jeudi 24 décembre 2015

Pas d'armée, pas de religion, pas de politique

La chose s'oublie, mais elle  mérite d'être redite : pour  un dîner réussi, chacun  doit s'interdire de parler de religion, d'armée, de politique  !

La question s'est posée avec acuité, lors de l'affaire Dreyfus, mais le bipartisme actuel conduit quasi nécessairement à des dîners où tous les bords coexistent, doivent coexister. Et comme un bon convive est celui qui parle sans prétention et écoute avec complaisance, nous avons le devoir d'éviter les sujets qui fâchent, dans ces circonstances : que nous soyons chez nous, car nous devons à nos hôtes de les rendre heureux ; que nous soyons chez  autrui, car s'il nous reçoit, nous devons nous bien tenir.
A la proposition d'éviter les trois sujets à éviter, je sais que certains grincheux rétorquent alors : "Mais alors, on ne peut parler de rien !". Pauvres grincheux, qui n'ont pas, dans la vie, autre chose!  Et tous ces émerveillements que  nous pouvons partager ? Les oeuvres d'art que nous avons découvertes, qu'il s'agisse de littérature, de musique, de peinture... ou de cuisine. Évidemment, il ne s'agit pas de faire étalage de titres, mais d'essayer de justifier nos émerveillements.
Et puis, la pensée, la merveilleuse pensée, qui nous fait grandir, la Raison, la merveilleuse Raison, dont nous avons tant besoin. N'est-ce pas à partager sans modération ?
Sans aller si loin, n'y a-t-il pas, aussi, le bonheur de nos métiers ? Examinons quelques métiers que j'ai rencontrés récemment. Menuisier ? Le bois est une matière  magique. Médecin ? On se préccupe d'autrui. Ramoneur ? Sans lui, c'est le feu  de cheminée, et il y a le bonheur de discuter avec ses clients. Le couvreur ? De même. Vendeur ? Le sourire qu'il devait afficher rejaillissait sur  son caractère. Ingénieur ? Il fait tourner les usines, donne du travail à d'autres, et leur permet donc de vivre. Scientifique ? Il s'agit de repousser les limites de la connaissances.
Comme pour les épinards, il y a ceux qui les aiment, et ceux  qui ne  les aiment pas, mais ne s'agit-il pas d'apprendre à y mettre de la crème ? Pardon pour la métaphore, mais tous les moyens sont bons quand il s'agit de mettre un peu d'harmonie dans ce monde.
 Je vous souhaite un joyeux réveillon. Ou, plutôt, je vous souhaite plutôt d'être capable de faire  que votre réveillon soit bon, non pas parce qu'il y aura eu de la bonne cuisine et de bons vins, mais, surtout, parce que  vous aurez réussi à faire une conversation merveilleuse.

dimanche 20 décembre 2015

Le même que celui du 19 décembre, mais en plus charitable

On m'envoie un article où je lis :

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci ! J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". 

Bien sûr, c'est la solution ! Chaque fois qu'on ne connais pas quelque chose, cela nous "pose problème". Et quand "cela nous pose problème", on élimine l'usage !
Tiens "pose problème" ? Je croyais qu'en français, on mettait des articles devant les noms ? Soit la mode a changé, soit notre interlocuteur a un usage limité du français. Pardon, je devrais peut-être écrire : soit mode a changé, soit interlocuteur a usage limité français.

Cela dit, la solution qui consiste à supprimer de notre existence tout ce que nous ne comprenons pas est merveilleuse, séduisante non ? Regardons-y de plus prêt.

Nous ne comprenons pas le fonctionnement de l'ordinateur que nous n'utilisons ? Revenons sans tarder à la Gentille Plume d'oie et à la Gentille Encre artisanale ou domestique.
Mais, au fait, d'où vient cette plume ? Il nous faudra aller à la Gentille Ferme voisine (ou faire notre élevage nous-même) pour en trouver sur une l'oie, un canard, sans quoi, on ne sait jamais : le Grand Complot pourrait nous refiler des "fausses plumes" !
Et l'encre ? N'utilisons certainement pas de la Vilaine Encre du "commerce", parce qu'on ne sais jamais : "ils" ont sans doute trafiqué notre produit. Oui, faisons  bouillir des clous rouillés avec de l'écorce d'arbre, puis filtrons, et stabilisons le produit avec de la gomme, exsudation d'arbre.
Bon, d'accord, écrire devient plus compliqué, mais combien "plus en accord avec nous-même" ! Et puis, nous sommes rassurés de tout "bien connaître".

Au fait, bien connaître : comment les oies, les canards, ont-ils ces plumes ? Je l'ignore : cela "pose problème". Pourquoi l'eau où l'on cuit écorce et rouille devient-elle noire ? Aïe : cela "pose problème". Et pourquoi certains arbres font-ils cette gomme ? Cela "pose problème". Et pourquoi la gomme stabilise-t-elle l'encre ?
 J'ai une idée : puisque je ne le sais pas, je ne vais pas utiliser la gomme, et secouer l'encre avant chaque utilisation. Après tout, tant qu'à nous compliquer la vie, ne reculons pas devant de petits sacrifices...

Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause.

Je veux  consommer des ingrédients que je connais ?
Revenons à la question de l'alimentation, puisque c'est cela dont il s'agit. Pour 80 pour cent des Français, qui vivent en ville, les légumes viennent des maraîchers. Selon la Théorie du Grand Complot, ce sont certainement de gros industriels malhonnêtes, qui font leur beurre sur notre dos. Allons chercher les légumes  à la ferme. Pas le temps ? Alors créons des associations, avec nos cotisation qui payeront du  personnel pour nous procurer des fruits et légumes dont nous connaissons l'origine. Non, la solution est mauvaise : si nous payons du personnel, le personnel sera exploité. Alors il y a le système des AMAP, pour lequel des Gentils Producteurs nous donneront nos produits. Mais, au fait, quelle différence avec un marché ? Sur le marché, ne s'agit-il pas de Gentils Producteurs qui viennent vendre leurs  produits ? Ah non ! Il y a les "Affreux Intermédiaires", ceux qui font du beurre sur notre dos et sur celui des Gentils Producteurs.

Bon, nous avons donc supprimé les Affreux Intermédiaires, et nous savons qui produit ce que nous mangeons. Mais, au fait, comment cela est-il produit ? Allons,  chacun sait qu'on met une graine dans la terre et que ça pousse tout seul. Arroser ? Ce n'est pas de la chimie. Des engrais ? Le fumier. Mais les semences ?
Là, deux  possibilités : selon la théorie proposée initialement, de la même façon que l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures  et les semences ? Il y a la solution de virer semences et méthodes de culture. Ou bien de rester aux graines que le légume fait lui-même, et ne pas utiliser des Vilaines Semences du Commerce : le Grand Complot veut certainement faire du blé sur notre dos !
Donc nous n'irons nous fournir que chez les Gentils Maraîchers qui n'achèteront pas les semences de Méchants Semenciers industriels. Oui, "industriels" : le mot arrive. Ce qui est Très Mauvais, c'est l'industrie ! Nous ne traiterons qu'avec des Gentils Artisans.
La voilà, la solution qui nous était proposée !
Pour les viandes ? Avec notre système précédent, nous ne prendrons de la viande que si elle vient d'un Gentil Eleveur "artisanal". Tiens, au fait, combien de bêtes un tel homme peut-il élever au maximum ? Seul ? Nous avons dit un artisan, soit quelqu'un qui n'exploite pas autrui. Limitons donc l'exploitation à un homme et sa famille. Personne en plus, sans quoi nous verserions dans la Méchante Industrie. Oui, parce que, si nous employons quelqu'un, c'est le début de la fin : un employé, deux, trois, dix, cent... D'ailleurs, au Canada, ne disent-ils pas que les chefs sont l'industrie ? Ce qui est juste : je connais des cuisiniers qui ont plusieurs restaurants et qui, de ce fait, employent beaucoup de monde ! L'Abominable Industrie. De sorte que nous arrivons à une conclusion supplémentaire, en chemin : nous n'irons plus que chez les Cuisiniers Artisans, ceux qui font tout eux-mêmes : la cuisine, le service et la vaisselle. Les autres ? D'Affreux Cuisiniers Industriels !

Un doute m'étreint : d'accord, le Gentil Eleveur aura élevé seul ses bêtes, mais qui les abattra ? Ouf, je viens de comprendre que ce sera un Gentil Boucher Artisan, comme dans le Bon Ancien Temps. Qui aura acheté des couteaux à un Gentil Artisan coutelier, lequel aura fait les couteaux un à un, des ses Propres Mains. Le métal ? Il l'aura acheté à un Gentil Métallurgiste, artisan qui aura acheté le charbon de bois à un Gentil Charbonnier, et le minerai à un Gentil Mineur. Le Gentil Mineur ne peut pas extraire seul le minerai ? Il aura fait une association, une Gentille Coopérative !

Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Un "artisan respectueux  des matières premières" ? Ah, oui : il y a les Gentils Artisans, mais ceux-ci ne sont pas tous gentils ! Il faut qu'ils soient "respectueux des matières premières" et qu'ils utilisent produits et vocaculaires compréhensibles.
Respectueux des matières premières, quand même c'est compliqué, non ? Je dois pas avoir le Bon Etat d'Esprit, parce que j'ai vraiment du mal à comprendre ce que signifie respecter des matières premières.
Allons, un effort : pensons à de la cuisine. Et, plus précisément, pensons à la recette de poulet rôti avec des pommes de terre qui sera sur la table à midi. J'ai donc un poulet qui vient d'un Gentil Eleveur, puis d'un Gentil Boucher. Comment le cuire en le respectant ? Je vois bien que je peux le manipuler avec une grande douceur... mais il est mort. Alors le cuire sans le chauffer trop ? La peau ne sera pas croustillante ! Une idée : chercher dans le dictionnaire ce que "respecter" signifie. Le Gentil Trésor de la langue française informatisé nous dit "action de prendre en considération". Bon, si je prends la cuisson en considération, je respecte. Autrement dit, il faut que je réfléchisse... D'ailleurs, l'article que l'on m'avait signalé disait bien "réfléchir en connaissance de cause".
Mais, au fait, pourquoi ne pas "prendre en considération" les additifs ? Ah, non, quand même  pas les additifs, puisque c'est une Méchante Invention.
Alors que farine, sucre, beurre, légumes, sel... Au fait, sais-je bien ce dont il s'agit ? Farine ? Je l'aurai achetée à un Gentil Meunier, un artisan, lequel se sera fourni à un Gentil Agriculteur, qui aura travaillé seul. Comment ? Là, les calculs les plus simples montrent que, sans mécanisation, un homme ne peut faire vivre que quatre personnes, à condition de ne faire que travailler. Pas de vacances pour notre Gentil Agriculteur ? Bon, d'accord, laissons-le Laissons avoir un tracteur. Un tracteur qui viendra d'où  ? D'un Gentil Artisan fabriquant de tracteurs ?

