Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
samedi 25 janvier 2020
A propos de précisions indues
Dans un précédent billet, j'ai critiqué des indications culinaires telles que "0,222 gramme de sel".
Oui, cette indication est idiote, parce qu'elle est à la fois sans intérêt pratique, prétentieuse ou ignorante, et inutile.
Les explications
Sans intérêt pratique : personne, en cuisine, n'a de balance capable de peser cela, ce qui ne signifie pas seulement d'avoir l'outil, mais aussi avoir l'outil bien étalonné, bien utilisé, validé, etc. (ce n'est pas la peine d'avoir une voiture qui roule à 200 km/h si l'on est à 10 km/h sur une route de campagne défoncée).
Prétentieuse ou ignorante : afficher tant de chiffres, c'est -je le sais- une façon pour certains de prétendre qu'ils sont précis, "scientifiques", ce qui est d'ailleurs faux, et c'est "ignorant" (là, ce n'est pas une critique mais un fait), pour d'autres, parce que cela démontre une ignorance des règles de la pesée et de l'affichage : en substance, il existe une règle internationale de l'industrie, de la réglementation, de la science, qui est que l'on ne doit pas afficher plus de chiffres qu'on est capable d'en mesurer, et je suis bien sûr que les personnes qui ont communiqué ce nombre ne pouvaient pas le mesurer.
Enfin, la quantité de sel à utiliser dans une recette, c'est une question de goût, et que, de ce fait, c'est inutile de donner une valeur qui doit, en réalité, être déterminée par ceux qui font la recette.
On m'argumente que ce nombre est le produit d'une division, et il est vrai que si l'on avait, par exemple, 10 gramme de sel pour 3 kilogrammes de préparation finale, on obtient 10/3, soit 3,33333333.... grammes pour 1 kilogramme. Ou, de façon plus réaliste, 0,33333.... grammes pour 100 grammes. Et oui, si l'on arrondit à 0,3 grammes pour 100 grammes, alors on mettra moins de sel que prescrit si l'on fait la recette pour 700 grammes.
Mais :
- d'une part, c'est contre les règles internationales, un peu comme si l'on décidait de nommer chat un animal à quatre pattes qui aboie
- de toute façon, on se moque de la quantité exacte de sel d'autrui, comme indiqué
- surtout, la règle veut que, si on fait du 10 grammes pour 3 kilogrammes, on affiche 10 grammes pour 3 kilogrammes, quitte à dire que cela fait environ 0,3 grammes pour 100 grammes.
Et je ne saurais terminer ce billet sans rappeler que la cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique.
Et pas de la technique en premier ! D'ailleurs, citons ici mon ami Pierre Gagnaire qui explique bien que le sel n'est pas un "curseur" que l'on varie en plus ou en moins : il faut le voir comme un des instruments de l'orchestre, qui joue sa partie, originale, mais en accord avec les autres. Et on ne demande pas à Mozart d'ajouter ou de retrancher un violon de son oeuvre.
Ce qui conduit à observer que le livre où j'ai trouvé l'indication est encore plus bête et malfaisant que je ne pensais initialement. Il met les praticiens sur une mauvaise piste, les abaisse au lieu de les éclairer.
Allons, ne restons pas sur cette note négative, et levons les yeux pour voir le ciel bleu : oui, avec des explications, nous y arriverons, surtout si nous n'oublions pas que, la cuisine, c'est d'abord de l'amour !
Quelques unes de mes inventions
Quelques recettes que j'ai inventées, et dont la démonstration pratique est démontrée lors de la masterclass filmée au Cordon bleu :
Les geoffroys
En salé :
1. Un blanc d'oeuf
2. On fouette de l'huile comme pour une mayonnaise
3. on ajoute des champignons cuits avec persil et ail, broyés
4. rectifier l'assaisonnement
En sucré :
1. Commençons par faire macérer des gousses de vanille fendue en deux dans la longueur dans une belle huile d'olive.
2. Puis mettons un blanc d'oeuf dans un cul de poule, une pincée de sel, et trois cuillerées de sucre.
3. Ajoutons l'huile vanillée en fouettant, comme pour une mayonnaise.
L'émulsion obtenue pourra être servie avec des tranches d'ananas rôties au beurre et des financiers (ces gâteaux qui, comme les meringues, permettent d'utiliser les blancs d'oeufs dont le jaune a été employé pour lier des sauces).
