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dimanche 12 avril 2020

A propos d'associations d'ingrédients


Ici, je mets en pratique ma nouvelle idée de constitution des textes. N'hésitez pas à me dire si cela vous paraît plus clair (icmg@agroparistech.fr)


1. On me parle encore de food pairing... La clé du bon  ! La clé du bon ? Je n'ai pas assez de points d'interrogation, afin de mettre en garde mes amis.

2. Tiens, j'observe que c'est de l'anglais : un peu snob,  un peu idiot, un peu simplet ? Nous aurions raison de nous souvenir de cette phrase hélas souvent juste : "à beau mentir qui vient de  loin" ! Oui, les termes étrangers, "ça en jette" ; ou disons plus justement que certains malhonnêtes ou prétentieux pensent que ça en jette, ou veulent faire croire qu'ils sont plus habiles que les autres. Oui, puisque non seulement ils ont des connaissances  (ou plus exactement ils prétendent les avoir) que les autres n'ont pas, et, de surcroît, ils sont allés les chercher si loin que, dans ces contrées, on ne parle même pas le français.

3. Le food pairing, c'est comme le nombre d'or : de ces petites règles simplistes qui sont prétendument la clé du beau. Le food pairing ? Il s'agit de penser que l'on peut faire quelque chose de bon  si l'on mêle deux ingrédients qui ont un composé odorant en commun. Enfin, disons que c'est la théorie actuelle, ou une des théories, parce que cette affaire de food pairing est complètement foireuse, et change tous les deux jours. On a d'abord dit, un composé odorant en commun, puis un composé odorant essentiel en commun, puis...

4. Au fait, et le nombre d'or  ? C'est un nombre, comme le nombre pi, que l'on trouve dans des circonstances faciles à décrire, mais ce serait un peu long. Disons seulement que des esprits mathématiquement un peu "légers"  y voient la clé de la construction des cathédrales, des pyramides, que sais-je... La clé du Beau, en tout cas. Et là encore, cette numérologie peut être largement réfutée.

5. Dans mon livre La cuisine c'est de l'art, de l'amour de la technique, je discute également la question du nombre-d'or qui était proposé en cuisine comme pour la construction des cathédrales. D'une part, les cathédrale ne sont jamais vraiment construites au nombre d'or,  qui est un nombre avec un nombre infini de décimales : une construction en pierre, elle, pourrait avoir certaines de ces proportions qui approchent le nombre d'or, mais pas toutes les proportions : ce serait idiot. De sorte que le choix des proportions au nombre d'or est arbitraire.

6. Dans les deux cas, du nombre d'or et du food pairing, une question : si le Beau était à ce compte enfantin du food pairing ou du nombre d'or, ne croyez vous pas que tout le monde l'atteindrait ? Oui, s'il suffisait de règles aussi simples, pourquoi tous les articles ne les utilisent-ils pas ? Pourquoi tout le monde n'est-il pas Mozart, Rembrandt, Rodin, Flaubert, Carême ? 

7. D'ailleurs, pour en revenir plus précisément  à la cuisine, observons que, trop souvent, il y a la confusion entre la technique et l'art. La technique, c'est le fait d'être capable d'assembler des ingrédients, de les préparer, et c'est très simple, même si c'est parfois long. L'art, d'autre part, c'est le fait de faire du bon, c'est-à-dire du beau à manger. Et là, il ne s'agit pas d'une question physiologique, mais sans doute d'une question culturelle, et on aura toujours intérêt à comparer la cuisine avec les autres arts que son la musique, la peinture, et cetera.

8. Aujourd'hui, le correspondant qui suscite ce billet est un cuisinier qui me parle d'associer les huîtres avec l'huître végétale, cette plante dont les feuilles ont un goût d'huîtres. Un goût d'huîtres ? D'abord, toutes les huîtres n'ont pas le même goût, et, d'autre part, le goût de cette plante ressemble au goût de certaines huîtres. Pas celles qui ont "un goût de noisette", par exemple.  Alors, lesquelles : huîtres de Marennes ? d'Oléron ? de Normandie ? claires ? ? petites ? grosses ? Mais, surtout, pourquoi associer un goût d'huîtres avec un goût d'huîtres ? Ce serait comme mêler du vin rouge à du vin blanc : pourquoi faire ?

9. Comparons avec la musique : associer un fa avec un fa dièse, par exemple :  pourquoi pas ? mais d'abord pourquoi ? Je propose que l'objectif soit toujours premier : avant de nous demander si le prétendu "food pairing" permettrait d'associer une huître avec une feuille d'huître végétale, demandons-nous ce que nous visons : quel effet veut-on obtenir ?  Le fait que mon correspondant s'aperçoive que l'association ne fonctionne pas ne condamne pas l'association pour autant.

