On m'interroge à propos d'une émulsion vanille : de quoi s'agirait-il ?
Je suis bien en peine de répondre... parce que je peux confectionner des milliards d'émulsions différentes, à la vanille.
Commençons simplement... pour lever une ambiguïté, ou, plus exactement, une confusion qui traîne dans beaucoup trop de cuisine : une émulsion, c'est une émulsion, et pas une mousse !
Oui, car une mousse, c'est la dispersion de bulles de gaz dans un liquide, tandis qu'une émulsion, c'est la dispersion de matière grasse liquide dans une solution aqueuse également liquide ; ou l'inverse, à savoir une dispersion de gouttelettes d'une solution aqueuse dans une matière grasse liquide.
Pour faire cette dispersion, dans tous les cas, il faut des composer dits tensioactifs, qui vont entourer les gouttelettes dispersées.
Un exemple ? Partons de blanc d'oeuf, qui est fait de molécules d'eau parmi lesquels sont dispersées des protéines du blanc d'oeuf. Ces protéines sont comme des pelotes et, quand les fouettes, elles se déroulent et elles font des fils.
Si l'on ajoute de l'huile tandis que l'on fouette du blanc d'oeuf, alors il y a certainement des bulles d'air qui s'introduisent dans le liquide, lequel mousse, foisonne, mais l'huile est simultanément émulsionnée, dispersée sous forme de gouttelettes dans le blanc d'oeuf, de sorte que l'on obtient un double système émulsion et mousse.
Si l'on ajoute beaucoup d'huile, la mousse va disparaître et il ne restera que l'émulsion, comme une crème, comme une mayonnaise, avec des gouttelettes de matière grasse dispersées dans l'eau. La préparation est très lisse, elle est blanche, elle n'a aucun goût... et c'est donc la possibilité de lui en donner !
Par exemple, si vous partez d'huile neutre, sans goût, que vous dans du blanc d'oeuf en fouettant, que vous obtenez donc cette émulsion que j'ai nommé un "geoffroy", vous pourrez ensuite ajouter du sucre, qui ira se dissoudre dans l'eau du blanc d'oeuf, et de la vanille qui ira parfumer le résultat : on aura donc fait ici un Geoffroy sucré à la vanille.
J'en profite pour dire que si vous passez ce produit au four à micro-ondes, les protéines du blanc d'oeuf vont assurer la coagulation et vous récupérez une sorte de flan sucré, avec un goût de vanille : c'est ce que j'ai nommé un gibbs, quand je l'ai inventé il y a fort longtemps.
On peut donc faire des geoffroy, on peut faire des gibbs, on peut faire ce que l'on veut à condition de comprendre ce que l'on fait.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
mardi 5 septembre 2023
On m'interroge à propos d'une "émulsion vanille"
jeudi 27 avril 2023
Mes inventions : les liebigs et les gibbs
Dans un précédent billet, nous avons considéré une de mes anciennes inventions, que j'avais nommée des liebigs, des émulsions gélifiées.
Toutefois, il y a gélification et gélification ; certaines sont réversibles, dites « physiques », tandis que d'autres sont « chimiques ».
Les gélifications chimiques sont des gélifications irréversibles, assurées par la formation de liaisons chimiques plus fortes que dans les gélifications physiques.
Un type particulier résulte de la formation de liaisons chimiques particulières nommées ponts disulfures, telles qu'il s'en forme lors de la coagulation de l'oeuf.
De ce fait, on entrevoit aussitôt que l'on peut obtenir une émulsion gélifiée chimiquement en émulsifiant de l'huile dans une solution qui contient des protéines capables de coaguler, telles qu'il y en a dans le blanc d'oeuf, puis en faisant coaguler les protéines.
La recette est extrêmement simple : fouetter de l'huile dans du blanc d'oeuf, jusqu'à obtenir une préparation épaisse comme une mayonnaise, mais blanche, puis cuire quelques secondes cette préparation au four à micro-ondes, afin d'obtenir la coagulation les protéines restées à la surface des gouttes d'huile.
Et c'est ainsi que l'on obtient rapidement une émulsion gélifiée blanche et insipide. J'ai nommé de ce système un « gibbs ».
