Dans la série des textes publiés dans l'Humanité la semaine passée, voici le troisième.
A noter, pour les quelques uns qui croient que je suis communiste (commentaires reçus mais non publiés) que les Ateliers expérimentaux du goût avaient été introduits grâce au ministre de l'Education nationale, en 2001, quand le gouvernement était socialiste, et que l'Institut des hautes études de la gastronomie a été créé en 2004, quand Renaud Dutreil, de droite, était ministre des PME.
Alors...
Pourquoi sommes-nous si peu à nous inquiéter du gaspillage d’énergie dû à l’activité culinaire ? Il y a pourtant une grande déraison à rejeter dans l’atmosphère l’essentiel de cette énergie que nous devons produire, ce qui engendre des déchets, que nous devons transporter, ce qui multiplie les installations (avec rendement de 20 pour cent, on diminuerait le nombre de lignes par quatre !), que nous payons (à la fin du mois, la facture d’énergie est lourde)…
Comment nous y prendre mieux ? Les fours à micro-ondes sont bien plus efficaces que les plaques à gaz ou les classiques plaques chauffantes… mais, malgré les « plats brunisseurs » et autres gadgets jamais vraiment utilisés, on ne fait pas de poulet rôti avec des micro-ondes.
Reste l’induction, et je suis heureux d’avoir récemment vu, dans un supermarché de campagne, les premières plaques à induction à prix abordable. Ce sont des outils culinairement remarquables : à volonté, elles chauffent très doucement, régulièrement, ou, au contraire, très fort, passant instantanément de l’un à l’autre. Que les lecteurs de l’Humanité se rassurent : je n’ai aucun intérêt dans les sociétés qui les fabriquent ou qui les vendent, sauf l’intérêt collectif, le souci du gaspillage énergétique actuel.
Hélas, ces systèmes font peur : induction électromagnétique ! Ne vont-ils pas nous donner des cancers ? Nous avons sans doute raison de nous méfier de ce que nous comprenons mal, mais nous devons nous seulement nous méfier, et pas plus. Par exemple, mettons une main, paume vers la joue, le plus près possible sans que la main touche la joue : nous sentons de la chaleur… parce que des rayonnements infrarouges passent de la main à la joue. Avons-nous peur de ces rayons invisibles ?
De toute façon, les hésitations seront balayées par l’augmentation prochaine du prix de l’énergie. Avec la fin du pétrole, nous serons tous obligés de nous préoccuper de l’énergie gaspillée dans nos cuisines. Nous devrons parler à nouveau d’ « économie domestique », notion considérée comme ringarde, mais qui a l’avantage qu’elle nous fait la vie plus belle individuellement et collectivement… et c’est alors que nous comprendrons que des braisages bien conduits sont économiques : les viandes ainsi cuites ne se contractent pas à la cuisson (quand on cuit 100 grammes de viande, on sert presque 100 grammes de viande) ; les viandes dures s’attendrissent (or du collier de bœuf, à quatre euros le kilogramme, c’est quand même moins cher que du filet à vingt euros) ; les préparations ont plus de goût, pour des raisons un peu longues à expliquer ici.
Demain ? J’espère que l’on parlera à nouveau d’économie domestique dès l’Ecole !
Le rayonnement infrarouge, tout le monde s'y frotte quotidiennement, et les quantités qui sont émises dans la nature sont généralement inoffensives (si ce n'est pas le cas, on se brûle, et on a le réflexe de tenter de se protéger). Mais une plaque à induction émet un champ de forte puissance (potentiellement plusieurs kW) que l'homme n'a aucun moyen de détecter, donc de s'en protéger instinctivement, et qui, n'existant pas dans la nature, ne nous permet d'avoir aucun recul quant à son effet sur l'organisme. Après tout, le gaz de ville est dangereux, naturellement invisible et inodore, peu courant dans la nature (sauf à courir les marais où à forer). L'homme n'étant pas naturellement pourvu d'un moyen de se protéger contre le gaz, c'est bien pour cela qu'il est parfumé, afin qu'on puisse le sentir et prendre les mesures appropriées en cas de fuite.
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