Vite, vite, passons au  sucre, puisque je ne sais pas répondre à la question : après tout, n'avions-nous pas comme conseil de supprimer de notre vie tout ce qui nous "pose problème" ?
Donc le sucre : ne l'achetons qu'à un Gentil Artisan, qui aura  lui-même lavé les betteraves d'un Gentil Agriculteur, qui aura lui-même broyé ses betteraves, aura ajouté de l'eau, de la chaux... De la chaux ? Oui, il se sera procuré la chaux d'un Gentil Artisan. Comment ce dernier aura-t-il  chauffé son four à chaux ? Pas d'électricité, parce que, là, on risque gros. Pas de nucléaire, bien sûr. Pas de centrale à charbon. Pas de pétrole. De l'éolien et du  solaire ? Pas des panneaux solaires, puisqu'ils sont fabriqués par de Méchants Industriels, et pas de ces grosses éoliennes industrielles modernes. Des moulins, de Gentils Moulins !
Passons au beurre. Facile : cela vient d'un Gentil Eleveur, ou d'un Gentil Crémier. Le sel ? Un Gentil Saunier. Il sera venu au marché, avec son sel, et nous saurons d'où vient le sel. Au fait, il aura fait six cent kilomètres pour venir du bord de mer ? Ben... oui. Et qui extraira le sel, pendant ce temps ? Allons, on sait bien que le vent et le soleil évaporent l'eau sans intervention humaine.

Et c'est ainsi que nous avons des  légumes, des viandes, de la farine, de l'huile, du sucre, du sel. Avons-nous vraiment besoin  d'additifs ?
Faisons l'essai d'une crème au caramel, pour le savoir. Il suffit d'avoir des oeufs, du sucre, du lait, de la vanille. Tout va bien... jusqu'au caramel : c'est un additif de code E150 ! Oui, mais c'est un Méchant Additif si nous l'achetons, mais si nous le faisons nous-même, cela devient un Gentil Caramel. A la limite, d'ailleurs, pourquoi ne pas l'acheter à un Gentil Artisan fabriquant de Gentil Caramel.
Une autre recette : une tarte au  citron meringuée. De la farine, du sucre, de l'eau, du citron, des oeufs, du sel. Le citron ? Il  sera acheté à un Gentil Maraîcher. Le citron n'est pas local ? Il sera donc venu du sud de la France. Le sud de la France ne produit pas assez de citron pour tous les Parisiens ? Tant pis : ceux-ci se passeront de tarte au citron, et ils mangeront des tartes au poires ou aux pommes.
Après tout, si nous mangeons des produits locaux, nous devons aussi manger des produits de saison. Ainsi, plus de Méchants Conservateurs, lesquels font partie de la catégorie des Méchants Additifs !
En hiver, il nous reste donc Gentils carottes, choux, pommes de terre, poireaux... Qu'avons-nous besoin du reste ? Et puis, en nous limitant ainsi, nous faisons disparaître les Méchants Supermarchés.

La proposition initiale était donc Merveilleuse : de la soupe aux choux tous les jours, des tartes aux pommes, et nous ne cherchons pas à savoir d'où viennent les plumes des canards, l'énergie...
Ne nous posons pas de question, et soyons Respectueux. Quelle Vie Merveilleuse s'offre à nous !

Le même que celui du 19 décembre, mais en plus charitable

On m'envoie un article où je lis :

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci ! J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". 

Bien sûr, c'est la solution ! Chaque fois qu'on ne connais pas quelque chose, cela nous "pose problème". Et quand "cela nous pose problème", on élimine l'usage !
Tiens "pose problème" ? Je croyais qu'en français, on mettait des articles devant les noms ? Soit la mode a changé, soit notre interlocuteur a un usage limité du français. Pardon, je devrais peut-être écrire : soit mode a changé, soit interlocuteur a usage limité français.

Cela dit, la solution qui consiste à supprimer de notre existence tout ce que nous ne comprenons pas est merveilleuse, séduisante non ? Regardons-y de plus prêt.

