vendredi 8 août 2014

Il doit me manquer des gènes


Le monde s'enflamme pour la coupe du monde (je suppose que c'est la coupe du monde) de football... mais ce serait pour moi l'enfer que d'être obligé de regarder un match à la télévision. Il doit me manquer le gène du football.
De même pour les voitures : je ne vois que de la mauvaise foi (je n'ai pas dit de la malhonnêteté : seulement des justifications très personnelles qu'ils donnent) dans le discours de mes amis qui en sont amateurs. Là encore, un gène doit me manquer.
Mais il y a pire : au jardin du Luxembourg, des groupes assis dans l'herbe au soleil. Que peuvent-ils donc bien faire, pendant tout ce temps ? Il doit encore me manquer le gène du groupe au soleil.
J'en vois qui sont étudiants, et qui ont un polycopié à la main, de sorte qu'ils pourraient être en train d'apprendre des cours, mais, quand je m'approche, je les entends parler d'une soirée qui s'est tenue la veille. Est ce vraiment une méthode efficace pour apprendre ? Là, quel est le gène ?
Sur un banc, au soleil, je vois une jeune femme très bronzée, allongée, qui ne fait rien. Elle n'a pas l'air fatiguée, de sorte qu'il est douteux qu'elle ait besoin de se reposer, et elle n'a sans doute pas pu éviter les messages des dermatologues signalant que le soleil est mauvais pour la peau. Pourquoi son comportement ?
Je passe maintenant devant la terrasse d'un bistrot, sans soleil cette fois, mais en plein air, juste devant la rue. Il y a à peine de quoi s'asseoir, les clients se gênent et les voitures sont bruyantes. Quel plaisir ont-ils ?
Un autre jardin public, un homme qui semble en parfaite santé est assis, sans lire, sans écrire, sans rien faire, à l'ombre. Que fait-il ?
Plus loin, une dame plus âgée fait des mots croisés. A quoi bon ? Ce type de questions me vaudra évidemment la rancune de mes amis cruciverbistes, mais je répète : à quoi bon ? Il s'agit d'une occupation, au sens d'occuper un vide, et la question n'est pas de savoir si elle élève l'esprit ou non, mais de se demander à quoi bon ? L'être humain revendique à chaque seconde de changer de condition, mais le fait est que beaucoup se contentent d'occuper leur temps, et leurs revendications ne sont donc guère que des gesticulations.
Une étudiante qui ne réussit pas particulièrement ses études me dit que, en réalité, elle est moins intéressée par la chimie physique que par « écrire ». A-t-elle déjà écrit ? Non. A-t-elle déjà pris du temps pour apprendre à écrire ? Non : ses compétences se limitent à celles qu'elle a eues lors de ses cours de français du collège ou du lycée... Cours où, m'avoue-t-elle, ses notes étaient médiocres. Comment peut-elle croire qu'elle gagnera sa vie alors que lui manquent, au minimum, des compétences, lesquelles ne s'obtiennent pas par des claquements de doigts ? Mon incompréhension d'une telle... naïveté (inconséquence ? Inconscience ?).
Un étudiant me dit avoir deux heures de transport en commun, touts les jours, pendant lesquelles il écoute de la musique ? Pourquoi ne fait-il rien ? Ses réponses sont toutes de mauvaise foi (et, à nouveau, j'ai beaucoup de sollicitude). Ce qui est avéré, c'est que son seul profit est du « plaisir ».
Je passe devant un petit jardin, et je vois une personne que je connais, directeur de société, qui cultive des tomates, carottes, choux... Je l'interroge sur son activité, et il me répond qu'il produit ainsi assez pour produire sa famille. Dont acte, mais l'efficacité de cette culture ? Au temps passé, elle est nulle, et la qualité de ses produits reste inférieure à celle des plus beaux fruits et légumes de la place. Financièrement, c'est nul. De sorte qu'il faut conclure que seul son « plaisir », son  « envie », sa compulsion le guident. Pourquoi ce plaisir ? Cette envie ? Pourquoi rester cassé en deux au soleil, dans le froid, sous la pluie ?
Dans la rue, une femme marche difficilement perchée sur des talons aiguilles immense. A quoi bon ?

