dimanche 22 juin 2014

Les gonflements en cuisine



Naguère les livres de cuisine indiquaient que c'était l'oeuf qui faisait « souffler ». Il aurait fait souffler les soufflés, les choux, les petits choux, les cannelés, les quiches, etc. Toutefois le physico-cchimiste a de quoi s'étonner : pourquoi donc les œufs auraient-ils eu cette vertu soufflante ? Le blanc d'oeuf, c'est 90 pour cent d'eau et 10 pour cent de protéines. Si le blanc fait souffler, c'est soit en vertu de son eau, soit en vertu de ses protéines, soit en vertu d'une combinaison des deux. Pourtant l'expérience est simple : si l'ajout de protéines à une préparation culinaire, on n'observe pas de gonflement. En revanche, avec de l'eau, la préparation gonfle si elle est chauffée par le bas. En effet, l'eau qui s'évapore fait bien plus de volume de vapeur que le liquide initial.
Et c'est ainsi que l'on ne voit pas les soufflés gonfler si on les chauffe par le grill du four, par le dessus, alors qu'ils se développent considérablement si on pose le ramequin sur la « sole » du four, en bas. La vapeur formée au fond du ramequin pousse le soufflé ra le socuhefs vers le haut, et l'on voit le soufflé gonfler.
Il y avait donc bien lieu de rénover l'enseignement culinaire, en balayant toutes les scories de son développement, dans les décennies précédentes. Ce fut la réforme du CAP, réforme qu'il faut poursuivre aujourd’hui, tant il est vrai que les idées fausses ne meurent jamais, mais que ceux qui les soutiennent finissent pas disparaître (partir en retraite, mourir, se désintéresser de le question). Progressivement, en nous fondant sur des expérience répétables, que les professeurs produiront devant leur élèves, on arrivera à des théories plus justes de la technique culinaire.
La conclusion est qu'il semble bien essentiel de poursuivre les expériences, et d'encourager les enseignants à en faire avec leurs élèves, dans les établissements d'enseignements de la cuisine.

dimanche 15 juin 2014

Je reviens sur la question du code couleur des aliments



Il est proposé un code couleur pour dire si les aliments sont nutritionnellement bons ou mauvais. L'intention est (peut-être bonne), mais il faut réfléchir.
Tout tient dans le mot « nutritionnellement ». Tout d'abord, on aurait intérêt à bien distinguer la nutrition, qui est une science, la diététique, qui est une morale, et l'alimentation, qui est une pratique de tous, et, mieux, de tous qui sommes sains, pas malades. L'alimentation, c'est ce que l'on mange. La nutrition est la sccience qui explore les mécanisme des phénomènes de l'interaction de nos aliment avec notre organisme.
La question est de savoir si la science de la nutrition en sait assez pour que la diététique guide correctement notre alimentation... et la réponse est non (voir par exemple la séance publique de l'Académie d'agriculture du 11 juin 2014). Peut-on donc avoir une politique de santé publique du point de vue de la nutrition ? Sans doute pas parce que c'est une science. Du point de vue de l'alimentation ? Oui, on peut souhaiter faire savoir à tous qu'il y a des idées simples à avoir quand on s'alimente, mais devons-nous d'abord considérer que l'alimentation est pathologique ou habituelle ? Certains médecins qui voudraient prendre le pouvoir sur leurs congénères n'hésiteront pas de se parer des vertus de l'hygiénisme pour imposer aux autres leurs idées, mais décodons : est-ce le goût du pouvoir (médical) ? Est-ce une idée politique qui voudrait que l'Etat contrôle nos faits et gestes. Tout est là, dans ce débat, et plus particulièrement dans la deuxième question. Il y a d'un côté l'individu qui veut manger à sa guise, dans les limites qui sont celles de la vie en collectivité évidemment, et ceux qui voudraient que l'Etat ait un contrôle sur tout !
On a vu par le passé les écueils des deux excès. On a vu ces pouponnières terribles où des enfants emmaillotés étaient telles les fourmis d'une colonie, telles les ouvrières d'une ruche d'abeilles, bons ouvriers obéissant... à qui ? Inversement, on voit trop les méfaits de l'individualisme, qui fait des collectivités incohérentes. Les Grecs avaient donc raison : il faut de la mesure.
Pour en revenir à ce code couleur, je le crois aussi déraisonnable que la recommandation qui voulait nous faire manger dix fruits ou légumes par jour : l'alimentation n'est pas dans le choix d'un aliment particulier, mais dans un tout. Peu importe que je mange un aliment très gras si le suivant ne l'est pas. Finalement, j'aurais mon compte. Peu importe que je mange un aliment fumé, chargé de benzopyrènes cancérogènes, si je ne le mange qu'une fois l'an. Peu importe que je mange des acides gras trans... si j'en mange la quantité qu'il faut, puisque mon organisme en a besoin. En matière alimentaire, la difficulté vient de ce que nous avons du mal à organiser un régime équilibre, et nous avons du mal à supporter que la seule règle vraiment valable soit : mangeons de tout en quantités modérées, et, surtout, faisons de l'exercice.
Mangeons de tout : c'est du bon sens, et l'on y arrive asssez bien, même quand on a une passion pour les pâtes, la purée, les frites, le riz... En quantités raisonnables : là, ça devient difficile, parce que en réalité, nous sommes déraisonnables. Il faut le dire, le redire, le savoir, le comprendre, et sans doute essayer de nous d'améliorer un peu. Faisons de l'exercice : là, c'est le plus dur, et c'est un effort de tous les instants que de prendre l'escalier au lieu de l'ascenseur, que de marcher suffisamment dans la journée, que de sortir de nos fauteuils où nous nous sommes si confortablement assis.
Pourtant c'est la seule règle tenable... mais il est vrai que ce n'est pas un fonds de commerce suffisant pour ces médecins, hygiénistes, nutritionnistes ou diététiciens qui voudrait prendre le pouvoir sur notre alimentation. Répétons que nous ne sommes pas malades, qu'il est légitime de boire du vin, de manger du saucisson, du fromage, de la viande, des poissons, des fruits, des légumes, des frites, même des pâtisseries... Il faut manger en quantités aussi raisonnable que possible et faire de l'exercice.
Et ce n'est pas un code couleur infantile qui parviendra nous aider vraiment , d'autant que les expérimentations d'un tel code, en Angleterre, se sont déjà soldées par un échec. Militons donc pour qu'aucun État tout-puissant ne prenne le contrôle du plaisir que nous avons à manger.

