mercredi 5 janvier 2022

Une idée qui date de décembre 2021

Voici une entrée qui figure maintenant dans le Glossaire des métiers du goût : 

 


FOISON :
Terme proposé par Hervé This le 12 décembre 2021 pour désigner les mousses très légères qui sont produites en cuisine, notamment par l'utilisation de siphons.
Le terme "foison d'or" est attribué à des foisons de couleur dorée. 

lundi 3 janvier 2022

Le microscope en cuisine

 

Il y a plus que ce que les yeux ne voient. Oui, nos yeux sont limités :  dans le très petit,  dans le très grand, dans les longueurs d'onde qui sont d'un côté ou de l'autre de l'étendue des couleurs visibles...
D'ailleurs, découvrir du nouveau, n'est-ce pas voir ce que l'on ne voyaient pas nos yeux d'"avant" ? De sorte que nous aurions raison de bien nous interroger sur nos méthodes d'explication.

Et toute cette introduction me fait souvenir d'une formation que j'avais faite sur la Côte d'Azur. À l'époque, je voulais montrer aux auditeurs que les mayonnaise sont des émulsions, et non pas de simples amalgames, comme cela était dit naguère.

J'ai déjà dit que le mot "amalgame" est d'utilisation risquée, parce que l'on ignore le plus souvent qu'un amalgame s'obtient quand on approche du mercure d'un autre métal et que l'on voit l'ensemble former une pâte homogène.
En cuisine, le terme a été repris pour désigner une préparation homogène, mais évidemment sans mercure puisque ce métal est très toxique. Et si l'on interroge ceux qui utilisent le mot "amalgame", on voit bien qu'ils ne savent pas très bien de quoi ils parlent.

Mais bref, j'étais avec des chefs confirmés, voire étoilés, et j'avais l'ambition de leur expliquer qu'il y a des choses justes et des choses fausses qui se disent à propos des sauces mayonnaises.

Comme rien ne vaut la méthode expérimentale, pour expliquer, j'avais décidé d'inviter un des participants à faire une mayonnaise afin que nous puissions la regarder au microscope.

Alors que la mayonnaise était pas faite, qu'elle était encore très liquide (peu d'huile ajoutée au mélange de jaune d'oeuf et de vinaigre), j'ai pris une goutte de la préparation pour la mettre sur une lame de verre, que nous avons regardée au microscope.

Et chacun a  alors vu, grâce au microscope, qu'il y avait une dispersion de  gouttes d'huile dans ce que les auditeurs ont admis  être de l'eau, apportée par le vinaigre et par le jaune d'œuf.

A ce stade, j'ai fait remarquer  qu'il n'y avait donc pas d'amalgame, mais une dispersion de gouttelettes d'huile dans l'eau.

Il m'a été répondu que oui, mais que la mayonnaise n'était pas encore faite.
Dont acte : j'ai invité l'opérateur a ajouter autant d'huile qu'il voulait, à fouetter autant qu'il voulait pour arriver à une mayonnaise qui serait faite.

Et quand celle-ci a été terminée, nous en avons repris un échantillon, que nous avons à nouveau observé au microscope...

Et nous avons de nouveau bien vue qu'il y avait des gouttes d'huile dans l'eau. Des gouttes dispersées, et non pas un "amalgame" au sens d'un mélange intime.

Car l'huile ne se mélange pas à l'eau. Et le mieux que l'on puisse faire, c'est comme ici : une émulsion.

Le microscope ? Merveilleux ustensile qui permet de voir mieux qu'avec nos yeux !

dimanche 2 janvier 2022

Décidément, la répétition est la base de l'enseignement ! Yes, for sure, repetition is essential for education

I get questions about some terms:

 

1.          Molecular and Physical Gastronomy, or for short Molecular gastronomy : the scientific activity (part of chemistry, physics, biology) that deals with phenomena occurring during culinary preparations (or cooking)

2.        molecular cooking : the culinary technique using modern tools (imported for science laboratories)

3.           molecular cuisine : the culinary style based on molecular cooking

4.           note by note cooking : synthetic cooking, i.e., cooking with pure compounds instead of traditional ingredients

5.        note by note cuisine : the new culinary based style based on note by note cooking

6.       synthetic cooking = note by note cooking. 