10. D'ailleurs,  il est rare d'avoir seulement deux ingrédients dans un plat, et pourquoi ne pas mettre tout cela avec un œuf poché ? Et une mayonnaise dans laquelle il y aura donc du jaune d' œuf, du vinaigre de l'huile ? Et du sel, et du poivre... Dailleurs, ne pourrait-on pas y mettre du sucre, du piment ? Se limiter à deux ingrédients, c'est bien faible et sans intérêt a priori, car je le répète pourquoi vouloir associer deux ingrédients et deux seulement alors que ce n'est jamais cela que l'on fait en cuisine ?

11. Tout cela me fait souvenir d'un cuisinier qui prétendait faire du beau en mettant toujours dans l'assiette trois éléments  : règle simplissime, simpliste, car pourquoi trois, et pas deux (le yin et le yang), et pas quatre (la beauté du carré), et pas cinq comme le voudrait la pensée coréenne, et pas six, comme l'étoile à 6 branches... Décidément les règles de valent pas grand-chose en matière artistique.

12. Et c'est d'ailleurs leur contestation qui fait grandir l'art. Suivre une règle condamne presque l'oeuvre : les artistes n'ont cessé de dérogé... mais cela est au delà des capacités de beaucoup, car il y a quand même de la règle de base, de la technique. Pour être Jean-Sébastien Bach, qui utilise l'accord du diable, il faut en être capable. Pour jouer avec la perspective, dans un tableau, il faut en maîtriser les règles. Les artistes sont d'excellents techniciens !

13. Et derrière les oeuvres d'art, il y a beaucoup de travail : derrière les oeuvres de Bach, il y a une virtuosité fondée sur d'interminables travaux. Derrière les toiles de Rembrandt, il y a toute la maîtrise technique de la peinture. Flaubert travaillait jour et nuit pour ne produire que sept phrases par jour !

14. J'alerte donc mes amis : ne vous laissez pas piéger par le "food pairing" (qui n'existe pas !).

vendredi 17 mai 2019

Some explanations about science, technology, molecular gastronomy, food pairing (bad theory), honesty in general

I was recently invited in a programme mixing science and... I don't understand exactly what, but it included "food pairing". 

I am publishing again and again that the theory of food pairing is not scientific, and I also observe that this "theory" is promoted by people selling advices to chefs, often trying to convince that there is science behind.
You will see why I am strongly opposed to this way of doing on other posts of this blog, but it's enough to know that "good" means "beautiful to eat", and this is not a question of technique, but of art... and art escapes the rules : the Diabolus in musica is appreciated today ; no science about that. 
 
So that I don't  want to participate to something where this wrong theory is promoted.


By the way, in the proposed programme, I could see that there is question of "aromas", and frequently, there is a confusion between aromas and odors.

But more generally, I see too often people speaking of science, when indeed they are doing technology or technique, and this is not fair. 
Engineers are engineers, technologists are technologists, technicians are technicians, and scientists are scientists. All these people are different, with different goals and different methods.

Another point: since the creation of molecular gastronomy, by me and Nicholas Kurti, there has been many people
- confusing molecular gastronomy and molecular cooking/ molecular cuisine (and this is bad for the public)
- confusing science and technology (and this is bad for students)
- confusing everything about "science and cooking" (and this is bad for everybody
- giving ( or trying to give) new names to the science called molecular and physical gastronomy (and this not very honest)

 
Here are some explanations : 

1. molecular and physical gastronomy is sometimes named " molecular gastronomy" for short ; it is a scientific activity, done in laboratories, by chemists or physicists, or biologists. This is science, not technology, and not technique

2. molecular cooking is the technique of cooking with modern tools that were transferred from laboratories to kitchens (thermocirculators, liquid nitrogen, siphons, pumps, centrifuge, rotary evaportaors...)

3. molecular cuisine is a culinary trend (chefs using molecular cooking for making new kind of dishes)

4. science (sciences of nature) is an activity of "looking for the mechanisms of phenomena using a specific method using experiments and calculation"; it has nothing to do with technique and technology

5. technique means "to do something". For example, cooking includes a technical component

6. technology means using the results of science for improving technique

7. and finally, there is art, and one of my book explains well that cooking includes a social component, an art component, a technical component.

 
By the way, I hope that my friends know about "note by note cooking"? This IS the future, the next new technique, and already some "note by note cuisine" is appearing all over the world.