Nous ne comprenons pas le fonctionnement de l'ordinateur que nous n'utilisons ? Revenons sans tarder à la Gentille Plume d'oie et à la Gentille Encre artisanale ou domestique.
Mais, au fait, d'où vient cette plume ? Il nous faudra aller à la Gentille Ferme voisine (ou faire notre élevage nous-même) pour en trouver sur une l'oie, un canard, sans quoi, on ne sait jamais : le Grand Complot pourrait nous refiler des "fausses plumes" !
Et l'encre ? N'utilisons certainement pas de la Vilaine Encre du "commerce", parce qu'on ne sais jamais : "ils" ont sans doute trafiqué notre produit. Oui, faisons  bouillir des clous rouillés avec de l'écorce d'arbre, puis filtrons, et stabilisons le produit avec de la gomme, exsudation d'arbre.
Bon, d'accord, écrire devient plus compliqué, mais combien "plus en accord avec nous-même" ! Et puis, nous sommes rassurés de tout "bien connaître".

Au fait, bien connaître : comment les oies, les canards, ont-ils ces plumes ? Je l'ignore : cela "pose problème". Pourquoi l'eau où l'on cuit écorce et rouille devient-elle noire ? Aïe : cela "pose problème". Et pourquoi certains arbres font-ils cette gomme ? Cela "pose problème". Et pourquoi la gomme stabilise-t-elle l'encre ?
 J'ai une idée : puisque je ne le sais pas, je ne vais pas utiliser la gomme, et secouer l'encre avant chaque utilisation. Après tout, tant qu'à nous compliquer la vie, ne reculons pas devant de petits sacrifices...

Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause.

Je veux  consommer des ingrédients que je connais ?
Revenons à la question de l'alimentation, puisque c'est cela dont il s'agit. Pour 80 pour cent des Français, qui vivent en ville, les légumes viennent des maraîchers. Selon la Théorie du Grand Complot, ce sont certainement de gros industriels malhonnêtes, qui font leur beurre sur notre dos. Allons chercher les légumes  à la ferme. Pas le temps ? Alors créons des associations, avec nos cotisation qui payeront du  personnel pour nous procurer des fruits et légumes dont nous connaissons l'origine. Non, la solution est mauvaise : si nous payons du personnel, le personnel sera exploité. Alors il y a le système des AMAP, pour lequel des Gentils Producteurs nous donneront nos produits. Mais, au fait, quelle différence avec un marché ? Sur le marché, ne s'agit-il pas de Gentils Producteurs qui viennent vendre leurs  produits ? Ah non ! Il y a les "Affreux Intermédiaires", ceux qui font du beurre sur notre dos et sur celui des Gentils Producteurs.

Bon, nous avons donc supprimé les Affreux Intermédiaires, et nous savons qui produit ce que nous mangeons. Mais, au fait, comment cela est-il produit ? Allons,  chacun sait qu'on met une graine dans la terre et que ça pousse tout seul. Arroser ? Ce n'est pas de la chimie. Des engrais ? Le fumier. Mais les semences ?
Là, deux  possibilités : selon la théorie proposée initialement, de la même façon que l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures  et les semences ? Il y a la solution de virer semences et méthodes de culture. Ou bien de rester aux graines que le légume fait lui-même, et ne pas utiliser des Vilaines Semences du Commerce : le Grand Complot veut certainement faire du blé sur notre dos !
Donc nous n'irons nous fournir que chez les Gentils Maraîchers qui n'achèteront pas les semences de Méchants Semenciers industriels. Oui, "industriels" : le mot arrive. Ce qui est Très Mauvais, c'est l'industrie ! Nous ne traiterons qu'avec des Gentils Artisans.
La voilà, la solution qui nous était proposée !
Pour les viandes ? Avec notre système précédent, nous ne prendrons de la viande que si elle vient d'un Gentil Eleveur "artisanal". Tiens, au fait, combien de bêtes un tel homme peut-il élever au maximum ? Seul ? Nous avons dit un artisan, soit quelqu'un qui n'exploite pas autrui. Limitons donc l'exploitation à un homme et sa famille. Personne en plus, sans quoi nous verserions dans la Méchante Industrie. Oui, parce que, si nous employons quelqu'un, c'est le début de la fin : un employé, deux, trois, dix, cent... D'ailleurs, au Canada, ne disent-ils pas que les chefs sont l'industrie ? Ce qui est juste : je connais des cuisiniers qui ont plusieurs restaurants et qui, de ce fait, employent beaucoup de monde ! L'Abominable Industrie. De sorte que nous arrivons à une conclusion supplémentaire, en chemin : nous n'irons plus que chez les Cuisiniers Artisans, ceux qui font tout eux-mêmes : la cuisine, le service et la vaisselle. Les autres ? D'Affreux Cuisiniers Industriels !

Un doute m'étreint : d'accord, le Gentil Eleveur aura élevé seul ses bêtes, mais qui les abattra ? Ouf, je viens de comprendre que ce sera un Gentil Boucher Artisan, comme dans le Bon Ancien Temps. Qui aura acheté des couteaux à un Gentil Artisan coutelier, lequel aura fait les couteaux un à un, des ses Propres Mains. Le métal ? Il l'aura acheté à un Gentil Métallurgiste, artisan qui aura acheté le charbon de bois à un Gentil Charbonnier, et le minerai à un Gentil Mineur. Le Gentil Mineur ne peut pas extraire seul le minerai ? Il aura fait une association, une Gentille Coopérative !

Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Un "artisan respectueux  des matières premières" ? Ah, oui : il y a les Gentils Artisans, mais ceux-ci ne sont pas tous gentils ! Il faut qu'ils soient "respectueux des matières premières" et qu'ils utilisent produits et vocaculaires compréhensibles.
Respectueux des matières premières, quand même c'est compliqué, non ? Je dois pas avoir le Bon Etat d'Esprit, parce que j'ai vraiment du mal à comprendre ce que signifie respecter des matières premières.
Allons, un effort : pensons à de la cuisine. Et, plus précisément, pensons à la recette de poulet rôti avec des pommes de terre qui sera sur la table à midi. J'ai donc un poulet qui vient d'un Gentil Eleveur, puis d'un Gentil Boucher. Comment le cuire en le respectant ? Je vois bien que je peux le manipuler avec une grande douceur... mais il est mort. Alors le cuire sans le chauffer trop ? La peau ne sera pas croustillante ! Une idée : chercher dans le dictionnaire ce que "respecter" signifie. Le Gentil Trésor de la langue française informatisé nous dit "action de prendre en considération". Bon, si je prends la cuisson en considération, je respecte. Autrement dit, il faut que je réfléchisse... D'ailleurs, l'article que l'on m'avait signalé disait bien "réfléchir en connaissance de cause".
Mais, au fait, pourquoi ne pas "prendre en considération" les additifs ? Ah, non, quand même  pas les additifs, puisque c'est une Méchante Invention.
Alors que farine, sucre, beurre, légumes, sel... Au fait, sais-je bien ce dont il s'agit ? Farine ? Je l'aurai achetée à un Gentil Meunier, un artisan, lequel se sera fourni à un Gentil Agriculteur, qui aura travaillé seul. Comment ? Là, les calculs les plus simples montrent que, sans mécanisation, un homme ne peut faire vivre que quatre personnes, à condition de ne faire que travailler. Pas de vacances pour notre Gentil Agriculteur ? Bon, d'accord, laissons-le Laissons avoir un tracteur. Un tracteur qui viendra d'où  ? D'un Gentil Artisan fabriquant de tracteurs ?

Vite, vite, passons au  sucre, puisque je ne sais pas répondre à la question : après tout, n'avions-nous pas comme conseil de supprimer de notre vie tout ce qui nous "pose problème" ?
Donc le sucre : ne l'achetons qu'à un Gentil Artisan, qui aura  lui-même lavé les betteraves d'un Gentil Agriculteur, qui aura lui-même broyé ses betteraves, aura ajouté de l'eau, de la chaux... De la chaux ? Oui, il se sera procuré la chaux d'un Gentil Artisan. Comment ce dernier aura-t-il  chauffé son four à chaux ? Pas d'électricité, parce que, là, on risque gros. Pas de nucléaire, bien sûr. Pas de centrale à charbon. Pas de pétrole. De l'éolien et du  solaire ? Pas des panneaux solaires, puisqu'ils sont fabriqués par de Méchants Industriels, et pas de ces grosses éoliennes industrielles modernes. Des moulins, de Gentils Moulins !
Passons au beurre. Facile : cela vient d'un Gentil Eleveur, ou d'un Gentil Crémier. Le sel ? Un Gentil Saunier. Il sera venu au marché, avec son sel, et nous saurons d'où vient le sel. Au fait, il aura fait six cent kilomètres pour venir du bord de mer ? Ben... oui. Et qui extraira le sel, pendant ce temps ? Allons, on sait bien que le vent et le soleil évaporent l'eau sans intervention humaine.

Et c'est ainsi que nous avons des  légumes, des viandes, de la farine, de l'huile, du sucre, du sel. Avons-nous vraiment besoin  d'additifs ?
Faisons l'essai d'une crème au caramel, pour le savoir. Il suffit d'avoir des oeufs, du sucre, du lait, de la vanille. Tout va bien... jusqu'au caramel : c'est un additif de code E150 ! Oui, mais c'est un Méchant Additif si nous l'achetons, mais si nous le faisons nous-même, cela devient un Gentil Caramel. A la limite, d'ailleurs, pourquoi ne pas l'acheter à un Gentil Artisan fabriquant de Gentil Caramel.
Une autre recette : une tarte au  citron meringuée. De la farine, du sucre, de l'eau, du citron, des oeufs, du sel. Le citron ? Il  sera acheté à un Gentil Maraîcher. Le citron n'est pas local ? Il sera donc venu du sud de la France. Le sud de la France ne produit pas assez de citron pour tous les Parisiens ? Tant pis : ceux-ci se passeront de tarte au citron, et ils mangeront des tartes au poires ou aux pommes.
Après tout, si nous mangeons des produits locaux, nous devons aussi manger des produits de saison. Ainsi, plus de Méchants Conservateurs, lesquels font partie de la catégorie des Méchants Additifs !
En hiver, il nous reste donc Gentils carottes, choux, pommes de terre, poireaux... Qu'avons-nous besoin du reste ? Et puis, en nous limitant ainsi, nous faisons disparaître les Méchants Supermarchés.