Les liebigs
Pour les liebigs, l'idée est d'obtenir une émulsion gélifiée.
Dans la mayonnaise, c'est le jaune d'oeuf qui apporte des protéines et des phospholipides qui permettent l'émulsion (ce sont les protéines qui sont le plus actives, pour enrober les gouttes d'huile). Avec les liebig, c'est la gélatine.
1. partir de 100 g d'un liquide qui a du goût
2. ajouter 10 g de gélatine préalablement trempée
3. chauffer pour dissoudre la gélatine
4. ajouter une huile parfumée en fouettant comme pour une sauce mayonnaise
5. couler dans une plaque couverte d'un film huilé sur 5 à 10 mm d'épaisseur, et laisser prendre au froid
On peut aussi faire une émulsion (celle que vous voulez, de la mayonnaise par exemple) et y dissoudre de l'agar-agar : en chauffant, l'émulsion sera emprisonnée dans un gel physique, et l'on obtiendra un liebig.
Les gibbs
Pour un gibbs vanille (dessert) :
1. Dans un saladier, mettre un blanc d'oeuf
2. Ajouter de l'huile d'olive goutte à goutte, en fouettant.
3. Quand on a obtenu une préparation crémeuse, un peu ferme, ajouter du sucre et de l'extrait de vanille, une pincée de sel, un peu de piment.
4. Répartir dans des tasse, et cuire au four à micro-ondes à pleine puissance, jusqu'à ce que l'on obtienne un gonflement de 1/4 environ.
5. Servir chaud.
Pour un gibbs au beurre noisette :
1. Dans une casserole, mettre 200 g de beurre.
2. Chauffer doucement : le beurre fond, puis se met à crépiter.
3. Avant qu'il soit noir, quand une belle odeur apparaît, en même temps qu'un léger brunissement, cesser de chauffer, et laisser refroidir dans la casserole. C'est ce que l'on nomme un beurre noisette.
4. Quand le beurre noisette obtenu est chaud mais pas solidifié, l'utiliser ainsi :
5. Dans un saladier, mettre deux cuillerées à soupe de poudre de blanc d'oeuf.
6. Ajouter 3 cuillerées d'eau, un quart de cuillerée à café d'acide citrique, sel, poivre.
7. Ajouter le beurre noisette en fouettant comme pour une mayonnaise.
8. Quand tout le beurre noisette a été ajouté, bien battre afin d'obtenir une préparation ferme.
9. Mettre dans des bols, et cuire au four à micro-ondes comme pour le gibbs vanille.
Les debyes
1. donner du goût à 100 g d'huile en macérant un produit broyé (carottes, basilic, café, poireaux...)
2. coller un liquide à raison de 24 g d'agar-agar au litre ; faire durcir au froid
3. broyer le gel au mixer dans l'huile
Les chaptals et vauquelins
Pour les chaptals :
1. Partir d'un blanc d'oeuf, dans un saladier.
2. Le fouetter
3. Quand il est en neige ferme, ajouter une cuiller à soupe de sucre
4. Battre
5. Quand la préparation est bien lisse, ajouter une cuillerée à café de jus de pomme verte
6. Battre jusqu'à ce que la mousse soit de nouveau bien ferme.
7. Ajouter alors une cuillerée à soupe de sucre.
8. Battre
9. Ajouter une cuillerée à café de jus de pomme verte.
10. Battre
11. Continuer ainsi à alterner sucre, battage, liquide, battage.
Quand le saladier est plein, répartir son contenu entre deux saladiers que l'on travaille en parallèle, puis entre quatre saladiers, et ainsi de suite.
Les vauquelins s'obtiennent de la façon suivante :
1. prendre du chaptal précédent, et le mettre dans un bol
2. passer au fours à micro-ondes (pleine puissance) jusqu'à ce que l'on observe un net gonflement (1/4 environ) ; servir.