samedi 14 juin 2014

À propos d'enseignement.



Récemment, j'ai lu l'annonce d'une réunion merveilleuse : des enseignants s'interrogeaient pour savoir pourquoi les étudiants font leurs travaux au dernier moment. Chacun sait que c'est une mauvaise méthode, qui conduit l'individu a manquer de temps, à faire l'impasse sur les matières pourtant importantes... Comment donc aider les étudiants à ne pas se retrouver à faire les travaux au dernier moment ?
Il y a évidemment plusieurs façons de répondre à cette question, mais il faut surtout se demander comment l'enseignement est organisé. Faut-il vraiment accumuler les heures de cours, afin de remplir les emplois du temps ? J'ai expliqué ailleurs pourquoi je crois que cette méthode est mauvaise, et pourquoi il vaut mieux des objectifs (compétences) bien identifiés, et je n'y reviens pas ici.
Toutefois, en vue pardonnez-moi cette question impertinente : pourquoi les enseignants chercheurs eux-mêmes rendent-ils le plus souvent leurs travaux bien tardivement ? Pourquoi sont-ils « débordés » ? Je n'arrive pas à penser que la question des étudiants soit entièrement déconnectée de celle des enseignants chercheurs, de sorte que, finalement, ce qui semblait être une bonne initiative paraît plutôt, à l'analyse, une façon de voir la paille dans l'oeil du voisin.
Chers collègues, pardonnez mon impertinence : j'ai du mal à oublier que les enseignants ont été des étudiants, d'autant que le chimiste Michel Eugène Chevreul, le père de la chimie des lipides, déclarait à l'âge de 100 ans qu'il était le doyen des étudiants de France !

Pas de bons points pour les aliments !



Mon collègue Jean-Paul Laplace, qui est un homme mesuré, savant et sage, vient d'être assez malhonnêtement attaqué par un journal « satirique » qui lui reproche d'être un suppôt de l'industrie.
Faut-il s'en émouvoir ? Après tout, on ne parle pas aux roquets...
Toutefois on peut s'interroger sur les motifs politiques de celui ou de cellee qui a attaqué notre collègue et, surtout, se demander pourquoi l'article arrive quand ce dernier attaque la proposition d'un code couleur qui serait appliqué aux aliments. 
Pourquoi un tel code est-il mal venu ? Parce que les aliments ne sont pas notre alimentation. Nous pouvons très bien manger un aliment gras un jour, si nous mangeons ensuite un aliment moins gras : c'est dans la durée que se construit l'alimentation. De surcroît, faut-il laisser des individus, voire l'Etat, nous dire ce que nous devons manger ? L'ingérence devient intolérable, et illégitime, voire dangereuse.
En réalité, nous le savons tous bien que nous devons avoir une alimentation variée : ne nous le répète-t-on pas tout le temps ? Et pourquoi pas de grosses étiquettes « le foie gras tue » sur nos menus de fêtes ?
Décidément, Jean-Paul Laplace a bien raison de réagir.

jeudi 12 juin 2014

Manuel Walls pour les OGM ?