Blanche et insipide : est-ce rédhibitoire ? Pas du tout : il suffit de donner de la couleur et du goût. Pour la couleur, tous les pigments ou colorants comestibles font l'affaire : les chlorophylles engendrant le vert, jusqu'aux caroténoïdes qui font le jaune, rouge, orange, en passant par les composés phénoliques des fleurs et fruits, qui font aussi du bleu, ou en passant par les bétalaïnes des betteraves.
Du goût : cela signifie de la saveur et de l'odeur. Comme il y a de l'huile dans la préparation, on conçoit facilement qu'il soit facile d'y dissoudre des composés odorants, le plus souvent solubles dans l'huile.
Pour la saveur, les composés sont solubles dans l'eau, ce qui tombe précisément bien, puisque le blanc d'oeuf initialement utilisé est composé de 90 % d'eau.
On le voit : finalement, il n'est pas difficile de faire des gibbs au goût merveilleux !
note : je vous recommande un blanc d'oeuf que vous sucrez, puis vous émulsionnez une huile où vous avez fait macérer des gousses de vanilles, et vous passez au four à micro-ondes dans de jolies tasses. A servir avec un élément croustillant ou croquant, tuile aux amandes ou autre.
samedi 25 février 2023
Deux recettes alsaciennes :
Là, sur l'exemple d'une merveilleuse préparation que j'avais faite à l'Hôtel Renaissance de la Défense, pour mon ami Jean-Pierre Lepeltier, je propose un dessert alsacien :
jeudi 22 juillet 2021
Notre repas de laboratoire
Nous venons d'avoir un repas de laboratoire pour le groupe de gastronomie moléculaire élargi. J'en profite pour donner les recettes que nous avons inventées pour l'occasion.
Tout a commencé par l'observation du fait que les stagiaires de notre groupe sont souvent interrogés par leurs amis ou famille à propos des activités qu'ils ont, avec ce fantasme que nous passerions notre temps à faire de la cuisine.
En réalité, nous passons notre temps à faire de la physico-chimie, c'est-à-dire à préparer des échantillons dont la masse ne dépasse pas le milligramme (cela ne nourrit pas son homme) et à les analyser par spectroscopie de résonance magnétique nucléaire, par exemple.
Nos amis disent donc à leur entourage qu'il n'y a pas de cuisine dans le groupe de gastronomie moléculaire, sauf peut-être pendant deux heures par mois, lors des séminaires de gastronomie moléculaire.
Reste qu'ils m'interrogent sur les inventions que je donne chaque mois depuis plus de 20 ans à mon ami Pierre Gagnaire . Ne pourrions-nous pas faire un repas où nous réaliserions certaines de ces inventions ?
La réponse est évidemment oui, à cet inconvénient près que nous sommes très peu outillés, avec trois fois rien en matière de récipients ou de casseroles. Nous avons un four et cela nous sauve (en réalité, c'est un four expérimental, équipé d'un nez électronique).
Tout cela étant dit, pour faire plaisir à mes amis, j'ai donc accepté l'idée que nous fassions un repas de laboratoire. Et nous l'avons fait : les stagiaires ont cuisiné des plats fondés sur certaines de mes inventions.
Le menu comportait les plats suivants :
1. Un gaspacho surmonté d'une mousse de Bloody Mary.
2. Un œuf à 65 degrés assorti d'un debye de lait d'ail.
3. Un saumon à basse température, avec un gauss de sarrasin courgettes et champignons, accompagné d'une crème d'échalotes et de ciboulette.
4. Des sablés "plus que parfaits" avec un sorbet à la pêche, un gibbs au café et une mousse d'expresso etwhisky.
Donnons maintenant les recettes de toutes ces préparations
1. Premièrement, pour le gaspacho, nous avons simplement mixé des tomates avec une demi échalote, une demi gousse d'ail, du sucre, du sel, un peu de caramel, un peu d'acite tartrique, et de l'huile d'olive.
