samedi 9 mai 2009

Un détail...important

Evidemment, notre monde souffre de la confusion entre "naturel" et "artificiel", mais, la confusion résulte aussi de la confusion entre le synthétique et l'artificiel.
Tout cela est discuté dans La sagesse du chimiste (Editions L'oeil 9), et je ne vais pas y revenir ici.
Toutefois, puisque ce blog est public, profitons-en pour discuter la question de "composé chimique".

L'eau est-elle un "composé chimique"? Tout dépend.
Si l'eau est bue, elle n'est pas un composé chimique, puisqu'elle est un composé (qui peut être) naturel.
L'eau peut être synthétique, quand elle résulte d'une synthèse, telle celle qui fut proposée par le grand Antoine Laurent de Lavoisier.
Enfin, elle peut être chimique... quand elle fait l'objet de l'étude d'un chimiste, et seulement dans cette circonstance.

Le corollaire, c'est que les composés chimiques ne seront jamais en cuisine. Dès qu'ils sortent du laboratoire de chimie, ce ne sont plus des composés chimiques, mais des composés.
Certains sont synthétiques, d'autres non, mais hors du monde de la chimie, aucun composé n'est chimique.
Et il est vrai, ainsi, que le soufre des volcans est naturel, tout comme l'arsenic.

Clarifions!

dimanche 3 mai 2009

Les chiens aboient

Des amis me signalent livres ou articles qui attaquent la cuisine moléculaire.

Je crois la défense très inutiles : aux échecs, c'est une position perdue. Il faut toujours attaquer... quand on est engagé dans la guerre.

Une autre position consiste à dire que les chiens aboient, et que la caravane passe.
De toute façon, la réfutation des croyances est une mission impossible : on ne combat pas la foi par la raison.

Je propose plutôt de nous émerveiller, puisque nous sommes humains en proportion de notre capacité d'admirer (pensons aux pauvres chiens dont je parlais, dans cette optique!).

Emerveillons-nous que la gélatine, l'oeuf, les protéines laitières, divers polysaccharides extraits de végétaux ou d'algues puissent rendre de l'eau solide. La gélification est un merveilleux processus!

Emerveillons-nous que l'acide ascorbique (du jus de citron, mais aussi à l'état pur) puissent prévenir le brunissement des pommes, bananes, avocats... coupés.

Emerveillons-nous autant que nous pouvons... et posons-nous la question, avec Voltaire :
"N’est-il pas honteux que les fanatiques aient du zèle et que les sages n’en aient pas. Il faut être prudent mais non pas timide." (Voltaire, Pensées détachées de M. l'abbé de Saint-Pierre).

Cette phrase est une invitation à tous les amis qui me lisent, à combattre ceux qui aboient. Eux, qui ne sont pas attaqués, auront une vraie voix dans un débat confisqué par quelques journalistes qui ont peur.

Soyez assurés que, de mon côté, je ne perds pas un moment pour produire de la connaissance et la diffuser (gratuitement, contrairement aux journaux, qui doivent vendre du papier).

Vive la connaissance ! Vive la raison !

Militons!

Alors que je trouve dans La Revue (des Toques blanches internationales) un extraordinaire article qui fait état de la difficulté (impossibilité?) de cultiver professionnellement des fruits sans utiliser de pesticides (La Revue, N°72, p. 13 : Fruits et légumes : la production française en danger, par E. Uminsky), je comprends que Voltaire avait bien raison, quand il écrivait :

N’est-il pas honteux que les fanatiques aient du zèle et que les sages n’en aient pas. Il faut être prudent mais non pas timide.
(Pensées détachées de M. l'abbé de Saint-Pierre)

Alors que s'agitent quelques ayatollahs de la "nature" ou du "terroir", ne devrions-nous pas nous mobiliser pour montrer combien la chimie est belle?

lundi 27 avril 2009

Pour les saveurs des acides aminés

Pour les saveurs des acides aminés Une partie du monde oriental a contaminé une partie du monde occidental avec l’idée de la saveur « umami »… et je suis en partie responsable de la diffusion de cette idée fausse de l’umami. 

Voilà pourquoi je cherche aujourd’hui à me rattraper en proposant une idée plus juste. 

 

L’umami est le nom qui a été donné il y a environ un siècle par un Japonais qui, par fermentation, a obtenu de l’acide glutamique. La saveur de cet acide aminé n’étant ni salée, ni sucrée, ni acide, ni amère, il a donné le nom d’umami, « délicieux ». 

A la réflexion, l’idée d’une saveur nouvelle n’était pas extraordinaire, puisque le bicarbonate de sodium, ou l’éthanol, ont aussi des saveurs qui ne sont ni salées, ni sucrées, ni acides, ni amères. Toutefois, le Japonais en question était un homme d’affaire avisé, qui, pour vendre son composé (ou plus exactement du monoglutamate de sodium), a payé des études. 

On a alors dit que cette saveur était celle du dashi, le bouillon que les Japonais produisent par infusion courte d’algues de type kombu dans de l’eau, ce qui fait passer en solution deux acides aminés : l’alanine, et l’acide glutamique. Mais alors, l’umami est-elle la saveur du dashi, ou bien celle de l’acide glutamique, ou encore celle du monoglutamate de sodium ? Car ces saveurs sont différentes. 

 

La confusion commence ici. Elle se poursuit quand on cherche l’umami dans les fruits de mer, la tomate ou le parmesan, qui contiennent également de l’acide glutamique. La tentation est alors grande de faire penser que tous ces produits sont « bons » parce qu’ils ont la saveur umami. 