Je lis :
"Si les dangers supposés des cultures transgéniques attendent toujours d'être vérifiés, les bénéfices espérés sont, eux, largement reconnus. En diminuant l'impact des intrants, les OGM joueraient un rôle essentiel dans la protection de l'environnement. Surtout, en augmentant les rendements agricoles sans épuiser les réserves d'eau, ils contribueraient, de manière décisive, à l'autonomie alimentaire des pays du sud. De toute évidence, ils méritent mieux que les procès d'intention et les acccusations de sorcellerie ! Plutôt que d'interdire les OGM, il faut donc augmenter les moyens en faveur de la recherche sur les biotechnologies afin de lever les doutes sur leur innocuité. Et il faut avoir le courage de reconnaître que cet objectif passe, inéluctablement, par des expérimentations en plein champ".

Ai-je bien lu ?

dimanche 8 juin 2014

Est-il bien vrai que l'on naît rôtisseur ?



Parmi les aphorismes de Jean-Anthelme Brillat-Savarin, il y en a un que je déteste parce qu'il stipule que l'on devient cuisinier, mais que l'on naît rôtisseur. Quoi : aucun travail ne pourrait nous donner la compétence de la rôtisserie, qui serait innée ?
En réalité, Brillat-Savarin a inventé des histoires, qu'il a merveilleusement racontées ; il a seulement colligé un grand nombre d'idées gastronomiques qui étaient dans l'air pour composer un bouquet bien plus beau que les fleurs qu'il avait amassées ça et là. Son génie littéraire nous a fait gober des tas d'idées, justes ou fausses... mais encore je trébuche sur le mot « génie », qui voudrait faire croire à des « dons » : dans le cas particulier de Brillat-Savarin, aucun don, puisque son livre fut un immense travail, celui de toute une vie.
Bref Brillat-Savarin a recueilli des fleurs, et toutes n'étaient pas d'égale qualité : l'aphorisme consacré à la rôtisserie est mauvais. Oui, tout d'abord, on peut devenir cuisinier si l'on travaille : si l'on travaille suffisamment, si l'on s'interroge sur l'acte de cuisiner, il y a fort à parier que l'on peut devenir un excellent cuisinier. Evidemment, tous les cuisiniers ne sont pas égaux, mais il suffit de les interroger pour voir que tous n'y ont pas passé le même temps, tous n'y ont pas mis le même soin, tous n'ont pas réfléchi avec autant d'intensité, d'incertitude, de doute, à l'acte de cuisiner, et cela fait toute la différence. Dans un registre artistique différent, la musique, je viens de visionner un cours public du violoncelliste Mstislav Rostropovitch, qui disait à ses jeunes élèves que seule une chose comptait, le nombre d'heures passées à travailler : et s'il n'avait pas tort ?
Venons en maintenant à la question de la rôtisserie. Est-elle innée ? Je ne le crois pas, car je me souviens trop bien de mes camarades de classe, au collège ou au lycée, qui nous disaient dédaigneusement qu'ils avaient de bon résultats sans rien faire. Renseignements pris, il y passaient des heures, et ce snobisme n'était pas à leur honneur. Je ne crois guère aux « facilités », et encore moins à l'impossibilité de ne pas devenir... par le travail, ce que l'on a décidé de devenir.
Evidemment, je ne parle pas des qualités physiques, la taille, le poids, car il y a une vraie différence. Je parle de compétences qui ne sont innées pour personne, et que l'on peut obtenir.
Tiens, d'ailleurs, la rôtisserie : et si l'on analysait un peu ? Commençons par un poulet. Il suffit d'une expérience, et d'une seule, de rôtissage d'un poulet trop près d'un feu vif pour observer qu'il charbonne. Et il suffit d'un thermomètre pour apprendre à mettre le poulet à une distance du feu telle que la température sera telle que nous le désirons. Cela parce que les feux modernes sont d'une régularité bien plus grande que les feux d'antan. Si nous voulons du 61 °C, nous l'aurons ; du 70 °C, itou. D'où les basses températures qui font des chairs parfaitementst tendres, pas sèches.
Ces deux expériences faites, posons-nous la question de l’objectif : comment voulons-nous notre poulet rôti. Cuit ? Cela signifie que les chairs doivent être portées à une température qui dépend de notre goût. Par exemple, pour ceux qui veulent non seulement la coagulation des chairs, mais aussi leur passage du rose au blanc, il faut un bon 70 °C. D'autre part, pouur que la peau soit croustillante, il faut que son eau soit évaporée. Et c'est là que des températures bien supérieures à 100 °C (l'ébullition de l'eau), comme pour les fritures, seront utiles. Si l'on dissocie ainsi la cuisson de l'intérieur, très simple grâce aux bases températures, et la cuisson de la peau, facile aussi avec les hautes températures que l'on peut atteindre, alors la question du rôtissage est réglée.
Il faut donc changer l'aphorisme : on devient cuisinier si l'on travaille, et l'on peut devenir également rôtisseur, si l'on travaille.