Pour le bBloody Mary, c'était effectivement un Bloody Mary, à savoir des tomates mixées additionnées de vodka, d'acide citrique, d'un peu de sucre, de sel... mais l'ensemble avait été mis dans un siphon, avec une demi cuillèrée de protéine (de blanc d'oeuf), secoué et ajouté sous la forme d'une mousse au-dessus du gaspacho, juste au moment de servir.
2. Pour les oeufs à 65 degrés, rien de plus simple : la boite d'oeufs, vaguement ouverte, a été mise dans un four à 65 degrés pendant deux heures. Puis, au dernier moment, on a cassé les oeufs dans les assiettes.
Pour le debye, nous avons commencé par faire bouillir longuement des gousses d'ail dans du lait. Nous avons assaisonné, et nous avons laissé refroidir avant d'ajouter 10 grammes par litre d'agar-agar. Puis nous avons de nouveau porté à ébullition, et quand, après le refroidissement, nous avons obtenu un gel ferme, nous l'avons mixé dans une bonne ville d'olive, en ajoutant quelques gouttes de l'évocation Hertzon de la société Iqemusu : il s'agit de 1-cis-hexèn-3-ol, qui a une merveilleuse odeur d'herbe fraîchement coupée.
3. Pour le saumon, il était mis dans le four, peau dessus (afin d'éviter de sécher) et cuit à la température de 70 degrés pendant également quelques heures. Peu de travail, donc, mais je peux vous assurer que le résultat était exceptionnel.
La crème d'échalotes et ciboulette était simplement obtenue par cuisson d'échalotes dans du vin blanc que l'on réduisait presque à sec ; puis, après ajout d'acide tartrique, de glucose, nous avons ajouté de la crème liquide, réduit à consistance, puis infusé de la ciboulette.
Le gauss, lui, était obtenu de la manière suivante : nous avons étalé un film plastique alimentaire sur le plan de travail, puis nous avons couvert le film avec des galettes de blé noir ; nous avons alors badigeonné les galettes de beurre noisette. Puis nous avons couvert avec de très minces lamelles de courgettes, badigeonné à nouveau de beurre noisette, couvert de lamelles très minces de champignon de Paris, badigeonné à nouveau. Enfin, nous avons replié le tout en deux, puis en deux, puis encore en deux une ou deux fois. Nous avons bien serré le film, et l'ensemble a été mis au grand froid pour durcir. Au moment de servir, nous avons coupé des tranches qui laissaient apparaître la succession de couches.
4. Pour le sorbet, peu de travail : un sirop de pêche additionné de vodka et un peu assaisonné, puis additionné d'azote liquide.
Pour les sablés, de la farine torréfiée (à sec, dans une poele), puis du caramel, du beurre noisette, du sucre, et très peu de blanc d'oeuf (en réalité, eau et protéines de blanc). L'ensemble a été formé en petites masses cuites pendant 14 minutes à 200 degrés.
Enfin, nous avons fait un gibbs de café en partant d'eau, de protéines d'oeuf, où nous avons émulsionné de l'huile que nous avions stockée pendant quelques jours avec du café moulu. L'émulsion était mise dans des verres, lesquels étaient passés quelques dizaines de secondes au four à micro-ondes, jusqu'à gonflement. Sucre, whisky, puis un expresso additionné de sucre et de protéines de blanc d'oeuf, dans un siphon, pour une mousse sur le gibbs.
Hopla, l'affaire est faite, et même si nous avons bien identifié les pistes d'améliorations, je vous invite à faire les recettes !
samedi 25 janvier 2020
Quelques unes de mes inventions
Les geoffroys
En salé :
1. Un blanc d'oeuf
2. On fouette de l'huile comme pour une mayonnaise
3. on ajoute des champignons cuits avec persil et ail, broyés
4. rectifier l'assaisonnement
En sucré :
1. Commençons par faire macérer des gousses de vanille fendue en deux dans la longueur dans une belle huile d'olive.
2. Puis mettons un blanc d'oeuf dans un cul de poule, une pincée de sel, et trois cuillerées de sucre.
3. Ajoutons l'huile vanillée en fouettant, comme pour une mayonnaise.
L'émulsion obtenue pourra être servie avec des tranches d'ananas rôties au beurre et des financiers (ces gâteaux qui, comme les meringues, permettent d'utiliser les blancs d'oeufs dont le jaune a été employé pour lier des sauces).
