samedi 13 juillet 2013

Samedi 13 juillet 2013. Les sciences de l'homme et de la société


« Sciences humaines et sociales » ? C'est soit une périssologie (un pléonasme mal maîtrisé, donc une erreur), soit une impossibilité !
Il s'agit ici de bien comprendre que la faute du partitif est partout, et que cette faute de langue conduit à des erreurs de pensée.

Qu'entend-on avec « sciences humaines » ? Que, a contrario, il existerait des sciences inhumaines ? Qu'entend-on avec « sciences sociales » ? Que les autres sciences seraient asociales ?
En réalité, les deux expressions sont erronnées, car les sciences, faites par les êtres humains sont toutes humaines, mais les sciences elles-mêmes ne sont pas des êtres humains ; les sciences, d'autres part, ne sont pas sociales, car elles ne le seraient que si elles étaient une émanation du groupe, ce qui n'est pas ce que l'on signifie.

Derrière tout cela, il y a l'erreur, hélas répandue, du « partitif », à savoir que le « cortège présidentiel » n'est vraiment une expression juste que si le cortège est le président ; autrement, on doit parler du cortège du président, ce qui n'est pas la même chose.
Même difficulté, souvent incomprise, derrière l'expression « sciences appliquées » : Louis Pasteur a combattu toute sa vie cette expression, parce qu'elle est une impossibilité, dans la mesure où les sciences, précisément, ne sont pas appliquées, sans quoi elles deviendraient de la technologie, de la technique. Il y a une différence entre « sciences appliquées » et « applications des sciences » : la première expression est une erreur grave, alors que la seconde est parfaitement juste. Pasteur prenait l'exemple de l'arbre et du fruit, sans le pousser beaucoup, mais on pourrait ainsi parler d' « arbre fruité » et de « fruit de l'arbre » : là, on voit mieux l'erreur du partitif !

Pour en revenir aux sciences « humaines et sociales », cela n'existe pas : il y a des sciences de l'homme et de la société.

vendredi 12 juillet 2013

Merveilleux Claude Bernard



Je ne crois pas encore avoir dit ici toute l'admiration que j'ai pour Claude Bernard. Non pas parce que ma mère se prénomme Claude et mon père Bernard ; non pas parce que mon laboratoire se trouve rue Claude Bernard ; mais parce que Claude Bernard fut l'auteur d'un extraordinaire livre sur la médecine expérimentale. J'invite tous ceux qui ne l'ont pas lu à ne pas rester une seconde de plus sans le livre. Claude Bernard y dit mille choses importantes, mais il dit notamment que la médeicne est une technique. Pas un art, puisqu'il ne s'agit pas, avec le sens moderne donné à ce mot, de produire de l'émotion. Non, il s'agit de soigner. Soigner est un geste technique, comme programmer, comme enfoncer un clou, tout comme résoudre une équation.
Claude Bernard distingue très bien la technique, c'est-à-dire la pratique médicale, et la technologie, qui est l'étude de cette technique en vue de son amélioration. Il parle ainsi de médecine expérimentale, de recherche clinique. Pour la technologie médicale, cette recherche clinique, par exemple, il s'agit d'améliorer la pratique médicale, d'améliorer une technique, par son étude. C'est donc, dans le sens littéral du terme de la technologie, de techne faire, et, logos, étudier.
Enfin Claude Bernard évoque la science de la médecine, si l'on peut dire, qui est la physiologie. La recherche clinique doit se fonder sur la physiologie pour améliorer la technique médicale ; c'est la physiologie qui une science, une science quantitative ; pas la recherche clinique, ni la pratique médicale. D'ailleurs, le prix Nobel de médecine est en réalité un prix Nobel de médecine physiologie, tant il est difficile de distinguer ces champs, ou, disons le plus justement, tant ces trois champs interagissent. Ils interagissent, mais ils ne confondent pas : la technique n'est pas la technologie, et la technologie n'est pas la science ! Quel est l'objectif, dans chaque cas ? C'est la compréhension des mécanismes des phénomènes ? Alors il s'agit alors de physiologie. C'est l'amélioration de la pratique médicale ? Il s'agit alors de recherche clinique, de technologie. C'est le soin ? il s'agit alors pratique médicale, de technique.
Oublions les baratins, oublions les fantasmes, nommons justement les choses, et, pour apprendre à le faire, lisons et relisons Claude Bernard !

