Je poursuis la publication des billets parus dans l'Humanité. Voici le dernier publié, mais pas le dernier préparé.
Il y a un siècle, on prédisait que, en l’an 2000, on mangerait des « tablettes nutritives », que la « chimie » résoudrait le problème de l’alimentation du monde. En 2009, nous continuons à manger des poulets rôtis, comme au Moyen-Âge. Et demain ?
Nous mangerons ce que nous avons décidé de manger… si notre agriculture suffit à nourrir une humanité qui augmente encore… et il n’y aura jamais de chimie en cuisine. Oui, il n’y aura jamais de chimie en cuisine, parce que la chimie est une science, c’est-à-dire une activité de production de connaissances ! Cessons de confondre la science (qui cherche les mécanismes des phénomènes ; par exemple, pourquoi les steaks sautés brunissent-ils ?) et la technologie, c’est-à-dire l’application des connaissances en vue de « perfectionner » les techniques. Louis Pasteur s’est battu toute sa vie pour expliquer qu’il n’y a pas de « sciences appliquées », mais seulement des applications des sciences. D’ailleurs, les prétendues « technosciences » ne seraient-elles pas que de la technologie fautivement nommée ?
La science, dangereuse ? Non, mais ses applications peuvent l’être. Qui est responsable d’Hiroshima ? Pas Pierre et Marie Curie quand ils ont exploré la structure de l’atome, mais bien ceux qui ont fabriqué la bombe et qui l’ont lâchée sur une ville japonaise. Qui est responsable des gaz de combat ? Pas les chimistes, mais ceux qui les ont fabriqué et utilisé.
Le problème vient souvent des mots, et ici, je crois qu’il faut cesser de nommer « chimie » l’activité d’applications des résultats de la science chimique. D’ailleurs, il serait temps de reconnaître que l’application des connaissances de la chimie n’est pas systématiquement mauvaise, et j’invite les lecteurs de l’Humanité au colloque « Chimie et alimentation » qu’organise la Maison de la chimie le 7 octobre, à Paris. N’ayons pas peur de discuter de la chimie, de ses relations avec la cuisine : pourquoi l’ancien serait-il toujours bon (le barbecue dépose sur les viandes des benzopyrènes cancérogènes) et le nouveau toujours mauvais (les pesticides…) ? Evidemment, le nouveau n’est pas toujours bon non plus.
Regardons y de plus près : la cuisine de demain peut être encore meilleure que celle d’aujourd’hui… si nous travaillons, réfléchissons, débattons, cherchons. Vive la connaissance !
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