Les liebigs
Pour les liebigs, l'idée est d'obtenir une émulsion gélifiée.
Dans la mayonnaise, c'est le jaune d'oeuf qui apporte des protéines et des phospholipides qui permettent l'émulsion (ce sont les protéines qui sont le plus actives, pour enrober les gouttes d'huile). Avec les liebig, c'est la gélatine.
1. partir de 100 g d'un liquide qui a du goût
2. ajouter 10 g de gélatine préalablement trempée
3. chauffer pour dissoudre la gélatine
4. ajouter une huile parfumée en fouettant comme pour une sauce mayonnaise
5. couler dans une plaque couverte d'un film huilé sur 5 à 10 mm d'épaisseur, et laisser prendre au froid
On peut aussi faire une émulsion (celle que vous voulez, de la mayonnaise par exemple) et y dissoudre de l'agar-agar : en chauffant, l'émulsion sera emprisonnée dans un gel physique, et l'on obtiendra un liebig.
Les gibbs
Pour un gibbs vanille (dessert) :
1. Dans un saladier, mettre un blanc d'oeuf
2. Ajouter de l'huile d'olive goutte à goutte, en fouettant.
3. Quand on a obtenu une préparation crémeuse, un peu ferme, ajouter du sucre et de l'extrait de vanille, une pincée de sel, un peu de piment.
4. Répartir dans des tasse, et cuire au four à micro-ondes à pleine puissance, jusqu'à ce que l'on obtienne un gonflement de 1/4 environ.
5. Servir chaud.
Pour un gibbs au beurre noisette :
1. Dans une casserole, mettre 200 g de beurre.
2. Chauffer doucement : le beurre fond, puis se met à crépiter.
3. Avant qu'il soit noir, quand une belle odeur apparaît, en même temps qu'un léger brunissement, cesser de chauffer, et laisser refroidir dans la casserole. C'est ce que l'on nomme un beurre noisette.
4. Quand le beurre noisette obtenu est chaud mais pas solidifié, l'utiliser ainsi :
5. Dans un saladier, mettre deux cuillerées à soupe de poudre de blanc d'oeuf.
6. Ajouter 3 cuillerées d'eau, un quart de cuillerée à café d'acide citrique, sel, poivre.
7. Ajouter le beurre noisette en fouettant comme pour une mayonnaise.
8. Quand tout le beurre noisette a été ajouté, bien battre afin d'obtenir une préparation ferme.
9. Mettre dans des bols, et cuire au four à micro-ondes comme pour le gibbs vanille.
Les debyes
1. donner du goût à 100 g d'huile en macérant un produit broyé (carottes, basilic, café, poireaux...)
2. coller un liquide à raison de 24 g d'agar-agar au litre ; faire durcir au froid
3. broyer le gel au mixer dans l'huile
Les chaptals et vauquelins
Pour les chaptals :
1. Partir d'un blanc d'oeuf, dans un saladier.
2. Le fouetter
3. Quand il est en neige ferme, ajouter une cuiller à soupe de sucre
4. Battre
5. Quand la préparation est bien lisse, ajouter une cuillerée à café de jus de pomme verte
6. Battre jusqu'à ce que la mousse soit de nouveau bien ferme.
7. Ajouter alors une cuillerée à soupe de sucre.
8. Battre
9. Ajouter une cuillerée à café de jus de pomme verte.
10. Battre
11. Continuer ainsi à alterner sucre, battage, liquide, battage.
Quand le saladier est plein, répartir son contenu entre deux saladiers que l'on travaille en parallèle, puis entre quatre saladiers, et ainsi de suite.
Les vauquelins s'obtiennent de la façon suivante :
1. prendre du chaptal précédent, et le mettre dans un bol
2. passer au fours à micro-ondes (pleine puissance) jusqu'à ce que l'on observe un net gonflement (1/4 environ) ; servir.
Les würtz
1. Dans une casserole, mettre 200 g de jus d'orange avec 50 g de sucre
2. Incorporer 5 g de gélatine préalablement ramollie à l'eau froide.
3. Foisonner
4. Mettre la mousse formée au réfrigérateur.
jeudi 8 février 2018
Pourquoi Gibbs ?