jeudi 11 juillet 2013

La communication ? La répétition



Je viens de relire à des lettres d'Albert Einstein adressé à Jacques Hadamard, mathématicien français. Nos deux hommes discutent de la question du pacifisme, alors que Hitler et les nazis menacent le monde de guerre. Au détour d'un paragraphe, je trouve cette extraordinaire remarque d'Albert Einstein, qui dit qu'il faudrait inonder l'Allemagne de ballons portant des messages de propagande inverse. Car c'est là la stratégie de Hitler : la répétition, la répétition, la répétition, litanique, la répétition ! Et l'on comprend bien que la folie de Hitler le conduisit effectivement à répéter le façon nauséeuse, à répéter, répéter, répéter...
Je ne peux m'empêcher de rapprocher cette observation de la phrase de Lewis Carroll, qui disait « Ce que je dis trois fois est vrai ».
Regardons le monde de communication, de démagogie, où nous vivons. N'est-ce pas cela que nous voyons : des répétions de messages, des décervelements par répétition ?
Les « sages » croient qu'en disant une fois un message rationnel, ils dispenseront une fois pour toute la « bonne parole »... mais ils sont fous : (1) de se croire sages ; (2) de croire qu'ils peuvent éviter de répéter, répéter, répéter.
Une conclusion : dans nos combats, répétons.

mercredi 10 juillet 2013

Luttons contre la bêtise ! Promouvons la précision et le travail !

Un remarquable article, dans le numéro 17 de "Hardware, canard PC", juillet août 2013, p. 94. Il est intitulé "Du cresson et du wi-fi", et l'auteur, le "Doc", y examine des résultats d'une étude sur l'effet des ondes électromagnétiques sur la croissance végétale.
Dans un premier temps, l'auteur relate un petit travail de recherche bibliographique, à propos d'étudiantes danoise qui auraient montré que du cresson pousse mal quand il est exposé à des ondes. Puis il analyse l'affaire Séralini (hélas, pas besoin d'expliquer qui c'est : la presse en a beaucoup trop parlé, à commencer par le Nouvel Observateur), avec lucidité et courage avant de présenter des résultats expérimentaux... qui montrent, évidemment, que le cresson pousse très bien même en présence d'ondes intenses.
Tout cela est mené "aimablement", courageusement, précisément.

Je ne saurais trop vous inviter à vous procurer rapidement ce journal !

mardi 9 juillet 2013

Mardi 9 juilet 2013. L'évaluation des stages



De nombreux stagiaires sont venus dans notre groupe de gastronomie moléculaire, depuis de nombreuses années. Ils travaillent, et nous nous efforçons de les aider à apprendre le plus possible.

À la fin de leur stage, il y a trois évaluations. La première, c'est une fiche d'évaluation, que j'ai déjà discutée précédemment. Cette fiche est envoyée par l'institution dont relève les stagiaires, et elle vise, pour cette institution, à connaître la qualité du travail qui a été effectué. Il est donc légitime que cette évaluation soit faite par le maître de stage, qui, seul sait - parfois comprend-la nature des travaux effectués.

Le rapport de stage est une autre façon de valoriser pédagogiquement les stages. Cette fois, il s'agit de communication écrite. Là, les règles à mettre en oeuvre sont celles de la communication écrite, et les règles d'évaluation de ce second travail sont les règles d'évaluation de la communuication écrite.
Autrement dit, d'une certaine façon, ce travail n'a rien à voir avec le travail scientifique effectué lors des stages. Il s'agit d'un travail de communication, et il s'agit, pour les étudiants, de montrer à leurs professeurs qu'ils connaissent et savent mettre en oeuvre les règles de la communication écrite, dans le domaine scientifique et technique. En corollaire, les étudiants sont en droit de demander une formation spécifique, sur cette communication écrite, s'ils ne l'ont pas reçue (ou se former par eux-mêmes : apprenons à grandir!).

Enfin il y a la soutenance orale. Cette fois le travail est de communication orale, et là, il y a une technique différente à mettre en oeuvre, et une évaluation différente. Là encore, rien à voir avec le travail scientifique effectué pendant le stage.

Bref, un stage, c'est trois travaux : le travail scientifique et technique, la communication écrite, la communication orale.

dimanche 7 juillet 2013

De l'émerveillement partagé pour un homme extraordinaire : Michael Faraday.



