mardi 11 mars 2025

Paraphrase vs plagiat : un autre

 

Un cabinet d'aide à la rédaction d'articles scientifiques me démarche, et rien que cela m'irrite, parce que si je ne suis pas capable de rédiger un article scientifique, c'est manifestement que la recherche à publier est médiocre.
Mais, le message m'a attiré, parce qu'il discutait la question des citations des travaux précédents : comment s'y prendre ? Faut-il reprendre entre guillemets ? Reprendre en paraphrasant ?
En tout cas, la moindre des choses est de bien citer les auteurs dont on retransmets des résultats ou des idées... si ce sont bien les premiers à avoir établi les faits, à avoir proposé les idées. Notre cabinet d'aide à la rédaction aurait dû commencer ainsi.

Ensuite, et ensuite seulement, on pouvait s'interroger sur la manière de citer... et là, mes correspondants ont à nouveau manqué une idée essentielle : si l'on change les mots, on change les concepts. De sorte qu'il vaut bien mieux donner les phrases exactes, sans rien changer, en assortissant chaque phrase d'une référence précise.

D'ailleurs, une troisième idée forte s'impose : dans un raisonnement, cela n'a pas de sens de citer tout un paragraphe, et il faut surtout citer à chacune des idées que nous utilisons pour arriver à l'ensemble du raisonnement.

D'ailleurs :
- lors d'une paraphrase, si nous changeons les mots des gens dont nous utilisons les idées, il y a sans doute lieu d'expliquer pourquoi nous faisons ce changement

-la rédaction scientifique, ce n'est pas de la "littérature", mais de la présentation de résultats scientifiques

- le plagiat, cela consiste à reprendre les idées d'autrui sans le citer
 
- contrairement à ce que dit le cabinet de rédaction scientifique, les études bibliographiques que nous faisons doivent relever des phrases assorties de références. Je suis très opposé à leur idée : "While it may seem convenient to lift passages verbatim, it is imperative to remember that this constitutes plagiarism. Instead, strive to understand the material thoroughly and rephrase it in your own words. By doing so, you not only demonstrate your grasp of the subject matter but also uphold the principles of academic integrity." (Sans Francisco Edit, 2025
).
Et c'est pendant ce travail, puis lors de la rédaction, que l'on doit s'assurer que les idées que l'on a relevées sont bien originales, qu'elles n'ont pas été prises dans une autre source plus ancienne.
 
Au fond, la question avait été très mal traitée !


Faut-il vraiment ?

Ai-je raison de me focaliser sur la différence entre la science et la technologie ? Oui, ai-je raison, alors que des amis me disent que cela est une perte de temps, d'énergie ? 

 A  l'analyse, e vois premièrement qu'il y a la question de l'usage des mots, lequel correspond à une propreté de la pensée. 
Et de ce simple point de vue,  il y a donc le plus grand lieu de faire la différence. 

Pour ce qui concerne l'activité ? Je me souviens que lors des thèses financées par des industriels, ces derniers insistaient pour que les docteurs fassent des choses « utiles » tandis que je revendiquais de la compréhension, du mécanisme, c'est-à-dire de la science.
Dans le dosage des activités, je me souviens que la différence entre science et technologie (applications) aidait les doctorants  à bien doser leurs activités. 

Dans la mesure où la compréhension des mécanismes est toujours plus fructueuse que de simplement régler des problèmes, résoudre des questions, il y a là quelque chose d'important... pour la techologie. 

Mais je me souviens aussi d'un cas où nous avions exploré l'étalement de la sauce sortie d'une buse, simplement pour nous amuser et parce que cela prenait quelques instants. Or nos amis industriels avaient été tout contents de ce résultat important pour eux alors que nous les considérions comme parfaitement anodin. Faut-il passer sa vie à faire des petites choses simples et utile ou vaut-il mieux investir les financements qui nous sont procurés pour des travaux plus difficiles mais qui conduiront à des applications bien plus nombreuses ? La réponse est évidemment dans la question. 

D'ailleurs, puisque nous en sommes à évoquer des dialogues avec des amis industriels, il est bien certain que la distinction des travaux est importante dans les contrats que nous passons avec eux, ce à quoi nous nous engageons en quelque sorte. 

Nous arrivons maintenant à la question scientifique et là virgule il est bien évident que si nous nous laissons aller à des questions d'application, nous ne ferons certainement pas le travail de recherche scientifique que nous imaginerions. C'est donc cette fois-ci avec nous-même qu'il y a lieu d'être rigoureux.



lundi 10 mars 2025

Terminologie : aujourd'hui, les savarins et les babas

Il se dit tant de choses fausses, à propos de la cuisine  !

Pour ce qui concerne babas et savarins, voici :  https://nouvellesgastronomiques.com/savarins-et-babas/

dimanche 9 mars 2025

Pourquoi les pâtes alimentaires refroidiraient-elles si vite ?

Ce matin, un ami m'interroge : "Pourquoi les pâtes alimentaires refroidissent-elles si vite ?"

Mon réflexe est de ne pas répondre, tout d'abord, mais de me demander si c'est vrai. Car quelle honte ce serait que d'expliquer un phénomène inexistant, n'est ce pas ? 