Pour le goût, il est évident qu'on aura assaisonné le blanc d'oeuf, et, de même, que l'on aura donné du goût à l'huile. Par exemple, on pourra avoir ajouté du sucre, une pincée de sel, un colorant, et l'huile pourra être une belle huile d'olive où l'on aura macéré de la vanille ou du café. Et cette recette est encore plus facile à faire en version "note à note" : on part d'eau, on dissout divers composés, on ajoute des protéines thermocoagulables (par exemple, de la poudre de blanc d'oeuf), puis on termine la recette comme indiqué précédemment.
Le mécanisme physico-chimique ? D'abord les protéines stabilisent (relativement, toujours relativement, pour les émulsions) les gouttes d'huile dans la phase aqueuse, en se "dénaturant" : leurs parties hydrophobes viennent au contact de l'huile, et les parties hydrophiles restent dans la phase aqueuse. Puis la cuisson permet que les protéines "coagulent", qu'elles se lient par des liaisons disulfure, ce qui forme une matrice solide où l'émulsion est piégée : c'est cela, le gibbs, à savoir une émulsion gélifiée chimiquement.
Pourquoi le nom de Josiah Willard Gibbs ?
Je l'ai donné quand j'ai commencé à donner des noms de chimistes ou de physiciens à des préparations que j'inventais : le personnage a été si important pour la physico-chimie qu'il fallait absolument qu'il ait un plat à son nom, mais il est vrai que l'attribution de son nom à ce plat particulier est un peu arbitraire. Non pas qu'elle soit usurpée : par exemple, Gibbs a effectivement publié un texte intitulé On the equilibrium of heterogeneous substances, dans les Transactions of the Connecticut Academy of Art and Sciences (vol 3, New Haven, 1874). Or l'émulsion nommée "geoffroy" prend de la stabilité (évolue vers l'équilibre, donc) quand elle est chauffée, formant manifestement un système hétérogène.
Et c'est ainsi que la chimie est belle !
Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)
lundi 15 janvier 2018
La recette des gibbs
La recette est montrée en vidéo sur http://www.agroparistech.fr/podcast/Un-plat-de-cuisine-note-a-note-le-gibbs.html, mais elle est toute simple.
Soit on le fait en "note à note", soit on le fait plus classique.
Commençons par la recette la plus classique :
- dans un saladier, un blanc d'oeuf
- on ajoute de l'huile en petit filet pendant que l'on fouette vigoureusement (à la main, au batteur)
- quand on a obtenu une émulsion blanche, épaisse comme une crème, on ajoute du sucre (mettons 50 à 100 grammes)
- puis on parfume à la vanille, à l'eau de fleur d'oranger, à ce que l'on veut
- on met à mi hauteur dans une jolie tasse
- puis on met à pleine puissance au four à micro-ondes pendant quelques dizaines de secondes seulement ; plus exactement, quand le volume augmente d'un tiers ou plus, on arrête aussitôt la cuisson.
C'est terminé : on sert chaud. Tous simple, non ?
Pour une recette de gibbs note à note :
- dans un saladier, une cuillerée à soupe rase de protéines susceptibles de coaguler à la chaleur (par exemple, de blanc d'oeuf)
- on ajoute deux ou trois cuillerées à soupe d'eau
- puis on ajoute l'huile en fouettant
- dans l'émulsion, on ajoute acide citrique, sucre, glucose, colorant, composé odorant
- on cuit
- on sert
Tout simple, non ?
Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)
jeudi 14 décembre 2017
Une de mes inventions : les gibbs
Toutefois, il y a gélification et gélification ; certaines sont réversibles, dites « physiques », tandis que d'autres sont « chimiques ». Les gélifications chimiques sont des gélifications irréversibles, assurées par la formation de liaisons chimiques plus fortes que dans les gélifications physiques.