Cela fait bien longtemps que je n'ai pas eu l'occasion de dire mon émerveillement pour le physico-chimiste extraordinaire que fut Michael Faraday. Tout le monde ne connaît pas son histoire exemplaire, de sorte qu'il n'est pas inutile que je la raconte une fois de plus. Evidemment, dans un billet, je ne vais pas entrer dans les détails, mais donner seulement les grandes lignes. 
 
Michael Faraday était le fils d'un maréchal-ferrant pauvre et son épouse, qui durent quitter les campagnes anglaises pour aller à Londres, faute de travail. Là, la vie n'était guère meilleure, et le père de Faraday mourut alors que l'enfant était encore jeune. C'était la misère : Faraday a raconté plus tard que, certaines semaines, il n'avait qu'un morceau de pain à manger pour toute la semaine. 
Faraday eut la chance d'être embauché comme saute ruisseau, c'est-à-dire livreur de journaux, par un émigré français qui tenait une librairie. Il eut aussi la chance -athée ou non, il faut le reconnaître- d'être dans un environnement religieux, ses parents appartenant à une secte nommée les « Sandemaniens », qui croyaient dans la littéralité de la Bible
Oui, ce fut une chance, parce que cet environnement le conduisit à avoir entre les mains le livre du clergyman nommé Isaac Watts, qui donnait une série de conseils pratiques. Faraday, sans père, suivit les conseils de ce livre à la lettre, à savoir : avoir des collaboration, ne pas généraliser hâtivement, vérifier ce que l'on nous dit, prendre des notes, entretenir des correspondances...
 Tout cela sortait du livre intitulé L'amélioration de l'esprit, et c'est ainsi, de fil en aiguille, que Faraday fut embauché comme apprenti relieur, qu'il occupa ses temps libres à s'améliorer l'esprit et à faire diverse des expériences en chimie... parce qu'il avait eu cette autre chance, conséquence de la première (mais la chance sourit aux esprits préparés), d'avoir entre les mains un livre intitulé Conversations chimiques d'une dénommée Mme Marcet, qui fit une oeuvre de vulgarisation extraordinaire.


Je passe la suite, mais tout s'enchaîne, et finalement, Faraday devint l'un des plus grands physico-chimistes de tous les temps. Quel destin extraordinaire !









samedi 6 juillet 2013

La communication... partout ?



Quand nous meublons notre appartement, c'est pour nous que nous le faisons : ce n'est pas tous les jours que l'on reçoit des amis, et les tableaux aux murs, les couleurs de ces derniers, les matières des sols... Tout cela vise à nous rendre la vie heureuse, parce que nous le percevons quand nous sommes chez nous. Autrement dit, meubler un appartement, c'est organiser une communication avec nous-même. 
 
De même, les livres que nous choisissons, les activités intellectuelles que nous avons, les conversations que nous menons, également, laissent des traces dans notre esprit, des souvenirs. 
Autrement dit, nos activités intellectuelles sont une façon de nous parler à nous-même. Nous nous "meublons" l'esprit. Cela a des conséquences : de même qu'une "croûte" sur les murs nous inflige la vision d'une horreur, augmentant notre inconfort, la contemplation de certaines émissions de la lucarne à décerveler nous abime l'esprit, nous salit... Il y a donc une responsabilité morale à bien choisir nos "consommations" (livres, émissions de radio ou autres, sites internet, journaux...) afin de nous élever l'esprit : souvenons-nous de Michael Faraday, l'un des plus grands physico-chimistes de tous les temps, qui allait le mercredi soir à son "club d'amélioration de l'esprit" (en plus du temple, mais c'est là une toute autre affaire, pour une autre fois). 
Tiens, tant qu'à me faire des ennemis : et si je signalais que le dernier numéro de la revue Pour la Science publie un article sur les arènes ? Aujourd'hui, il y a les stades. Hier comme aujourd'hui, le Prince donne au peuple (pour le calmer) du pain et des jeux. Voulons-nous vraiment tomber dans ce piège millénaire ?

 Mais la morale est ennuyeuse, et Aristophane semble du meilleur côté de la vie que Sophocle. Et puis, à quel titre pourrais-je me permettre d'ennuyer mes concitoyens, alors que ma vertu n'est certainement pas à la hauteur? 
Passons, donc, et revenons à la "communication", puisque c'est de cela dont ce billet discute. 
Nous "parlons" aux autres, et nous parlons à nous-mêmes. Une question, de ce fait : la communication serait-elle donc la totalité de la vie ? Y a-t-il autre chose que des actes de communication ?