Les würtz
1. Dans une casserole, mettre 200 g de jus d'orange avec 50 g de sucre
2. Incorporer 5 g de gélatine préalablement ramollie à l'eau froide.
3. Foisonner
4. Mettre la mousse formée au réfrigérateur.
Les geoffroys
En salé :
1. Un blanc d'oeuf
2. On fouette de l'huile comme pour une mayonnaise
3. on ajoute des champignons cuits avec persil et ail, broyés
4. rectifier l'assaisonnement
En sucré :
1. Commençons par faire macérer des gousses de vanille fendue en deux dans la longueur dans une belle huile d'olive.
2. Puis mettons un blanc d'oeuf dans un cul de poule, une pincée de sel, et trois cuillerées de sucre.
3. Ajoutons l'huile vanillée en fouettant, comme pour une mayonnaise.
L'émulsion obtenue pourra être servie avec des tranches d'ananas rôties au beurre et des financiers (ces gâteaux qui, comme les meringues, permettent d'utiliser les blancs d'oeufs dont le jaune a été employé pour lier des sauces).
Les liebigs
Pour les liebigs, l'idée est d'obtenir une émulsion gélifiée.
Dans la mayonnaise, c'est le jaune d'oeuf qui apporte des protéines et des phospholipides qui permettent l'émulsion (ce sont les protéines qui sont le plus actives, pour enrober les gouttes d'huile). Avec les liebig, c'est la gélatine.
1. partir de 100 g d'un liquide qui a du goût
2. ajouter 10 g de gélatine préalablement trempée
3. chauffer pour dissoudre la gélatine
4. ajouter une huile parfumée en fouettant comme pour une sauce mayonnaise
5. couler dans une plaque couverte d'un film huilé sur 5 à 10 mm d'épaisseur, et laisser prendre au froid
On peut aussi faire une émulsion (celle que vous voulez, de la mayonnaise par exemple) et y dissoudre de l'agar-agar : en chauffant, l'émulsion sera emprisonnée dans un gel physique, et l'on obtiendra un liebig.
Les gibbs
Pour un gibbs vanille (dessert) :
1. Dans un saladier, mettre un blanc d'oeuf
2. Ajouter de l'huile d'olive goutte à goutte, en fouettant.
3. Quand on a obtenu une préparation crémeuse, un peu ferme, ajouter du sucre et de l'extrait de vanille, une pincée de sel, un peu de piment.
4. Répartir dans des tasse, et cuire au four à micro-ondes à pleine puissance, jusqu'à ce que l'on obtienne un gonflement de 1/4 environ.
5. Servir chaud.
Pour un gibbs au beurre noisette :
1. Dans une casserole, mettre 200 g de beurre.
2. Chauffer doucement : le beurre fond, puis se met à crépiter.
3. Avant qu'il soit noir, quand une belle odeur apparaît, en même temps qu'un léger brunissement, cesser de chauffer, et laisser refroidir dans la casserole. C'est ce que l'on nomme un beurre noisette.
4. Quand le beurre noisette obtenu est chaud mais pas solidifié, l'utiliser ainsi :
5. Dans un saladier, mettre deux cuillerées à soupe de poudre de blanc d'oeuf.
6. Ajouter 3 cuillerées d'eau, un quart de cuillerée à café d'acide citrique, sel, poivre.
7. Ajouter le beurre noisette en fouettant comme pour une mayonnaise.
8. Quand tout le beurre noisette a été ajouté, bien battre afin d'obtenir une préparation ferme.
9. Mettre dans des bols, et cuire au four à micro-ondes comme pour le gibbs vanille.
Les debyes
1. donner du goût à 100 g d'huile en macérant un produit broyé (carottes, basilic, café, poireaux...)
2. coller un liquide à raison de 24 g d'agar-agar au litre ; faire durcir au froid
3. broyer le gel au mixer dans l'huile
Les chaptals et vauquelins
Pour les chaptals :
1. Partir d'un blanc d'oeuf, dans un saladier.
2. Le fouetter
3. Quand il est en neige ferme, ajouter une cuiller à soupe de sucre
4. Battre
5. Quand la préparation est bien lisse, ajouter une cuillerée à café de jus de pomme verte
6. Battre jusqu'à ce que la mousse soit de nouveau bien ferme.
7. Ajouter alors une cuillerée à soupe de sucre.
8. Battre
9. Ajouter une cuillerée à café de jus de pomme verte.
10. Battre
11. Continuer ainsi à alterner sucre, battage, liquide, battage.
Quand le saladier est plein, répartir son contenu entre deux saladiers que l'on travaille en parallèle, puis entre quatre saladiers, et ainsi de suite.
