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jeudi 16 février 2023

Il faut justifier ses dires, ou être capable de le faire.


Je fais ce billet parce que cela fait quelques plusieurs fois en quelques jours que des correspondants me soumettent des "récits", des "thèses", sans justification et que, cela venant de personnes qui sont extérieures à la production de connaissance, je vois délivrer des informations douteuses et sans référence.

Par exemple, un de mes correspondants me signale qu'un chimiste vers 1930 aurait découvert "la molécule qui fait synthétiser le récepteur de l'amertume des légumes". D'abord, il n'y a pas une amertume, mais de nombreuses amertumes. Ensuite, puisqu'il y a de nombreuses amertumes, il y a de nombreux récepteurs. Ensuite, il n'existe pas de molécule qui déclencherait la synthèse de ces récepteurs. Bref, une telle phrase montre... qu'elle est très fausse, et que notre interlocuteur a mal recopié une information juste, sans comprendre, ou bien qu'il a recopié une information fausse sans comprendre que l'information était fausse.

Mais si la phrase qui m'est tendue est si fausse, que faut le reste ? Rien, en l'occurrence... d'autant que tout cela est donné sans référence.

Certes, moi-même, je ne donne pas toujours mes sources, mais je publie assez largement, publiquement, mon adresse email, en avertissant que je tiens à la disposition de ceux qui les demanderaient les références qui justifient mes dires.

Par exemple, je renvoie à mon livre Casseroles et éprouvettes pour le document qui fait état  d'études de marquage fluorescent fondé sur l'usage l'ion calcium pour détecter des  récepteurs de composés sapides amers.

Plus généralement, tout ce que je dis, tout ce que j'écris, se fonde sur des références. Et des références primaires, pas des sources secondaires, dont il y a lieu de douter. Chaque fait que je délivre doit être fondé sur une référence solide qui l'établit.

D'ailleurs, toutes les personnes qui ont publié des articles scientifiques avec moi pourront  témoigner du fait que je réclame  sans cesse "une phrase -> une référence ou plus ».

Oui, tout ce qui est écrit dans un article doit être sourcé, référencé et avec des règles très particulières que j'ai exprimé dans des nombreux billets et textes sur les bonnes pratiques en sciences.

Je sais qu'il y a des groupes où des adultes sont poussés à s'améliorer, notamment par la production de textes sur des sujets qu'ils choisissent, produisant des documents spéculatifs, des  "mémoires", mais il faut répéter que la qualité  d'un document analytique (pas la littérature) tient à la sélection des faits et idées rapportés, et au référencement de ces faits et idées.
Il est notamment essentiel de savoir reconnaître de bonnes sources... pour ne pas en citer de mauvaises sans analyse critique  : si l'on cite une référence médiocre en la prenant pour argent comptant, alors on endosse la médiocrité de cette référence.

La question des références est absolument essentielle en sciences et on ne répétera jamais assez que l'on ne doit se référer qu'à des textes "primaires", et ne pas citer des auteurs qui citent d'autres auteurs, et ainsi de suite.

Souvent, il y lieu de bien choisir les sources citées. Notamment quand  plusieurs auteurs ont contribué à établir le fait :  c'est l'auteur qui a établi le fait particulier que nous citons qui doit être cité et nul autre.

On n'a donc pas un choix considérable sauf à vouloir préciser des conditions d'établissement du fait.
Par exemple, si une méthode  d'analyse a été mise au point par un chercheur M, et que l'équipe N a utilisé cette méthode pour obtenir un résultat d'analyse particulier, alors on a le droit de citer à la fois N et M,  dans la mesure où l'on veut expliquer à la fois la méthode et son résultat.

Ce qui vient d'être énoncé n'est pas anodin, car la science demande des "moyens de la preuve", à savoir comment un résultat a été établi. Si l'équipe M a cité l'équipe N pour la méthode qu'elle a mise en œuvre, alors il devient légitime de citer M et N.

J'en profite aussi pour signaler que nous n'avons pas le droit de choisir entre plusieurs publications que l'on cite. Il y en a une et une seule, qui a été la première a  établir le fait que nous citons, et c'est celle-là qui doit être citée et nul autre.

Même si nous avons des amis qui ont travaillé sur le sujet et à qui nous voudrions faire plaisir ! Même si nous avons à coeur de citer toute une communauté.

Non, la bonne pratique en matière de référencement des informations consiste à citer, qu'on les aime  ou  pas, les personnes précises qui ont établi les faits que nous utilisons dans notre argumentation.

Et je reviens à la question initiale  :  de toute façon, un récit ne vaut rien s'il n'est pas correctement sourcé, et nous ne devons avoir aucune confiance dans un récit dont les composantes ne sont  pas clairement établies, ne sont pas fiablement établies.

mardi 14 décembre 2021

Promis, je vais me corriger

Décidément, il y a des travers, chez les autres, qui nous montrent mieux nos insuffisances.