Mais je n'ai pas tellement besoin de faire l'expérience, en réalité, car je sais le phénomène inexistant, en toute généralité, comme on va le voir avec l'analyse suivante. 

Soit une de pâte qui serait cubique, avec un côté de 10 centimètres. Il perdrait de l'énergie ("chaleur")  par ses six faces, soit 600 centimètres carrés. 

Dans ce cube, coupons des feuilles carrées de 1 millimètre d'épaisseur, comme pour des lasagnes. Alors il y aurait 100 feuilles, et chaque feuille aurait aire surface de 200 centimètres carrés, soit une surface de 20000 centimètres carrés, sans compter les bords. Et donc au total la pâte perdrait de la chaleur par un total de 20400 centimètres carrés : 34 fois plus que précédemment. 

Coupons maintenant des spaghettis, qui auront donc 1 millimètre carré de section. A partir de notre cube initial, nous pouvons en faire 10 000,  soit une aire 67 supérieure à la surface du cube. Autrement dit, les spaghettis refroidiraient environ 67 fois plus vite que le cube initial ! 

Sortons la tête de ces calculs, pour nos amis qui ne les aiment pas, et reprenons les conclusions : des spaghettis refroidissent plus vite que des feuilles de lasagne, et plus vite qu'un lourdaud cube de pâte.
On voit que c'est le degré de division des pâtes qui détermine leur vitesse de refroidissement, ainsi que la surface exposée à l'air.
Sans compter que la sauce, aussi, peut jouer : si elle est froide, elle refroidira les pâtes en s'adsorbant à leur surface... mais si elle est chaude, alors elle réchauffera d'autant mieux les pâtes que celles-ci seront divisées.
Bref, pas besoin d'expérience... mais il fallait interpréter la question de notre ami, pour arriver à des conclusions que je vous invite à tester expérimentalement, sans que j'ai beaucoup de doute. 

Et c'est ainsi que l'Art culinaire peut être encore plus beau : fondé sur une saine technique, mais avec un travail artistique soigneux, sans compter l'amour que l'on donne à ses convives.

samedi 8 mars 2025

La beauté est dans l'oeil de celui qui regarde !

1 Je m'aperçois que j'ai transmis des idées fausses, et je présente des excuses : comme trop d'autres, j'ai expliqué que Robert Brown avait découvert le mouvement brownien en observant des grains de pollen : c'est vrai... et faux, comme je l'explique maintenant. &

2. On raconte qu'en 1828, le botaniste britannique Robert Brown (1773–1858) publia le manuscrit  A brief account of microscopical observations made in the months of June, July and August, 1827, on the particles contained in the pollen of plants; and on the general existence of active molecules in organic and inorganic bodies.
Cela est exact : l'article fut publié par le Edinburgh new Philosophical Journal : https://sciweb.nybg.org/science2/pdfs/dws/Brownian.pdf. 

3. Dans cet article, Brown explique qu'il a mis des grains de pollen de l'espèce Clarkia pulchella dans l'eau et qu'il les a observés, les voyant emplis de particules de  5 µm de diamètre environ, et qui bougeaient.
Il lui apparut que le mouvement ne résultait ni de courants dans le liquide, comme on le voit souvent quand on vient de déposer une goutte de liquide sur une lame, ni d'évaporation, mais des particules elles-mêmes. 

4. Là, pas d'erreur... mais le point clé, c'est que Brown a observé des particules dans les grains de pollens, et non les grains de pollen eux-mêmes. Car les grains de pollen, eux, ne bougent pas de façon visible ! 

5. La théorie du mouvement brownien, détecté effectivement par Brown, resta inexpliquée longtemps, parce que l'on n'avait pas la notion moderne de molécules et d'atomes. C'est le mathématicien français Louis Jean-Baptiste Alphonse Bachelier (1870 – 1946) qui, le premier modélisa le mouvement brownien dans sa thèse intitulée Théorie de la spéculation, en 1900. 

6. Puis, en 1905, Albert Einstein publia sa théorie, qui fut ensuite testée par le physicien Jean Perrin. 

7; Mais revenons à la confusion entre les grains de pollen et les particules ("granules") à l'intérieur de ces grains. En utilisant les équations d'Einstein, on peut calculer que les grains de pollen sont trop gros pour être observés. Einstein calcula en effet la constante de diffusion D du mouvement brownien  d'une particule en fonction du rayon  r de celle-ci et de la viscosité du milieu η et de la température absolue T (k est la constante de Boltzmann) :
D = k T/ 6 π η r 

8. Pour observer le mouvement brownien à l'oeil nu, il faut que la particule bouge rapidement. On calcule cela en déterminant la racine carré moyenne de la position, soit, pour un temps de 1 s, une distance de l'ordre de 10 nanomètres seulement, ce qui n'est pas visible avec les microscopes de table. Pour un temps 100 fois plus long, la distance parcourue est de l'ordre du dixième de micromètre. Pour que le déplacement, en une seconde, soit de l'ordre du rayon de la particule, on calcule un rayon de l'ordre de un micromètre... comme ce qu'a observé Brown. 