Les vauquelins s'obtiennent de la façon suivante :
1. prendre du chaptal précédent, et le mettre dans un bol
2. passer au fours à micro-ondes (pleine puissance) jusqu'à ce que l'on observe un net gonflement (1/4 environ) ; servir.
Les würtz
1. Dans une casserole, mettre 200 g de jus d'orange avec 50 g de sucre
2. Incorporer 5 g de gélatine préalablement ramollie à l'eau froide.
3. Foisonner
4. Mettre la mousse formée au réfrigérateur.
vendredi 24 janvier 2020
Amusant : un interlocuteur qui lit une de mes recettes/inventions me répond qu'il faudrait absolument prévenir mes lecteurs que l'agar-agar provoquerait des diarrhées, a-t-il lu quelque part.
Provoquerait ? Quelque part ? Notre ami ferait bien de regarder des publications sérieuses avant de colporter des rumeurs.
Et comme il s'agit là de diététique, je ne donnerais pas le résultat de mes recherches, mais je peux rassurer mes amis, quand même ;-)
Et tout cela me fait penser à la personne qui m'avait évoquée cette "liste pourrie de Villejuif" et les prétendus dangers de l'acide citrique.
Ne colportons pas des rumeurs, ne nous effrayons pas comme des gogos !
Provoquerait ? Quelque part ? Notre ami ferait bien de regarder des publications sérieuses avant de colporter des rumeurs.
Et comme il s'agit là de diététique, je ne donnerais pas le résultat de mes recherches, mais je peux rassurer mes amis, quand même ;-)
Et tout cela me fait penser à la personne qui m'avait évoquée cette "liste pourrie de Villejuif" et les prétendus dangers de l'acide citrique.
Ne colportons pas des rumeurs, ne nous effrayons pas comme des gogos !
Abandonnons le Guide culinaire à ses erreurs et à ses prétentions !
Je me suis souvent étonné que le Guide culinaire soit un si mauvais livre, signé par le seul Auguste Escoffier, après la première édition, alors que l'homme avait fait écrire des tas de gens : Philéas Gilbert, Emile Fetu, et bien d'autres.
Je me suis souvent étonné d'y voir tant d'erreurs : de la moutarde dans la mayonnaise, des confusions entre mousses et mousselines, des précisions indues (95 °C sans thermomètre, 0,222 grammes de sel*).
Bref, je n'aime pas ce livre, et je viens de trouver une nouvelle occasion de proposer qu'on le mette aux oubliettes de l'histoire, avec un bien mauvaise note. C'est à propos d'oeuf sur le plat.
Je lis :
Œufs sur le plat
Les œufs traités par ce mode de cuisson représentent une espèce particulière d’œufs poché, dont le juste à point de cuisson fait tout le mérite et leur apprêt s’équilibre sur ces trois points :
1-cuisson du blanc jusqu’au moment où il prend une teinte laiteuse ;
2-miroitement du jaune ;
3-soins attentifs, pour éviter que les œufs ne s’attachent au fond du plat.
La proportion établie pour ce genre d’œufs ; le sont uniformément pour 2 œufs. La quantité normale de beurre est de 15 g, dont moitié dans l’ustensile et l’autre moitié versée, fondue sur les jaunes. L’assaisonnement est de 32 centigrammes pour 2 œufs.
Tout d'abord, non, cela n'a rien à voir avec un oeuf poché, et, d'autre part, c'est une évidence que l'à point de cuisson soit essentiel.
Le blanc doit-il être laiteux ? Si on le veut ainsi ! Et si on le veut différemment, faisons différemment.
Les oeufs qui attachent ? Mouais... Ils attachent en réalité rarement quand la poêle est bien beurrée ou huilée.
D'ailleurs, 15 grammes de beurre ? Il noircit. De l'huile, plutôt, avec du beurre en fin de cuisson ? L'assaisonnement : il n'est pas dit que c'est du sel, mais on peut le supposer. Et... 32 centigrammes ? Prétention ! Prétention ! Et menteurs : je suis bien sûr que ce n'est pas 32 centigrammes qui était mis, mais 30, ou 35, ou 40... Et puis, cela dépend de ce que l'on aime !
