Ce matin, je reçois cette question :
Existe t il un gélifiant, pour coller une pana cota qui résiste ensuite à la
cuisson?
Et cela me rappelle mes interrogations à propos des gelées chaudes. On va voir que la réponse est simplissime... et que cela doit nous interroger
Partons d'une analyse de la question. D'abord, la panna cotta. C'est ce que l'
on obtient en cuisant de la crème, du lait, du sucre, avec de la gélatine.
Autrement dit, c'est un gel de gélatine qui contient des gouttelettes de matière
grasse (venues de la crème et du lait), plus le sucre en solution dans l'eau
(apportée par la crème, le lait).
Rien de plus simple, donc. Concentrons nous donc sur la question des gels.
Pour faire un gel, il faut donc de l'eau (mais on pourrait utiliser de l'huile,
ce qui est une autre histoire) et un agent gélifiant. Traditionnellement,
l'Europe a beaucoup utilisé la gélatine, mais elle était jadis extraite des
arêtes de poisson ou des tissus d'animaux terrestres (pied de veau, pattes de
poule, etc.). La gélatine, comme je l'explique en détail dans mon livre Mon
histoire de cuisine, est une protéine, qui forme un réseau tridimensionnel où
l'eau est piégée. Et il est vrai que ce gel est "thermoréversible", ce qui
signifie qu'il prend à froid, et fond à chaud.
Comment faire un tel qui tienne à chaud ? Il y a plein de façons. Par exemple,
ayant une gelée prise à froid, on peut avoir, dans la phase aqueuse, de la
"transglutaminase", une enzyme qui réticule le gel de gélatine de façon
permanente.
Il y a d'autres possibilités. Par exemple, une gelée faite à partir d'agar-agar
résisterait à l'échauffement. Tout comme une gelée où l'on aurait utilisé de
l'alginate de sodium et des ions calcium. Et j'en passe.
Bien plus simple
Mais on peut faire bien plus simple : au lieu d'utiliser comme agent gélifiant
la gélatine, qui se défait à chaud, pourquoi ne pas utiliser... du blanc d'oeuf,
qui tiendra à chaud ? Ou des protéines sériques de lait ? Ou mêmes des actines
et myosines de tissu animal ?
Selon la concentration, on aura quelque chose de très tendre, ou de très dur.
Pensons à 5 pour cent de protéines au minimum, jusqu'à... ce que l'on veut, mais
on se souviendra qu'une viande, avec environ 20 pour cent de protéines, peut
être très dure, quand elle est cuite... et cela n'est guère l'idée que l'on a
d'une panna cotta.
Maintenant, la question essentielle : pourquoi mon interlocuteur, d'autres amis
dont je n'ai pas encore fait état... et moi-même avons-nous cette fascination
pour les gelées qui tiennent à chaud, alors que nous avons les oeufs, la viande
et les poissons sous les yeux ? Pourquoi n'imaginons-nous que les gélifiants de
type polysaccharidiques, ce qui est une sorte de contradiction, alors que la
solution est si simple ? Je n'ai pas de réponse, et compte sur mes amis pour
m'aider.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
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