Là, par exemple, je tombe sur un texte "intéressant" (http://mycoventures.com/MycoVentures (http://mycoventures.com/MycoVentures/Home.html) qui dit le danger des champignons crus.
L'auteur donne un nombre important d'indications... mais d'où les sort-il ?
Certes, pour chaque champignon, il donne un lien internet, mais ce lien ne va que vers une description du champignon, et non pas vers des articles scientifiques qui disent spécifiquement le danger. La référence est donc mauvaise, et même trompeuse, en quelque sorte.

Or je m'aperçois que, dans des communications publiques, pas scientifiques donc, je me laisse aller, pour des raisons de place ou de temps, à donner des informations sans les justifier par des références. Je les ai, ces références, mais je ne les donne pas, et c'est un mauvais exemple.
Au fond, je suis reconnaissant à l'auteur du mauvais texte que j'ai cité, de m'avoir bien fait comprendre qu'il y avait lieu de faire mieux que je ne faisais.

Promis, je vais me corriger.

lundi 29 mars 2021

Ils causent...

 Je bétonne !

Je ne regarde pas souvent les commentaires qui me sont fait sur Twitter, parce que je n'ai pas le temps pour cela. Toutefois,  hier, on m'a retransmis par email un commentaire bizarre de quelqu'un qui me compare à d'autres et qui s'interroge apparemment sur mon cheminement.
Ce type de commentaires m'intéresse peu, mais il me donne l'occasion de m'interroger sur mon activité. Est-elle telle que je la souhaite ?

En réalité, les choses sont très claires : j'ai une production scientifique à faire, et l'essentiel de mon temps, de mon énergie, doit être consacré à cette recherche scientifique (pour laquelle je suis payé par le contribuable). Je dois donc m'efforcer de faire de la recherche scientifique, et non pas d'aller causer sur les réseaux sociaux comme au café du commerce.

En matière scientifique, il me paraît clair, aujourd'hui, que mon effort doit porter sur les "échanges",  car c'est autour de ce thème que s'articulent nombre de mes travaux.

Il y a lieu, maintenant, avec tous les résultats que j'ai obtenus, de produire un travail en profondeur sur cette question, un travail général. Cela demande beaucoup de temps et d'énergie ; cela demande que j'y pense, sans cesse, et c'est seulement à titre de délassement que je fais d'autres travaux telles que des recherches terminologiques autour de la cuisine, des séminaires, des réflexions sur la méthode scientifique, sur la didactique, et ainsi de suite.

La personne qui commentait mes productions n'a apparamment  pas compris que mon propos est essentiellement de produire de la science. Le chimiste Jean-Marie lehn cite souvent un de ses amis architecte qui répète "Ils causent, je bétonne".

Oui, il y a lieu d'élever l'édifice scientifique  sans perdre de temps à palabrer.

vendredi 19 mars 2021

Une phrase une référence



Des amis me demandent une règle simple pour écrire des publications,  et je crois qu'il faut commencer par le commencement qui tient dans cette formule : "Une phrase, une référence".

Cela signifie en réalité que tout ce que l'on écrit doit être justifié, et cette justification est soit donnée par un article scientifique publié antérieurement, soit par des travaux expérimentaux bien exposés... après avoir été rigoureusement menés.

Évidemment, dire cela est insuffisant, car cela sous-entend notamment que les publications scientifiques que l'on cite sont bonnes.
Et, à ce propos, je fais un clin d'œil en signalant qu'une publication scientifique est bonne... si elle même fait usage de cette idée "Une phrase, une référence",  car je ne connais pas d'exemple du contraire, à savoir que je ne connais pas de bonne publication scientifique qui ne met pas en œuvre cette idée.

Les sciences de la nature se fondent sur les résultats bien établis,  et ces résultats bien établis sont ceux qui ont été publiés, qui ont donc été passé au crible de rapporteurs, lesquels se sont assurés de la qualité du travail.

Bien sûr, comme dans toute entreprise humaine, il y a des cas où les auteurs ont été médiocres, où les rapporteurs ont été trop rapides, ou complaisants, où les éditeurs ont été laxistes, mais il y a aussi les auteurs soigneux, les rapporteurs attentifs, les éditeurs précis.

Pour les sciences de la nature, la question est surtout celle de l'objectif :  à défaut d'atteindre la perfection, on peut viser, et en tout cas, ce que l'on avance dans une publication doit être juste, c'est-à-dire que l'on a vérifié soi-même ce que l'on dit, ou que l'on rapporte ce que quelqu'un d'autre a bien vérifié.

Hier encore, je voyais une publication  mauvaise où l'auteur disais que le café est la boisson la plus consommée dans le monde. C'est évidemment faux, car la boisson la plus consommée, c'est l'eau !
Si l'auteur avait bien regardé les consommations, il n'aurait pas écrit une ânerie pareille.

Il y a donc lieu, quand on donne des références accompagnant chaque phrase de notre texte, de bien s'assurer de ce que l'on dit, et les références ne sont pas là seulement pour justifier ce que l'on dit,  mais aussi pour donner des informations complémentaires qui établissent correctement ce que l'on dit.

Il y a donc une règle simple à s'appliquer, quand on rédige une publication : chaque phrase doit être assorti d'une bonne référence. On a le droit de faire des phrases non justifiées pour commencer une rédaction, mais finalement, elles devront toutes être assorties d'une référence, et je le répète, d'une bonne référence !