Hoping that all this is clear ?   



On me pose des questions sur certains termes :
 

1.          Gastronomie moléculaire et physique, ou en abrégé Gastronomie moléculaire : l'activité scientifique (relevant de la chimie, de la physique, de la biologie) qui s'intéresse aux phénomènes se produisant lors des préparations culinaires (ou cuisine).

2. la cuisine moléculaire : la technique culinaire utilisant des outils modernes (importés des laboratoires scientifiques)

3. cuisine moléculaire : le style culinaire fondé sur la cuisine moléculaire.

4. cuisine note à note : la cuisine de synthèse, c'est-à-dire la cuisinedont les ingrédients sont des composés purs plutôt que  des ingrédients traditionnels.

5. cuisine note par note : le nouveau style culinaire fondé sur la cuisine note par note.

6. cuisine synthétique = cuisine note par note.

 

J'espère que tout cela est clair ?    


Happy New Year

Décidément, je ne sais pas vivre



Décidément, j'ai de bien mauvaises manières : alors qu'un ami m'envoie de jolis voeux, j'analyse, je décortique... et je réfute la plupart du temps. A la poésie, j'oppose la froide raison. Est-ce bien... raisonnable ? 


Voici l'envoi, qui est une citation de Jacques Brel : 


Je vous souhaite des rêves à n’en plus finir et l’envie furieuse d’en réaliser quelques uns. Je vous souhaite d’aimer ce qu’il faut aimer et d’oublier ce qu’il faut oublier. Je vous souhaite des passions, je vous souhaite des silences. Je vous souhaite des chants d’oiseaux au réveil et des rires d’enfants. Je vous souhaite de respecter les différences des autres, parce que le mérite et la valeur de chacun sont souvent à découvrir. Je vous souhaite de résister à l’enlisement, à l’indifférence et aux vertus négatives de notre époque. Je vous souhaite enfin de ne jamais renoncer à la recherche, à l’aventure, à la vie, à l’amour, car la vie est une magnifique aventure et nul de raisonnable ne doit y renoncer sans livrer une rude bataille. Je vous souhaite surtout d’être vous, fier de l’être et heureux, car le bonheur est notre destin véritable.


Et ma réponse :

Des rêves ? Moi, j'ai des plutôt des activités.
 

L'envie d'en réaliser : on me connaît, je n'ai guère de temps pour avoir envie de réaliser des rêves que je n'ai pas, et je passe mon temps à travailler pour faire mes activité, je travaille pour le faire plutôt qu'avoir seulement l'envie.
 

Aimer ce qu'il faut aimer : OK.
 

Oublier ce qu'il faut oublier : j'ai cette capacité d'oublier tout ce qui m'ennuie ou m'a ennuyé ; et, de surcroît, l'activité ne donne pas de temps pour se souvenir !
 

Des passions : question difficile, parce que l'action ne laisse pas de place au sentiment ; on est dans l'action !
 

Silences : ah, difficile, car l'activité est un tel tumulte !
 

Chants d'oiseaux : d'accord si je les entends quand je me réveille, mais pas s'ils me réveillent ;-).
 

Rires d'enfants : oui, certainement.
 

Respecter les différences : oui, je me mêle le moins possible de la manière de vivre des autres (tant que cela n'empiète pas sur ma vie ni sur celle d'autres que ces autres, et tant qu'il y a du respect et de la dignité.
 

Le mérite et la valeur à découvrir : oui, parfois, on est heureusement surpris ; parfois, je dis.
 

Résister à l'enlisement, etc : je crois que toutes les époques ont été semblables, qu'il n'y a d'enlisement que pour ceux qui veulent en voir. Voir mes billets sur le Ragnarok. 

Marteau exclusive | Marteaux de forgeron | Marteaux | Outils | Forge |  Angele Shop
 

Ne jamais renoncer à la recherche : la recherche est mon métier, ma passion (pas contradictoire avec ce qui précède), mon éblouissement... Comment imaginer d'y renoncer ?
 