Ouais… J’invite à goûter les divers acides aminés, et à observer leurs intéressantes saveurs. Et si l’umami est la saveur de l’acide glutamique, j’invite à penser que ni le dashi ni le monoglutamate de sodium n’ont stricto sensu la saveur umami. 

D’ailleurs, pourquoi nommer umami une saveur qui est celle de l’acide glutamique ? La saveur de l’acide glutamique, c’est… la saveur de l’acide glutamique. Tout comme la saveur de la tyrosine (un autre acide aminé) est la saveur de la tyrosine, et ainsi de suite pour les divers acides aminés.

La science doit être considérablement revalorisée

La science doit être considérablement revalorisée

Dans notre monde, la valeur des choses est souvent –c’est un fait, une constatation, pas une volonté personnelle- la valeur financière. Un tableau de Picasso vaut cher ? L’œuvre est donc importante.
Pour l’activité des « travailleurs », également, sont en balance l’intérêt intrinsèque du travail, son intérêt extrinsèque, des intérêts concomitants. Un emploi particulier n’attire pas ? Il faudra payer cher des individus pour qu’ils le fassent. Les candidats à un poste sont nombreux ? L’employeur pourra faire la fine bouche, et imposer de bas salaires.

Et la science, dans tout cela ? C’est un fait que les salaires des scientifiques (on observera que je parle des scientifiques, pas des « chercheurs ») ne sont pas élevés (par rapport aux salaires des industriels) : cela n’incite pas notre collectivité à considérer que les productions des scientifiques sont importantes socialement, économiquement. De ce fait, les connaissances produites par la science risquent de moisir dans des publications scientifiques, et les scientifiques eux-mêmes ne sont pas incités à publier les résultats de leurs travaux.

Ma proposition : payer beaucoup plus les scientifiques !

« Démontré scientifiquement » est un oxymoron

« Démontré scientifiquement » est un oxymoron

Nous entendons un interlocuteur dire que quelque chose a été « démontré scientifiquement » ? Méfiance !!!!

Méfiance, parce que la science ne cherche pas à démontrer, et que la démonstration est l’apanage des mathématiques. La science, elle, ne fait que réfuter des théories qu’elle sait être insuffisantes. On ne peut pas « démontrer » l’existence des atomes ou des molécules, par exemple, mais on peut seulement corroborer l’idée de leur existence, par des expériences qui établissent plus ou moins fermement l’idée de l’existence d’entités –atomes ou molécules- auxquelles on prête des propriétés qui évoluent selon l’état de nos connaissance. Ainsi, alors que l’atome a été d’abord considéré comme une sorte de système solaire miniature, avec des électrons tournant autour du noyau, quelques travaux de physique quantique ont montré que les propriétés des atomes ne s’expliquaient pas par ce modèle.
Ce qui est pire, c’est que c’est souvent dans des champs bien compliqués que l’expression « démontré scientifiquement » est employée ; pis encore, c’est bien souvent l’industrie qui utilise cette expression, pour affirmer des faits qui, évidemment, sont en faveur de la prétendue qualité de ses produits.
Je ne dis pas ici que l’industrie ne produit pas des produits de qualité (bien que la qualité soit toute relative), mais je dis ici que la science est bien souvent prise en otage par une certaine industrie, qui parle à son aise des démonstrations faites par des scientifiques, afin de vanter ses productions. Cette industrie est alors soit malhonnête, soit ignorante de ce qu’est la science.

Apprenons nous-mêmes, enseignons à nos enfants à ne pas tomber dans le panneau de la prétendue « démonstration scientifique », puisqu’il n’existe pas de démonstration scientifique !

Que dire alors, de faits qui auraient été étudiés ? Si un fait est établi (aux exceptions près de la règle), alors il est établi, pas démontré. Si le fait a été établi avec rigueur, alors il a été établi « rigoureusement ».

Pourrait-on admettre qu’un fait soit établi scientifiquement, s’il a été établi par un scientifique. Non, impossible, puisque le scientifique ne cherche pas à établir des faits, mais à réfuter des théories et à proposer des mécanismes qui contribuent à l’explication des phénomènes sans en donner le mot final.

Je propose donc de nous limiter à « établi rigoureusement ».

Quand on aura tout changé (ingrédients, façons de cuisiner, de manger, etc. ), que pourrons-nous proposer de plus ?

Depuis des décennies, je propose de questionner ce que nous mangeons. Récemment, par exemple, je proposais d’asseoir les cuisiniers, au lieu de les laisser debout, dans le stress, dans le bruit et dans la chaleur. Il y a une dizaine d’années, je proposais de remplacer tous les systèmes de chauffage par des systèmes plus efficaces énergétiquement que ceux que nous avons, afin d’éviter de chauffer l’atmosphère du Globe au lieu de ne chauffer que les aliments. Il y a une vingtaine d’années, j’ai proposé d’introduire en cuisine des composés purs, aux goûts inédits. Récemment, j’ai aussi proposé de changer la façon de servir, en salle ; et les ustensiles utilisés pour manger (assiettes, verres, couverts…).
Et ainsi de suite. Il y a donc du pain sur la planche, parce que proposer un changement n’est rien ; il est bien plus difficile de proposer positivement un changement. La question est : on remplace… mais par quoi ?

Evidemment, puisque je pose ici cette question, c’est aussi que j’ai proposé des réponses. Je ne suis pas en reste, et l’on trouvera dans les centaines d’articles publiés depuis 1980 une foule de propositions positives.

Ici, la question est toutefois : que ferons-nous quand nous aurons tout changé ?