Quelque part, j'ai lu l'interview d'un maître d'hôtel qui déclarait que, "en salle, le beau geste est celui qui ne se voit pas". Ah bon ? Les maîtres d'hôtel ne doivent-ils être que des porteurs d'assiette invisibles ? A contrario, je me souviens pourtant d'une découpe de caille "à la volée" (l'oiseau était piqué sur une fourchette, et le maître d'hôtel en découpait les parties) qui m'a coupé le souffle ; je me souviens de sourires aimables, d'accueils ; je me souviens d'informations techniques ; je me souviens de préparations de dernières minutes devant moi...
Pour analyser la question, n'est-ce pas une bonne idée que de se demander ce que l'on va faire au restaurant ?
Il y a autant de réponses que de personnes; et peut-être même que d'occasions d'aller dans ces endroits où il y a de la cuisine et du service. On peut vouloir découvrir la cuisine d'un "artiste culinaire". On peut avoir besoin d'un endroit hors de chez soi pour "passer un moment". Parfois, on n'a pas le temps ou la possibilité de cuisiner, alors qu'on doit se nourrir. On peut vouloir manger mieux que ce que l'on sait préparer. On peut vouloir donner rendez-vous à des amis ou à des relations... Pour chaque restaurant, il y a une cuisine appropriée... et un service adéquat, n'est-ce pas ? Par exemple, si l'on veut se rencontrer, on peut ne pas vouloir que le moment de la rencontre soit détourné par de l'art culinaire, mais, si l'on pressent qu'il faudra que les circonstances extérieures facilitent la discussion, il faudra au contraire que le service et la cuisine soient des supports à la discussion. Par exemple, si l'on veut découvrir la cuisine d'un artiste culinaire, on se moque (un peu) de la façon dont les mets sont servis.
Par exemple, si l'on a besoin d'être "entouré", alors le service est essentiel.
Par exemple, si l'on a simplement besoin de manger parce que l'on n'est pas chez soi, on veut quelque chose de simple et rapide. Et ainsi de suite.
De sorte que, en réalité, le bon service est celui qui a l'intelligence de s'adapter aux convives, n'est-ce pas ?
Et pour le bon geste ? Le geste n'est que la base du service. Par exemple, un bras tendu fera un bel accueil... et il se verra, bien sûr, contrairement à ce que l'on nous disait. Par exemple, une façon de marcher particulièrement élégante sera admirée : après tout, on admire bien les mannequins, non ? Par exemple, une découpe à la volée se voit, s'admire. Par exemple... Le beau geste se voit, sans quoi il n'est pas beau : après tout, un arbre qui tombe dans une forêt où personne n'est présent ne fait pas de bruit, non ? Mais c'est là une option philosophique.
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