On aura compris que la liste de mes incompréhension est longue. Souvent, quand j'interroge ceux et celles dont je ne comprends pas le comportement, je ne reçois que la réponse « j'aime ». Je n'ai évidemment aucun droit à discuter leur goût, mais quelle étrange chose que ce « plaisir », qui conduit à des comportements extraordinaires, souvent irrationnels !

mardi 29 juillet 2014

Taxation et obésité

Cela nous vient de collègues de l'INRA  :


La taxe des boissons sucrées n’a pas réduit l’obésité    

Dans le but de réduire la prévalence de l’obésité, les pouvoirs publics ont appliqué en 2012 une taxe de 7,16 centimes d’euros à tous les produits du secteur des boissons sucrées, quelle que soit l’origine de la matière sucrante : sucre ou édulcorant, à l’exception des sirops et des purs jus de fruit. Cette taxe est communément appelée taxe « soda ».
L’impact global de cette taxe sur la consommation de sucre restera assez faible en raison des substitutions entre les boissons sucrées et les jus de fruit dont la teneur en sucre est équivalente à la moyenne en sucres ajoutés des boissons visées par la taxe. La taxation aurait été plus efficace en termes de changement de comportement alimentaire si elle n’avait ciblé que les produits sucrés et pas les boissons allégées car les consommateurs se seraient reportés sur les produits allégés. Cette taxe visait donc davantage à collecter des fonds plutôt qu’à limiter la consommation de sucres.

La taxation s’est traduite par une augmentation réelle des prix

Contrairement à l’idée souvent admise que les acteurs de la filière (industriels, distributeurs) absorbent une partie de ces taxes pour limiter l’impact sur le volume des ventes, les travaux de l’UMR GREMAQ montrent que ces acteurs ont intérêt à répercuter au consommateur plus que la taxe. L’augmentation des prix serait de l’ordre de 10 centimes d’euros par litre.
Ces travaux mettent en évidence la nécessité d’intégrer la réponse stratégique des acteurs lors de la mise en place de politiques de taxation.  L’efficacité d’une taxe nutritionnelle dépend du design de la taxe. Une taxe sur la TVA sera moins répercutée par les acteurs du marché qu’une taxe d’accise (taxe perçue sur la quantité et non sur la valeur).

Des méthodes d’évaluation ex ante en progression constante

Les méthodes développées par les chercheurs en économie structurelle permettent de réaliser des évaluations ex-ante de politiques publiques nutritionnelles en tenant compte des réactions des entreprises, industriels et distributeurs. Ces méthodes font l’objet de constantes améliorations tant du côté méthodologique – réaction en qualité des industriels par exemple – que par le couplage de ces analyses avec des modèles de santé pour évaluer les impacts globaux sur la santé. 

dimanche 27 juillet 2014

L'auto-organisation




En 1987, le prix Nobel de chimie à été attribué au chimiste français Jean Marie Lehn et à deux de ses collègues pour leurs travaux sur la chimie supramoléculaire. De quoi s'agit-t-il ?

Normalement, en chimie, on forme des molécules nouvelles en coupant et en établissant des liaisons dites « covalentes », qui résultent de la mise en commun d'une paire d'électrons, entre deux atomes.
Toutefois, dans les années 1980, les chimistes ont étudié la possibilité de former des assemblages de plusieurs molécules à l'aide de liaisons plus faibles que les liaisons covalentes : des ponts disulfures, des liaisons hydrogène … Ces assemblages ont été nommé supermolécules, et la chimie qui les forme et les étudie a été nommée chimie supramoléculaire.
Il est tout à fait remarquable d'observer que, avant cette chimie supramoléculaire, les bibliothèques étaient pleines de livre sur les « complexes » de diverses sortes. Tout cela a été balayé par la chimie supramoléculaire, qui donné un cadre général à la description de ces divers objets.

Ce qui est le plus merveilleux, c'est que cette chimie permet d'envisager la création d'objets nouveaux, et, notamment, d'objets capables de s'assembler spontanément, de se dissocier et de se réassembler selon les circonstances chimiques. Notamment, Jean-Marie Lehn et ses collègues ont conçu et réalisé des molécules en formes de parts de tartes, avec des bords « collants ». Si l'on met de telles molécules dans une solution, elles diffusent, puis s'assemblent par les bords. Si l'angle au centre de ces molécules n'est pas un sous-multiple de 360°, alors les parts de tarte forment une structure hélicoïdale, identique à la capside de certains virus !
Voilà pourquoi la chimie supramoléculaire me semble si importante, et voilà pourquoi l'étude de chimie mérite que l'on réserve un chapitre particulier à cette chimie des forces faibles, qui conduit à l'étude de l'auto-organisation, un chapitre de la chimie qui se développera considérablement au XXIe.
Militons pour que Jean-Marie Lehn reçoive un deuxième prix Nobel !

samedi 26 juillet 2014

L'envie blanche et l'envie noire

En ces temps minables où l'on devrait à tout moment se justifier de gagner (ou pas) de l'argent, où l'on voudrait qu'aucune tête ne dépasse, je propose de rappeler que Jorge Luis Borges, l'écrivain merveilleux, disait bien qu'il y a deux sortes d'envies : l'envie blanche et l'envie noire.