Décidément, je préfère de loin la bonne Madame Saint Ange, ou
Jules Gouffé, dont voici la recette :
Étalez dans un plat de fer rond 25 g de beurre, 1 demi-pincée de sel et une prise de poivre. Cassez dessus 6 œufs toujours de première fraîcheur. Saupoudrez avec une demi-pincée de sel et 2 prises de poivre. Mettez-les au fourneau à feu doux. Couvrez avec le couvercle de tôle et feu dessous. Laissez cuire 4 minutes. Dès que le blanc est pris, servez.
C'est quand même mieux, non ?
* On me demande pourquoi je critique ces 0.222, et je vais m'en expliquer dans un billet à suivre rapidement :
https://hervethis.blogspot.com/2020/01/a-propos-de-precisions-indues.html
jeudi 23 janvier 2020
Le sel, c'est quoi, au juste ?
La grande question du sel : c'est quoi, le sel ?
En discutant avec des collègues moins chimistes que moi, je m'aperçois que les rapports entre sel, sodium chlorure de sodium, gros sel, sel fin, et caetera, méritent d'être éclaircis. Et, me remémorant des échanges avec des amis cuisiniers, il y a déjà quelques années, je crois qu'il est indispensable de bien présenter les choses.
Partons donc de la mer, l'océan, où il y a de l'eau qui a un goût salé.
On sait que quand on fait évaporer l'eau, il reste des petits solides assez blancs, qui, si on les regarde à la loupe, ont des faces planes.
Ces petits objets ne sont pas sphériques, pas entièrement irréguliers : non, il ont des facettes planes, même si chaque cristal a une forme particulière. La raison en est que, contrairement à du verre, par exemple, ou à du sucre tiré, le sel présent dans l'eau de mer "cristallise". Il va falloir se demander ce que cela signifie vraiment, mais pour l'instant, savourons ces premières informations : l'eau de mer est faite d'eau qui peut s'évaporer, et de ces solives blanc qui restent solides, ne s'évaporent pas, et qui forment ce que l'on nomme le sel de mer. D'ailleurs, j'ai dit que ces cristaux étaient blancs, mais le sel de mer non raffiné est souvent gris, et il faut des redissolutions et recristallisations pour arriver, par une opération qui est la même que celle qu'on fait en laboratoire, à obtenir les cristaux blancs, parfaitement purs... Mais là encore, je vais un peu trop vite.
Prenons un de ces solides à la pince, et regardons-le au microscope : nous voyons alors que c'est en réalité un objet de transparent. Il n'apparaît blanc, quand la lumière et blanche, que parce que la lumière se réfléchit sur les facettes. Si la lumière est blanche, alors les reflets sont blancs et le cristal apparaît blanc. Mais si la lumière était rouge, les reflets seraient évidemment rouges, et le sel, les cristaux de sel apparaîtrait rouge.
Le sel, donc, est un matériau transparent.
Imaginons que nous coupions un de ces cristaux en deux : nous obtiendrions deux cristaux plus petits que le cristal initial. Coupons encore chaque cristal en deux, et en deux... Nous avons toujours des cristaux.
Mais nous poussions l'opération, nous arriverions à un moment où nous n'obtiendrions plus des cristaux, mais des très petits objets de deux sortes, que les chimistes ont nommé des "atomes de sodium" et des "atomes de chlore". Et ces atomes sont comme des boules vertes et rouges, dont l'empilement régulier fait les cristaux. Bref, le sel est fait d'atomes de sodium et d'atome de chlore. On dit parfois que le sel est fait de sodium et de chlore, mais c'est déjà une façon jargonnante de parler.
En réalité, je n'ai pas dit que les atomes de sodium et les atomes de chlore s'attirent tels des aimants, mais je le dis. Et je propose de ne pas expliquer la différence entre des atomes et des ions, car les ions, ce sont seulement des atomes qui ont perdu une petite partie : l'ion sodium, c'est un atome de sodium qui a perdu un "électron". Et, d'ailleurs, l'ion chlore (on dit en réalité "ion chlorure", mais vraiment on entre dans des détails) a gagné un électron. Et cet échange est à l'origine de l'attraction entre les deux sortes d'atomes : j'ai parlé d'aimants, mais ce n'est pas ici une question de magnétisme, mais d'électricité. Mais, je le répète, je crois que ce sont là des subtilités sans intérêt à ce niveau de description.
Imaginons maintenant que nous mettions un cristal de sel dans de l'eau : on voit que ce cristal disparaît, après un certain moment, et l'eau devient salée.