La proposition initiale était donc Merveilleuse : de la soupe aux choux tous les jours, des tartes aux pommes, et nous ne cherchons pas à savoir d'où viennent les plumes des canards, l'énergie...
Ne nous posons pas de question, et soyons Respectueux. Quelle Vie Merveilleuse s'offre à nous !

samedi 19 décembre 2015

Intérêts cachés

On accuse moins de "conflit d'intérêt" les charlatans qui font leur beurre sur le buzz que les scientifiques.

Passons sur le fait que l'expression "conflit d'intérêt" soit idiote (les intérêts n'ont pas de conflit, et il faut parler plus justement d'intérêts cachés), et focalisons-nous sur le fond de la chose.
Par exemple, ne doit-on pas s'étonner qu'un individu puisse impunément faire un article "à scandale"... quand il est l'auteur d'un livre sur le sujet ? Le scandale fait vendre son livre ! Bien sûr, on peut toujours, charitablement, considérer que notre auteur est si ému par son sujet qu'il  multiplie les façons de promouvoir son point de vue... mais pourquoi, alors, ne donne-t-il pas ses droits d'auteur à une oeuvre ?
 Aujourd'hui, on me signale un homme qui "vend du bon naturel"... en mentionnant évidemment de se reporter au livre qu'il a écrit. Dans son article, on lit : 

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci !
J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause. Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Une telle déclaration est idiote, parce que les "artisans", comme il dit, utilisent les mêmes additifs que les industriels qu'il stigmatise, et auxquels s'applique une réglementation bien plus contraignante. La gélatine est un additif, tout comme le caramel, par exemple.
Et puis, un "artisan respectueux des matières premières" ? Je préfère un artisan respectueux des êtres humains  !
Ce n'est pas tout : le sel, d'où sort-il ? Le sucre ? Notre homme sait-il bien comment il est produit ? Et le beurre, et la farine...
Il propose de ne consommer que ce que nous "connaissons", mais de quoi s'agit-il ? Que sait-il des semences ? Des amendements ? Des traitements ? Si l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures ?

Allons, je me suis fait  une règle de toujours être positif... et la bêtise et la malhonnêteté me conduisent hélas à les dénoncer, ce qui n'est pas une bonne façon d'avancer.
Je vais donc proposer, ici,  au contraire, de mieux connaître les additifs, les compositions et extraits odorants nommés arômes, les auxilliaires technologiques, au même titre que les fruits, les légumes, les viandes ou les poissons.

Connaître les viandes ? Puisqu'aucun de  nous (je fais l'hypothèse que nous sommes en ville)  ne prend sa viande à la ferme, nous ignorons le plus souvent les conditions exactes d'élevage (différentes de ferme à ferme), d'abattage, de transformation... Et nous voulons souvent l'ignorer, parce que nous sommes bien heureux  de ne pas avoir devant les yeux  l'animal que l'on abat. Manger de la viande, d'accord, mais à condition qu'elle nous arrive toute  prête à manger.

Les légumes ? Il suffit de voir les jardiniers du dimanche pour comprendre qu'ils ignorent que tout part de semences très encadrées par la loi... pour le bien des citoyens, et, notamment, des agriculteurs ou des maraîchers.
Ainsi le Centre technique de la production de semences (CTPS) oeuvre, pied à pied, pour que les semences soient de bonne qualité, car les biologistes  végétaux savent bien que les croisements qui favorisent certaines caractéristiques ne sont pas "stables", par exemple. Et le CTPS, également, se préoccupe de végétaux qui consomment moins d'intrants (eau, engrais, traitements). Puis, pour les méthodes de culture, l'INRA et quelques autres institutions oeuvrent  depuis longtemps pour  aider les agriculteurs à produire plus facilement des végétaux de meilleure qualité. De sorte que les critiques sont souvent idéologiques... mais pas toujours dites ainsi !  (Tiens, j'y pense : notre auteur a-t-il refusé d'utiliser un ordinateur pour faire son article et son livre ? A-t-il poussé l'obscurantisme jusqu'à écrire à la plume trempée dans l'encre ?).

Les additifs ? Ces produits ont toujours été utilisés, et le fait que nous les connaissions est une très bonne chose, parce que cela signifie que leur emploi est réglementé. Dans les années 1910, les cuisiniers et les particuliers utilisaient, par exemple, des mèches de soufre qu'ils brûlaient dans des bouteilles pour conserver les fruits : on n'ose imaginer la quantité de dioxyde de soufre qui était alors produite ! De sorte que c'est un vrai progrès que d'avoir rénové les pratiques anciennes (des artisans, ces fameux "artisans respectueux etc.) et de les avoir réglementées.
Ce qui reste à faire, c'est d'appliquer les lois imposées à l'industrie aux artisans !
Les arômes ? Même question : utilisés depuis toujours, mieux réglementés aujourd'hui, donc plus sûrs que  les pratiques artisanales.

