau des constats quotidiens.

5. Je ne dis pas que nous parvenons à nous guérir de nos pires maladies, mais, au moins en surface, notre chasse aux symptômes ne nous rend plas plus bête.

6. Et puis, souvent, les erreurs que nous faisons sont celles que font certains de nos amis. D'où un intérêt supplémentaire de partager dans le groupe de recherche nos analyses.

7. Oui, nos erreurs nous font grandir, de sorte qu'il faut les chérir, les collectionner, les partager, pour aider nos amis.