On dit que le sel s'est dissout dans l'eau. Et le phénomène est simple. L'eau, tout d'abord, est faite d'une myriade de très petits objets tous identiques, que l'on a décidé de nommer des "molécules d'eau". Ces molécules sont en mouvement; de sorte que, quand on met le cristal dans l'eau, les molécules d'eau viennent bousculer les atomes de sodium et de chlore du sel, qui se dispersent alors au milieu des molécules d'eau.
Pourquoi l'eau où le sel est dissout est-elle salée ? Sur la langue, nous avons ce que on a des papilles, des groupes de cellules spécialisées dans la détection des composés sapides. Ces cellules sont de petits sacs vivants, à la surface desquels il y a ce que l'on nomme des "récepteurs ". Or les atomes de sodium qui sont dans l'eau peuvent aller interagir avec ces récepteurs, comme des clés et des serrures : et quand des atomes de sodium interagissent ainsi, cela déclenche un courant électrique qui part vert le cerveau : c'est la détection de la saveur salée.
J'espère que, le tableau étant plus clair, et nous pouvons tirer les conséquences de ce qui a été dit précédemment.
D'abord la différence entre gros sel et sel fin de. Tout simplement, il suffit d'observer que les cristaux obtenus par évaporation de l'eau de mer sont très variés : il y en a de gros, de petits, de moyens... Et il suffit de broyer les gros pour en obtenir de petits. Ou de tamiser avec des tamis aux trous de tailles décroissantes :on récupère d'abord les gros cristaux, puis les moyens, puis les petits... puis les très petits. On peut même, si l'on broie de petits cristaux, comme je l'ai proposé il y a quelque décennies, faire du "sel glace", comme du sucre glace, mais avec du sel : en pratique, il suffit de broyer longuement du sel dans une poêle, en l'écrasant avec une casserole ! J'y pense : les gros cristaux c'est du gros sel, et les petits cristaux c'est du sel fin.
D'autre part, ajoutons aussi que la façon dont les cristaux se forment, lors de l'évaporation de l'eau (et de la cristallisation du sel) peut conduire à des cristaux différents : en pyramide creuse, en plaquette, en pyramide pleine à étages, etc. Par exemple, le sel de Maldon (en Angleterre), c'est du sel mais qui a cristallisé sous la forme de plaquettes et qui a un croustillant particulier, très appréciés de certains cuisiniers étoilés.
Il y a aussi la question du sel iodé et du sel fluoré : pour des raisons sanitaires, on a considéré que le public manquait de ces éléments chimiques que sont l'iode et le fluor, et on les a ajoutés au sel, de sorte que, quand nous utilisons du sel, nous consommons ces deux éléments et nous n'en manquons pas.
D'ailleurs on peut ajouter bien d'autres éléments tel le fer, pour faire de la couleur rose, le cuivre pour du bleu, et ainsi de suite... mais c'est toujours du sel, du chlorure de sodium, avec quelques impuretés. Et c'est la raison pour laquelle il est vraiment extraordinaire, exorbitant au sens littéral du terme, de payer des fortunes pour du sel rose de l'Himalaya qui n'est autre autre chose que du sel ferrugineux.
Enfin, puisque nous sommes à des "impuretés, ajoutons que le "sel" de table, qu'il vienne de la mer ou de mines (d'anciens océans évaporés et recouverts", peut contenir d'autres atomes ou groupes d'atomes : du potassium, par exemple. Mais c'est toujours d'abord du sel.
Et puis, il faut terminer en ajoutant que l'on peut "fabriquer" du sel, en mélangeant de l'acide chlorhydrique et de la soude : oui, avec ceux produits extraordinairement corrosifs (qu'il ne faut surtout pas consommer !), on obtient du sel. Mais de l'acide sulfurique, on neutraliserait aussi la soude, pour former du sulfate de sodium. Ou avec de l'acide nitrique et de la potasse, on ferait ainsi, par "neutralisation", du nitrate de potassium. Et ainsi de suite : les produits finalement formés ont été nommés "des sels", par les chimistes. Et ces sels ne sont pas du chlorure de sodium. Le chlorure de sodium, ces cristaux formés de sodium et de chlore, ne sont qu'un sel parmi mille.
Parlons de la mousse de l'expresso, pas de la crème
Il y a des confusions terribles, dans le monde alimentaire, et j'en identifie une, aux terrasses des bistrots, quand les clients et les servent discutent de café et prononcent le mot "crème".