A l'aventure : la recherche, c'est l'aventure, donc idem.
 

La vie : il la faut pour la recherche, n'est-ce pas.
 

L'amour : absolument.
 

Renoncer à la vie : pourquoi donc cette idée ?
 

Etre moi ? Je le suis, non  ?
 

Fier de l'être : la fierté est un sentiment que j'ignore, car je me préoccupe entièrement de ce que je fais.
 

Heureux : Oui, certainement, et aussi parce que c'est une politesse que l'on fait aux autres.

jeudi 30 décembre 2021

Sucres, oses, saccharides...

 
Il y a des termes aussi mal utilisés qu'ils sont communément employés. Et il en va ainsi des "sucres" et de leurs cousins.
Heureusement il y a cette entreprise merveilleuse, même si elle reste imparfaite, de l'Union internationale de chimie pure et appliquée, et, plus particulièrement, de son "Gold Book", qui donne des définitions internationalement acceptées (https://goldbook.iupac.org/).  

Commençons par "sucre" : c'est un terme un peu imprécis, mais que l'on utilise souvent pour désigner les "monosaccharides" et les petits "oligosaccharides" (PAC, 1995, 67, 1307).
Les  monosaccharides? Ce sont des aldoses, des cétoses et nombre de leurs dérivés par oxydation, désoxygénation, substitutions, alkylation et acylation de groupes hydroxyles, branchements.
Les aldoses ? Des polyhydroxyaldehydes H[CH(OH)]nC(=O)H, avec n ≥ 2) et leur hémiacétal intramoléculaire. Les cétoses : des sucres cétoniques, c'est-à-dire des polyhydroxycétones H–[CHOH]n–C(=O)[CHOH]m–H et leurs hémiacétals intramoléculaires, le groupe oxo (C=O) étant généralement en C-2.
Là, nous sommes armés pour considérer les "oligosacharides" : le préfixe oligo signifie "quelques", et il est utilisé pour désigner des composés formés par la répétition de quelques résidus (entre 3 et 10) de monosaccharides.
Les polysaccharides, eux, sont des répétitions de plus de 10 unités ; on les nomme aussi des glycanes.
Et les saccharides sont les monosaccharides, les disaccharides, les oligosaccharides et les polysaccharides.

mardi 28 décembre 2021

Je vous présente le fructose, disons le D-fructose



Le fructose est un composé de la famille des oses, disons simplement des sucres.

La forme D du fructose (on dit D-fructose) est un des trois sucres que l'on trouve généralement dans les plantes (les racines, les fruits, les tiges...), avec le glucose et le saccharose.

Il a une saveur sucrée, environ deux fois et demie plus sucrée que le saccharose, qui est lui même bien plus sucré  que le glucose.

La molécule comporte six atomes de carbone, six atomes de carbone et douze atomes d'hydrogène.

En solution aqueuse (le cas général, pour les aliments), la molécule est refermée sur elle-même (67 % des molécules, à instant particulier). 

 




Jadis, lorsque la chimie était encore dans l'enfance, on a cru que le D-fructose (on ne faisait pas la différence entre le D-fructose  et le L-fructose) était fait par l' "assemblage" de molécules d'eau à des atomes de carbone, comme si l'on avait eu la formule (C-H2O)6.
Et c'est la raison pour laquelle on a parlé d'hydrates de carbone.

Mais la chimie a progressé, et elle a corrigé cette idée très fausse. Raison pour laquelle on ne doit plus parler d'hydrates de carbone, mais d'oses, de sucres, etc.
D'ailleurs, il ne s'agissait pas de simples assemblages, mais bien de molécules identifiables (après qu'on avait compris ce qu'était une molécule !).

La réaction du D-fructose et du D-glucose conduit à la formation du saccharose, ou sucre de table.
Les atomes étant réarrangés, lors de la réaction (et certains étant perdus), il n'y a plus de molécules de D-fructose ni de molécules de D-glucose dans la molécule de saccharose, mais seulement des "résidus" de D-glucose et de D-fructose.

Cristallisé, le D-fructose fait une poudre blanche.