L'envie noire, tout d'abord, c'est celle qui nous pousse à détruire ce que nous n'avons pas.
L'envie blanche : il s'agit, quand on voit quelque chose qu'on n'a pas, de travailler pour l'avoir.

On aura compris de quel côté je me place !

samedi 19 juillet 2014

La beauté de la science

Relisant un texte de Henri Poincaré, sur l'intérêt des mathématiques, je m'aperçois que, bien que souvent ébloui par la "beauté" de résultats mathématiques ou scientifiques, je n'ai pas cherché à faire partager cet éblouissement.
Dans l'enseignement des sciences, il y a mille exemples, de sorte que cela ne devrait pas être compliqué de trouver des exemples d'émerveillements à partager. En revanche, montrer cette beauté à ceux qui ne maîtrisent ni les mathématiques, ni les sciences, c'est là la vraie difficulté, et il serait bienvenu de s'y atteler.
J'ai écrit ailleurs que la vulgarisation avait pour tâche de montrer comment les résultats nouveaux s'imposent, en relation avec les équations qui soutiennent les théories, mais je crois qu'une deuxième tâche pourrait être de montrer la beauté des résultats mathématiques ou scientifiques.
Réfléchissons collectivement aux manières d'y parvenir !

lundi 14 juillet 2014

Clarifions



Dans ce « clarifions », il y a à la fois l'idée de la clarification, et aussi celle de l'entreprise faite en commun. Deux raisons d'aimer tout particulièrement ce mot.

La clarification, tout d'abord : on disait naguère « Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement ». Est-ce vrai ? Dans un billet précédent, j'ai discuté la foi excessive que j'avais eu en Condillac et Lavoisier, à ce propos, et mes doutes actuels, nés de la relecture de Henri Poincaré, lequel pensait sans les mots, et avait ensuite bien des difficultés à mettre les mots sur les idées.
Cela étant, énoncer n'est pas une mauvaise idée, d'abord parce qu'une idée dans un tiroir n'est pas une idée : il faut communiquer nos résultats à la communauté humaine. Ensuite, parce que les mots exprimés sont ensuite la possibilité de discussions, de réfutations éventuelles. Bref, les mots posés sont une possibilité de les discuter.

Clarifions : le mot est évidemment un écho de la recherche scientifique, la recherche des mécanismes : d'une sorte de brouillard, on veut faire émerger des idées claires ; dans une eau trouble, on veut identifier un poisson brillant. Surtout dans l'écheveau tourbillonnant de nos pensées, nous voudrions être capables d'en saisir qui soient non pas isolées, sans quoi la perte du contexte risquerait de les tuer, mais plutôt qui soient identifiées, bien délimitées, avec une structure et des relations avec leur entourage.
La science, la technologie, la cuisine, l'art, la gastronomie moléculaire, la cuisine moléculaire, la cuisine note à note, la chimie, la physique... Tout cela ne mérite-t-il pas une clarification ?

En commun, ce serait encore mieux, puisque nous sommes humains, donc membres de la grande communauté des humains.

dimanche 13 juillet 2014

Vu dans Proust

Vx ou littér. Qqn persuade à qqn qqc./que + ind. ou subj. Olivier lui persuada facilement qu'il devoit rester auprès de la duchesse (GENLIS, Chev. Cygne, t.3, 1795, p.355). Il ne suffit pas qu'une chose soit dite, il faut qu'elle soit publiée, prouvée, persuadée à tous, universellement reconnue (SENANCOUR, Obermann, t.2, 1840, p.171):
2. Je ne sais quelle amie intrigante était parvenue à persuader à cette âme naïve et si timide qu'il était de son devoir de partir pour Saint-Cloud, et d'aller se jeter aux genoux du roi Charles X.
STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p.505.