mardi 2 janvier 2024

Questions de mousse au chocolat


Ce matin, une question, par des élèves qui doivent faire un travail personnel encadré (TPE) : 

Est ce qu'il y a une émulsion dans la mousse au chocolat traditionnelle? Nos recherches sont contradictoires et nous aimerions avoir une réponse exacte. Si il y en a une, pouvez vous nous spécifier entre quels ingrédients.

 

Lisons. On me parle d'une "mousse au chocolat traditionnelle"... mais de quoi s'agit-il ? 

Une mousse au chocolat, c'est une mousse à laquelle on a donné le goût du chocolat ! 

Et l'on peut en imaginer beaucoup :
- un blanc d'oeuf battu en neige (une mousse) que l'on mêle à du chocolat fondu -
un blanc d'oeuf battu en neige, et sucré (toujours une mousse, mais plus stable que la précédente) auquel on ajoute du chocolat
- les mêmes, mais au lieu de chocolat fondu, on ajoute de la poudre de cacao
- les mêmes que les deux premiers, mais on fond du beurre en même temps que le chocolat - les mêmes que le précédent, mais on ajoute du jaune d'oeuf
- les mêmes que tous, mais avec en plus une pincée de sel, un peu de vanille, du rhum...
- de la crème fouettée que l'on mêle à du chocolat fondu
- de la crème Chantilly (de la crème fouettée que l'on sucre) que l'on mêle à du chocolat fondu - et j'ai encore plein d'idées... 

Alors ? Laquelle ? Le mot "traditionnel" signifie en français "qui est dans la tradition", de sorte qu'il faudrait aller chercher une recette dans des livres de cuisine. Lesquels sont "traditionnels" ? Je laisse la question en suspens, en me référant plutôt à une recette "professionnelle" qui fait usage de : 250 g de chocolat à cuire 100 g de beurre 4 jaunes d'oeufs 6 blancs d'oeufs 40 g de sucre. Le protocole est le suivant :
- concasser le chocolat
- le mettre dans un bain à sauce, le fondre doucement
- incorporer le beurre, mélanger jusqu'à consistance de pommade
- hors du feu, ajouter les jaunes, mélanger
- monter les blancs d'oeufs en neige
- incorporer le sucre en poudre, serrer les blancs
- verser l'appareil sur les blancs montés sucrés et mélanger à la corne. 

Pour ceux qui sont intéressés, on pourra consulter : http://www.agroparistech.fr/Les-seminaires-2013-2014.html

 

Pour interpréter cette recette, je propose d'utiliser le "formalisme des systèmes dispersés" (DSF, voir : https://tice.agroparistech.fr/coursenligne/main/document/document.php?cidReq=FIPDESMOLECULARGASTR&curdirpath=/docs%20HTHIS, 

ou, en français, le livre "Mon histoire de cuisine", aux éditions Belin). 

Pour commencer, on part de chocolat. A basse température, la formule de ce dernier est S1/S2, où S1 désigne les grains de sucre dispersés dans le chocolat, où "/" désigne une dispersion aléatoire, et où S2 désigne la matière grasse du chocolat (beurre de cacao). 

Quand on fond cette matière, la matière grasse fond, et l'on récupère un système de type "suspension dans l'huile" (on désigne par "huile" toute matière grasse fondue), de formule S1/O1. 

Puis, quand on ajoute du beurre, ce dernier, qui était initialement du type (W1+O2)/S3, fond, libérant l'eau, qui, sans doute, vient dissoudre le sucre, ce qui produit probablement un système de type W2/O3, où O3 désigne la matière grasse fondue faite du mélange de la matière grasse laitière fondue et du beurre de cacao fondu. 

L'ajout de jaune d'oeuf ne change pas notablement ce système, car le jaune apporte 50 % d'eau, 15 % de protéines et 35 % de matières grasses. 

D'autre part, en battant le blanc d'oeuf (solution de protéines dans 90 % d'eau, de formule W3), on obtient une mousse : G/W3. 

Vient alors l'opération qui consiste à mêler la mousse G/W3 et la suspension dans l'huile W2/O3. Là, je fais l'hypothèse que la mousse vient se disperser dans une phase aqueuse continue: O3. 

Dans cette phase continue, on trouve des "particules de mousse" (G/W3), visibles à l'oeil nu en début de préparation, invisibles ensuite, et du sirop W3. 

Toutefois la mise au froid conduit la matière grasse O3 à solidifier un peu : une partie cristallise, et c'est là que se produit la plus grosse incertitude : le réseau cristallin est-il continu, ou bien l'huile qui reste l'est-elle, ou bien a-t-on deux phases continues ? Dans la première hypothèse, on aurait (W2+(G/W3)+O4)/S4. Dans la deuxième hypothèse, on aurait (W2+(G/W3)+S4)/O4 Dans la troisième hypothèse, on aurait (W2+(G/W3))/(O4xS4). 

 

Finalement, la question de la présence d'une émulsion s'est compliquée... mais pourquoi se laisserait-on aller à dire des choses fausses ?

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