Plus généralement, la question merveilleuse qui se pose aux instances de régulation (je pense notamment à cette merveilleuse DGCCRF du Ministère de l'agriculture) est de réguler, sans tomber dans l'hygiénisme. Pour y parvenir, il faut beaucoup de connaissances, et beaucoup de doigté, afin de protéger sans excès. Il faut aussi  beaucoup d'explications à ce public (dont je suis) que l'on ne doit pas priver d'informations justes, au contraire ! Au lieu de ne pas utiliser d'additifs (ce qui n'est pas possible : souvenons-nous du caramel), il vaut mieux apprendre à les utiliser !

jeudi 17 décembre 2015

Une courbe en U pour la toxicologie ?

Pardonnez-moi, mais je me soutiens de principes simples : la droiture, la bonté... et la simplicité. Pourquoi cette liste, alors  que le titre de ce billet concerne la toxicologie ?
Parce que certaines personnes malhonnêtes se nourrissent de la peur  du public, par idéologie (ou par malhonnêteté, il y a  de tout dans ce monde), et que je crois utile de les combattre.
Tiens, récemment, j'ai rencontré un (petit) journaliste d'un (grand) quotidien, qui déclarait naïvement, à un groupe devant lequel il pérorait, qu'il était bien ennuyé d'avoir  à rapporter un fait qui s'opposait à ses idées. Ses idées... Le pire, c'est qu'il pensait être ainsi un parangon de vertu : ne vainquait-il pas ses préjugés au nom  de la Vérité ? En réalité, si les faits  s'opposent à ses idées, il aurait plutôt dû penser que ses idées étaient fausses !

Mais arrivons au fait. Il existe des composés toxiques, dans ce monde (les benzopyrènes déposés sur les viandes par les barbecues, les glycoalcaloïdes de la surface des pommes de terre, les pescticides naturels des végétaux...), et les toxicologues les étudient en mettant en relation leur  toxicité à la dose à laquelle on les rencontre (voir la première figure).
Dans ce diagramme dose effet, on comprend que la dose nulle soit associée à un effet nul : on représente cette situation par le point rouge dans la deuxième figure.
Puis on imagine diverses possibilités, mais, pour toutes, il faut admettre que la dose infinie corresponde à un effet infini.
Entre les deux ?

On peut penser à plusieurs possibilités (troisième figure), mais on pressent que la question qui est débattue par certains est la suivante : peut-il exister une courbe en U ?
Cette question a été récemment soulevée par un article scientifique (ce n'est pas un synonyme absolu de qualité : il y en a de bons et de mauvais, malgré le processus d'examen avant publication ! Après tout, la revue Nature a bien publié l'article qui décrivait la "mémoire de l'eau", et l'histoire des sciences est pleine d'erreurs, des "rayons N" du physicien Blondlot, la récente "découverte" des ondes gravitationnelles dans la polarisation de fond cosmologique...) et reprise par quelques marchands de peur, mais... est-il possible d'avoir une courbe en U ?
Cela signifierait qu'aux très petites doses, on aurait un effet considérable. Est-ce possible, sachant que la dose nulle est associée à un effet nul ? Il faudrait admettre alors un saut, de la valeur nulle à la grande valeur du début du  U (voir la quatrième figure).
Par quel miracle ? Comment, à la  première molécule de composé, obtiendrait-on un effet considérable ? Il faudrait envisager un effet analogue à une catalyse, où un composé engendre une série de réactions sans être consommé. Est-ce envisageable ?
 Observons que, pour la vision, les récepteurs de la vision sont très efficaces : deux photons sur trois sont efficaces ! Et l'on peut imaginer (cela a été le cas, pour les prions) une efficacité toxique dès le premier composé... mais on n'oubliera pas d'être simple : dans la QUASI TOTALITE des études toxicologiques effectuées, on n'a jamais rencontré cet effet de façon certaine.


dimanche 13 décembre 2015

jeudi 10 décembre 2015

Professeur, quel beau métier !


Quand on en vient à  admirer assez naïvement des choses admirables, on s'expose à la moquerie... mais devons-nous vraiment nous préoccuper des pisse vinaigre ?
Cette question a deux objectifs : d'une  part, me donner l'occasion de promouvoir cette devise merveilleuse : « le summum de l'intelligence, c'est la bonté et la droiture » ; d'autre part, faire état -sans naïveté : le terme "naïvement" trouvait une place rhétorique- d'une évidence... oubliée, à savoir que, oui, le métier de professeur est admirable.