Un type particulier résulte de la formation de liaisons chimiques particulières nommées ponts disulfures, telles qu'il s'en forme lors de la coagulation de l'oeuf. De ce fait, on entrevoit aussitôt que l'on peut obtenir une émulsion gélifiée chimiquement en émulsifiant de l'huile dans une solution qui contient des protéines capables de coaguler, telles qu'il y en a dans le blanc d'oeuf, puis en faisant coaguler les protéines.
La recette est extrêmement simple : fouetter de l'huile dans du blanc d'oeuf, jusqu'à obtenir une préparation épaisse comme une mayonnaise, mais blanche, puis cuire quelques secondes cette préparation au four à micro-ondes, afin d'obtenir la coagulation les protéines restées à la surface des gouttes d'huile. Et c'est ainsi que l'on obtient rapidement une émulsion gélifiée blanche et insipide.
J'ai nommé de ce système un « gibbs ».
Blanches et insipides : est-ce rédhibitoire ? Pas du tout : il suffit de donner de la couleur et du goût.
Pour la couleur, tous les pigments ou colorants comestibles font l'affaire : les chlorophylles engendrant le vert, jusqu'aux caroténoïdes qui font le jaune, rouge, orange, en passant par les composés phénoliques des fleurs et fruits, qui font aussi du bleu, ou en passant par les bétalaïnes des betteraves.
Du goût : cela signifie de la saveur et de l'odeur. Comme il y a de l'huile dans la préparation, on conçoit facilement qu'il soit facile d'y dissoudre des composés odorants, le plus souvent solubles dans l'huile.
Pour la saveur, les composés sont solubles dans l'eau, ce qui tombe précisément bien, puisque le blanc d'oeuf initialement utilisé est composé de 90 % d'eau.
On le voit : finalement, il n'est pas difficile de fairedes gibbs au goût merveilleux ! note : je vous recommande un blanc d'oeuf que vous sucrez, puis vous émulsionnez une huile où vous avez fait macérer des gousses de vanilles, et vous passez au four à micro-ondes dans de jolies tasses. A servir avec un élément croustillant ou croquant, tuile aux amandes ou autre.
vendredi 1 décembre 2017
L'agar-agar et le gibbs... ou plutôt le liebig
"Est-il correct d'introduire de l'agar-agar en poudre dans un gibbs? Est-ce correct pour de la cuisine Note a Note?"
Commençons par le commencement : le gibbs. C'est une émulsion gélifiée chimiquement, que l'on obtient, par exemple, par coagulation des protéines qui servent de tensioactifs dans une émulsion. En pratique, on l'obtient de deux façons :
- cuisine classique : on fouette de l'huile dans un blanc d'oeuf ; puis on donne du goût à l'émulsion obtenue (couleur, saveur, odeur...) avant de passer au four à micro-ondes
- cuisine note à note : c'est la même chose, mais au lieu d'utiliser du blanc d'oeuf, on utilise de l'eau et des protéines ; et les composés utilisés pour donner du goût doivent être purs.
L'agar-agar, dans cette affaire ? C'est un gélifiant physique, et non chimique, de sorte qu'il conduirait à un système différent, que j'ai nommé "liebig", et dont voici une recette : on dissout de la gélatine dans de l'eau, puis on émulsionne de l'huile ; le refroidissement fait prendre en gel.
Autrement dit, si l'agar-agar est effectivement un composé pur, utilisable pour la cuisine note à note, il est mieux approprié pour faire un liebig que pour faire un gibbs.
jeudi 23 avril 2015
Deux podcasts pour présenter des plats note à note
Sur le site AgroParisTech :
[http://www.agroparistech.fr/podcast/Un-plat-de-cuisine-note-a-note-le-gibbs.html->http://www.agroparistech.fr/podcast/Un-plat-de-cuisine-note-a-note-le-gibbs.html]
[http://www.agroparistech.fr/podcast/Un-plat-de-cuisine-note-a-note-le-gibbs.html->http://www.agroparistech.fr/podcast/Un-plat-de-cuisine-note-a-note-le-gibbs.html]
Et aussi sur Dailymotion :
http://www.dailymotion.com/video/x2mybw5_un-plat-de-cuisine-note-a-note-le-dirac_tech
http://www.dailymotion.com/video/x2nkkju_un-plat-de-cuisine-note-a-note-le-gibbs_school