 

 Lisons bien les sources !

vendredi 7 mars 2025

A propos d'évaluation par les pairs

Jeune scientifique, je m'offusquais un peu de l'évaluation par les pairs... et surtout quand elle conduisait à rejeter des manuscrits. J'étais conforté dans mon sentiment par de nombreux articles, éditoriaux, dans des revues scientifiques telles que Nature ou Science... 

Jusqu'à ce que je comprenne enfin que le processus est le meilleur qui soit, surtout s'il est en double anonymat et s'il est pratiqué par des gens de qualité. Car il y a lieu de penser aux (sains)  principes, avant de considérer les cas particuliers parfois médiocres. 

Pensons D'ABORD que ce processus d'évaluation par les pairs sert à améliorer la qualité des textes publiés. Pensons aussi qu'il enseigne aux plus jeunes à bien rédiger des textes scientifiques. 

Pensons aussi que nombre des arguments qu'on oppose ont été réfutés. C'est tout cela que je discute ici : N3AF, Editorial : Pourquoi l'évaluation par les pairs s’impose - Why peer review is needed, 2023, 15(2), 1-6; voir l'article (en open) sur https://www.academie-agriculture.fr/publications/notes-academiques/n3af-editorial-pourquoi-levaluation-par-les-pairs-simpose-why-peer"

La cuisine note à note recrée-t-elle des aliments à partir de produits chimiques ? La réponse est non

Hier soir, un groupe d'étudiantes intéressées par la cuisine note à note, qui proposaient comme définition : La cuisine note à note recrée-t-elle des aliments à partir de produits chimiques. Est-ce cela ? 

Non, mais l'erreur est vénielle, et, d'autre part, on peut toujours d'un petit mal un grand bien, à savoir donner des éclaircissements. Et puis, c'est une méthode toute simple : il s'agit seulement de se demander ce que signifient les mots. 

La cuisine ? C'est la préparation des aliments à partir d'ingrédients.
Et si la cuisine note à note a été nommée ainsi, c'est bien que c'est de la cuisine. Les ingrédients sont seulement différents de la cuisine classique ou même de la cuisine moléculaire. 

La cuisine note à note "recrée" des aliments ? Non, elle crée des aliments : à partir d'ingrédients, on construit des aliments, des mets, des plats. Bref, on cuisine.
Derrière cette petite erreur, il y a peut-être l'idée que l'on va faire de la carotte sans carotte, ou de la viande sans viande... mais cela n'est pas le cas. Le croire serait céder à un fantasme indu. Non, on crée, et l'on évite d'ailleurs de reproduire des carottes, des pommes ou des viandes... car cela n'a aucun intérêt : on a déjà les carottes, pommes ou viandes. 

La cuisine note à note a pour ingrédients des "composés chimiques" ? Là encore, il y a une erreur... parce que l'expression "composé chimique" est souvent mal comprise.
Je pars d'un exemple : l'eau. L'eau parfaitement pure est un "composé", à savoir qu'elle est faite de molécules toutes identiques, et faites chacune d'un atome d'oxygène et de deux atomes d'hydrogène. Quand cette eau vient du ciel, ce n'est pas un composé chimique, mais un composé naturel. Mais si un chimiste qui étudie l'eau la synthétise (je faisais cela à l'âge de six ans), alors elle devient un composé "chimique", ce qu'il serait plus intelligent de nommer un composé de synthèse. Oui, il y a des composés synthétisé par des chimistes, et des composés extraits du monde naturel. Cela étant, l'eau synthétisée peut être exactement la même que l'eau de la pluie.
Passons à plus compliqué : le sucre de table, ou saccharose. Il est extrait dans des usines à partir de betteraves. Là, on râpe les betteraves, on les chauffe dans l'eau, on concentre les jus en évaporant l'eau. Ce n'est pas un travail scientifique, pas un travail de chimiste, mais un simple travail technique. Le sucre n'est pas un composé chimique, mais un composé extrait de produits naturels. Mais le sucre a mauvaise presse, aujourd'hui, parce que des idéologues critiquent les "sucres ajoutés" : prenons donc un autre exemple, à savoir le sel, que l'on obtient en concentrant de l'eau de mer. Le sel n'est pas synthétisé, mais extrait.... Ah mais, pardon, le sel a également mauvaise presse.
Passons donc à l'huile, qui est faite de "triglycérides" (et non pas d'acides gras, comme le croient des ignorants qui causent trop de ce qu'ils ne comprennent pas toujours). Ces triglycérides ne sont pas synthétisés ; ce ne sont pas des composés chimiques... mais seulement des produits du pressage de graines ou de fruits (olives, noix, tournesol...).
La gélatine ? C'est un mélange de composés extraits de viande. Pas synthétiques, pas chimiques, donc. L'acide citrique, vendu comme additif ? Il est obtenu par fermentation, comme l'est la choucroute. Ce n'est donc pas un produit chimique. Et ainsi de suite ! 

Donc finalement, non, la cuisine note à note ne recrée pas les aliments à partir de composés chimiques. C'est une cuisine qui crée des aliments à partir de composés qui sont le plus souvent extraits des produits de l'agriculture.