Ce billet, lui, veut surtout rappeler ce qui est en réalité une évidence, à savoir que les professeurs se préoccupent de les étudiants. Une certaine lutte des classes idiote oppose les deux camps : les étudiants qui rechigneraient à faire leurs devoirs, à passer du temps sur les matières « arides »  ; les professeurs qui considéreraient que les étudiants sont paresseux.
Cette vision du monde ne me va pas, tout comme ne me va pas l'opposition encore prétendue mais soutenue par certains selon laquelle, pour les industriels, les chercheurs seraient des êtres abscons, enfermés dans leur tour d'ivoire et quasi inutiles,  tandis que, pour les scientifiques, les industriels seraient des individus cupides,  terre à terre et pas toujours honnêtes. D'ailleurs, on comprend qu'avec l'évocation de la lutte des classes, je déteste  la prétendue opposition entre travailleurs et patrons.
Je suppose que je n'ai pas besoin d'expliquer beaucoup ce qu'est cette prétendue lutte. En revanche, je veux dire  ici que les faits sont bien diffférents : s'il y a effectivement des patrons détestables, il y en a aussi d'honnêtes, qui se charge de la responsabilité d'une entreprise parce qu'ils se soucient d'emploi, du bien être de leurs collègues. D'ailleurs, de l'autre côté, il faut  dire que s'il y a des travailleurs honnêtes, courageux, travailleurs, il y en a aussi de paresseux, profiteurs...
Mais on me connaît : je ne veux voir que le meilleur, et, pour les deux groupes, ce sont ceux qui se soucient du bien d'autre qui m'intéressent : les patrons qui visent l'emploi, le bien être des autres, et les travailleurs travailleurs, ceux qui font bien leur travail, honnêtement, selon les termes du contrat qu'ils n'ont pas manqué de signer avec l'entreprise qui les emploie.
De même, en remontant la chaîne que nous avions descendue, il y a des scientifiques enfermés  dans leur tour d'ivoire... mais il y a aussi les autres, qui sont nombreux. Et s'il y a des industriels obtus, il y en a aussi qui sont merveilleux, et qui savent qu'il faut associer la recherche scientifique et la  technologie pour  aboutir  l'innovation, laquelle  profite aux deux parties.

Enfin, pour remonter au véritable sujet de ce blog, ce qui m'intéresse, c'est de constater qu'il y a des étudians intéressés par les sujets qui leur sont proposés, sujets qui sont d'ailleurs tout à fait merveilleux :  les sciences chimiques, en particulier, sont inouïes,  remarquables, admirables, merveilleuse… Je n'ai pas assez d'adjectifs pour dire tout le bien je pense de ces matières.
Et parmi les professeurs, il y en a effectivement qui se contentent d'avoir un métier, pour qui les étudiants sont sans importance, mais il y a aussi tous ceux qui se décarcassent pour les étudiants dont ils ont la responsabilité. Observons que je n'ai pas dit « la charge ».
Oui, il faut dire aux étudiants que certains professeurs sont admirables, et que, par vision politique, ils acceptent des salaires bas, car ils considèrent que la mission d'enseigner vaut des sacrifies : ne s'agit-il pas, en effet, de prévoir le monde de demain ? Ne s'agit-il pas de favoriser des compétences et des comportements qui mettront un peu d'harmonie dans notre monde ?
# A partir du moment où on cesse de voir le monde par le prisme idiot de la lutte des classes, tout devient plus simple, les rapports sont apaisés, les objectifs sont plus clairs pour chacun, les intentions aussi.
C'est pour cette raison que j'en reviens maintenant à ce que j'avais nommé le contrat d'enseignement. Quand il est rédigé, il ne faut pas le laisser moisir sans le considérer, au contraire. Je propose qu'il fasse l'objet d'une discussion préliminaire, voire d'une rédaction commune par les professeurs et les étudiants. Il ne s'agit pas d'une espèce de formalité, mais du socle sur lequel doivent s'ériger  les activités conjointes des étudiants et des professeurs.
Récemment encore, alors que nous avions pris soin de préparer un document soigneux, je sais qu'il a été lu  trop vite, et que certains étudiants n'ont pas pu profiter pleinement du système d'apprentissage que nous avions prévu pour eux. Nous aurions dû y passer plus de temps, et peut-être même interroger les étudiants (sans évaluation, bien sûr) pour nous assurer  qu'ils avaient bien capté les informations essentielles que nous voulions transmettre. Il en va de la réussite du projet d'enseignement que nous avons en commun.  Certes, cela prendra un peu de temps d'enseignement, mais l'expérience prouve que nous ne pouvons pas en faire l'économie.
Finalement on aura observé que, dans ce billet, j'utilise le mot de "professeur", et non pas d'"enseignant". On se reportera à un autre billet pour voir pourquoi le mot d'"enseignant" me déplaît. En substance, quand même, il y a le fait que je répète que l'enseignement est mpoins important aue l'apprentissage, et qu'il ne s'agit pas pour les enseignants d'enseigner, mais il s'agit pour les étudiants d'apprendre.
A quoi bon le changement de mots ? Professer, c'est soutenir des thèses, « dire  devant » : le professeur a un discours, et ce discours ne se réduit pas à des informations techniques, mais à un mode de vie, et l'on voit d'ailleurs, dans l'histoire des sciences, que les grands professeurs ont toujours été des individus qui se préoccupaient d'un cadre qui conduisait les étudiants à mieux apprendre,  à apprendre en connaissance de cause, à apprendre par un apprentissage qui avait du  sens, qui dépassait les simples connaissances, à apprendre  en comprenant pourquoi ils apprenaient, de sorte que, motivés d'eux-mêmes, ils se dirigeaient plus facilemen vers l'objectif qu'ils s'étaient eux-mêmes donné.
# Il y a donc tout un état d'esprit à organiser,  et  le contrat d'enseigment n'est qu'une partie infime de ce cadre que nous devons créer avant de commencer à discuter techniquement des diverses matières.

Mais c'est un bon début... et c'est notamment avec un tel début que le métier de professeur est merveilleux !