Nous sommes bien d'accord que la crème du lait, c'est la crème. Quand on fouette de la crème, ce n'est plus de la crème, mais cela devient de la crème fouettée.
En cuisine, il y a bien d'autres crèmes : par exemple, une crème de potiron ne comporte pas nécessairement de crème de lait, mais elle a une consistance crémeuse.
On parle aussi de la crème anglaise, qui, ne contient pas non plus de crème de lait, mais a une consistance crémeuse.
Et ainsi de suite : le mot "crème" est très répandu, avec les crème au beurre, crème au citron... Quand on y regarde de plus près, on s'aperçoit que le mot "crème" désigne les préparations crémeuse, de la consistance de la crème du lait... mais on n'oublie toutefois pas que la crème fouettée n'est plus la crème, mais la crème fouettée (vous allez voir bientôt pourquoi je me répète).
Arrivons donc maintenant au bistrot : il y a plus particulièrement le mot "crème" à propos des cafés, ou bien des expressos. Par exemple, un café crème, c'est pour certains du café additionné de crème, mais, pour d'autres, c'est la partie supérieure, foisonnée, mousseuse. Et l'on voit souvent la confusion produire des effets délétères, à savoir le garçon qui apporte un expresso alors que le client voulait un café avec de la crème, ou bien le garçon apporter un café crème alors que le client avait demandé un expresso avec beaucoup de mousse.
Je propose de ne pas nommer crème la mousse de l'expresso. Oui, car cette mousse n'est pas crémeuse, comme de la crème, mais bien mousseuse, foisonnée. D'ailleurs, j'ajoute qu'elle ne contient pas de matière grasse, comme cela a été écrit par de mauvais professionnels, qui ont répété des erreurs. Et, surtout, cette mousse n'est pas plus le café que la crème fouettée n'est la crème.
Bref, luttons contre la confusion !
mercredi 22 janvier 2020
Le hachage des viandes ? C'est pour faire des viandes tendres !
Je sors de chez un boucher où une petite dame voulait acheter du steak haché. Le boucher avait pris du filet de boeuf, l'avait mis dans la machine et avait produit un steak haché, assurant que cette viande serait délicieuse.
Certes, mais c'est marcher sur la tête, car précisément le hachage a pour fonction d'attendrir des viandes qui sont saines mais dures, pas d'attendrir des viandes tendres !
Il y a deux sorte de viande de bœuf : les viandes à griller, qui sont naturellement tendres, parce que les fibres musculaires sont "collées" par très peu de collagène ; et les viande à braiser, qui sont dures parce qu'elles contiennent beaucoup de tissu collagénique.
Pour cuire les viandes tendres, il suffit de faire un aller-retour dans une poêle chaude et le tour est joué : on obtient un steak qui reste tendre, dont la surface a été assainie microbiologiquement et qui a pris du goût. La viande a durci un peu, mais est restée tendre si l'on n'a pas trop cuit !
Pour les viandes à braiser, en revanche, la cuisson sautée comme précédemment donne de mauvais résultats, car la viande est dure. D'où la solution qui consiste à hacher la viande, pour en faire une masse tendre que la cuisson durcit à peine, quand les protéines sorties des fibres lors du hachage viennent solidariser les morceaux produits par le même hachage.
Bref, hacher une viande tendre, c'est marcher sur la tête, et faire payer des sommes exagérées aux clients : une viande à braiser coûte environ 4 euros, contre plus de 20 pour une viande à griller ! C'est donc du gâchis que de hacher du filet, et une petite malhonnêteté de la part de boucher qui abuse de l'ignorance de sa cliente.
Certes, stricto sensu, notre boucher n'a rien fait de malhonnête, mais il n'a pas été de bon conseil. Ce genre de personne nuit à la profession tout entière, et doit être dénoncé. Car, je le répète ici, le hachage, comme d'ailleurs le carpaccio, visent à produire des viandes tendre à partir de matière dure, une bonne opération de valorisation de viande à braiser.
Tiens, tant que nous y sommes : avez-vous imaginé de faire un steak haché de poulet ? De porc ? D'agneau ? Ce n'est évidemment pas impossible, mais ce n'est pas très intéressant, car ces viandes sont souvent déjà tendres ;-)
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