Cette poudre peut se dissoudre dans l'eau, pour faire une solution aqueuse de D-fructose.

Vous voulez savoir quoi d'autre ?

samedi 25 décembre 2021

Les diagrammes logarithmiques

 N'oublions pas mes années passées (pour moitié) à faire la revue de vulgarisation Pour la Science : alors qu'il s'agit d'une revue de "haut niveau", illisible par ceux qui n'ont pas un minimum de bagage scientifique, je savais bien, naguère, que les graphes étaient difficiles pour beaucoup de lecteurs, et qu'il fallait donc les éviter ou les expliquer de façon détaillée. Nos lecteurs pouvaient comprendre la notion de fonction, mais il ne fallait pas en abuser. Manifestement, ce que je dis ici est plus "avancé", et certains me pardonneront, j'espère, car c'est pour des étudiants engagés dans des étudies techniques, technologiques ou scientifiques que j'écris.
Mon objectif : expliquer l'intérêt des diagrammes logarithmiques (semi logarithmiques ou "log-log"), mais, aussi, expliquer pourquoi il faut en user avec circonspection.

Pour les besoins de l'explication, je crée deux séries de points, associées respectivement à des fonctions x^3  et  x^10 (à noter que je fais tout cela en utilisant ce merveilleux logiciel qu'est Maple : comment un étudiant en technique, technologie et science peut-il ne pas l'utiliser ?) :
for i to 10 do
    p[i] := i^3;
    q[i] := i^10;
end do;

Commençons par examiner une représentation de la fonction
x^3;
. Là, sur un axe horizontal, nous portons des valeurs de x, et nous indiquons verticalement les valeurs de la fonction. Les deux axes sont gradués régulièrement : pour l'axe horizontal, par exemple, il y a autant de distance entre 2 et 3 qu'entre 5 et 6, puisque les deux différences 3-2 et 6-5 sont égales (à 1).
La représentation de la fonction est la suivante :
with(plots);
pointplot({seq([i, p[i]], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 1000], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);


Si nous voulons maintenant représenter la fonction
x^10  sur le même graphe, nous rencontrons une difficulté, car voici ce que nous sommes amenés à tracer :

pointplot({seq([i, q[i]], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 1000], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);

Là, un seul point peut être indiqué, car le deuxième, correspondant à l'abscisse x = 2, doit apparaître à une ordonnée 2^10  = 1024 qui sort du cadre du graphique.
Bien sûr, on pourrait agrandir ce dernier :
pointplot({seq([i, q[i]], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 2000], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);

Mais on voit que le troisième point (et les suivants) n'apparaissent pas. Pour les voir, il faudrait faire un graphe tel que :

pointplot({seq([i, q[i]], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 10^11], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);

Et ce n'est pas bon, parce que, cette fois, les premiers points semblent tous à  la même ordonnée, ce qui est loin d'être vrai !
La fonction logarithme est intéressante, parce qu'elle permet de bien voir les différences, aussi bien quand les valeurs sont petites que quand elles sont grandes
pointplot({seq([i, log(p[i])], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 20], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);

Bien sûr, on évitera de penser que la courbe soit ainsi  de type racine carrée, mais, au moins, on pourra voir les différences sur les points initiaux comme sur les points finaux.
Mieux même, on pourra voir des différences qui auraient été difficiles à voir autrement :
with(plottools);
a := pointplot({seq([i, log(p[i])], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 20], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);
b := pointplot({seq([i, log(q[i])], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 20], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);
display({a, b});

Jusque ici, on observera que je n'ai pas utilisé d'échelles logarithmiques, pour les graphes, mais seulement représenté les logarithmes des valeurs. Je trouve cela plus simple.

Puis, pour terminer, je vous invite à regarder ce que donne la première fonction quand on affiche le logarithme de x, et le logarithme de y :

pointplot({seq([log(i), log(p[i])], i = 1 .. 10)}, labels = ["x", "y=f(x)"], view = [0 .. 10, 0 .. 20], symbol = soliddiamond, color = blue, symbolsize = 30);

Une droite ! Mais on se souvient que c'est une courbe qui est loin d'être linéaire.